Histoire du Minitel

Le réseau télématique




Peut être avez vous utlisé ce genre d'appareil ? Qu'est il devenu ?

A l’occasion des fêtes de fin d’année, vous aurez peut-être envie de revoir le film culte 3615 code Père Noël ». Ce film diffusé sur les écrans en 1990 accorde une large place à un objet désormais obsolète : le minitel. Le jeune héros du film, Thomas, y dialogue par minitel avec une personne inconnue qui prétend être le vrai Père Noël.
Le minitel est un terminal informatique donnant accès à des services variés préfigurant ceux du futur Internet. Il utilise une technologie de communication s’appuyant sur le réseau téléphonique, développée en France par le ministère des Postes et télécommunications. Exploité commercialement entre 1980 et 2012, le système a hissé la France au premier rang de la télématique mondiale, avant de céder la place au réseau Internet .

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Lorsqu’on parle du Minitel, on évoque souvent un vieil outil télématique exclusivement français, qui émerveillait les nations étrangères pendant la décennie des années quatre-vingt, mais qui est aujourd’hui condamné depuis l’apparition d’Internet.
Ringard, cher, infréquentable, inventé par des technocrates qui ont dépensé stupidement l’argent de l’état, franco-français, dépassé technologiquement, responsable du retard que la France a pris en matière d’accès à l’internet, à l’origine d’une honteuse libération des mœurs, machine à fric etc.
Nous avons tout entendu sur le Minitel et pas seulement de la bouche des dignes représentants des ligues de vertu. Quel paradoxe ! Tout le monde critique sans ménagement cette petite boîte mais tout le monde s’en est servi à cette époque.

Qui aurait imaginé lire que cet objet au design rustique avait été “ le premier système online qui avait fait de la France un pays envié par ses voisins ”, que le Minitel avait “ symbolisé la virilité technologique de la France des années 80 ”, qu’avec “ 17 millions d’utilisateurs en France, le Minitel apparaissait comme une incredible succes story ”.
Des phrases irréelles dans une presse plutôt habituée à décrier les excès d’un état français trop dirigiste, d’une économie pas assez libérale.

Le Minitel (pour « Médium interactif par numérisation d'information téléphonique ») est un type de terminal informatique destiné à la connexion au service français de Vidéotex baptisé Télétel, commercialement exploité en France entre 1980 et 2012.
Donnant accès à des services variés préfigurant ceux du futur Internet, et utilisant pour cela le réseau français Transpac qui lui-même préfigurait la future infrastructure de transmission d'Internet, il a hissé la France au premier plan de la télématique mondiale grâce au premier service au monde de fourniture gratuite ou payante d’informations télématiques. Il sera un succès considérable et restera longtemps populaire.

Par métonymie, le mot « Minitel » a fini par désigner l'ensemble du service Vidéotex en France ainsi que les éléments de réseau (concentrateurs, points d'accès) destinés à rendre ce service.

Cette technologie de communication a été créée par le ministère des Postes et Télécommunications et utilisée en France des années 1980 aux années 2000.

4 autres systèmes similaires ont été développés dans le monde :
-
Prestel en Grande-Bretagne,
- Bildschirmtext en RFA,
- Telidon au Canada,
- Captain au Japon.

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Dès septembre 1973, "Le Monde" estime que le « premier véritable terminal à domicile », dont certaines entreprises sont déjà équipées, sera un téléphone au cadran remplacé par un mini-clavier, pour communiquer avec un ordinateur, qui pourrait être expérimenté « d'ici deux ou trois ans » auprès des particuliers. Il souligne que le Japon comptait en 1972 plus de 130000 postes à clavier répartis entre Tokyo et Osaka, dont 60 % permettant d'accéder au réseau mis au point par le ministère des télécommunications pour consulter une bibliothèque d'une centaine de programmes scientifiques, mais que la concurrence des calculettes, déjà « baptisées bien souvent micro-ordinateurs » limite le nombre de consultations à 8000 appels par jour en moyenne.
Le Japon veut alors investir 3 milliards de yens dans un réseau de transmission par câble coaxial reliant 300 familles-test à un centre de télévision et d'informatique pour faire du télé-shopping, suivre des cours, lire leur journal, « réserver des places ou régler des factures ».

L'année 1972 a ainsi « marqué un tournant » considérent les professionnels français, car « cette fois, le coup d'envoi de la téléinformatique est donné », mais le principal problème est celui des programmes,
En France une expérimentation est prévue à L'Isle-d'Abeau. Plus généralement, une étude du BIPE évalue alors le marché français des terminaux, de tout type, à 600 millions de francs en 1975, prévoyant un sextuplement en cinq ans.

Les ingénieurs du Centre national d'études des télécommunications (CNET), qui ont depuis la fin des années 1950 développé des systèmes de transmission et de commutation téléphonique, puis dans les années 1960 réalisé des ordinateurs, contribuent dans les années 1970 à former une vision de la télématique du futur. Ils seront soutenus pour cela par les moyens financiers considérables investis dans le plan de rattrapage téléphonique des années 1970.
Dans ce cadre, le Centre commun d'études de télévision et télécommunications (CCETT), à Rennes puis à Cesson-Sévigné dans sa banlieue, à élaboré les spécifications du réseau Transpac puis, sous la direction de Bernard Marti, spécifié le Minitel qui utilisera Transpac via des points d'accès spécialisés.

