Alfred Niaudet

Alfred Niaudet, électricien renommé, est né le 2 mars 1835 et décédé le 11 octobre 1883 , à l’âge de 48 ans.

Fils de Prosper Niaudet et Mathilde Lassieur (1813-1896), il avait deux sœurs : Sophie (1837-1907, épouse de Marcellin Berthelot) et Alice (1839-1929).
Le 5 octobre 1845, Edgar Daugas entre au collège Louis Le Grand, il y effectue toute sa scolarité. C'est là qu'il rencontre Alfred Niaudet, Henri Rouart, Paul Valpinçon et Ludovic Halévy, qui resteront ses amis.
1877 Niaudet par Edgar Daugas, Musée des Beaux-Arts de Virginie.

Il fût :
- Membre de la Société Française de Physique dès sa fondation.
- Collaborateur Puis Directeur de la société Bréguet
- Administrateur de la Société Générale des Téléphones, de la Compagnie électrique, et de la Société d’éclairage publique.
- Président de la Compagnie internationale des Téléphones.

sommaire

En 1870, il organisait le service télégraphique de l’armée du Rhin ; enfermé à Metz, il créait un système de communications aériennes pour tromper le blocus. Habillé en civil, il s’en échappait pour rejoindre les armées de la Défense nationale.

1873-1874 Alfred Niaudet-Breguet vient faire des recherches sur la machine de Gramme au laboratoire de recherches physiques de la faculté des sciences de Paris.
ÉVOLUTION DES TRANSPORTS D’ÉNERGIE. Le 19 mai 1873, Par Planté et Niaudet attirèrent sur la question l’attention de l’Académie des Sciences.

1874 La Nature - Revue des sciences, 1874. Alfred Niaudet-Breguet

EXPLOSEUR MAGNÉTO-ÉLECTRIQUE de breguet.

Supposez un aimant en fer à cheval, sur les branches duquel sont enroulés des fils conducteurs isolés ; supposez une armature de fer doux appliquée sur les pôles de l’aimant. Si on vient à éloigner rapidement l’armature, il se produit dans le fil conducteur un courant électrique d’une durée presque instantanée. Si on rapproche l’armature et qu’on l’applique de nouveau sur les pôles de l’aimant, il se produit dans le fil un second courant présentant les mêmes caractères que le premier, mais en sens contraire.
Cette expérience, due à Faraday, est le principe de l’exploseur représenté par la figure ci-jointe.
Exploseur magnéto-électrique

