1911
lu dans le Bulletin mensuel / Association des abonnés au
téléphone
Nous croyons intéressant pour nos lecteurs de reproduire
l'article ci-dessous, paru récemment dans Excelsior :
. La désinfection du téléphone
et son antiseptisation constituent un des problèmes d'hygiène
sociale, les plus importants à résoudre.
Le progrès n'apporte pas toujours, avec
lui, la perfection absolue. C'est le cas du téléphone,
qui, tout en rendant les plus grands services, est un danger
de contagion grave, permanent pour la santé publique.
Chaque fois, dans la cabine étroite,
privée d'air salubre, où d'autres personnes, plus
ou moins contaminées, nous ont précédés,
nous nous exposons à prendre, avec la communication,
les germes nocifs des maladies les plus redoutables, dont le
plus terrible est encore la tuberculose, la grande faucheuse
de l'humanité. Un trait qui, en hygiène sociale,
comme dans toutes les circonstances de la vie d'ailleurs, peint
très bien, dans la société intelligente,
dans les pouvoirs dirigeants, et, il faut bien le confesser,
chez les médecins et les hygiénistes même,.cette
espèce de torpeur, de mépris du danger éloigné,
la maladie contagieuse, qui agit, brusquement et brutalement,
nous terrorise. Les moyens les plus extraordinaires sont employés
pour endiguer le mal. Mais celle-là, dont les effets
bien plus terribles s'opèrent lentement,
à longue échéance, nous laisse presque
indifférents.
Voyez ce qui a été fait pour les
maladies épidémiques, le choléra, la peste,
la fièvre jaune et tous les fléaux, qui terrifient
l'humanité par leurs effets immédiats.
Grâce aux efforts des Etats réunis,
aux mesures prophylactiques, aux cordons sanitaires, ces terribles
épidémies sont devenues, pour nous Européens,
quantité négligeable.
Et l'effrayante tuberculose, qui nous guette
partout, dont les ravages lointains sont encore plus meurtriers
que les atteintes immédiates de toutes les maladies dites
contagieuses, par l'emploi du téléphone public,
conserve, pour ainsi dire, parmi nous, son entrée officielle.
Si l'on disait à la foule, qui attend
son tour à la cabine téléphonique, qu'un
pestiféré ou un cholérique vient de se
servir du téléphone, elle s'éloignerait
de l'appareil remplie d'épouvante. Or. à chaque
fois que nous nous servons d'un téléphone public,
nous pouvons être certains qu'un bacille de Koch est là,
qui nous guette, nous attend.
Songez que l'homicide bacille, déposé
sur la plaque communicative et sur les récepteurs, conserve
sa virulence, pendant des années. Qui pourrajamais dire,
dans ces conditions, le contingent de léthalité,
que nous occasionne quotidiennement le contagium téléphonique
?
D'autres Etats de l'Europe, l'Allemagne surtout,
plus avisés que nous, stérilisent depuis longtemps
leurs appareils.
En France, où l'on fait tant pour l'hygiène,
on est réellement stupéfait que, dans cette voie
importante, rien, jusqu'alors, n'ait été tenté
pour préserver la santé publique, en dépit
des éloquentes protestations de notre éminent
confrère le docteur LACHAUD, qui s'est, comme hygiéniste,
acquis à la Chambre des députés une autorité
bien justifiée par la lutte sans merci qu'il poursuit
contre les microbes.
Aussi, tous les hygiénistes accompagnent
de leurs voeux l'initiative privée, qui vient de se constituer
sous le nom de : « SOCIÉTÉ
du PHONÉPOL », pour la désinfection
des téléphones.
« Vaut mieux tard que jamais »,
nous dit la sagesse des nations.
On ne saurait qu'applaudir à la décision
de l'Etat et celle des administrations centrales, telles que
Postes et Télégraphes, Chemins de fer, Douanes,
Police, comptant un nombreux personnel et qui étudient,
en ce moment, les propositions qui leur sont faites par la Société
du « PHONÉSOL ».
Le « Phonésol », d'après
les microbiologistes les plus compétents, est unmicrobicide
énergique de la Tuberculose, de la Diphtérie,
de la Fièvre typhoïde et de la Pneumonie. Il agirait,
à là fois, comme bactéricide et comme vernis,
s'opposant au contact des bacilles, sans nuire à la sonorité
des appareils.
Mais, dans pareille question, où il y
va de la santé publique, le procédé de
désinfection employé employé
pas plus que les personnes. La question est plus haute.
L'initiative privée, qu'on ne saurait
trop encourager dans, la circonstance, a donné une idée
féconde. Elle germera et l'Etat, sous peine de manquer
à son rôle de gardien de ta santé publique,
est forcé, dans un avenir prochain, emboîtant le
pas aux sociétés privées, de présenter
enfin au public ses appareils stérilisés.
Ce jour-là, ardement attendu par ce public,
une lacune, qui a vécu trop longtemps, sera comblée
clans l'hygiène publique de la France.
Dr LKPINAY,
Ex-chirurgien de lu maison de santé du Bon Secours, à
Paris.
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