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Rétrospectives

Dans la première moitié de la décennie 1970, avant même que ne soit envisagé le lancement d’un projet de télématique grand public, la Direction Générale des Télécommunications finalise le rattrapage téléphonique initié sous la présidence de Georges Pompidou et continué sous Valéry Giscard d’Estaing. En effet, depuis presque un siècle, la France est touchée par le mal du sous-équipement et du dysfonctionnement chronique en matière de téléphonie. Cette situation est devenue un sujet de plaisanterie récurrent et l’on n’hésite pas à dire que « la moitié desFrançais attend le téléphone, l’autre moitié, la tonalité » en continuant de rire au sketch de Fernand Reynaud, « le 22 à Asnières10 ».
Pour remédier à cette situation, la Direction Générale des Télécommunications entreprend avec Gérard Théry, son nouveau directeur général depuis 1974, un plan d’équipement en lignes téléphoniques sans précédent, le plan « Delta LP11 ».
Devant l’effort financier à consentir, la DGT qui jouit du monopole sur les lignes, pense également à l’après rattrapage téléphonique et aux moyens de rentabiliser ses investissements. C’est notamment du côté de ce qui ne s’appelle pas encore la télématique, mais la « téléinformatique », par contraction des termes français télécommunication et informatique - que peuvent émerger des solutions pour l’établissement de « nouveaux services » à forte valeur ajoutée.
La fin de la décennie 1970 est également le moment d’émergence d’un discours sur la modernité qui s’incarne dans le projet « d’informatisation de la société » que le rapport Nora-Minc met en mots.
Remis le 21 février 1978 au Président de la République Valéry Giscard d’Estaing, le célèbre rapport Nora-Minc est un point de départ commode et souvent repris pour dater le début de la « télématisation » de la société .
Commandé officiellement le 22 avril 1975, il s’agit alors de confier une réflexion générale sur les moyens de conduire « l’informatisation de la société » à Simon Nora, Inspecteur Général des finances et déjà auteur de plusieurs rapports remarqués, qui décide de s’adjoindre les services du jeune Alain Minc, tout juste sorti de l’Ena.
Si le contexte difficile de lancement du troisième Plan Calcul et l’annonce contestée de la fusion de la CII avec Honeywell-Bull jouent incontestablement un rôle dans la nécessité ressentie au plus niveau de l’Etat de justifier d’un cap industriel, ce sont plus globalement les évolutions de l’informatique qui poussent à cette floraison de réflexions socio-politiques dont le rapport Nora-Minc sera l’expression la plus médiatisée. L’entrée rapide de l’informatique dans les bureaux, les changements, les attentes, mais également les blocages qu’elle fait naître pendant les décennies 1960 et le début des années 1970 poussent à l’examen des implications de cette technologie qui ne semble pas connaître de limites à sa diffusion.
Pour Simon Nora et Alain Minc, la télématique est avant tout un enjeu politique du fait de sa nature d’outil informationnel : « la télématique, à la différence de l'électricité, ne véhicule pas un courant inerte, mais de l'information, c'est-à-dire du pouvoir » et « la maîtrise du réseau est donc un objectif essentiel. Ce qui veut dire qu'il doit être conçu dans un esprit de service public. »
La nécessité de trouver les moyens de poursuivre la croissance initiée par le rattrapage téléphonique et l’impératif de modernité constituent les deux éléments principaux du volontarisme qui donne naissance à la télématique française.
Si le volontarisme politique qui entoure le lancement du projet de télématique grand public assure ce dernier d’un soutien sans faille de la part du gouvernement, la partie n’est pas donnée pour gagnée entre 1978 et 1981. Cette courte période est celle des premières turbulences .

Rappel des principales dates

Le 22 avril 1975, lors du Conseil des Ministres restreint, la décision est prise de mandater une personnalité chargée de diriger une Commission qui propose au gouvernement les orientations souhaitables en matière de développement des applications de l'informatique dans notre pays.

Le 20 décembre 1976, M. le Président de la République - Valéry Giscard d'Estaing charge M. l'Inspecteur Général des Finances - Simon Nora de la rédaction d'un rapport concernant l'informatique dans la société française.

Le 20 janvier 1978, M. Simon Nora remet à M. le Président de la République le rapport cosigné avec M. l'Inspecteur des Finances - Alain Minc intitulé : L'informatisation de la Société ; rapport considéré comme fondateur en la matière.

Le 27 janvier 1978, est signé un accord à Rennes entre le British Post Office et la Deutsche Bundespost pour élaborer une norme commune qui soit compatible avec la norme Teletex (Franco-allemande) en cours d'élaboration.
Cet accord est ensuite dénoncé quelques semaines plus tard par la Grande-Bretagne, pour des raisons de politique intérieure, mais est dans la foulée reconnu et signé par 4 nouveaux pays, après certaines modifications.
Les 8 et 9 mai 1978, la première réunion du CCITT se tient à Genève. Il s'agit de la première réunion dont l'ordre du jour soit le Vidéotex. Les premières spécifications sont ainsi élaborées et six pays s'engagent dans l'aventure : France, Suisse, Suède, RFA, Autriche et Norvège. Le texte est publié à la fin 1978 : il s'agit de l'Avis S100 du CCITT.
Les 22 et 30 Novembre 1978 se tiennent deux Conseils des Ministres Restreints sur le développement des applications de l'informatique. Suite à l'avis Avis S100 du CCITT et grâce à l'implication motivée de M. le Directeur Général des Télécommunications - Gérard Théry depuis 1976, le gouvernement français décide le 30 novembre 1978 de lancer 2 expérimentations en matière de télématique :
Télétel 3V à Vélizy,
Annuaire Électronique en Ille-et-Vilaine.
Ces 2 expérimentations évolueront côte à côte.
Le 4 décembre 1978, la marque TELETEL est déposée par la Direction Générale des Télécommunications.
En Décembre 1978, Nomination de M. Philippe Leclercq comme chef du Projet Télétel 3 V - Vélizy. L'équipe du Projet est sise au 28, place Louvois, 78140 Vélizy.
Le 26 février 1979, M. le Directeur Général des Télécommunications - Gérard Théry en visite au salon Intelcom 79' à Dallas, officialise la Politique Télématique de la France appelée à être prochainement mise en œuvre.
Le 2 juin 1979, sont ouverts les chantiers sur le Télétel et l'Annuaire Électronique par M. le Directeur Général des Télécommunications - Gérard Théry.
L'équipe du Projet TELETEL qui se constitue est basée au 9/11, avenue Louis Bréguet à Vélizy.
En Juin 1979, la société Thomson-CSF est retenue par la Direction Générale des Télécommunications pour fournir les terminaux Télétel expérimentaux à Vélizy.
Le 9 août 1979, M. Le Directeur des Affaires Industrielles et Internationales - Jean Syrota annonce en conférence de presse l'arrivée prochaine de l'Annuaire Électronique.
Se tient ce jour la présentation officielle des futurs terminaux informatiques miniaturisés qui ne s'appellent pas encore Minitel mais Terminal Annuaire Électronique (TAE), au Centre d'Information sur les Techniques Avancées des Télécommunications (CITAT) au 38, rue du Général Leclerc à Issy-les-Moulineaux - dépendant de la Direction des Affaires Industrielles et Internationales. (Les modèles présentés sont des prototypes).
La norme d'affichage initiale retenue est du type alpha-mosaïque formée de caractères répartis sur une Grille-calque d'affichage 24 lignes horizontales sur 40 colonnes Norme Télétel.