Pour obtenir un courant au moyen de cet appareil, il suffit de donner un coup de poing sur le manche, d’où résulte le brusque arrachement de l’armature. La simplicité de cette manœuvre fait souvent donner à cette machine le nom de coup de poing.
Quand on ramène l’armature au contact, on obtient un second courant de sens contraire.
Pour la principale des applications de cet instrument, l’inflammation de la poudre, il y a intérêt à avoir un courant de grande tension ; aussi convient-il d’employer le premier courant, celui d’arrachement, par cette seule raison que le mouvement peut être accompli plus rapidement que le mouvement contraire. Pour augmenter encore la tension du courant, on a recours à un artifice singulier qui mérite de nous arrêter un instant.
Le levier de l’armature porte un petit ressort que la figure montre en avant et à gauche, et qui touche par son extrémité à une vis. Quand on écarte l’armature et l’aimant, le ressort cesse de toucher la vis. Mais, comme au point de départ, il est bandé, le contact entre la vis et le ressort ne cesse qu’après que l’armature a fait environ les deux tiers de son mouvement. L’un des bouts du fil conducteur enroulé sur les branches de l’aimant est mis en communication avec le levier de l’armature, l’autre bout communique avec la vis ; par conséquent, le courant produit par le coup de poing est enfermé dans l’appareil, du moins pendant les deux tiers du temps de sa production. Cette disposition qui, à première vue, paraît destinée à faire perdre la plus grande partie du courant, a, au contraire, pour effet d’augmenter la tension, parce que le courant qui est fourni par l’appareil est, non plus le courant d’induction magnéto-électrique, mais l’extra-courant de ce courant d’induction, c’est-à-dire le courant d’induction qui se produit au moment de la rupture du circuit local du courant magnéto-électrique.
En fait, la simple addition du ressort et de la vis dont nous venons de parler, augmente dans le rapport de 1 à 5 la tension du courant. On l’apprécie d’une manière grossière en comparant les chocs que l’appareil donne quand on met deux doigts sur les bornes terminales, et on le constate d’une manière plus nette par le nombre des amorces qu’on peut enflammer dans l’un et l’autre cas. Grâce à ce perfectionnement et à une heureuse proportion entre les parties de la machine, on peut arriver à enflammer de la poudre de chasse extra-fine placée entre deux pointes de métal très-voisines.
En réalité, dans la pratique, on emploie dans la confection des amorces, des poudres spéciales, notamment celle indiquée par M. Abel, chimiste de l’arsenal anglais de Woolwich. La poudre d’Abel est plus sensible que la poudre de chasse ordinaire ; aussi peut-on enflammer simultanément dans un seul circuit un nombre assez grand d’amorces, et, par suite, mettre le feu à plusieurs mines ou à plusieurs canons à la fois. Le seul défaut de cette poudre est qu’elle s’altère avec le temps, et qu’au bout de dix-huit mois ou deux ans elle n’est plus inflammable.
Ce défaut est écarté dans de nouvelles amorces dues à un officier du génie, et qui ne contiennent aucune substance susceptible de s’altérer avec le temps. En attendant que ces amorces françaises se répandent, on est réduit aux amorces anglaises qui ont servi pendant la guerre à quantité de travaux de destruction et qui rendent dans la paix de grands services aux ingénieurs pour la percée des tunnels et l’abatage des roches.
On a construit des exploseurs qui, d’un seul coup de poing, peuvent enflammer vingt amorces d’Abel ; mais cette grande puissance n’est obtenue qu’en sacrifiant la légèreté de l’appareil (ces instruments puissants pèsent 12 à 13 kilogrammes}. Dans la plupart des cas, on se contente d’appareils plus petits qui pèsent 8 kilogrammes et qui sont capables d’enflammer dix à douze amorces dans le laboratoire, et d’en faire partir six à huit sur le terrain. Enfin le génie fait étudier des appareils de très-petite dimension et d’un poids très-réduit, desquels on n’attend que trois ou quatre explosions simultanées, c’est-à-dire une force suffisante pour être absolument sûr d’une explosion sur le champ de bataille. L’exploseur est l’appareil magnéto-électrique le plus simple qui ait jamais été réalisé, et on peut ajouter qu’il n’est pas possible d’en concevoir un plus simple, puisqu’il n’y entre que les trois parties indispensables à répéter l’expérience de Faraday. En effet, on n’y voit qu’un aimant, une armature de fer doux et du fil de cuivre recouvert de soie. Malgré cette extrême simplicité, il y a tout lieu de croire que l’instrument se perfectionnera encore notablement et acquerra, à égal poids ou à égal volume, une énergie plus grande. Ainsi l’emploi des aimants Jamin, qui n’a encore été pratiqué qu’à titre d’essai, ne peut manquer de donner de bons résultats. Il faut bien se garder de croire que l’exploseur soit comparable en énergie à la bobine de Ruhmkorff. Le seul avantage qu’il présente sur ce puissant appareil est qu’il se suffit à lui-même et qu’il est toujours prêt à fonctionner, tandis que la bobine d’induction a besoin d’être excitée par une pile. Sur le terrain, et notamment à la guerre, cet avantage est tout à fait capital ; cela est trop évident pour qu’il y ait lieu d’y insister.
Applications diverses de l’appareil
L’appareil qui nous occupe est susceptible d’autres applications que l’inflammation de la poudre, et dès lors il ne doit plus être appelé exploseur. Tout d’abord il est facile de l’employer dans la télégraphie. On a pu voir parmi les objets exposés à Vienne, par la maison Breguet, un télégraphe Morse sans pile, dont le manipulateur n’était autre chose qu’un exploseur de petite dimension. On connaît la clef Morse, dont la manipulation consiste en une série de battements longs et courts diversement espacés. Il suffit de répéter ces battements avec le manche de l’exploseur pour produire une série de courants positifs à l’arrachement, négatifs au retour, qui font fonctionner un récepteur Morse à armature polarisée. Cet instrument parait être le télégraphe militaire par excellence, parce qu’il réduit au minimum le poids et le volume des appareils, et parce qu’il dispense de la pile, qui est l’embarras capital de la télégraphie ambulante. On a objecté que les télégraphes Morse employés en France n’étant pas à armature polarisée, les stations ordinaires de la télégraphie ne pourraient pas être mis en communication avec les télégraphes de l’armée. Cette objection est plus spécieuse que sérieuse. On a vu en effet, pendant la dernière campagne, que l’armée d’invasion, c’est-à-dire l’armée allemande, n’a presque jamais pu faire usage des postes français qui ont toujours été désorganisés au bon moment ; l’armée française, au contraire, constamment en retraite, employait presque toujours les stations ordinaires de la télégraphie comme stations militaires. D’ailleurs, il y a tout lieu de croire que les appareils à armature polarisée se répandront en France comme en Angleterre et en Allemagne, et dès lors l’inconvénient signalé se réduira de jour en jour. Rien ne serait plus aisé que de concevoir un télégraphe à cadran magnéto-électrique fondé sur le même principe, et les officiers du l’école régimentaire du génie de Montpellier ont fait des essais dans cette voie.
Nous avons eu l’occasion de voir récemment en Angleterre une autre application du même appareil réalisée par Sir Charles Wheatstone et déjà assez répandue ; il s’agit d’un compteur de tours de roue. Un excentrique placé sur l’axe dont on veut compter les tours vient à chaque révolution arracher l’armature d’un appareil analogue à celui que présente la figure et produit des courants qui sont envoyés dans un récepteur ou compteur facile à imaginer. Au lieu de compter des tours de roue, on peut compter les allées et venues du piston d’un corps de pompe, soit dans un moteur à vapeur, soit dans toute autre machine.
D’autres problèmes pourraient encore être résolus au moyen de cet artifice, et nous serions trop heureux si nous avions pu mettre quelque lecteur sur la voie d’une invention nouvelle.
A. Niaudet.

Publications 1876
- La machine magnéto-électrique de Gramme, par Alfred Niaudet-Bréguet. (Télégraphie Journal, vol. III, pages 185, 196, 223).
- Les piles secondaires de M. Planté, par A. Niaudet-Breguet. (Télégraphie Journal, volume III, page 272).
- Nouvelle machine électro-magnétique à courant continu, par Alfred Niaudet. (The télégraphie Journal, vol. IV, page 100).

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En Septembre 1877 A la réunion annuelle de l'association Britanique (BAAS) à Plymouth, on apprit les progrés fait depuis et W.Preece, avec la participation de Bell, ils firent la première démonstration pratique avec la fameuse paire de Hand-Téléphones amené par WH Preece.

