L'internet artificiel et le téléphone

L’intelligence artificielle dans votre téléphone

Nous assistons depuis quelques années à l'avancée fulgurante de l'intelligence artificielle (IA), considérée comme un outil indispensable pour plusieurs adopteurs précoces. Alors que de plus en plus d’entreprises lancent leur version de l’intelligence artificielle générative, les fabricants de téléphones mobiles n’y font pas exception.
Aujourd’hui les smartphones deviennent de véritables assistants personnels avec l’intégration de l’Intelligence Artificielle. Grâce à cette technologie générative, ils sont capables de comprendre les besoins des utilisateurs et d'y répondre de manière proactive. Les applications mobiles, les données et les contenus sont ainsi optimisés grâce à l'IA, qui permet notamment une traduction linguistique instantanée, une personnalisation accélérée des messages et de résumer rapidement des contenus.
Alors que de plus en plus d’entreprises lancent leur version de l’intelligence artificielle générative, les fabricants de téléphones mobiles n’y font pas exception.

ChatGPT, le robot conversationnel qui a tout initié
Apparu en novembre 2022, ChatGPT fascine par ses incroyables capacités. Conçu par Open AI, un institut de recherche à la base non lucratif créé en 2015 par Sam Altman et Elon Musk, son nom s'est répandu comme une traînée de poudre en l'espace de quelques semaines.
À cela, une explication toute simple : ChatGPT, dans lequel Microsoft a investi plusieurs milliards de dollars, propulse l'intelligence artificielle (IA) comme jamais dans nos quotidiens.
Début février 2023, ce fut au tour de Google de présenter son propre robot conversationnel. Baptisé Bard, cette intelligence artificielle fonctionne de manière similaire à celui développé par OpenAI, à ceci près qu'il peut répondre à des requêtes sur des tendances ou des événements récents. Et ce contrairement à la base de connaissance de ChatGPT qui est mise à jour occasionnellement pour la version gratuite.
Si ces deux technologies (et la ribambelle d'alternatives possibles) sont aujourd'hui essentiellement utilisées pour la création de contenus écrits (poèmes, dissertations, argumentaires juridiques, etc.) à partir d'un ordinateur, elles investissent également nos smartphones.
Ainsi, les assistants dotés d'IA, comme Siri et Google Assistant, disposent désormais d'un traitement du langage naturel et d'une connaissance du contexte améliorés, ce qui rend les interactions avec votre smartphone, qu'il fonctionne sous IOS ou Android, plus fluides et plus intuitives.
Et ce n'est qu'un début, les assistants IA étant appelés à être dotés de plus en plus de fonctionnalités. Et, in fine, devenir de plus en plus efficaces et incontournables.
Annoncée par Samsung en novembre 2023, la nouvelle marque Gauss (en hommage à Carl Friedrich Gauss, un mathématicien à l'origine de certains fondements de l'IA) entreprend de positionner le géant coréen sur le secteur des assistants vocaux capables de prouesses inimaginables il y a quelques années encore.
Grâce à son IA générative - ou, si vous préférez, l'ensemble des outils d'intelligence artificielle générant des contenus en fonction d'une demande -, Samsung affirme que ses smartphones Galaxy permettront à ses utilisateurs de disposer d'un outil de traduction en temps réel capable de traduire de l'audio et du texte pendant une communication. L'entreprise promet même que l'utilisation de cette fonctionnalité sera aussi simple qu'activer les sous-titres d'un film ou une série.
Le géant coréen donne ainsi la réplique à Google, qui a dopé son dernier modèle (le Pixel 8) avec de l'IA générative, mais aussi à OpenAI, qui veut s'associer avec Softbank et l'ex-designer star d'Apple, Jony Ive, pour développer un appareil offrant une "expérience utilisateur plus naturelle et intuitive". Un "iPhone de l'IA" , inspiré de la façon dont la technologie d'écran tactile du premier iPhone a contribué à révolutionner l'interaction avec l'Internet mobile. Forcément prometteur.
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On distingue deux intelligences artificielles : l'IA forte et l'IA faible. Tandis que l'intelligence faible associe de nombreuses données et techniques très rapidement, l'intelligence artificielle forte permet d'exécuter plusieurs actions intelligentes mais elle est également capable de comprendre et analyser comme un humain.
Aujourd'hui, l'intelligence artificielle est partout, que ce soit dans les voitures autonomes (taxis, véhicules personnels), la sécurité (systèmes de reconnaissance), les diagnostics médicaux (algorithmes, appareils de réalité augmentée), les assistants personnels (intégrés aux smartphones et ordinateurs, suivis médicaux), les robots industriels et domestiques.