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Avec les 7 millions de lignes qui sont créées entre 1974 et 1979, l'annuaire papier est obsolète avant d'être terminé. Cela crée également une forte augmentation du coût de production qui culmine à 120 millions de Francs en 1979. Entre 1979 et 1984, 7 autres millions de lignes sont prévues. Les évaluations du tonnage de papier nécessaire grimpent de 20 000 tonnes en 1979 à 100 000 tonnes en 198515.
En 1978, l’administration fait imprimer 16 millions d’annuaires qui coûtent 307 millions de francs et en rapportent 370 dont 67% reviennent à l’Office d’Annonces qui gère les annonces qui y sont insérées.
Cette débauche de moyens pour maintenir l’annuaire à jour, sa relative inefficacité pour trouver rapidement un numéro et l’impossibilité pour le tout-venant d’avoir accès aux numéros dans la France entière offrent un excellent prétexte à l’informatisation de ce service.
C’est sur cet argument qu’en 1979, la Direction Générale des Télécommunications lance sa campagne de communication autour de la télématique,
mouvement de modernisation qui commence par l’annuaire.

Le projet d'ensemble « Annuaire Électronique et Minitel » (1979-1985) a été supervisé par Jean-Paul Maury, directeur du projet).
D'après Bernard Marti, le nom « Minitel » serait l'abréviation de « Médium interactif par numérisation d'information téléphonique ».

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En 1978, la France décide de tirer parti de Transpac, son réseau de transmission de données, en lui ajoutant des points d'accès, via le réseau téléphonique, pour des terminaux peu onéreux, les Minitels.
Cette décision sera rendue publique par Gérard Théry, directeur de la DGT, à l'Intelcom 79 de Dallas (Texas) qui réunit le gratin mondial des télécommunications. Il y annonce avec une certaine emphase le déclin de l'ère du papier.

Prototypes de Terminal Annuaire Électronique (TAE) proposé par CIT-Alcatel en 1979. Et second prototype.

Prototypes de Terminal Annuaire Électronique (TAE) proposé par TRT - Philips. Et second prototype

Prototype de Terminal Annuaire Électronique (TAE) proposé par Thomson - CSF

Prototypes de Terminal Annuaire Électronique (TAE) proposé par Matra Communication

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À l'étranger, dans une ambiance d'émulation internationale, les ingénieurs américains, anglais ou allemands accompagnent les recherches des ingénieurs du Centre national d'études des télécommunications.
Ainsi en Europe d'autres systèmes sont étudiés, tous fondés sur la norme Vidéotex : Prestel (en), le Ceefax, le Bildschirmtext (de). Aux États-Unis est élaboré le système NAPLPS.

Conçu comme vecteur de vente à domicile, il met l'accent sur un affichage en couleurs de qualité photographique.
Mais la déception est sévère en raison du coût des composants et du faible débit des lignes de l'époque — surtout aux États-Unis : l'affichage de certaines pages pouvait prendre une durée de six minutes.
Le mélange de texte et graphiques, qui ne posait pas de problème avec les caractères semigraphiques de basse qualité du Minitel, n'était pas possible sans faire monter le coût de réalisation du terminal à des valeurs prohibitives en mémoire vive et en mémoire morte.

Alors qu'il est prévu de fabriquer 30 millions de Minitels, Valéry Giscard d’Estaing, devant le lobby de la presse qui voit un concurrent dans cette nouvelle technologie, se ravise et décide de lancer des expérimentations.

Durant cette période de turbulences, à l’incertitude de l’adhésion du public, aux coûts pharaoniques d’industrialisation, aux difficultés techniques à surmonter (conception technique qui repose alors sur la plus grande base de données accessible en temps réel au Monde, sur une architecture complexe, composée de points d’accès vidéotex, de centaines de modems, etc.) s’ajoute la fronde d’une partie de la presse régionale française qui voit dans la télématique une décision technocratique qui pourrait la couper des rentrées d’argent que représentent les petites annonces que l’on
imagine déjà en train de migrer sur le nouveau média.
A la tête de la contestation, François-Régis Hutin, le directeur de Ouest France, qui ouvre les hostilités en 1979 dans un article publié le 8 mai qui
commente la décision prise par la DGT de raccorder 30 millions de terminaux à l’orée 1990 au rythme de 3 millions par an. Expression d’un technocratisme qui confine à l’autocratisme, il s’agit de s’élever contre cette décision inique : « Quand des techniciens réfléchissent seuls à l’utilisation des techniques qu’ils ont l’intelligence de mettre au point, cela s’appelle la technocratie. »

En France, la phase d'expérimentation de Télétel et du Minitel commence en 1980 à travers plusieurs opérations sur le terrain.

En juillet 1980, à Saint-Malo, les 55 premiers utilisateurs de l'annuaire électronique sont équipés (20 entreprises et 35 particuliers). L'expérience de Saint-Malo s'achèvera en décembre 1982.
Les localités concernées par l'expérimentation Annuaire Électronique sont exactement les suivantes :

Cancale
Châteauneuf-d'Ille-et-Vilaine
Dinard
La Gouesnière
La Richardais
La Ville-ès-Nonais
Le Minihic-sur-Rance
Lillemer


Prototype de Terminal Annuaire Électronique (TAE) et un des premiers Terminaux Annuaire Électronique (MINITEL) utilisé par les 55 premiers utilisateurs de France, à Saint-Malo, en Juillet 1980.

Les premiers terminaux (que l’on appelle télétel), sont mis en place de façon expérimentale à Vélizy en 1981. Cette première expérience sert à tester la pertinence des services télématiques. Les 2 500 foyers concernés sont équipés d’un décodeur surnommé « chauffe-plat » permettant de consulter une vingtaine de services sur l’écran de leur téléviseur.

Pendant les trois années qui suivent, des études statistiques d’utilisation sont faites : Vélizy devient l’endroit de tests techniques et de services. Dans le même temps, le CNET et le CCETT élaborent la maquette du fichier informatisé de l’annuaire électronique. On trouve également les premières hostilités dans le monde de la presse (peur de l’apparition d’un nouveau concurrent) et de la politique (peur du coût de l’expérience).
Le 29 juillet 1980 est lancée une consultation par M. le Secrétaire d’État aux Postes et Télécommunications et à la Télédiffusion - Norbert Ségard destinée à équiper le département d’Ille-et-Vilaine, soit 300.000 foyers, de Terminaux Annuaires Électroniques.

