Le téléphone rouge
Lhistoire du téléphone rouge
durant la guerre froide qui nétait ni un téléphone,
ni rouge
Au plus fort de la guerre froide, les États-Unis et l'Union soviétique
ont établi une liaison de communication directe pour permettre
à leurs dirigeants de se contacter en cas de crise nucléaire
ou autre urgence.
La hotline Washington-Moscou a été proposée pour
la première fois dans les années 1950, mais lidée
na pas eu de succès avant la crise des missiles de Cuba
en 1962, lorsque les Américains et les Soviétiques ont
constaté que leurs messages diplomatiques mettaient souvent plusieurs
heures à se parvenir.
Craignant que de nouveaux incidents ne déclenchent une guerre
nucléaire accidentelle, les deux superpuissances se sont rencontrées
à Genève l'année suivante et ont signé un
«Mémorandum d'accord concernant la création d'une
ligne de communication directe».

J.F. Kennedy et N. Khrouchtchev, lors du sommet de Vienne en juin
1961 -©cc
Voici donc le décor de l'histoire. La Guerre
froide entre les Etats-Unis et l'Union soviétique poussée
à son paroxysme. En octobre 1962, les Américains détectent
la présence de missiles soviétiques sur l'île
de Cuba, située 160 Km au sud de la Floride. Les flottes
des deux puissances se mettent en place, un bras de fer s'engage.
Des deux côtés du monde, les dirigeants craignent un
conflit nucléaire. "Ce qui a beaucoup marqué
les responsables de cette époque, commente André Kaspi,
c'est que la crise de Cuba aurait très bien pu dégénérer
en une guerre mondiale, qui aurait été une guerre
atomique, et qui aurait abouti en fin de compte à la destruction
de la planète. Donc on a frôlé le pire."
Tout doucement, pour prévenir le retour à une telle
situation, l'idée de mettre en place un canal de discussion
entre les deux grands fait surface. Andreï Kozovoï, maître
de conférences à l'université de Lille et auteur
de plusieurs ouvrages sur la Guerre froide, relate : "L'initiative
est américaine. Il faut souligner qu'une proposition en ce
sens est faite dès avril 1962, six mois avant la crise. Mais
c'est la crise de Cuba qui pousse les Soviétiques à
accepter la proposition américaine, qui fait d'abord partie
d'un "package" sur le désarmement (voir encadré
ci-contre)." Pour Pierre Melandri, la position du président
Kennedy à l'issue de la crise lui donne l'avantage : "Une
fois que la crise des missiles de Cuba lui a donné l'impression
d'être en position de force, d'avoir remporté la victoire
dans la crise, ce qui est toutefois disputé sur le plan des
réalités, il est prêt à faire des ouvertures
à Moscou."
Andreï Kozovoï rappelle que cette création "téléphonique"
ne revêt pas que des aspects diplomatiques. La stratégie
militaire est elle aussi touchée : "Du côté
américain, il y a alors l'émergence de la doctrine
MAD, comprendre "destruction mutuelle assurée",
selon laquelle pour prévenir un conflit nucléaire,
il faut mener des discussions bilatérales. D'une certaine
manière, la création d'une ligne anti-crise répond
aussi à une demande de l'opinion publique américaine.
Elle a vécu intensément la crise, à la différence
du public soviétique, qui n'en connaît que la version
officielle, mensongère et partielle, diffusée par
la propagande." |
Le 30 août 1963 était inauguré un
objet mythique qui en fait na jamais réellement existé
: le téléphone rouge.
Cette hotline Washington-Moscou a depuis figuré dans d'innombrables
romans et films tels que «Dr. Strangelove », mais contrairement
à ses représentations dans la culture pop, il n'a jamais
pris la forme d'un téléphone rouge. En fait, cela n'a
jamais impliqué d'appels téléphoniques.
On a bien inauguré le 30 août 1963 une liaison directe
entre le Kremlin et la Maison blanche mais, non, le téléphone
nétait pas rouge.
Rouge suppose lurgence et traduit le concept anglais de "
hot line ".
Chacune des deux superpuissances détient un arsenal nucléaire
impressionnant qui permettrait de se détruire mutuellement. Cest
ce quon appellera léquilibre de la terreur et dans
ce contexte la moindre erreur peut être fatale. Il est dailleurs
arrivé à plusieurs reprises durant la guerre froide que
les ordinateurs évoquent par erreur une attaque. Heureusement,
les officiers concernés de part et dautre ont gardé
leur sang-froid et nont pas ordonné une frappe en réaction.
Quun contact direct entre les deux leaders américain et
soviétique soit possible est de nature à rassurer lopinion
publique.
Le téléphone inaugure une période de détente
relative après le pire moment de tension : la crise des missiles
de Cuba en 1962 où Américains et Soviétiques vont
se toiser dans le blanc des yeux et ce sera au premier des deux qui
cédera. En résumé, les Soviétiques installent
des missiles à Cuba pointés sur lAmérique.
En réaction, les Etats-Unis instaurent le blocus de lîle.
"Chacun reproche à lautre dêtre lagresseur.