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Les avantages de l'IA

Productivité accruel
L'intégration de l'intelligence artificielle dans les smartphones permet d'améliorer la productivité professionnelle. Grâce à l'analyse des habitudes de travail et des préférences de l'utilisateur, l'IA peut anticiper les besoins et fournir des recommandations personnalisées pour les tâches professionnelles. Par exemple, elle peut suggérer des raccourcis pour les applications les plus utilisées, proposer des rappels pour les réunions importantes ou fournir des suggestions de réponses lors de la rédaction d'e-mails.

Gestion intelligente des tâches
Les smartphones avec IA peuvent vous aider à gérer efficacement vos tâches professionnelles. L'IA peut vous accompagner dans l'organisation et le priorisation des tâches en fonction de leur importance et de leur échéance, ce qui vous permet de rester organisé et de ne pas manquer les délais. De plus, l'IA peut également automatiser certaines tâches répétitives, telles que la planification de réunions, la gestion des contacts ou la création de rapports, ce qui vous permet de gagner du temps et de vous concentrer sur des tâches plus stratégiques.

Communication et collaboration améliorées
Les smartphones avec intelligence artificielle facilitent la communication et la collaboration professionnelle. Les assistants virtuels intelligents peuvent gérer les appels, les messages et les e-mails, ce qui vous permet de rester connecté et de répondre rapidement aux demandes professionnelles. De plus, l'IA peut également faciliter la traduction en temps réel lors de communications internationales, ce qui facilite la collaboration avec des collègues ou des clients étrangers.

Comment ces fonctionnalités peuvent-elles optimiser votre travail ?

Ces nouveaux smartphones proposent différentes fonctions qui facilitent l'utilisation du téléphone au quotidien.
- Entourez simplement ce que vous voyez pour effectuer une recherche instantanée,
- Tout d'abord, la traduction en direct est une fonctionnalité clé qui permet de parler dans la langue de votre choix durant un appel tout en étant compris par votre interlocuteur. Cette traduction en temps réel élimine les barrières linguistiques lors des communications personnelles ou professionnelles. En dehors des appels, vous pouvez également traduire du texte directement à partir de votre camera.
- Une autre fonctionnalité pratique est le résumé rapide. Vous pouvez résumer en quelques phrases une page web complète, et ce, en seulement quelques secondes. Cette fonction est particulièrement utile pour traiter rapidement de longs courriels et retenir les informations importantes. De plus, cette option permet de rendre la prise de notes plus claire et structurée, car l’intelligence artificielle propose de formater vos notes pour vous.
- Il est également possible d’utiliser un assistant de retranscription qui vous permet d’enregistrer des conversations et de les retranscrire automatiquement. Cette fonctionnalité facile la rédaction de notes commerciales et d’autres documents. Vous pouvez également traduire le texte transcrit dans une autre langue au besoin.
- Finalement, il est possible d’utiliser la fonctionnalité ‘Entourer pour chercher’ qui vous permet de rechercher des éléments sur le web simplement en les encerclant avec votre doigt. Vous n’avez donc plus besoin de changer d’application pour trouver les informations que vous cherchez. Cette fonctionnalité fonctionne sur les images, les textes et les vidéos. Vous pouvez désormais trouver rapidement une réponse à vos questions.
- Pour les fans de photographie, l'intelligence artificielle permet d’optimiser et de modifier vos photos. Vous pouvez déplacer, remplacer, enlever complètement ou même modifier les proportions d’éléments sur une photo. L’intelligence artificielle peut également vous proposer des suggestions pour améliorer vos photos.
- Il est même possible avec Google AI de faire des modifications sur les vidéos. Une des fonctionnalités offertes est d’enlever les bruits de fond comme le vent pour améliorer la qualité sonore.