A cette réunion assiste Alfred Niaudet, neveu de Mr Louis Bréguet (père) et célébre constructeur de matériel éléctrique chez Bréguet, qui parle couramment l'Anglais et qui est aussi membre de la "Society of telegraph Engineers".
Le lendemain Niaudet recoit
des mains même de l'inventeur une paire de téléphones (photo ci contre au musée du cnam) pour les amener en France.


Ces deux téléphones traverserent la Manche, dans une boite fermée à clef. Ils étaient en bois de frêne blanc tout à fait rustique et assez semblable à un bilboquet, la paire sera par la suite, donnée par la veuve A.Breguet au Musée des arts et métiers à Paris en 1884 et y sont toujours visibles.


Breguet sans tarder fit une présentation devant un petit comité apartenant à l'institut et Collége de France.
Fin septembre 1877 Niaudet et Breguet organisent une présentation à l'Académie des Sciences à Paris.

Mémoires et compte-rendu des travaux de la société des ingénieurs civils Vol. 30, 1877

Puis A. Niaudet fait ses premières expériences et une présentation à Paris début novembre 1877 et termine en annonçant que M. Bell lui avait formellement promis de venir bientôt à Paris et d’y prendre la parole dans une réunion scientifique. Ce sera une fête pour les admirateurs de l’heureuse invention du téléphone.
Le 2 Novembre 1877 , Alfred Niaudet et Antoine Breguet expérimentent " le téléphone" devant des membres de l'institut et du collége de France.

Ci dessous deux lettres de correspondance entre Bell et Niaudet sont echangées, la première rédigée par Alfred Niaudet, le 8 novembre 1877, quelques jours après la première démonstration d’un téléphone en France ;

« Cher Monsieur, merci infiniment pour votre intéressante lettre et pour les journaux que vous m’avez transmis. Je serai à Paris pendant six ou huit jours et j’espère vous y rencontrer. Je vous envoie un journal contenant les comptes rendus de ma conférence ici. Les remarques de Sir William Thomson ont été si brillantes qu’elles devraient certainement être traduites en français – et auront un grand poids. En hâte, vôtre, sincèrement. Alexander Graham Bell. »

La seconde écrite par Alexander Graham Bell le lendemain, 9 novembre, à Alfred Niaudet. Lettre autographe signée au physicien Théodore Schneider.

« Monsieur, Pourriez-vous m’envoyer une douzaine de brochures (éclairage industriel par la lumière électrique – Heilmann et Schneider) ou plutôt pourriez-vous me les faire envoyer par l’imprimeur Vve Bader et Cie à qui il me serait agréable d’en envoyer le prix. Cette brochure m’est quelque fois demandée et je voudrais pouvoir la faire lire aux personnes qui la désirent.
Vous aurez vu par les petits imprimés de la Soc. de Physique que j’ai eu le plaisir d’y montrer le 2 novembre dernier, les deux premiers téléphones qui aient été introduits en France.
C’est une invention bien extraordinaire, dans son état actuel ; elle se perfectionnera certainement, mais dès à présent, on ne peut se défendre d’une certaine émotion quand on entend la voix d’un ami au travers d’un fil télégraphique.
Hier soir, nous avons essayé entre Paris et St Germain et malgré un temps affreux, nous avons entendu bien des mots, reconnu la voix de notre correspondant, entendu chanter Au Clair de la Lune. J’étais saisi comme si je n’avais jamais entendu le téléphone. Croyez, Monsieur, à mes sentiments dévoués. Alf. Niaudet. 6 rue de Seine »

Le 21 Novembre 1877, Bell arrive à Paris guidé par A.Niaudet , pour participer à ce rendez vous historique. Bell et Pierret conviennent de faire des essais sur les lignes télégraphiques de l'état.
Dès le lendemain A.G Bell communique sur une ligne spéciale de son domicile de Paris avec Léon Say au ministère des finances et des postes et télégraphes puis avec le ministre de la guerre.

Décembre 1877 A.Niaudet et C. Roosevelt créent la "Societé Anonymes des Téléphones Bell"
C’est la première société de téléphonie créée en France . Son siège social est situé au 1, rue de la Bourse, à Paris.

La Société Anonyme des Téléphones Bell sera présente à l’exposition universelle de 1878.

Le 7 décembre : Un extrait de l'exposé de A. Niaudet "Mémoires de la Société des ingénieurs civils" : Volume 30 année 1877.

En 1878 Niaudet édite un ouvrage Téléphone et Phonographe, consultable cette page
et un exposé dans
"LA NATURE", REVUE DES SCIENCES 23 mars 1878

Le phonographe d'Edison.
- Cet instrument extraordinaire, réalisé en Amérique et annoncé par les journaux, vient de passer l'Atlantique et d'arriver à Paris. Un exemplaire de cet appareil, apporté par M. Puskas, concessionnaire des brevets européens de l'inventeur, a été présenté le lundi 11 mars à l'Académie des sciences et le vendredi 15 à la Société française de physique.
Le phonographe remplit une double fonction ; son nom n'indique que la première ; il écrit les sons, ceux de la voix ou ceux rendus par un instrument quelconque, voilà la moitié ; il est capable de les reproduire après et d'en donner comme le portrait, voilà l'autre moitié. L'enregistrement des sons avait déjà été obtenu d'une autre façon, notamment dans le phonautographe de Scott et Kœnig, dont la description se trouve dans tous les traités de physique récents. Mais la reproduction des sons au moyen de la trace qu'ils ont laissée dans l'enregistreur,... elle a été rêvée, cherchée, essayée par plusieurs, elle n'a jamais été réalisée avant M. Edison.
Le phonographe ou machine parlante d'Edison
(1/6 grandeur d'exécution, agrandir)
.