Khroutchev tentera ainsi de justifier que les missiles de Cuba sont
défensifs en disant : si je pointe un pistolet vers vous pour
ne pas que vous mattaquiez, cest une arme défensive
et non offensive."
A ce jeu très dangereux, Nikita Khroutchev finira par céder
devant la détermination de John Fitzerald Kennedy, lequel aura
lintelligence davoir le triomphe modeste pour ne pas humilier
ladversaire et de chercher à faire ensuite retomber la
tension. Cette inauguration du téléphone rouge en fait
partie mais Kennedy naura guère le loisir de lutiliser
puisque moins de trois mois plus tard il sera assassiné.
Ce téléphone rouge nexistait pas en tant que tel
mais paraissait en fait comme lultime moyen déviter
par un contact direct une déflagration mondiale : après
tout, tant quon se parle, il y a de lespoir, celui de ne
pas se tirer dessus.
Plutôt qu'une liaison téléphonique, qui présentait
la possibilité de problèmes de communication, la hotline
se composait de téléscripteurs qui permettaient aux deux
pays de s'envoyer des messages écrits via un câble transatlantique.
Dans un premier temps, par un câble transatlantique via Londres
et Helsinki. Par la suite, on utilisera le satellite pour cette liaison
sécurisée qui permet à chacun de transmettre un
texte dans sa propre langue et donc dans son propre alphabet. Ce texte
était alors remis aux traducteurs respectifs avant dêtre
transmis au chef dEtat. Le 30 août 1963, pour tester la
ligne, les Américains envoient aux heures paires un texte extrait
de lEncyclopedia Britannica et les Russes aux heures impaires
des passages littéraires. Limportant est que le message
soit neutre et ne comporte aucune insinuation parce que la guerre froide
met les nerfs à rude épreuve et est propice à la
paranoïa..
Le système soviétique était situé au Kremlin,
mais la version américaine était toujours logée
au Pentagone, pas à la Maison Blanche.
Des liaisons par satellite ont été ajoutées plus
tard à la hotline pendant l'administration Nixon, et en 1986,
elle a été mise à niveau pour inclure la capacité
de télécopie à haut débit.
La refonte la plus récente a eu lieu en 2008, lorsque le système
est passé au courrier électronique.
Bien qu'il n'y ait aucune preuve que la hotline ait jamais été
utilisée pour éviter une catastrophe nucléaire,
elle a souvent joué un rôle clé dans les relations
américano-soviétiques.
Par la suite, d'autres lignes de communications ont
été installées dans divers pays : liaisons Inde-Pakistan
(2004 et 2011), liaisons Chine-États-Unis (2007 et 2015) et liaison
Corée du Nord-Corée du Sud (2018).
La légende
Une image largement diffusée qui montre un téléphone
rouge sans cadran exposé dans la bibliothèque et le musée
Jimmy Carter à Atlanta, en Géorgie.
Le texte parle d'un téléphone rouge utilisé pour
la ligne directe, mais le plus important est que le téléphone
exposé n'est qu'une reproduction. Cela est également confirmé
par le commissaire de l'exposition, qui a déclaré que
ce téléphone était un accessoire que le concepteur
de l'exposition voulait utiliser. Il est désormais clair que
le téléphone rouge réel de l'image n'a jamais été
utilisé sur la ligne directe entre Washington et Moscou, ni sur
aucun autre réseau téléphonique sécurisé
(bien que les téléphones rouges aient été
régulièrement utilisés pour les prédécesseurs
du réseau de commutation rouge de la défense, qui est
le principal réseau vocal sécurisé de l'armée
américaine).
Pour les visiteurs du musée, cela a dû sembler une confirmation
de leur idée de la Hotline téléphonique rouge.
Lorsque quelqu'un a téléchargé une photo de ce
téléphone sur Wikipédia en mars 2011, elle a rapidement
trouvé son chemin vers des articles sur la Hotline Washington-Moscou
en onze langues, la plupart d'entre eux indiquant à tort que
la Hotline avait également une fonction vocale. Ce n'est qu'après
des recherches effectuées pour ce blog, qui ont abouti à
un article détaillé sur la Hotline l'année dernière,
que certains articles de Wikipédia ont été corrigés.
Après que la question de lattribution erronée du
téléphone rouge ait été soulevée
ici sur ce blog, la Jimmy Carter Library la remarqué et
a remplacé la description du téléphone en mars
2016 par le texte suivant, qui est désormais exact :
« Pendant la présidence de Jimmy Carter, le « téléphone
rouge » était utilisé pour communiquer avec les
centres de commandement militaire américains en cas de crise.
Il ne sagissait pas de la ligne directe des dirigeants soviétiques,
comme on le voit souvent dans les films. ».
 |
Le renard et le chien
Le premier message du "téléphone rouge"
a été envoyé le 30 août 1963.
Sa signification, étrange, avait en fait un sens purement
technique. Il s'agissait d'utiliser toute la chaîne de caractères
latins, de l'émetteur américain. |
Le système a deux avantages : la vitesse et la clarté.