Le 14 novembre 1980, se tient à l'Assemblée Nationale un débat sur la Télématique, lors du vote du budget des télécommunications. M. le Secrétaire d'État aux PTT - Pierre Ribes rend alors publiques les garanties et engagements pris par le gouvernement :
«Il apparaît que l'ensemble de la législation applicable à l'édition au sens large est transposable à l'expérience de Vélizy. Sont ainsi, en particulier, applicables de plein droit en loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse et de l'édition, celle du 21 juin 1943 sur le dépôt légal, l'ensemble des textes régissant la publicité, et la loi du 11 mars 1957 relative à la protection du droit d'auteur.
En outre, il est prévu d'insérer dans le cahier des charges que chaque prestataire de service devra signer avec mon administration responsable du projet, un ensemble de dispositions destinées à garantir le respect des droits de l'usager, à savoir : obligation de faire figurer en tête du service le nom et l'adresse du prestataire, et, le cas échéant, le prix du service proposé, confidentialité des informations sur les usagers recueillies par les prestataires de service.
Il convient que nous regardions ensemble comment, en pratique, s'applique cette législation déjà complexe, avant d'envisager de bâtir un nouveau cadre juridique qui ne pourrait certainement pas aujourd'hui être construit sur des bases solides.»

Le 8 décembre 1980, M. le Directeur Général des Télécommunications - Gérard Théry est l'invité de M. Jean-Louis Servan-Schreiber dans son émission télévisée Questionnaire, sur TF1, dans cet opus intitulé Du 22 à Asnières à la Télématique, où il vient exposer le futur de la télématique française et son déploiement à venir dans les foyers.
M. Théry présente en outre, pour TF1, les prototypes des Terminaux Annuaires Électroniques (MINITEL).
L'émission Questionnaire, émission comme l'on n'en fait plus, permettait à l'unique invité de pouvoir développer dans le calme son domaine d'expertise, guidé en cela par M. Servan-Schreiber muni de son questionnaire.

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Parallèlement, en 1981, 4 000 Minitels sont distribués en Ille-et-Vilaine. Il s'agit de tester ce nouveau service chargé de remplacer l'annuaire papier. Il devait aussi alors alléger le service traditionnel des renseignements, passablement saturé devant la croissance du parc téléphonique fin des années 1970. Il se justifiait aussi par l'efficacité d'un service de renseignements recouvrant l'ensemble des abonnés au téléphone en forte croissance.
Les publications des annuaires papier, constamment dépassées, créaient une forte demande sur les renseignements téléphoniques alors assurés par des fonctionnaires des PTT.

Le 1er janvier 1981, il est créé dans la ville de Rennes par Décision n°29 du 13 janvier 1981 - de M. le Secrétaire d’État aux Postes et Télécommunications et à la Télédiffusion - Pierre Ribes - la Sous-Direction Maintenance, Exploitation, Gestion, Assistance à la Télématique (MEGAT).
Cette sous-direction est déclarée responsable des centres de maintenance centralisée.
La Sous-Direction MEGAT est en outre chargée de participer aux expérimentations, d'assurer la maintenance de deuxième niveau des matériels et logiciels implantés dans le réseau.
La Sous-Direction MEGAT met au point les modes opératoires pour la maintenance de premier niveau et assure leur diffusion.

À l'automne 1980, 2 500 foyers volontaires de Versailles, Vélizy-Villacoublay, Jouy-en-Josas, Buc, Bièvres et Les Loges-en-Josas reçoivent un terminal Vidéotex. Du côté des services, près de 200 fournisseurs participent à l'expérience, se donnant ainsi l'occasion de tester ce nouveau moyen de communication auprès du public. Les services remportant la plus large adhésion seront les annuaires téléphoniques pages blanches et pages jaunes (services gratuits), la presse, la vente par correspondance, la SNCF, les banques ainsi que la messagerie.

Le 2 janvier 1981
, ouverture de la première tranche du Centre Informatique Télétel-Videotex de Vélizy (CITV), capable de traiter 300 appels simultanés, en mettant en relation les abonnés et les serveurs des sociétés ou des organismes proposant des services téléinformatiques (fonctionne alors à vide).

Première maquette de terminal Télétel datant de 1980 (pour l'expérimentation de Vélizy Télétel 3V).

Afin de désamorcer tout contentieux éventuel avec la Presse Quotidienne nationale et régionale face aux inquiétudes déontologiques, économiques et juridiques l'Administration des PTT organise une autre expérience incluant d'autres services (petites annonces, informations, messageries) qui se déroulera à Vélizy.
Si l'expérience de Vélizy reste un symbole dans le monde de la télématique, c'est que cette expérience est la source de la création de la formule « kiosque télématique » qui permet de répartir les revenus entre l'opérateur et les fournisseurs de services, notamment à travers le 3615.
En effet, si les éditeurs de presse ont progressivement compris l'intérêt de cette expérience, ils voulaient en tirer des revenus.
Conséquemment, d'après des discussions auxquelles participent notamment Mme Martine Tournier (le Parisien Libéré), M. Roger Lajus (Hachette Filippacchi), les hommes de la DGT ont l'idée d'utiliser le système de surtaxation utilisé pour le réveil téléphoné.
Cela donne lieu, en février 1984, à la création du kiosque mis en priorité et en exclusivité à la disposition de la presse.


À Vélizy, le premier terminal n'a pas d'écran et se glisse sous le téléviseur : simple décodeur, il permet de consulter une vingtaine de services sur l’écran du téléviseur. La télécommande est élémentaire : juste un clavier alphanumérique en majuscules.
Un groupe d'utilisateurs passionnés fonde l'AATEL (Association des abonnés à TéléTEL), qui devient une véritable interface entre les testeurs et la DGT - DACT (Direction générale des télécommunications - Direction des affaires commerciales et télématiques) qui dirige le projet.
De leur côté, les entreprises offrant des services pour Minitels créent l'AFTEL (Association française des fournisseurs de services télématiques). L'accès à leurs serveurs se font via le réseau Transpac par le numéro d'accès 612 34 56.
Centre Informatique Teletel-Videotex de Vélizy

Le 26 mars 1981, marque le démarrage des tests techniques de l'expérience Télétel 3V avec 100 premiers utilisateurs triés sur le volet parmi les 2.500 ménages volontaires.

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Le 1er avril 1981, le premier marché de fabrication en grande série de 300.000 MINITEL est remporté par le constructeur Telic-Alcatel.