En 2024 il y a plusieurs modèles déjà sur le marché qui ont accès à l'intelligence artificielle incluant entre autres les séries Galaxy S21, S22, S2 et S24, ainsi que le Google Pixel 7, 7 Pro, 8, 8 Pro et 8a. Vous pouvez sans doute y trouver votre compte selon vos besoins et votre budget.
Dès l’année prochaine, l’I.A. va faire une entrée fracassante dans les téléphones. Avec, à terme, un énorme impact sur la consommation de l’info.

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L’intelligence artificielle nous rend-elle plus humains ?
Il y a deux perspectives à envisager lorsqu’on intègre des notions de droits humains dans la sphère de l’intelligence artificielle.
La première pose la question de l’influence de l’IA dans notre manière de vivre avec les autres; la seconde explore la part d’humanité présente dans le développement de l’IA. Sur les deux aspects on s’intéresse aux impacts éthiques de l’IA. D’une part, le regard est sociologique, de l’autre il est mécanique. Il ne faut pas confondre les deux approches, bien que les deux se rattachent à la question des droits humains. On peut commencer par examiner deux notions importantes des droit humains, la liberté d’expression et l’égalité des chances.

Perspectives sociologiques
La liberté d’expression est une notion qui se trouve écorchée par les réseaux sociaux. À plus ou moins large audience, ces plateformes constituent des places publiques, des agoras ou encore des forums où l’opinion est reine. La visée amicale et naïve des réseaux sociaux se transforme rapidement en tribune politique, tribune d’information et parfois tribune militante. C’est la raison pour laquelle la liberté d’expression est devenue une valeur si précieuse aujourd’hui.
Mais liberté d’expression ne veut pas dire liberté de dire n’importe quoi sur n’importe qui. L’individu est avant tout un citoyen. S’il a droit à l’expression publique, c’est dans un cadre de bienveillance pour autrui et en respectant la liberté d’autrui à être ce qu’il est. La liberté d’expression prend son sens dans un état de droit où les droits humains sont pris en compte. Elle perd son sens dans un univers non réglementé où la perversion s’infiltre aisément.
La liberté d’expression est un concept qui ne peut pas être détaché des droits humains dans son ensemble. Elle passe après les devoirs du citoyen envers sa communauté. Je peux dire ce que je veux mais je suis entièrement responsable de mes dires et de ce qui en découlera. Je parle en connaissance de cause. C’est un devoir de base du citoyen.
Or, la sphère du privé s’étiolant en faveur de la sphère du public, nos paroles passent graduellement du privé au public. Ce que nous pensions tout bas nous le disons haut et fort sur les réseaux. Ce que nous chuchotions se trouve maintenant inscrit dans des Chats et l’anonymat n’est pas réaliste sur les réseaux sociaux. C’est en partie à cause de l’illusion du privé numérique.