L'appareil que nous avons vu est représenté par la figure ci-jointe ; il est d'une simplicité qui ne pourra pas être dépassée et qu'à certains égards même on sera obligé d'abandonner pour obtenir plus de perfection dans le rendu. Il présente une membrane toute semblable à celle des téléphones, tenue par sa circonférence dans une bague métallique, A. Cette membrane porte, fixé à sa surface inférieure un petit style métallique placé perpendiculairement à son plan et très rigide. C'est devant cette membrane qu'on parle, et c'est le style qui écrit les vibrations de la membrane.
L’enregistrement se fait sur un cylindre métallique, M, qu'on meut au moyen d'une manivelle. L'axe du cylindre est taillé en vis, ou en terme technique, taraudé, et l'un de ses collets ou supports fonctionne comme écrou ; de telle sorte que, quand on tourne la manivelle, le cylindre non seulement tourne, mais encore progresse. La surface du cylindre présente elle-même un pas de vis de même hauteur que l'axe ; si bien que la pointe du style, pendant le mouvement du cylindre, se trouve continuellement dans la rainure pratiquée à sa surface.
Quand ou veut employer l'instrument, il faut commencer par placer sur le cylindre un papier d'étain, pareil à celui dans lequel on enveloppe le chocolat ; on colle ce papier métallique avec une colle ordinaire suivant une des génératrices du cylindre, afin de l'envelopper complètement. Avec les mains on appuie de manière à faire pénétrer le papier dans la rainure, qu'on voit se dessiner au travers de l'étain. On amène alors la membrane dans sa position d'action, on l'assujettit solidement au moyen d'une vis de serrage, le style appuyant légèrement sur le fond du canal hélicoïdal présenté par le papier. On parle et en mémo temps on tourne le cylindre ; la membrane vibre et le style fait dans le papier d'étain une série de marques plus ou moins profondes et de formes variées, qu'un puissant microscope permettrait seul d'étudier.
Voilà l'inscription, c'est-à-dire la première partie de l'invention d'Edison ; voilà ce qu'on avait fait avant lui et voilà ce qu'on avait fait mieux que lui, quand on se proposait simplement d'écrire les vibrations pour en étudier les formes. Mais ce mode d'inscription a été l'idée de génie et comme l'a fort bien dit M. Marcel Deprez à la Société de physique, l'emploi de ce papier d'étain a rendu possible la reproduction des sons, qui avait été cherchée en vain par d'habiles et savants expérimentateurs. Voici comment on procède pour tirer de l'instrument ainsi préparé les sons qu'on lui a dit ou plus exactement criés à l'oreille. On écarte la membrane, on fait tourner le cylindre en sens inverse jusqu'à ce qu'il soit ramené à la position qu'il occupait au début de l'expérience ; on rapproche la membrane et le style se retrouve au contact du papier d'étain. On tourne de nouveau et dans le même sens que la première fois. La membrane, poussée par le style, qui est lui-même guidé par les marques ou cavités antérieurement produites, la membrane, disons-nous, vibre et reproduit les sons qui avaient déterminé l'inscription. Ces sons, amplifiés par une sorte de porte-voix placé contre l'anneau A (voy. la figure) contenant la membrane, peuvent être entendus à distance.
Ou ne peut se rendre compte sans l'avoir entendu, de l'impression singulière que cause cette petite voix grêle sortant de l'instrument ; jusqu'au dernier moment on doute et quand les sons distincts, quoique faibles, viennent frapper l'oreille, on éprouve un étonnement et une satisfaction qui se sont traduits à la Société de physique en applaudissements et en rires des personnes qui remplissaient la salle.
Insistons sur les particularités de cet instrument, grâce auxquelles il réalise ce qu'il était si difficile de produire. Le papier d'étain est comme suspendu au-dessus du vide formé par le pas de vis tracé sur le cylindre ; il présente une certaine rigidité à cause de sa tension, mais comme il n'est pas soutenu par derrière, il présente en même temps une certaine flexibilité. Grâce à ces propriétés, la feuille d'étain est capable de recevoir les impressions qu'y fait le style inscripteur, et ensuite de les rendre à la membrane quand on fait passer une seconde fois le style devant la feuille écrite. Le papier d'étain n'est pas encore, parait-il, ce qu'il y a de mieux pour cet usage ; M. Edison emploie maintenant des feuilles de cuivre, sans doute de cuivre rouge, très minces et qui donnent de meilleurs résultats.
Nous avons supposé implicitement dans ce qui précède que la rotation du cylindre était uniforme ; mais il est clair que le mouvement donné directement par la manivelle ne peut pas être parfaitement régulier. Pour atténuer ce défaut, on a mis à la seconde extrémité de l'axe un lourd volant, V, montré sur notre figure, qui, dans une certaine mesure, corrige les variations de vitesse produites par l'action de la main. Il est facile de concevoir des appareils d'horlogerie, grâce auxquels on obtiendrait un mouvement très uniforme ; c'est un point sur lequel il n'y a pas à insister.
Quand il s'agit de reproduire des paroles articulées par la voix humaine, les inégalités de vitesse ont peu de conséquence ; le son monte ou baisse légèrement quand le cylindre se hâte ou se ralentit. Mais quand on reproduit des sons musicaux, le défaut est plus sensible. On comprend en effet que plus la rotation est rapide, plus le son rendu est aigu, et la même inscription peut donner des notes très différentes suivant qu'on tourne plus ou moins vite.
Et par suite, si on inscrit successivement les quatre notes d'un accord parfait do, mi, sol, do, sur le cylindre, on le rendra juste, à la condition qu'on tourne tout à fait régulièrement et pendant l'inscription et pendant la reproduction du son ; mais pour peu que la vitesse n'ait pas été uniforme l'une des deux fois, l'accord n'est pas juste.
On peut noter ici en passant que, avec le téléphone, les sons musicaux sont plus aisément rendus que les articulations de la voix ; tandis qu'avec le phonographe tel que nous l'avons entendu, c'est l'inverse.
Nous l'avons dit, et nous ne pouvons que le répéter, ces petites imperfections de rendu seront corrigées par des appareils donnant un mouvement très régulier. D'autre part, M. Edison a récemment annoncé par le télégraphe à son représentant en Europe qu'il était arrivé à reproduire exactement le timbre de la voix humaine. Ce sera une nouvelle merveille ou plutôt un parachèvement d'une merveille mécanique ; mais dès à présent on ne saurait trop admirer le résultat obtenu et la simplicité extraordinaire des moyens mis en œuvre pour l'obtenir.