"A notre période d'Internet on a du mal à le comprendre,
mais pendant la crise, il faut souvent une douzaine d'heures pour qu'un
message arrive de Moscou à la Maison Blanche. Il n'y a pas de ligne
de téléphone directe entre l'ambassade de l'Union soviétique
à Washington et Moscou. Les échanges se font entre l'ambassade
et Moscou par des télégrammes codés envoyés
par la Western Union. Alors on envoie des petits coursiers à bicyclette
déposer les messages, ensuite transmis à Moscou. Bref, alors
que les choses peuvent prendre un tour terriblement urgent, les communications
sont d'une lenteur tout à fait inquiétante."
Alors que techniquement, une ligne téléphonique pourrait
être mise en place et serait encore plus rapide et directe qu'un
télégramme, cette hypothèse n'est pas retenue. "Par
peur de malentendus", rapporte Andreï Kozovoï. Ecrits en
toutes lettres et à la rédaction posée, ils permettent
d'éviter les compréhensions hasardeuses et les quiproquos.
sommaire
Liaison États-Unis-Russie
L'idée d'un lien de communication direct entre
les dirigeants des deux superpuissances est attribuée à
Thomas Schelling qui, en 1961, travaille sur le projet War by Accident,
Miscalculation and Surprise (« La guerre par accident, erreur
de calcul et surprise ») du département de la Défense
des États-Unis, mais Schelling pense plutôt que l'idée
s'est peu à peu répandue dans le gouvernement grâce
au roman populaire 120 minutes pour sauver le monde de Peter George,
sorti en 1958 (et qui inspirera le film de Stanley Kubrick sorti en
1964, Docteur Folamour ou : comment j'ai appris à ne plus m'en
faire et à aimer la bombe).
Le 20 mars 1960, Jess Gorkin du magazine Parade enthousiasme ses lecteurs
après avoir publié une lettre ouverte sur ce sujet au
président américain Dwight D. Eisenhower et au dirigeant
soviétique Nikita Khrouchtchev, parvenant même à
interpeller ce dernier lors de sa visite aux États-Unis. Évoquant
un « téléphone blanc », Khrouchtchev est d'ailleurs
favorable à l'idée d'un lien direct et en fait ouvertement
la promotion lors d'une discussion avec le ministre japonais de la Pêche
en mai 1962, quelques mois avant la crise des missiles de Cuba.
Par la suite, l'idée d'un « téléphone
rouge » entre les deux pays végète mais, après
la crise des missiles de Cuba en 1962 qui mène le monde au bord
d'une possible guerre mondiale, la proposition est officiellement envisagée.
Durant cette crise, les communications entre Khrouchtchev et le président
Kennedy mettent plus de six heures à arriver au destinataire
par voie diplomatique, illustrant ainsi la question finale de la lettre
ouverte de Gorkin publiée deux ans plus tôt : Must a world
be lost for want of a telephone call ? (« Un monde doit-il être
perdu faute d'un appel téléphonique ? »).
Le 20 juin 1963, le « protocole d'accord entre
les États-Unis d'Amérique et l'Union des républiques
socialistes soviétiques concernant l'établissement d'une
liaison de communication directe » est signé à Genève.

Salle avec léquipement hotline dans l'aile Est de la Maison-Blanche,
avec deux téléimprimeurs occidentaux et deux en cyrillique
(en clair), ainsi que quatre machines de chiffrement ETCRRM II.
Première génération
La première génération du système de liaison
par communication directe entre les deux pays ne transmet pas la voix,
car on estime que les communications verbales spontanées peuvent
mener à de mauvaises interprétations. Il transmet des
messages à la vitesse de 50 bauds ou 66 mots par minute via une
ligne télégraphique duplex.
En 1967, Lyndon B. Johnson est devenu le premier président à
utiliser le système lorsqu'il a négocié avec le
dirigeant soviétique Alexei Kosygin pendant la guerre des Six
jours, un bref conflit entre Israël et plusieurs États arabes.
Richard Nixon l'a utilisé plus tard à des fins similaires
pendant la guerre indo-pakistanaise de 1971 et la guerre du Yom Kippour
en 1973, et Jimmy Carter a sauté sur la hotline pour s'opposer
à l'invasion soviétique de l'Afghanistan en 1979.
Les dernières utilisations de crise de la hotline sont survenues
pendant l'administration Reagan et les derniers jours de la guerre froide,
mais elle existe encore à ce jour.
Pour s'assurer que le système fonctionnera en cas d'urgence,
les techniciens russes et américains continuent de s'envoyer
des messages de test une fois par heure.
La ligne suit le trajet Washington Londres Copenhague
Stockholm Helsinki Moscou. Au départ, la
liaison Washington Londres transite par le câble TAT-1,
le premier câble téléphonique transatlantique. Il
existe aussi une liaison radio secondaire, Washington Tanger
Moscou, utilisée pour les communications de service et
la coordination des opérations entre les deux points terminaux,
mais aussi comme liaison alternative en cas de coupure de la liaison
filaire.
Le chef d'État émetteur formule son message dans sa propre
langue, puis celui-ci est traduit par le destinataire avant d'être
transmis au chef d'État concerné, avec le message original.