Nos comportements changent. Nous apprenons à juger autrui plus facilement; à exprimer nos désaccords plus aisément; à séduire un plus grand nombre de personnes en même temps. La communication est devenue extrêmement facile et nous en sommes de plus en plus dépendants.
Perspectives mécaniques
Du point de vue de la machine, la liberté d’expression intervient autrement. Elle est présente dans l’élément modérateur des réseaux sociaux. La censure sera effectuée comment, par qui, pour qui ? Comment la justifier ? Toutes ces questions relèvent de l’éthique de l’IA et doivent être clairement identifiées par les administrateurs de ces réseaux.
L’utilisateur, qui n’a pas saisi le transfert sinueux et graduel du privé au public, manifeste sa frustration de voir ses propos d’ordre privé être jugés par une instance extérieure, comme l’administrateur. Les craintes de se sentir contrôlé viennent souvent du fait que les chuchotements ou messes basses sont mises au grand jour. Le souci grandissant de transparence numérique entraîne nécessairement plus de visibilité dans nos communications puisque tout est chiffré.
L’impression de contrôle est atténuée si nous réalisons à quel point nous consentons à livrer des informations sur notre personne. Aussi, il est rare que le contrôle provienne d’une personne. Les systèmes sont complexes. Il n’y a pas forcément de volonté machiavélique derrière les réseaux. Le conspirationnisme est illogique.
On craint le contrôle par le domaine politique, mais nous devrions d’abord craindre les administrateurs de nos réseaux. Ceux-ci ne travaillent pas pour l’administration publique, même si l’Etat peut parfois le recommander.

Perspectives mécaniques
L’accès à tous et l’égalité des chances face à l’IA sont des considérations éthiques. Au Québec, certaines publicités de fournisseurs d’accès aux réseaux dénigrent, avec humour, ceux qui ont une mauvaise connexion internet. Il semble y avoir là un problème éthique. Pourquoi l’accès à l’information et l’accès aux technologies seraient-ils si mal distribués à l’ensemble de la population ?
Ces réseaux représentent bien plus que des lignes téléphoniques, il faut se le redire. On voit, par exemple, comment l’éducation pâtit de cette distribution inégale. Les régions se trouvent affectées alors qu’elles auraient droit à l’égalité des chances. L’accès à Internet devient quasiment analogue à l’accès à l’alphabétisation!

LA COMMUNICATION – LE RÈGNE DE L’OPINION

Perspectives sociologiques
D’un autre angle, l’IA peut-elle nous rendre plus égaux entre nous? Améliore-t-elle nos chances de réussite à chacun? Mis à part le problème de l’accès à Internet, on peut constater des pas de géants dans des domaines comme la psychologie. Des applications permettent aujourd’hui d’offrir des séances avec un psychologue en réalité virtuelle. La création d’avatars pour le patient et pour le spécialiste permet de créer un anonymat. La séance se déroule dans un environnement contrôlé par les utilisateurs afin de produire une meilleure consultation. Il s’agit d’un progrès important pour les minorités visibles et pour les populations éloignées.
On peut penser aussi aux applications qui offrent de l’aide à distance pour les aînés. Il existe également des outils éducatifs personnalisés qui permettent de mieux accompagner les élèves en difficulté d’apprentissage.

CONCLUSION
Il est difficile de répondre à la question de départ en un seul article. D’autres perspectives sont à étudier comme les perspectives psychologiques, environnementales et bien d’autres.
De plus, il faut examiner de plus près les notions reliées aux droits humains afin de pouvoir mesurer l’ensemble des impacts sociétaux reliés à l’IA. La tâche de l’éthique de l’intelligence artificielle est de déterminer des variables relatives aux valeurs universelles. Il s’agit ensuite d’intégrer ces variables dans le cycle de vie des données afin de quantifier le niveau de responsabilité de l’intelligence artificielle impliqué dans telle ou telle application.