Parmi les perfectionnements qui ont été déjà réalisés, parait-il, par M. Edison, nous en indiquerons un seul : dans de nouveaux appareils le papier d'étain se place non plus sur un cylindre, mais sur une plaque dans laquelle on a tracé une rainure qui a la forme d'une spirale d'Archimède, ou, pour parler le langage vulgaire, la forme d'un limaçon. Le mouvement de cette plaque est combiné de manière que le style porté par la membrane trace ses inscriptions dans la rainure spirale. Cette disposition est certainement plus compliquée que celle qui a été montrée à Paris ; mais elle permet de placer plus aisément et plus promptement la feuille d'étain et surtout elle permet, la feuille une fois écrite, de la placer sur un autre appareil qui fera la reproduction, ce second appareil pouvant être dans une autre ville et dans une autre partie du monde que le premier.

C'est dans ces conditions qu'il sera possible à la Société française de physique d'entendre une communication verbale de M. Edison, communication qui aura été confiée à l'étain quinze jours auparavant et qui aura, passé l'Atlantique dans une enveloppe de lettre. Cette chose extraordinaire n'a pas encore été réalisée, mais elle le sera certainement, pour peu que M. Edison veuille continuer de suivre la voie dans laquelle il est entré si brillamment.
Ajoutons en terminant que le phonographe peut être combiné avec le téléphone, et sans parler de ce qui pourra être fait, disons que des expériences ont été exécutées à Bruxelles, dans lesquelles la membrane du phonographe était mise, au moment de la reproduction, en présence d'un aimant de téléphone. Les vibrations produites dans la membrane par le style commandé par la feuille d'étain préalablement écrite, déterminaient des courants d'induction téléphoniques dans le fil qui entourait l'aimant et se trouvaient reproduites dans un téléphone récepteur placé à distance.

Alfred NIAUDET.

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Niaudet publia de nombreux ouvrages d’électricité et collabora à plusieurs publications scientifiques.

1878 Exposé des applications de l'électricité.

Machine de M. Niaudet-Breguet. — M. A. Niaudet-Breguet a combiné récemment une machine Clarke multiple possédant l’avàntage de pouvoir se passer de commutateur.
La fig. 140 représente cet appareil.

C’est, comme on le voit, une série de 12 bobines placées entre deux plateaux et tournant entre les pôles de deux aimants fixes. Les bobines des électro-aimants sont toutes rattachées les unes aux autres, le bout entrant de chacune étant lié au bout sortant de la bobine voisine,
exactement comme une série d’éléments voltaïques réunis en tension. Quand le plateau tourne dans le sens de la flèche, en supposant le pôle nord de l’aimant en bas et le pôle sud en haut, voici ce qui se passe dans une bobine quelconque à mesure qu’elle s’éloigne du pôle N : il s’y développe un courant d’un certain sens, et ce courant reste de même sens pendant tout le temps que la bobine va du pôle N au pôle S ; mais pendant la seconde demi-révolution de la bobine, elle s’éloigne du pôle S et s’approche du pôle N, et par conséquent le sens du courant est inverse de ce qu’il était dans la première moitié du mouvement.
Yoyons maintenant ce qui se passe dans l’ensemble. A un moment quelconque, considérant toutes les bobines placées à la droite de la ligne des pôles, elles sont toutes parcourues par des courants de même sens qui sont associés en tension. Au même moment les bobines placées à gauche de la ligne des pôles sont parcourues par des courants de sens inverse aux premiers et, comme eux, associés en tension. La somme des courants de droite est d’ailleurs manifestement égale à celle des courants de gauche. L’ensemble peut donc être considéré comme deux piles de 6 éléments opposées l’une à l'autre par leurs pôles de même nom. Or, si un circuit électrique est mis en communication par ses deux extrémités avec les points où ces deux séries d’éléments sont opposées, il est parcouru à la fois par les courants des deux piles qui se trouvent alors associés en quantité comme dans la machine Gramme.
Par analogie, pour recueillir les courants développés dans la machine de M. Niaudet, il faut établir des frotteurs qui touchent les points de liaison des différentes bobines entre elles au moment où ils passent sur la ligne des pôles. A cet effet, l’inventeur, s’inspirant de la machine Gramme, a placé des pièces métalliques qui, dirigées radialement, communiquent avec les points de jonction des bobines et sur lesquelles se fait la prise des courants.