Le 9 avril 1981, le nom de marque MINITEL est déposé par la Direction Générale des Télécommunications

En Mai 1981, la Conférence Européenne des Postes et Télécommunications adopte une norme commune Vidéotex pour harmoniser les systèmes en cours de développement en France, en Grande-Bretagne et en RFA.

En Mai 1981
, 1.400 abonnés volontaires de la Région des Télécommunications de Rennes sont équipés de l'Annuaire Électronique dans les 5 villes suivantes : Rennes, Vitré, Betton, Montfort et Retiers.
La toute première messagerie, uniquement par boîtes aux lettres, est baptisée M3V. On peut y échanger des messages privés, ou par l'intermédiaire de groupes de discussion thématiques. À l'époque, la DACT et les fournisseurs de services pensent qu'il ne s'agit que d'un gadget ludique : pour eux l'avenir de la télématique réside dans l'information, et non la communication. Il est même question de supprimer cette messagerie.
Mais l'AATEL se bat pour la conserver et démontrer qu'elle est une motivation primordiale des utilisateurs, ce que confirmera le développement de la télématique grand public en France.

Le 15 juin 1981 débute l'ouverture complète de l'expérimentation de Télétel 3V (3V pour Vélizy, Versailles et Val-de-Bièvre) auprès des 2.500 ménages retenus.

En 1981, l’annonce d’une loi-cadre pour sauver la liberté de la presse face à la télématique adoucit les positions. Une franchise particulière sur la presse électronique et une commission paritaire de contrôle sont demandées et obtenues. La demande est approuvée par le syndicat de la presse industrielle. « Il est essentiel que la télématique ne vienne pas saper les bases économiques du pluralisme de la presse écrite qui constituent les garanties d'une démocratie vivante », déclare Valéry Giscard d’Estaing au Journal de la presse le 8 avril 1981. Véritablement rassurée ou satisfaite de son coup de poker réussi contre les télécommunications, la presse contestataire peut, en ce début d’année 1981, se considérer à juste titre comme un acteur important du secteur de la télématique en construction.
Principal symptôme de ce Yalta télématique, la nécessité de détenir un numéro de commission paritaire pour ouvrir une messagerie, ce qui fera émerger en 1984-1987 nombre de services « roses » très rentables pour la presse20 qui ne trouvera plus rien à redire

À l'hiver 1981, les Dernières Nouvelles d'Alsace lancent le service expérimental Gretel sur un quartier pilote à Strasbourg.
Gretel est né de l’initiative d’une association de quartier strasbourgeoise, l’ARES (Association des résidents de l’Esplanade), avec l’active collaboration du journal les Dernières Nouvelles d’Alsace. Initiée en 1981, l’expérience Gretel avait atteint dès la fin de l’année 1983 une notoriété au niveau national.
L'expérience débute avec 80 foyers, puis est progressivement étendue.
Les premiers services proposés sont des consultations des actualités, des programmes de télévision et de cinéma, et de la météo, ainsi que quelques jeux. On trouve aussi un service de messagerie électronique de type courriel avec une notion de boîtes aux lettres.
Le 4 janvier 1985, Mariella Righini expose "la fièvre du Minitel" qui a saisi Strasbourg : le Gretel (Groupement régional de télématique) propose plusieurs services en ligne, comme un journal électronique avec le quotidien "Les Dernières Nouvelles d'Alsace". Pour dépanner les usagers en difficulté, un logiciel de communication a été mis au point.
Pour encourager le développement de ce nouveau service, les terminaux sont distribués gratuitement aux abonnés.

"De jeunes pirates découvrent ce trésor de la communication et le détournent à leur usage et profit. Le temps que les logiciels s'en aperçoivent, les clandestins du Gretel se sont démultipliés comme des bretzels.
Trop tard pour sévir. Alors que partout ailleurs on peut écrire 'ennui' sur le centimètre de poussière qui recouvre ces machines inoffensives, à Strasbourg on se les arrache.[...] On se connecte des heures et des heures, de jour comme de nuit, jusqu'à saturation des lignes téléphoniques d'accès à l'ordinateur. [...] On minitèle à table, au lit, à la cuisine, aux toilettes. Infernale passion, cocktail de scandale et de technologie, qui a mis toute une ville sens dessus dessous... Au cours des années suivantes, on assiste à l’ouverture d’une multitude de services télématiques, d’initiative publique ou privée. L’Agence culturelle technique d’Alsace (ACTA) dispose d’un service accessible via le code 3615 Gretel Acta.
Le CRRIP d’Alsace (Centre régional de ressources et d'initiatives pédagogiques) négocie avec son homologue lorrain et fait héberger sa base de données sur un serveur situé à Nancy. Le service 3614 CRRIP réservé aux professionnels de la formation est ouvert le 1er janvier 1991, suivi le 21 juin 1993 par le service 3616 CRRIP, destiné au grand public.
De son côté, la Région Lorraine soutient la création de services télématiques dans différents domaines: 3615 CLOTAIR (Centre Lorrain de Télématique Agricole et d'Information Rurale), 3615 ECLOR (Economie et Culture en Lorraine)…

Le 8 décembre 1981, inauguration de l'expérimentation télématique CITITEL, d'une durée d'un an, par M. le Ministre des PTT - Louis Mexandeau. En collaboration entre les PTT et les professionnels des secteurs du tourisme, de la restauration, de l'hôtellerie, de la presse généraliste et spécialisée, l'expérience consiste à installer dans les grands hôtels parisiens et les offices de tourisme une centaine de terminaux Télétel dans un circuit fermé, accessible à la clientèle. Sont disponibles 4.500 pages d'informations réparties en 5 rubriques :
- tourisme,
- loisirs,
- affaires,
- renseignements utiles,
- journal.

Mais ce qui fait exploser le succès de l'expérience est le lancement en 1982 du premier service de messagerie instantanée, principe découvert à la suite d'un piratage. Ce nouveau service représente très rapidement jusque 85 % du trafic.
L'ancêtre des messageries instantanées et de l'internet social est alors né.
C'est ainsi qu'apparaissent des services créés par de jeunes entrepreneurs comme Thierry Roze et Xavier Niel.

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Lancement

C'est seulement fin 1982 qu'apparaît le premier Minitel. L'expérience sera définitivement arrêtée au printemps 1984.