Aux États-Unis, le terminal est situé au National Military
Command Center (en) au Pentagone. Selon Léonid Brejnev, le terminal
soviétique est géré par des civils au quartier
général du parti communiste.
Seconde génération
En 1971, alors que de nouvelles technologies sont désormais
disponibles, les deux camps décident d'améliorer le système
car l'URSS craint qu'une guerre nucléaire puisse être déclenchée
sur un malentendu causé délibérément par
la Chine.
La première ligne télégraphique est complétée
par deux liaisons radio par satellite, l'une composée de satellites
américains Intelsat et l'autre de satellites soviétiques
Molniya II. La mise à niveau du système dure de 1971 à
1978 et, à cette occasion, la liaison radio Washington
Tanger Moscou est fermée.
Plusieurs terminaux sont ajoutés des deux côtés
; les Américains en installent deux supplémentaires, dont
un situé à la Maison-Blanche qui a la capacité
de neutraliser et de verrouiller les deux autres.
Troisième génération
Le système est modernisé en 1984. LUnion soviétique
utilise alors des satellites géostationnaires de type Gorizont
de la flotte Statsionar (en) pour remplacer les satellites Molniya II9.
Par ailleurs, des fonctionnalités de fax à haute vitesse
sont ajoutées. Ceci permet aux chefs d'État des deux pays
d'échanger rapidement des documents et autres données
à la vitesse de 4,8 kbit/s.
Quatrième génération
Le 1er janvier 2008, une liaison par fibre optique est mise en service,
permettant ainsi des transmissions vocales et l'échange de messages
par courriel10.
Sécurité des communications La ligne de communication
est sécurisée grâce au principe du masque jetable,
à l'aide de machines de chiffrement dites Electronic Teleprinter
Cryptographic Regenerative Repeater Mixer (ETCRRM) fabriquées
en Norvège.
Les Soviétiques fournissent leurs clés de chiffrement
à l'ambassade des États-Unis à Moscou et les Américains
à l'ambassade de l'URSS à Washington5. Les clés
sont changées à chaque communication et détruites
lorsque celle-ci est terminée.
La technique du masque jetable est utilisée pour plusieurs raisons
: cest le seul chiffrement qui est théoriquement inviolable
si plusieurs conditions sont respectées et les valises diplomatiques
sont une solution pratique pour un échange sécurisé
des clés aléatoires. De plus, le principe de masque jetable
était souvent utilisé par lURSS et ses agents11.
Le masque jetable, système très simple et connu depuis
1917, évitait davoir à divulguer le fonctionnement
dun algorithme secret de chiffrement à une tierce partie.
Les États ont toujours jalousement gardé secrets les rouages
de leurs algorithmes, même si cette pratique est potentiellement
risquée (principe de Kerckhoffs).
Divers
Le 30 août 1963, afin de tester la liaison les États-Unis
envoient un premier message qui contient toutes les lettres de l'alphabet
latin : The quick brown fox jumped over the lazy dog's back 1234567890
(« Le renard brun rapide a sauté par-dessus le dos du chien
paresseux 1234567890 »). Les soviétiques envoient une description
poétique du soleil couchant sur Moscou ; dès lors, la
liaison est testée toutes les heures par l'expédition
d'un message quelconque, pourvu qu'il ne contienne pas d'insinuations
risquant un incident diplomatique. Moscou envoie des passages littéraires
et Washington des extraits de l'Encyclopædia Britannica. Les Soviétiques
émettent aux heures impaires, les Américains aux heures
paires ; les deux côtés échangeant des vux
pour le nouvel an ainsi que tous les 30 août.
Le câble fut sectionné par un agriculteur finlandais labourant
son champ, un chalutier de pêche ou encore par un bulldozer à
Copenhague.
Durant les négociations des traités Salt
sur la limitation des armements stratégiques (Salt II), le président
Jimmy Carter envoie des messages personnels à Léonid Brejnev
mais reçoit en réponse des messages qui semblent provenir
d'une obscure bureaucratie plutôt que du dirigeant soviétique
en personne. Le président américain utilise alors le «
téléphone rouge » pour se faire entendre mais, la
ligne ne devant être utilisée que dans un contexte de crise,
les Soviétiques répondent « s'il vous plaît,
ne faites plus jamais ça ! ».
Durant les essais de la liaison de seconde génération,
les échanges (par un canal de service) entre les techniciens
des deux pays, habituellement polis et sobres, prennent à partir
de la fin de 1975, une tournure plus joviale qu'à l'accoutumée
: les Soviétiques débutent souvent les essais par «
bonjour chers estimés collègues » et félicitent
les Américains lors des jours de fêtes comme le 4 juillet,
ces derniers félicitant leurs homologues russes à l'occasion
de dates d'anniversaire comme par exemple celle du lancement de Spoutnik.