1879 La Lumière éléctrique

La Pile de M. Niaudet au chlorure de chaux .
La Nature 1880

Cette pile disposée à peu près comme la pile Léclanché (1 modèle), a pour substance dépolarisante du chlorure de chaux mêlé à des fragments de charbon qui remplissent l’intérieur du vase poreux où plonge le charbon, et pour liquide excitateur, une solution de chlorure de sodium (eau salée) dans laquelle est immergée la lame de zinc.

L’hydrogène dû à la décomposition de l’eau, réagit sur le chlorure de chaux pour former de l’eau et de l’acide chlorhydrique, d’où il résulte, dans la solution excitatrice, du chlorure de zinc et du chlorure de calcium, corps très-solubles et bons conducteurs, ce qui rend la pile énergique et constante. I)e plus comme le zinc n’est pas attaqué d’une manière appréciable en présence du chlorure de chaux, la pile s’use fort peu quand elle ne sert pas, et l’addition du sel marin la rend encore moins résistante.
La force électro-motrice de celte pile est de 1 volt 6 .Bien qu’elle se polarise plus que la pile de Daniell, elle reprend sa force électro-motrice par le repos. Sa résistance est d'environ 5 ohms. Mais ce qui est remarquable dans cette pile, c’est la suspension de toute attaque du zinc quand le circuit est ouvert. Il paraît que,l’odeur du chlorure de chaux se trouve rendue inoffensive par un bouchage hermétique du vase poreux avec un bouchon entouré de poix.

1880
- La Lumière éléctrique
Machines nmgnèto-èlectriqiies.
Nous nous proposons, dans ce travail, d’exposer les principes et les principes seulement de toutes les machines connues qui ont fourni quelques résultats pratiques... En 1876: M. Niaudet, utilisant la disposition des bobines de Clarke, et produisant l’induction par les deux extrémités de la bobine à la fois, comme dans la machine de l’Alliance, â construisit une machine à courants continus dans laquelle les courants sont recueillis par un collecteur du principe de Gramme....
En se reportant au diagramme et à ce que nous allons dire sur le collecteur de Gramme, il est facile de concevoir le. fonctionnement de la machine de M. Niaudet ...

- Edition du "Traité élémentaire de la pile électrique". Alfred Niaudet.

- Niaudet est aussi membre de la Société Française de Physique dès sa fondation et deviend administrateur de la Société Générale des Téléphones.

- Alfred Niaudet : Appareil indicateur du niveau de l’eau.

1881
- La Lumière éléctrique
Sifflement de l’arc voltaïque.
... M. A. Niaudet vient de communiquer à l’Académie une note dans laquelle il montre que les sifflements que produit souvent l’arc voltaïque, correspondent à une diminution subite du potentiel des deux charbons entre lesquels s’échange l’arc voltaïque. Ces variations du potentiel de l’arc sont assez notables et répondent à des variations en sens inverse de l’intensité du courant général. Voici les résultats qui ont été obtenus en faisant usage du galvanomètre de M. Marcel Deprez pour la mesure des intensités et des forces électro-motrices ...
- M. Niaudet vient de publier un ouvrage sur les machines magnéto et dynamo-électriques.
- Mémoires et compte-rendu des travaux de la société des ingénieurs civils Vol. 36, 1881 , long exposé sur la pile.
- A. Niaudet : Télégraphe optique
- A. Niaudet : Nouveau récepteur téléphonique de W.H. Preece
- A. Niaudet : Pile secondaire de M. Faure
- A. Niaudet : Arc voltaïque

Ses publications : Dans l’hebdomadaire La Nature

Machine magnéto-électrique de Gramme, N°22 - 1er Novembre 1873
Exploseur magnéto-électrique de Bréguet, N°35 — 31 Janvier 1874
Chronographe du Dr Marey, N°49 — 9 Mai 1874
Pile secondaire de M. Planté, N°56 — 28 Juin 1874
Observations sur les paratonnerres, N°58 — 11 Juillet 1874
Nouveau moyen d’éviter l’incrustation des chaudières à vapeur, N°74 — 31 Octobre 1874
Rhéotome liquide à direction invariable de M. Ducretet, N°92 - 6 mars 1875
Aimants Jamin, N° 106 - 12 juin 1875
Nouvelle machine magnéto-électrique à courants continus, N°132 - 11 Décembre 1875
Correspondance sur la machine Gramme, N°139 - 29 Janvier 1876
Télégraphie militaire. Système de M. Trouvé, N°155 - 20 Mai 1876
Pile au chlorure d’argent de M. Warren DE LA RUE, N°159 - 17 Juin 1876
Pile humide de M. Trouvé, N°168 - 19 Aout 1876
Éclairage à l’électricité, N°214 - 7 Juillet 1877
Bougie électrique de M. Jablochkoff, N°204 - 28 Avril 1877
Le phonographe d’Edison, N°251 — 23 mars 1878
Plume électrique d’Edison, N°255 — 20 avril 1878
Appareil indicateur du niveau de l’eau, N°393 - 11 Décembre 1880
Description de la plus grande bobine d’induction construite jusqu’à ce jour, N°348 - 31 Janvier 1880
Ligne électrique sous-marine de Marseille à Alger, N°391 - 27 Novembre 1880

Et bien d'autres publicatons dans divers ouvrages et revues autres.