La réalisation du Minitel ayant été confiée à trois industriels différents (Matra, Radiotechnique (Philips) et Télic-Alcatel), le prix de série put être négocié au plus bas en tenant compte d'une hypothétique, mais probable, baisse future des prix de revient par l'évolution technologique et l'accroissement des quantités produites (courbe d'apprentissage) par les fournisseurs.

Le programme Télétel (nom du réseau des terminaux appelés Minitel) est reconnu dans le monde entier comme le premier réseau télématique grand public et comme un succès commercial.
Les services sont facturés en fonction de la durée des communications, indépendamment des distances entre utilisateur et serveur.

Le 11 février 1982, l'ouverture en présence de M. le Ministre des PTT - Louis Mexandeau, de l'expérimentation Telem'Nantes, dans la ville de Nantes.
Le décision initiale de l'expérimentation est prise par la Mairie de Nantes en Juin 1980.
Initialement, il s'agit d'un système fermé, non relié au réseau téléphonique public.
Au départ, 14 terminaux à la norme Videotex sont installés dans les lieux publics de Nantes.
N'importe quel visiteur peut se connecter à Telem' Nantes à partir d'un terminal Minitel disponible.
Dès Septembre 1982 le parc de terminaux est porté à 27 unités.

Le 28 mai 1982, la Direction Générale des Télécommunications annonce en conférence de presse que l'ouverture du Réseau Télétel national du Videotex sera mis en service au mois d'Octobre 1982. Sont annoncées les conditions tarifaires suivantes :
Dans les départements où l'Administration propose dès cette date l'Annuaire Électronique, la mise à disposition du terminal Minitel serait gratuite.
La recherche d'un numéro de téléphone dans son propre département serait gratuite.
La recherche d'un numéro de téléphone dans un autre département serait facturée 2 Taxes de Base (soit 1,10 franc).
Dans les départements et régions où l'Annuaire Électronique n'est pas encore mis en service, le Terminal Minitel serait proposé à la location pour 70 francs par mois.
En réalité, il faut se reporter aux Arrêtés Ministériels ultérieurs pour le détail qui ne sera pas tout à fait ce qui est annoncé.
Le 30 août 1982, l'Arrêté Ministériel publié au Journal Officiel du 16 septembre 1982 confirme seulement que le Terminal Minitel est loué 70 francs par mois. Il s'agit du premier arrêté qui commence à réglementer le Télétel, et spécifiquement le Terminal.
Le trafic de données n'est pas encore concerné, il reste donc gratuit.

Le 1er octobre 1982, le service Télétel Professionnel (Télétel 1) est ouvert dans toute la France métropolitaine (avec des moyens techniques restant à étendre en masse).
schématisation très simplifiée du Réseau Télétel.

En 1983, et après de complexes négociations, est lancée une deuxième expérience en Ile-et-Vilaine, avec l’offre du service d’annuaire électronique, système souple et fiable qui sera généralisé par la suite sur tout le territoire. La presse devient de plus en plus favorable, voyant dans le Minitel un support de diffusion, et les Français se penchent avec curiosité vers la télématique.

Le 4 février 1983, l'Annuaire Électronique est inauguré par M. le Ministre des PTT - Louis Mexandeau dans les futurs locaux du CCETT de Rennes-Atalante dont il inaugurera dans la foulée le bâtiment déjà livré où se déroule la cérémonie et les démonstrations. À cette date, l'Annuaire Électronique est généralisé dans tout le département d'Ille-et-Vilaine et dans toute la région Bretagne.

La plateforme CTA devient accessible par les numéros 311.11.11 et/ou 311.21.11 en Île-de-France à partir du 15 février 1983. (pour la province : information non trouvée. Besoin d'annuaires de province de 1982, 83 et 84 - pages bleues).

Le 1er novembre 1983, le réseau télématique municipal de Nantes devient consultable par Minitel par n'importe quel abonné au téléphone. 10.000 pages écrans sont emmagasinées en mémoire.
Le serveur fermera le 14 novembre 2005 victime d'internet.

C'est en Décembre 1983 que paraît la première édition de l'Annuaire Officiel des Services Télétel, chargé de répertorier tous les services disponibles par le Minitel.
Le 3 novembre 1983, les 3 premières agences à distribuer en Île-de-France des Minitel, au titre de l'Annuaire Électronique sont Paris-Turbigo, Évry et Boulogne-Billancourt.

Au 31 décembre 1983, la France compte un peu plus de 100.000 terminaux Minitel en service, pour 400 services télématiques ouverts au public. Les régions officiellement ouvertes sont alors : Bretagne, Picardie, Île-de-France.
L a décision est prise d’offrir le terminal gratuitement, car France Télécom voit difficilement le public acheter un matériel sans savoir exactement quels services y sont disponibles. Ce choix, unique en Europe, aura un rôle primordial dans le décollage des usages du Minitel en France. Entre 1983 et 1984, le nombre de terminaux s’accroît jusqu’à 531 000. Cependant les systèmes tarifaires ne sont pas encore bien mis au point. On essaye de combiner de façons multiples gratuité et abonnement à différents services, sans grands succès.
D’après la courbe d’évolution du nombre de terminaux, le vrai démarrage se produit entre 1984 et 1985, soit une progression de 146 %. Cela correspond à deux facteurs clés.
Le premier facteur est la naissance au cours de l’année 1984 du système « kiosque », méthode de facturation des services Minitel sur la durée de consultation et non sur la distance. C’est un système simple et compréhensible. Mais pour pouvoir vraiment démarrer, les services disponibles doivent être séduisants et de qualité, car les utilisateurs payants sont plus exigeants que ceux de l’expérience pilote gratuite de Vélizy. Un deuxième facteur joue donc un rôle important : c’est l’ouverture du 3615. À partir de ce moment se multiplie à grande vitesse le nombre de services (messagerie, jeux, services professionnels…) : 145 services en janvier 1984, 2 074 en janvier 1986, près de 5 000 en 1987. ! C’est l’explosion du marché

Le 31 janvier 1984, un Arrêté Ministériel paru au Journal Officiel le 24 février 1984 précise désormais que pour les zones ouvertes à l'Annuaire Électronique, le Terminal Minitel 1 sera mis à disposition des abonnés qui le désirent sans supplément d'abonnement, (ce qui revient de facto à un prêt de Terminal Minitel à titre gratuit).
Le 31 janvier 1984, un Arrêté Ministériel paru au Journal Officiel le 24 février 1984 autorise la commercialisation du Minitel 10, produit par Alcatel.