Le 21 novembre 2024, la Russie bombarde lusine
aéronautique ukrainienne Pivdenmach, située dans le centre
de Dnipro, à l'aide d'un missile balistique à moyenne
portée (CF. RS-26 Rubezh) équipé pour l'occasion
d'explosifs classiques, mais qui est en mesure de porter des têtes
nucléaires. Il s'agit de la première utilisation historique
d'un tel type de missile dans un conflit. Le Département de la
Défense des États-Unis a annoncé avoir été
informé par Moscou peu avant le lancement du missile via «
les canaux de réduction du risque nucléaire », 30
minutes avant son tir, selon le porte-parole du Kremlin.
sommaire
Liaisons Inde-Pakistan
En 2004, l'Inde et le Pakistan reprennent le principe
du « téléphone rouge » en mettant en place
une liaison directe entre leurs ministères des Affaires étrangères
respectifs, en vue d'éviter un conflit. Ces deux pays, dotés
chacun de la puissance nucléaire sont en état de tension
sur le Cachemire depuis les années 1940.
En 2011, les deux pays mettent en place une autre liaison directe, cette
fois entre les ministères de l'Intérieur, dans le but
de « contrer les menaces terroristes ».
Liaisons Chine-Russie
Une ligne téléphonique est mise en place
entre la Chine et l'URSS dans le cadre du pacte sino-soviétique,
mais alors que le conflit entre les deux pays est sur le point de dégénérer,
Alexis Kossyguine tente de joindre directement Mao Zedong le 21 mars
1969, sans succès : l'opérateur chinois refuse de transférer
l'appel, qualifiant Kossyguine d'« élément révisionniste
». Peu après, les autorités chinoises déclarent
qu'étant donné l'état de leur relation, «
une ligne téléphonique directe n'était plus avantageuse
».
Le 3 mai 1998, une liaison directe est ouverte entre le président
russe et chinois, suivi en mars 2008 par un lien téléphonique
entre les ministères de la Défense des deux États
dans le but de « renforcer leur coopération bilatérale
».
Liaisons Chine-États-Unis
Lors d'une réunion secrète tenue en novembre
1973 à Pékin, Henry Kissinger alors secrétaire
d'État, propose au Premier ministre chinois Zhou Enlai la mise
en place d'une ligne directe entre leurs deux pays, mais la Chine refuse.
Dans les années 1990, en échange d'un vote d'abstention
lors d'une résolution du Conseil de sécurité des
Nations unies sur l'Irak, les États-Unis s'engagent à
aider la Chine qui cherche à améliorer son image et ses
relations après la répression sanglante des manifestations
de la place Tian'anmen. Dans ce contexte, des discussions s'ouvrent
pour l'établissement d'une ligne directe entre les deux États.
Après un report dû à l'annonce de la réouverture
de la liaison entre la Chine et la Russie, les discussions reprennent
et en 1998 un accord portant sur la création d'une ligne directe
de communication est signé entre Madeleine Albright et Tang Jiaxuan,
contribuant ainsi à élever la Chine au rang de superpuissance.
Le 5 novembre 2007, la Chine et les États-Unis conviennent de
linstallation dun « téléphone rouge
» commun entre les autorités militaires, à loccasion
de la visite en Chine du secrétaire à la Défense
américain, Robert Gates.
Une autre ligne est installée en 2015 pour échanger des
informations sur leurs activités dans l'espace, et ainsi éviter
les malentendus qui pourraient déboucher sur une crise.
Liaisons Corée du Nord-Corée du Sud
Une ligne téléphonique est ouverte en
septembre 1971 à Panmunjeom afin de permettre les communications
de la Croix-Rouge de part et d'autre de la zone démilitarisée.
Le 4 juin 1972, les deux pays annoncent leur intention d'ouvrir plusieurs
autres lignes ; ainsi, un total de trente-trois liens de communications
sont mis en service : cinq pour les communications quotidiennes, vingt
et un pour les négociations inter coréennes, deux pour
le trafic aérien, deux pour les questions maritimes et trois
concernent la coopération économique.
La ligne de Panmunjeom est testée quotidiennement en semaine
mais au gré des tensions entre les deux pays, la Corée
du Nord cesse parfois de répondre aux appels. Ainsi, le 3 janvier
2018, elle répond finalement aux appels du Sud après presque
deux ans de silence.
Le 20 avril 2018, la Corée du Nord et la Corée du Sud
décident linstallation dun « téléphone
rouge » commun. Cette ligne relie la Maison bleue, la présidence
sud-coréenne à Séoul et le bureau à Pyongyang
de la Commission nord-coréenne des Affaires d'État, présidée
par le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un.
Autres liaisons
Plusieurs liaisons entre des capitales européennes
et Moscou sont établies, plus pour des questions liées
au prestige, à la politique ou à la diplomatie que pour
répondre à un impératif de sécurité.
Ainsi, en 1966, la France et l'URSS décident d'installer une
liaison Télex entre le palais de l'Élysée et le
Kremlin ; liaison qui est améliorée à la fin des
années 1980 grâce au télécopieur haute vitesse,
une technologie également utilisée pour le lien direct
mis en service entre Bonn et Moscou en 1989. La ligne entre les autorités
britanniques et russes, que les premiers souhaitent depuis 1963 est
enfin réalisée en 1992.
En 1945, un téléphone rouge (littéralement) fabriqué
par Siemens et utilisé par Adolf Hitler pour envoyer ses ordres
à la Wehrmacht est saisi dans le bunker du dictateur par les
troupes soviétiques qui en font cadeau à un officier britannique.