Livres :
Machines magnéto-électriques Gramme, Hippolyte Fontaine, 1875
Le téléphone de A. Graham Bell, C. Roosevelt, 1877
Téléphones et phonographes : étude complète de ces inventions, J. Baudry 1878.
Traité élémentaire de la pile électrique, J. Baudry 1880.
Machines électriques a courants continus, J. Baudry 1881.

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Le TÉLÉPHONE DE M. GOWER publication dans "La Nature du 22 février 1879 :

— Nous avons sous les yeux la copie du mémoire présenté par M. Gower à l’Académie le lundi 27 janvier 1879, et dont les Comptes rendus ont donné un extrait. Nous allons résumer la discussion qu’il contient des mérites comparatifs des différents systèmes téléphoniques. Il paraît démontré que les courants électriques interrompus sont impropres à la transmission de la parole articulée. Ils permettent de produire à distance des bruits d’une hauteur déterminée ou des notes musicales ; mais ils paraissent incapables de donner les effets du timbre. Rappelons pour fixer les idées que le téléphone de Reis est le type des appareils électriques reproducteurs des sons sans leur timbre, fondés sur l’emploi des courants interrompus. On les appelle téléphones musicaux, quoiqu’ils ne fassent entendre qu’une fort mauvaise musique.
L’emploi des courants appelés par M. Bell ondulatoires a permis de franchir l’énorme distance qui sépare les téléphones dits musicaux des téléphones articulants. Les courants ondulatoires sont ceux dont l’intensité subit des variations qui peuvent être figurées par une courbe ondulée analogue à celle qui représente les phénomènes du son. Ces variations d’intensité peuvent être obtenues de deux façons :
1° En faisant varier la résistance du circuit, tandis que la source électrique reste invariable ;
2° En faisant varier la force électromotrice de la source tandis que la résistance du circuit reste fixe ; nous avons dans ce cas deux classes de téléphones articulants.
A la première appartient le transmetteur à charbon de M. Edison et les microphones. Dans tous ces appareils des variations dans le contact entre deux pièces faisant partie du circuit, déterminent des variations dans la résistance du courant fourni par une pile constante. La seconde classe comprend les téléphones magnéto-électriques de Bell qui, après avoir excité tant d’étonnement et d’admiration en 1877 viennent de recevoir entre les mains de M. Gower une puissance dont on ne pouvait les croire susceptibles.
Le téléphone de M. Gower est représenté par les figures ci-jointes, qui sont faites à l’échelle de 1 et donnent par conséquent la dimension de l’instrument qui a reçu le nom de téléphone chronomètre.

Une des préoccupations de l’auteur a été de faire emploi des aimants les plus forts possible, tout en réduisant au minimum la dimension des boîtes contenant l’instrument. Il a fait construire des aimants du meilleur acier français connu, supérieur pour cet usage seul à tous ses rivaux anglais. Il a adopté la forme fermée NOS. Enfin ces pièces ont été aimantées par l’emploi d’un électro-aimant fort gros, excité par le passage du courant d’une puissante machine Gramme. Les deux pôles portent chacun une petite pièce de fer oblongue sur laquelle est montée une bobine de fil ; cette forme aplatie essayée déjà autrefois en Amérique par M. Gower et rejetée, a été reprise par lui et lui a donné de meilleurs effets que la forme cylindrique, sans doute à cause de la force extraordinaire de l’aimant.
Une boîte de laiton contient les organes que nous venons de décrire; son couvercle, de même métal, porte la membrane vibrante qui est quelque peu plus épaisse que dans les appareils du même genre construits jusqu’ici ; elle est maintenue sur toute sa circonférence par une bague de laiton et les vis qui l’attachent au couvercle ne touchent en aucun point la membrane. Le disque de métal qui forme le couvercle n’est séparé que par une chambre excessivement mince de la membrane vibrante, circonstance importante, comme on sait; car s’il est important de diminuer les effets de résonnance de la boîte elle-même, au-dessous de la membrane, il l’est bien plus encore de les écarter complètement au-dessus. M. Gower assure d’autre part que ce couvercle présente une vibration appréciable d’accord avec celle de la membrane elle-même. La forme ancienne de l’embouchure téléphonique a été abandonnée, et on a pu sans rien perdre de l’intensité du son faire usage de tuyaux acoustiques souples avec leurs embouchures ordinaires.
Cette disposition paraît extrêmement commode, car il devient facile de parler et d’entendre sans se lever de sa table, tandis que le téléphone est solidement suspendu au mur. On arrive ainsi à toute la commodité que présentent les porte-voix ordinaires. Pour compléter la ressemblance avec les tuyaux acoustiques, M. Gower a pourvu son appareil d’un avertisseur ou appel qui forme la particularité la plus nouvelle de son instrument. On voit sur la membrane une pièce A, représentée à part et en plus grand ; elle se compose d’un tube recourbé à angle droit, ouvrant par un bout T sur le dessus de la membrane et par l’autre dans la boîte ; elle contient une anche vibrante. Si on souffle dans le tuyau acoustique, l’air chassé dans ce tube A, fait vibrer l’anche et par communication solide la membrane entre en un mouvement vibratoire dont les excursions sont beaucoup plus étendues que dans les téléphones ordinaires ; elles le sont assez pour qu’on les sente au doigt. Ces vibra, tions intenses produisent des courants induits d’une intensité considérable dans le téléphone transmetteur ; il en résulte au récepteur une vibration correspondante qui fait entendre un son assez fort. Cet appel peut être entendu dans toute une pièce si grande qu’elle soit, alors même qu’il n’y règne pas un silence absolu. Le timbre particulier- de ce son contribue d’ailleurs à le rendre facilement perceptible au milieu d’un certain bruit ambiant.
Ainsi se trouve résolu le problème, si souvent cherché, de transmettre au moyen du même instrument un appel assez fort et ensuite la parole articulée. On pourrait croire que l’addition sur la membrane du tube A contenant cette anche vibrante, trouble la netteté de la transmission ; il n’en est rien et il paraît même que ce poids ; ainsi placé, joue le rôle d’étouffoir et contribue à rendre plus distincte et plus naturelle la parole articulée. Le téléphone chronomètre a été expérimenté dans la salle des séances de l’Académie des sciences le 27 janvier et dans la salle relativement petite de la Société de physique le 5 février. On a pu constater que l’appel était entendu dans toute la salle de l’Institut ; on a entendu également de tous les points de cette pièce les sons d’un cornet à piston joué près d’un transmetteur. Enfin la parole articulée a pu être entendue à distance; des phrases simples parlées à voix haute au transmetteur, ont été entendues à cinq ou six mètres du récepteur, résultat qui n’avait jamais été obtenu jusqu’à ce jour. Pour entendre à distance de l’instrument il faut l’armer d’un grand cornet résonnateur, dans le genre de celui qu’on emploie pour renforcer les sons du phonographe; mais dans la pratique l’emploi du tuyau acoustique nous paraît préférable. Avec le cornet dont nous venons de parler on peut encore exécuter une expérience curieuse qu’on fait d’ailleurs avec tous les bons microphones (à piles) ; on parle devant le transmetteur en se tenant à un mètre ou deux de l’instrument, et la parole est clairement reproduite par le récepteur écouté de près.
A. NIAUDET.