Tout ce que l'IA ne nous dit pas

Intelligence artificielle, ça veut tout, et surtout rien dire. Si le terme est aujourd'hui autant mis en avant par les fabricants, c'est qu'il renvoie à quelque chose de fondamentalement neuf pour les consommateurs. Pour combien de personnes le simple terme « IA » est aujourd'hui chevillé à celui de ChatGPT ? Ou à quelconque outil de génération d'images ? L'IA, c'est ça… mais c'est aussi quantité d'autres choses.
En réalité, cela fait des années que l'on retrouve le terme au sein de différentes fonctionnalités. En photo, notamment, avec divers algorithmes améliorant la netteté de l'image, ou lissant à l'excès les traits en mode portrait. Mais également dans les photothèques, justement. C'est grâce à l'intelligence artificielle que, lorsque l'on tape « chat » dans la galerie de son iPhone, l'appareil nous présente uniquement des clichés de félins. IA encore, lorsqu'on peut sélectionner le texte d'une photographie, ou demander à Google Lens des informations sur un bâtiment nous faisant face.
C'est sûr, c'est un peu moins clinquant que des fonctionnalités que les utilisateurs et les utilisatrices peuvent réellement mobiliser selon leurs envies. Ce sont des améliorations de confort, par petites touches. Mais, encore une fois, elles ne datent pas d'hier.
Qualcomm, plus gros fournisseur de puces pour les smartphones Android, en parle depuis 2017 avec le lancement de son Qualcomm AI Engine sur la Snapdragon 845. Un an plus tard, la Snapdragon 855 promettait déjà « des capacités IA on-device stellaires » grâce à une puissance de calcul de 7 TOPS (Tera Operations Per Second, les puces haut de gamme d'aujourd'hui dépassent les 40 TOPS).
En clair : l'IA a toujours été là, et le restera probablement même après l'éclatement de cette bulle déjà prédite par des investisseurs au nez creux (ou pas).

Un créneau très juteux
Si OpenAI n'avait pas autant percé, il y a fort à parier que les fabricants de smartphones auraient ainsi poursuivi sur leur lancée, à base d'améliorations incrémentielles de la photographie, des performances, de la vitesse de recharge.
L'IA aurait bien entendu continué d'être mobilisée, mais sans tirer toute la couverture à elle. Est-ce un mal ? Pas nécessairement. Je teste des smartphones depuis plus de six ans, et les modèles qui m'ont le plus convaincu sont ceux qui ont davantage soigné leur logiciel, leurs fonctionnalités innovantes, que ceux qui font exploser tous les records dans les benchmarks.
Il y a donc malgré tout du positif à tirer de cela. Les assistants vocaux, par exemple, vont peut-être enfin tenir leurs promesses et servir à autre chose que de définir un minuteur pour la cuisson de ses œufs mollets (c'est cinq ou six minutes ?). Mais les principaux gagnants de ce changement de paradigme, c'est sans grande surprise les fabricants eux-mêmes.
OpenAI l'a démontré : certaines et certains sont prêts à payer pour accéder à une meilleure version de ChatGPT. Ainsi soit-il. Si Gemini, l'IA de Google, est accessible gratuitement, son modèle de langage le plus avancé est accessible à partir de 21,99€ par mois, et son nouvel agent conversationnel Gemini Live nécessite obligatoirement cette formule pour pouvoir en profiter.
Samsung ? Après des mois de flou, la marque a finalement arraché le pansement. Galaxy AI restera gratuit jusqu'à la fin 2025 sur ses flagships. Et après ? On prend vos paris sur le nom que donnera Samsung à sa formule premium. Je confesse une espérance pour un très à propos « Galaxy AI All Stars ».
Reste à aborder l'éléphant dans la pièce qu'est Apple. Très en retard sur le sujet, la marque à la pomme ne donnera officiellement le coup d'envoi d'Apple Intelligence que le 9 septembre, lors de l'événement de présentation des iPhone 16.
Un lancement partiel, en bêta, dont beaucoup de fonctionnalités seront manquantes, et encore plus en Europe où nous n'aurons droit qu'aux miettes qu'Apple voudra bien nous laisser alors qu'il bataille pour faire plier la Commission européenne. Mais, ici encore, personne n'est dupe. Pour certains analystes financiers, Apple compte bien monétiser son intelligence artificielle d'ici à quelques années. Il faut dire que la ligne « services » du bilan comptable d'Apple pèse de plus en plus lourd chaque année, porté par les abonnements iCloud, Apple Music ou Apple TV+. Apple Intelligence pourrait ainsi rejoindre le bouquet Apple One et offrir des fonctionnalités additionnelles à celles et ceux qui acceptent de payer pour.
Faut-il acheter un smartphone IA en 2024 ? Vous lisez la réponse depuis les premières lignes de cet article. Vous n'avez pas vraiment le choix - ils le sont tous.