L'appareil est vendu aux enchères en 2017 pour la somme de 243
000 dollars.
Dans la salle des séances du Parlement de Galice,
le siège du président du gouvernement, au premier rang
de l'hémicycle, est équipé d'un téléphone
rouge. Utilisé par Fernando González Laxe, Manuel Fraga,
Emilio Pérez Touriño et Alberto Núñez Feijóo,
il est tombé en désuétude avec l'usage du smartphone
et des applications de messagerie instantanée.
sommaire
New York Times du 18 septembre 1988, Section 6, Page
58.
Il s'agit d'une version numérisée d'un article des archives
imprimées du Times, avant le début de la publication en
ligne en 1996.
Une version de cet article est parue dans l'édition imprimée
du 18 septembre 1988, section 6, page 58 de l'édition nationale,
sous le titre : Moscou tient toujours
À L'INTÉRIEUR D'UNE PIÈCE SANS
FENÊTRE au cur du Pentagone, un ensemble de machines de
cryptage/décryptage désuètes commence soudainement
à fonctionner. Le vrombissement incite un colonel de l'armée
aux cheveux gris à lever les yeux vers trois horloges numériques
surdimensionnées étiquetées « ZULU »
(heure moyenne de Greenwich) et, en russe, « WASHINGTON »
et « MOSCOU ». Il est 10 h 57, heure normale de l'Est. «
C'est l'appel d'Ivan qui arrive juste avant l'heure », dit le
colonel Donald L. Siebenaler. La ligne directe, la liaison électronique
24 heures sur 24 entre Washington et Moscou, est testée, comme
elle l'est chaque heure de chaque jour depuis son inauguration il y
a 25 ans.
Un sergent de l'armée tape rapidement une combinaison de touches
prescrite authentifiant que Washington est prêt à recevoir
le message test. Les secondes passent. Le curseur de l'ordinateur clignote
sans rien faire. Puis, sur ordre de Moscou, le téléscripteur
émet un clic-clac automatique du message décodé
en caractères cyrilliques. « Il s'agit de chasseurs et
de loups », remarque le colonel Siebenaler, un officier de renseignement
parlant couramment le russe.
Contrairement à la croyance populaire, la ligne directe, connue
officiellement par les Américains sous le nom de liaison de communication
directe Washington-Moscou (les Russes inversent les noms des capitales),
n'est pas un téléphone rouge au sommet du bureau ovale
du président. Il s'agit plutôt de deux systèmes
distincts, l'un par télétype, l'autre par télécopieur,
au Centre de commandement militaire national du Pentagone, dans ce qui
pourrait être pris pour la salle informatique d'un lycée
aisé. La différence est qu'ici, les messages entrants
portent toujours la classification de sécurité la plus
élevée : « Yeux seulement - Le Président
». L'opération de Moscou, bien que largement présumée
se dérouler au Kremlin, se déroule, comme l'a dit un jour
Leonid Brejnev à un groupe de journalistes américains
basés à Moscou, de l'autre côté de la Place
Rouge, au siège du Parti communiste ; elle est dirigée
par des civils.
Voici comment cela fonctionne. Dans les rares occasions
où un message officiel du gouvernement soviétique est
reçu, MOLINK (abréviation de Moscow-link) le traduit immédiatement
en anglais et envoie les textes russe et anglais par une ligne de fax
inexploitable à la salle de situation du sous-sol de la Maison
Blanche, qui est occupée 24 heures sur 24 par du personnel militaire.
Si le message devait suggérer une catastrophe imminente, comme
une frappe nucléaire accidentelle, l'équipe MOLINK appellerait
l'officier de permanence de la salle de situation et lui « résumerait
» les principaux éléments pour qu'il les transmette
rapidement au président ; ceci est rapidement suivi d'un message
méticuleusement traduit. Lorsqu'il n'est pas à la Maison
Blanche, le président peut être rapidement « connecté
» à MOLINK grâce à un équipement spécial
qui l'accompagne à tout moment.
Le nombre exact de fois où la ligne directe a
été utilisée est tenu secret, car seul le président
est autorisé à déclassifier de telles informations.
Mais certains exemples peuvent être extraits des mémoires
du président. La période la plus intense d'utilisation
a peut-être eu lieu pendant la guerre israélo-arabe des
Six Jours en 1967. Le tout premier message officiel jamais transmis
a été reçu à Washington le 5 juin. Juste
avant 8 heures du matin, comme le président Johnson l'a rappelé
dans ses mémoires, « The Vantage Point », le secrétaire
à la Défense Robert McNamara l'a appelé dans sa
chambre à la Maison Blanche et lui a annoncé : «
Monsieur le président, la ligne directe est en service. »
Après une frappe préventive israélienne contre
des pays arabes, le dirigeant soviétique Alexeï Kossyguine
a envoyé un message disant que les forces de son pays resteraient
en dehors du conflit en cours si les États-Unis acceptaient de
faire de même. Le président a accepté sans hésiter.