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1883 Vu dans "La Nature" de 1883 NECROLOGIE

Alfred Niaudet. — La science et l’industrie viennent de faire, en la personne de M, Alfred Niaudet, la perte d’un de leurs plus dévoués et de leurs plus éminents serviteurs. Membre de la Société française de physique depuis sa fondation, coopérateur depuis de longues années à la maison Bréguet, dont il avait concouru à maintenir les bonnes traditions scientifiques, administrateur de la Société générale des Téléphones, de la Compagnie électrique, de la Société l'Éclairage électrique, président de la Compagnie internationale des Téléphones, M. Niaudet avait, plus que personne, contribué à développer en France les industries qui se rattachent à l’électricité. En même temps il trouvait le moyen de collaborer aux publications scientifiques, de faire paraître différents mémoires sur les machines dynamo-électriques, sur la téléphonie et la télégraphie, et deux ouvrages qui font autorité, sur les piles électriques et sur les moteurs dynamo-électriques.

En 1870, il organisait le service télégraphique de l’armée du Rhin ; enfermé dans Metz, il créait un système de communications aériennes pour tromper le blocus ÿ ensuite il s’échappait sous un vêtement civil pour rejoindre les armées de la Défense nationale. M. Alfred Niaudet, avant la longue maladie qui l’a enlevé à la science, était un de nos meilleurs et de nos plus zélés collaborateurs ; nos lecteurs apprécieront, comme nous, la déplorable perte de ce savant et de cet homme de bien.

1883 La Lumière éléctrique

FAITS DIVERS
Après la mort de M. Alfred Niaudet, tout récemment emporté après une longue maladie, nous apprenons celle de M. L. Breguet, membre de l’Académie des sciences et du Bureau des longitudes. Jeudi dernier, il assistait encore au banquet des membres de l’Institut, et rien ne faisait présumer une mort aussi rapide. M. Breguet, petit-fils du célèbre mécanicien dont le nom est resté une des gloires de l’horlogerie de précision, est un des premiers qui se sont occupés des applications électriques en France; c’est lui qui a organisé les premières lignes télégraphiques en ce pays, et qui a construit les premiers appareils télégraphiques qui ont fonctionné sur nos lignes. Son télégraphe à cadran est connu de tout le monde, et il en combina d’autres de divers modèles, qui lui furent demandés à diverses époques par l’administration des lignes télégraphiques. Pendant longtemps, il fut le seul constructeur qui construisait les appareils électromagnétiques de précision, et on lui doit une foule de modèles de chronographes, d’horloges et d’enregistreurs électriques. La maison Breguet créa la plupart des habiles constructeurs qui exploitent aujourd’hui à Paris ce genre d’industrie. Il avait d’ailleurs fait, dès 1837, avec M. Masson, des expériences sur les bobines d’induction électriques, qui conduisirent à la bobine de Ruhmkorff. Appelé à construire beaucoup d’appareils employés pour la détermination des différences de longitudes et l’astronomie, il fut nommé membre du Bureau des longitudes, et, en 1873, il fut proclamé membre de l’Institut en remplacement de M. Passy. Après avoir survécu à son fils, Antoine Breguet, électricien distingué, qui avait pris une grande part dans l’organisation de l’Exposition de 1881, et à son neveu, M. Niaudet, le praticien bien connu, il s’est trouvé frappé, à son tour, par une embolie, dans sa 78e année ; il a été enlevé subitement à la science et à ses amis, dans la plénitude de ses facultés et sans qu’aucune infirmité pût faire présager une fin aussi prompte.

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