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Fin 2024, Analyse selon Frederic Filloux — frederic@episodiqu.es

Cela prendra quelques années car il faudra attendre la modernisation du parc de smartphones.
Aujourd’hui, on change de téléphone en moyenne tous les 18 à 24 mois (ce qui est absurde compte tenu de la durée de vie du hardware qui est plutôt de l’ordre de six à sept ans — mais c’est un autre sujet). Dans les six mois qui viennent, seuls les modèles haut de gamme seront en mesure de gérer la puissance de calcul nécessaire à l’exploitation de modèles d’I.A. dans les appareils, mais dès 2025, tout s'accélérera.

Intégrer une I.A. à un téléphone impose de réduire la taille des algorithmes (tout le monde y travaille, y compris en France), et de gérer la multimodalité : accès non seulement via du texte, mais aussi, par la voix ou la caméra du téléphone. Cela nécessite un microprocesseur dédié, embarqué dans le smartphone — c’est le Neural Engine pour l’iPhone ou le Tensor Chip dans le monde Android — donc de résoudre de complexes problèmes de consommation électrique et de dissipation de chaleur.

Ces I.A. “light” permettront au téléphone de devenir l’extension cognitive absolue. Celui-ci l’est d’ailleurs largement aujourd’hui. Il connaît tout de notre champ relationnel grâce à nos communications (métadonnées des conversations téléphoniques, SMS, emails), nos déplacements, notre graph social (merci les réseaux sociaux), nos centres d’intérêt (search) et même des données “inférées” comme notre état de santé ou notre situation financière (search + achats en ligne).

L’intelligence artificielle va permettre une puissante combinaison de tout cela. Celle-ci se fera dans le smartphone lui-même, avec une protection de la vie privée variable selon les fabricants : correcte chez Apple dont c’est l’argument marketing, plus discutable chez Google, nulle pour tout ce qui est lié à Meta ou Amazon.

La première conséquence de cette intégration est un écrasement des applications et leur remplacement par des agents conversationnels à qui l’on donnera des instructions génériques. Exemples : “Trouve-moi un aller retour pour Marseille à telles dates”. Sur la base de mes trajets passés, l’IA se souvient de mes préférences en matière d’horaires, de tarifs, de placement dans le train, etc. Idem pour une réservation dans un restau, l’achat d’une cartouche d’encre pour mon imprimante, la commande d’un taxi, ou la location d’une voiture... Cela évidemment, si j’ai autorisé mon agent intelligent à accéder à mes historiques d’achat et à mes comptes sur SNCF-Connect, Amazon, la G7, Doctolib, Air France ou Hertz. L’I.A. va donc s’interposer entre le consommateur et une nuée de services.

L’information risque de souffrir d’une “ré-intermédiation” identique à mesure que son usage migrera vers le conversationnel. De l’ouverture d’une app d’info, on passera à des interactions du type, “Que va-t-il se passer pour Donald Trump après le verdict de New York?”, l’I.A., powered by OpenAI, génèrera alors une synthèse vocale de bonne facture puisque nourrie par les éditeurs visionnaires qui auront cédé toutes leurs données (archives et flux d’actualité) aux opérateurs en échange d’un jolie rente à court terme et d’une destruction de leur business à moyen terme (lire mes rengaines consternées sur le sujet : Les opérateurs d'I.A. continuent de clouer le cercueil des médias et Presse et IA : le syndrome du scorpion). Dans un prochain post, j’expliquerai pourquoi les articles et contenus éditoriaux sont de l’or en barre pour les opérateurs d’I.A. et comment les accords en cours vont accélerer de façon décisive les performances de l’intelligence artificielle générative, au bénéfice des géants de la tech, évidemment.