Quelques jours plus tard, après qu'un navire de communication
américain a été accidentellement torpillé
au large de la péninsule du Sinaï, une force opérationnelle
de porte-avions américaine s'est rendue dans la zone pour secourir
les survivants. Inquiet que l'Union soviétique puisse interpréter
les manuvres de la sixième flotte comme une intervention,
le président Johnson envoya un message expliquant l'action. Et
lorsqu'il apparut que les troupes israéliennes pourraient avancer
sur Damas, Johnson assura à Kossyguine qu'il faisait pression
sur les Israéliens pour un cessez-le-feu, et les Israéliens
s'arrêtèrent avant la capitale syrienne. Le secrétaire
McNamara déclara plus tard que la ligne directe s'était
avérée « très utile » pour empêcher
ce qui aurait pu devenir une confrontation directe entre les États-Unis
et l'Union soviétique.
La ligne directe fut également utilisée en 1971 pendant
la guerre indo-pakistanaise ; pendant la guerre israélo-arabe
de 1973, lorsque les États-Unis déclenchèrent une
alerte nucléaire ; en 1974, lorsque la Turquie envahit Chypre
; en 1979, lorsque l'Union soviétique envahit l'Afghanistan,
et à plusieurs reprises sous l'administration Reagan, lorsque
les Russes demandèrent des renseignements sur les événements
au Liban et que les États-Unis commentèrent la situation
en Pologne.
La ligne directe est également connue pour avoir été
utilisée dans des situations non critiques. Au cours des négociations
sur Salt II, lorsque les lettres personnelles du président Jimmy
Carter au secrétaire général Brejnev ont été
à plusieurs reprises répondues dans un style qui, selon
un conseiller à la sécurité des États-Unis,
« avait été écrit par le 14e sous-secrétaire
du ministère des Affaires étrangères », Zbigniew
Brzezinski, le conseiller à la sécurité nationale,
a recommandé au président d'envoyer ses communications
par la ligne directe. Cela a bien retenu l'attention de Brejnev, mais
un participant de la Maison Blanche se souvient que les Russes, qui
prennent l'utilisation de la ligne directe très au sérieux,
ont répondu par quelque chose du genre : « S'il vous plaît,
ne faites plus jamais ça ! »
LE PRÉSIDENT PEUT ÊTRE le seul à pouvoir décider
des communiqués officiels de la ligne directe, mais le personnel
de MOLINK assume la prodigieuse et monotone responsabilité de
tester continuellement l'équipement pour s'assurer que les lignes
fonctionnent correctement.
Cinq équipes militaires de deux personnes, chacune composée
d'un communicateur, d'un sous-officier capable de gérer les particularités
de l'équipement et d'un officier traducteur, assurent le service
de la ligne directe par roulement de huit heures. En plus de maintenir
leurs compétences linguistiques, les traducteurs doivent se tenir
au courant de la politique mondiale en lisant divers journaux et périodiques
et en participant régulièrement à des briefings
de renseignements.
Mais toutes les heures, sans faute, ils transmettent ou reçoivent
des messages de test. Ce n'est qu'au Nouvel An et le 30 août,
anniversaire de la ligne directe, que les deux équipes s'écartent
des messages de routine pour échanger des salutations.
De ce côté de la ligne directe, le chef de la branche MOLINK
est chargé d'accumuler de nouveaux messages de test. Les Américains
envoient parfois Shakespeare, les Russes Tchekhov. Les Américains
envoient également des passages de l'encyclopédie, Mark
Twain et même un manuel de premiers secours. Le plus important,
a souligné le colonel Siebanaler peu avant de céder son
poste de chef du MOLINK au colonel de l'armée Thomas C. O'Keefe,
est de « s'assurer qu'il n'y ait pas d'insinuations ». Un
passage concernant Winnie l'ourson se mettant la tête dans un
pot de miel pourrait, par exemple, être considéré
comme un affront aux Russes, dont le symbole national officieux est
l'ours.
PLUSIEURS PERSONNES ont été créditées de
l'idée d'un lien de communication direct entre les dirigeants
des deux superpuissances, notamment le professeur Thomas Schelling de
Harvard, un économiste politique et ancien stratège nucléaire
qui, en 1961, avait travaillé sur un projet d'étude du
ministère de la Défense intitulé « Guerre
par accident, erreur de calcul et surprise ». Mais Schelling dit
que ce n'est pas une question de savoir qui a eu l'idée en premier
mais plutôt une prise de conscience générale qu'un
moyen de communication aussi fondamentalement crucial n'existait pas.
Un tel oubli, dit Schelling, n'était pas rare à l'époque.
« C'était comme si Robert McNamara découvrait qu'il
n'y avait pas de serrure à combinaison sur les armes nucléaires.
» Il a failli tomber de sa chaise. »
Schelling attribue à la littérature populaire, notamment
au roman de Peter Bryant, Alerte rouge, paru en 1958, le mérite
d'avoir fait prendre conscience aux membres du gouvernement de cette
omission.
Alors que la proposition d'une liaison directe circulait au sein du
gouvernement, une formidable campagne avait déjà commencé
dans l'espace public pour faire adopter la mesure. Le principal chef
de file était Jess Gorkin, rédacteur en chef de Parade,
qui en 1960 publia dans son magazine une lettre ouverte au président
Dwight D. Eisenhower et au dirigeant soviétique Nikita Khrouchtchev,
concluant par ces mots : « Un monde doit-il être perdu faute
d'un appel téléphonique ? » Les lettres de lecteurs
enthousiastes affluèrent.