Appareil intégrant un téléphone complet, un répertoire mémoire de 51 numéros. Ce téléphone est relié à l'écran par un câble. La partie Téléphone s'inspire du modèle Fidelio. Le Minitel 10 constitue dès lors le terminal Minitel haut de gamme. Loué 120 francs par mois en 1984, puis 60 francs par mois à partir de 1985 (car ne trouvait pas son public à 120 francs).
Au mois d'Avril 1988, le Minitel 10 évolue et devient Minitel 10 Bistandard, qui fonctionne, en plus du mode Télétel, en Mode Téléinformatique ASCII pour permettre un accès aux banques de données professionnelles. Loué 85 francs par mois en zone ouverte à l'Annuaire Électronique, ou 143 francs HT en zone non ouverte.

L’information est également un secteur porteur dans le domaine télématique.
Après la période de la contestation, les journaux entrent dans la phase de la collaboration en proposant services et informations.
Les chaines de télévision vont également se saisir de cette opportunité de compléter leur offre médiatique en investissant aussi la télématique.
Quatre chaines disposent dès 1986 d’un service Minitel : TF1, A2, FR3 et TV6.
La culture et en particulier les musées sont aussi parmi les premiers fournisseurs d’informations, des bases de données muséales comme le 3615 Joconde, du 3615 Louvre qui permet de se faire adresser par courrier le programme du musée, des services qui recensent les offres de concerts ou de théâtre.
Les services de consultation d’horaires ou encore de réservations sont également parmi les services les plus plébiscités.
Ainsi, la SNCF s’est associée à l’expérimentation Télétel 3V en proposant aux 2500 foyers équipés de la mi 1981 à la mi 1982 plusieurs services : informations générales sur les services offerts, horaires des trains grandes lignes et réservation des places assises et couchées.
Les services bancaires trouvent également leur public sur Minitel. De nombreuses banques développent leur offre grâce à laquelle les clients peuvent
contrôler leurs comptes, faire des virements ou jouer en bourse. La Banque de la Cité offre à sa clientèle privée le premier service de banque à domicile en 1985. Pour la première fois, les clients reçoivent non seulement le relevé de compte mais également un historique des soldes mémorisés sur six mois par voie électronique. Le service offre également la possibilité d’entrer en contact avec son établissement bancaire pour
commander un chéquier ou fixer un rendez-vous avec son conseiller .

Les messageries professionnelles, les informations économiques, financières et boursières, les services tournés vers le social, l’emploi et la formation, les informations marketing et commerciales attirent également les organisations vers le Minitel, dont la consultation est facilitée par la mise en place de passerelles directes entre les différents services télématiques et des tarifications différentes, favorisant la multi-consultation sans déconnexion, grâce à des systèmes de reroutage introduits dans le système Télétel.
Il faudrait encore évoquer le développement d’usages plus ludiques, éducatifs pour compléter ce tour d’une ronde des services, qui ne doit pas non plus omettrel’importance du 3618 ou « Minitel Dialogue » à destination des sourds, exemple de lutte précoce contre une fracture numérique qui n’est pas que géographique
.

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Mode d'accès à l'Annuaire Électronique en 1984 :
Dans les zones officiellement ouvertes, la plateforme CTA devient accessible par le 11 en Île-de-France et en province le 11 mai 1984.
Dans les zones non ouvertes, la plateforme CTA d'une région voisine est accessible par le 16 (3) 619.91.11 - la taxation étant alors équivalente au Télétel 2 - 16 (3) 614.91.66 : une Taxe de Base toutes les 2 minutes, dès le début de la connexion.

Le 25 juin 1984, Télétel et l'Annuaire Électronique sont mis en service en région Provence-Alpes-Côte d'Azur. (Une préouverture limitée avait été opérée le 14 novembre 1983 à Marseille-ville).

L'inauguration officielle a lieu le même jour par M. le Ministre-délégué chargé des PTT - Louis Mexandeau, en présence de M. le Maire de Marseille & Ministre de l'Intérieur - Gaston Defferre.

Le 7 janvier 1985, la couverture totale du 36.14 est réalisée sur l'ensemble du territoire métropolitain.

Le 23 janvier 1985 se tient le premier forum Télétel-Entreprise.

En Mai 1985, le Minitel 1 Couleur est proposé en Location-Entretien pour 200 francs par mois.

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La surcharge du réseau TRANSPAC : l'incident grave.

Le 18 juin 1985, le Télétel est victime de son succès : une panne géante se produit sur le réseau TRANSPAC qui frôle la limite de charge avec 2,5 millions d'appels journaliers.

Plusieurs Commutateurs E10-5 PAVI de Paris, Orléans, Lille et Lyon "tombent" sous le poids de la charge.
Dans l'urgence une limitation provisoire forcée et drastique du trafic est opérée.
Le 2 juillet 1985, un plan d'urgence est rendu public par M. le Président Directeur Général de TRANSPAC - Pierre Fortin :
Limitation du trafic à destination des services kiosque télématique Télétel 3 - 36.15.
Distribution des minitels par les Agences Commerciales des Télécommunications fortement ralentie, avec suspension d'envoi des bons de retraits.
Mise en service anticipée début Juillet 1985 à Paris de 2 Commutateurs TRANSPAC avec mise en charge maximale dès le début.
Réexamen complet des logiciels des Commutateurs Transpac, où statistiquement, une vingtaine d'erreurs sont susceptibles d'exister dans des programmes de 500.000 instructions.
Les corrections des bugs découverts sont effectuées au fil de l'eau sous huitaine la nuit.
Commande anticipée de nouveaux Calculateurs MITRA 625 deux fois plus puissants que les MITRA 125 du réseau TRANSPAC.
Ils seront prêts au début d'année 1986 pour un remplacement complet du parc d'ici la fin 1987.
Le 9 juillet 1985, les limitations de trafic commencent à être levées région par région.
Le 12 juillet 1985 voit le retour à la normale, au prix d'installation en urgence de correctifs logiciels dans les commutateurs E10.5 et d'une spécialisation de certains Commutateurs TRANSPAC désormais uniquement dédiés au trafic Télétel, afin de protéger le trafic destiné aux clients Entreprise ; spécialisation qui augmente de surcroît l'efficacité et le rendement global du réseau.
Dans la foulée, une vingtaine de commutateurs temporels dédiés au Télétel, à Transpac et au Transit sont commandés en plus des commandes prévues au titre de l'année 1985 avec installation et mise en service accélérées.
Le 27 août 1985, un test grandeur nature est réalisé pour éprouver la fiabilité du réseau TRANSPAC : le réseau tient.