L’agent intelligent informationnel proposera toutes sortes de traitements de news en fonction des demandes du client avec des requêtes du type : “—Qui était dans C à Vous ce soir? —Bruno Lemaire. —OK, fais-moi une synthèse de ce qu’il a dit” ; “— Quelles sont les statistiques données par Piketty pour défendre le programme du NFP?” ; “—Peux-tu m’alerter à chaque publication d’un sondage d’intention de votes pour l’élection du le 30 juin ?” Ce sera l’interface idéale pour accéder à du journalisme explicatif : “—Quelle est la corrélation entre le rendement des OAT et les taux sur les prêts immobiliers ? Comment l’un a évolué par rapport à l’autre au cours des dix dernières années ?” ; “—Que disent les dissidents de gauche sur les options du NFP ? (l’IA fera alors la synthèse des tribunes et interviews de Le Drian, Guedj et autres).

Nous souffrons tous de myopie par rapport à ces nouveaux modes de consommation de l’information car les lecteurs d’Episdodiqu.es sont encore fidèles à des “marques” de médias avec lesquels ils entretiennent une relation historique, et qui est leur point d’entrée principal dans l’information. Mais cette notion de marque ne cesse de s’éroder depuis 20 ans, sous l’effet d’une dilution (encouragée par les éditeurs eux-mêmes qui n’ont eu de cesse de se soumettre aux agrégateurs divers) pour le plus grand bénéfice du lecteur. Mon abonnement à Apple News m’a permis de supprimer cinq abonnements que je payais plein pot : le New Yorker, The Atlantic, Wired, la MIT Technology Review, le New York Magazine, et m’offre en plus des lectures occasionnelles comme Vanity Fair ou Fortune, et d’autres titres que je ne lisais même pas. Tout cela pour 10 dollars par mois.

Incidemment, je lis en ce moment le Wall Street Journal pour 2 dollars par mois et à la fin de cette promo en février 2025, je passerai aux best of du WSJ disponibles sur Apple News, ou encore sur des sites gratuits qui reprennent la presse financière sans vergogne. Dans mon champ personnel, seul The Economist m’oblige à payer plein tarif et je viens d’abandonner le FT, trop cher.

Les opérateurs d’IA vont donc s’en donner à coeur joie pour synthétiser et repackager tout cela en temps réel et gratuitement, ou presque. Apple News version ~2026 me proposera à la fois d’excellentes synthèses sur tout ce qui m’intéresse et (parce que j’ai une lecture conservatrice de l’info), un accès direct à mes sources préférées. Et on peut parier, qu’OpenAI et d’autres proposeront des services gratuits, nourris aux meilleures sources financées par une pub optimisée, ciblée, etc.

Le dommage collatéral sera l’ARPU des éditeurs. Le revenu moyen par lecteur devrait rester la boussole, le KPI absolu. Déjà, pour le produit principal, l’ARPU tend à s’éroder sous l’effet de la baisse du prix de la pub, et des promotions excessives sur les abonnements (celle-ci ?? du San Francisco Chronicle m’ayant été servie ce dimanche.

A de rares exceptions près, les éditeurs souffrent d’une déflation qu’ils se sont eux-mêmes infligés. Le consommateur est ravi. Il y a trois ans, je dépensais facilement (de ma poche) 1500 $/€ par an pour des abonnements ; cette dépense a été divisé par quatre ou cinq, essentiellement pour des newsletters spécialisées.

Pour ces publications, le but est en principe d’avoir des marques médias suffisamment puissantes pour pouvoir développer plusieurs lignes de produits à forte marge qui seront “tirées” par le vaisseau-amiral (hors-séries, evénements, master class ou des podcasts à forte marge — lire “Ces podcasts longs qui cassent la baraque). Plusieurs grands éditeurs (y compris en France) ont à leur actifs de belles diversifications qui font la différence entre un P&L dans le vert ou le rouge. Mais on peut se demander comment ces business annexes se comporteront lorsque les contenus seront agrégés, synthétisés, remis en forme, selon les goûts des lecteurs par des IA super smart qui auront remplacés les applications.

Histoire de ne pas terminer sur une note sinistre, un des effets bénéfiques de cette redéfinition du news sera de forcer les éditeurs à segmenter leur audience et à faire des choix éditoriaux plus marqués, plus conformes à leur identité et à leurs attributs.

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