Se présentant comme un diplomate citoyen, Gorkin harcelait les
candidats à la présidence John Kennedy et Richard Nixon
pour qu'ils prennent son idée en considération. Lors d'une
réception donnée en l'honneur de Khrouchtchev lors d'une
visite aux États-Unis, Gorkin réussit à convaincre
le dirigeant soviétique de reconnaître le bien-fondé
de l'idée.
Mais il y avait de puissants opposants. Le Département d'État
et l'armée s'y opposèrent. Gorkin rapporta qu'ils n'appréciaient
pas l'idée que le président parle dans leur dos aux Russes.
Et le Kremlin refusa obstinément d'envisager toute mesure de
contrôle des armements des États-Unis en dehors d'un désarmement
général et complet.
La proposition de ligne directe resta lettre morte jusqu'à l'automne
1962, lorsque la crise des missiles cubains démontra de manière
spectaculaire le besoin urgent d'une liaison de communication directe.
Les messages entre Kennedy et Khrouchtchev prenaient plus de six heures
à être transmis par les canaux diplomatiques habituels,
de sorte que les deux gouvernements recoururent aux déclarations
publiques comme moyen de communication le plus rapide. L'Union soviétique
alla jusqu'à demander à l'un de ses conseillers d'ambassade,
Aleksandr Fomin, un officier du KGB, de remettre au correspondant de
la chaîne ABC John Scali plusieurs messages à transmettre
à la Maison Blanche.
Une fois la crise résolue, la proposition de ligne directe devint
une priorité immédiate et un accord fut signé à
Genève en juin 1963. Lorsque la ligne directe devint pleinement
opérationnelle le 30 août, le premier message de Washington,
« Le renard brun vif a sauté par-dessus le dos du chien
paresseux 1234567890 », n'était guère comparable
à la transmission initiale des Russes, une description poétique
du soleil couchant de Moscou. Depuis lors, des messages tests sont transmis
toutes les heures paires depuis Washington en anglais et toutes les
heures impaires depuis Moscou en russe.
La hot line a commencé à rattraper son
retard sur la technologie moderne en 1984, lorsque les deux pays ont
convenu de moderniser le système de transmission par télécopie.
Désormais, les cartes, les graphiques, les textes et les photographies
peuvent être envoyés presque instantanément.
La hot line est désormais composée de trois liaisons distinctes,
la redondance garantissant qu'un message sera toujours transmis. Un
satellite commercial américain, INTELSAT, et un satellite du
gouvernement soviétique transportent chacun une ligne de communication,
et le câble européen original de 1963 fournit le troisième
circuit. Chaque fois que des suggestions sont faites pour abandonner
le câble original, les Russes rechignent. Comme le décrit
un ancien spécialiste de la hot line : « Ils disent : "Ah,
non. C'est l'alliance, le lien qui nous unit." »
Si Ted Koppel parvient à réunir des responsables américains
et soviétiques lors d'une téléconférence
« Nightline » depuis leurs capitales respectives, beaucoup
se demandent pourquoi la hot line n'adopte pas une technique similaire.
Mais les hauts responsables militaires américains estiment que
si les dirigeants pouvaient se voir mutuellement pendant qu'ils parlent,
cela pourrait conduire à des malentendus, à des décisions
hâtives et à des échauffourées.
Les deux pays souhaitent néanmoins avoir davantage de lignes
directes entre eux. L'année dernière, les gouvernements
américain et soviétique ont convenu de créer des
centres de réduction des risques nucléaires. Désormais
opérationnels, ils sont gérés aux États-Unis
par des agents du service extérieur russophones et des spécialistes
des communications du département d'État. Ce lien parallèle,
appelé par certains « ligne chaude », fournit un
canal diplomatique de niveau inférieur 24 heures sur 24 pour
échanger des informations sur le contrôle des armements
non critiques - comme la notification des essais de missiles et la clarification
des points du traité.
Un autre concept en discussion est celui d'une liaison de communications
militaires conjointes. Une autre proposition consisterait à créer
des liens directs entre les deux chefs de gouvernement et leurs propres
ambassades dans les capitales de l'autre.
Sans surprise, la ligne directe a donné lieu à des mesures
similaires dans le monde entier. Le président français
a sa propre ligne avec les dirigeants soviétiques, tout comme
le Premier ministre britannique. Israël et l'Egypte ont une ligne
directe, tout comme la Corée du Nord et la Corée du Sud.
Les Japonais seraient en train de discuter de l'idée d'une série
de lignes directes dans le monde entier.
L'efficacité de cette ligne directe est considérée
par beaucoup comme l'un des grands succès de l'ère atomique,
car elle a permis à une succession de dirigeants américains
et soviétiques de désamorcer secrètement des situations
explosives imminentes. En termes de programmes de défense, c'est
une aubaine, puisqu'elle coûte actuellement environ 1 million
de dollars par an.
sommaire