Le 1er septembre 1985, le parc compte 1.000.000 de Minitel en service. Au 31 décembre 1985, le parc est de 1,3 million de Minitel.

Le 15 avril 1986 est créé l'Indicatif 3618 permettant à tous les terminaux Minitel de communiquer deux à deux. Le service est accessible initialement par le 36.18.91.11. Il deviendra accessible ultérieurement par le Numéro Court 3618.

Le 8 juillet 1986, sont créés les trois premiers Numéros Courts attribués au Télétel : 3613, 3614 et 3615

Au 31 décembre 1986, le parc compte 2,3 millions de Minitel en service.

En Avril 1987 : parc de 2,5 millions de Minitel en France .

Au 31 décembre 1987, l'Annuaire Électronique est généralisé dans toute la France (Métropole + DOM/TOM). La France compte 3,4 millions de Minitel en service.

En Avril 1988, sont commercialisés des kits d'émulation de terminaux Minitel à partir de micro-ordinateurs par différentes sociétés d'électro-informatique. Ainsi, il devient dès lors possible de se connecter aux services Télétel et à l'Annuaire Électronique à l'aide d'un ensemble carte enfichable + logiciel, pour un prix plutôt coûteux (de 6000 à 9000 francs).
Xtel : logiciel émulateur de terminal Minitel.

En Avril 1988, sont commercialisés les Minitel 10 Bi-Standard, en remplacement immédiat des Minitel 10. le Minitel 10 Bi-Standard permet, en plus du mode d'affichage Télétel sur 40 colonnes, du mode Téléinformatique de 80 colonnes permettant l'accès aux banques des données professionnelles. Il dispose d'une mémoire de 51 numéros d'appels et il est loué 85 francs par mois.

Au 31 décembre 1988, la France compte 4,2 millions de Minitel en service.

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Le 15 février 1989, M. le Commissaire de Police - Roger Le Taillanter vient présenter sur TF1 dans l'émission Ex-Libris son nouveau livre Paris-sur-Vice 2 / Dans l'Enfer du Minitel Rose.
Il s'agit là d'une minutieuse enquête à charge menée par ce célèbre Commissaire en retraite de la Mondaine contre le Minitel Rose et tout ce qu'il se cache derrière : trafic, corruption, prostitution, proxénétisme et perversions de tous ordres...

Il est à noter que plusieurs personnes aujourd'hui très connues dans le monde des médias et des Télécommunications sont devenues immensément riches grâce au Minitel Rose...

Le 4 avril 1989 : commercialisation du nouveau Minitel 12, Ivoire, produit par Alcatel qui remplace le Minitel 10.

Le 7 novembre 1989 commercialisation du Minitel 2. Le pavé des chiffres permet désormais de composer directement le numéro de téléphone du service Télétel demandé une fois que l'on a pris la ligne à l'aide d'une touche spécifique. Il n'y a plus besoin d'y brancher un téléphone additionnel à cet effet. Numérote en DC ou FV. Loué 20 francs par mois.

Minitel 2

Le 23 janvier 1990, présentation au cours d'un salon à Paris Porte de Versailles, du nouveau Minitel 5, gris, produit par Matra Communication. Le Minitel 5 est portatif, avec écran monochrome à cristaux liquide. Il fonctionne sur secteur, sur accumulateurs R6 rechargeable ou sur piles R6.

Le 15 avril 1990, 5 millions de Minitel en France.

Dans les années 1980 et les années 1990, le Minitel ne sert pas qu’aux messageries roses et à la recherche de coordonnées dans l’annuaire électronique. Un grand nombre de services se développent et font entrer les Français dans l’ère de l’achat à distance, de la consultation d’informations interactive ou encore du jeu vidéo en mode vidéotex.
Ainsi, la vente par correspondance connaît un grand succès durant les années 1980 et 1990 et symbolise à elle seule l’effet bénéfique que le Minitel a pu avoir sur les pratiques et la promotion de nouveaux services. Le système repose bien souvent sur la complémentarité entre le catalogue papier et un service qui permet de saisir les références à commander.
En 1983, les Trois Suisses lancent sur ce modèle le TSUISSES qui génèrent 400 000 connexions annuelles et représente 3,5% du chiffre
d’affaires en 1986 et 10% en 198824. Ces pratiques s’installent durablement dans le paysage de la consommation française et en 1994, 1,2 million de foyers passe une commande sur un site de VPC par Minitel. Faut-il rappeler qu’à la même date, aux Etats-Unis, seuls 800 000 foyers font de même sur Internet ?

Début 1990, un premier prototype de Minitel 1 Photographique voit le jour.
Il est créé à partir d'un Minitel 1B auquel l'on a interchangé la carte video avec un modèle plus élaboré. La carte video permet de restituer 64 niveaux de gris différents.

Au 31 décembre 1990, la France compte 5,6 millions de Minitel en service.

En Octobre 1991, après une série expérimentale de Minitels Photographiques, France-Télécom notifie un premier marché à la société Alcatel Business Systems, basé sur le Minitel 2.

Au 31 décembre 1991, la France compte 6,2 millions de Minitel en service.

Le 5 février 1992, sont proposés deux nouveaux terminaux Minitel Philips à la vente uniquement :
Le Minitel 2 Gris Clair, techniquement identique au Minitel 2 Anthracite produit par Philips, vendu 1290 francs. Référence : 884.806.Y.
Le Minitel 12 Anthracite, équivalent au Minitel 12 Ivoire produit par Alcatel, mais avec un design épuré et plus moderne, destiné aux catégories supérieures. Loué 85 francs par mois

En 1992, le Minitel 2 Anthracite Philips devient le terminal de base et se substitue au Minitel 1 dont cesse la fabrication.

Le 6 mai 1992 (ouverture commerciale), ce sont les Commutateurs E10.5 PAVI qui reprennent progressivement l'acheminement des Services du KIOSQUE TÉLÉPHONIQUE, acheminés jusques alors par des Commutateurs d'Abonnés classiques.
Les Services du KIOSQUE TÉLÉPHONIQUE sont en cette occasion renommés AUDIOTEL.

En Juin 1992, ouverture expérimentale en Île-de-France du Minitel Photographique. La généralisation est alors prévue d'ici 2 à 3 années. Finalement, l'expérimentation ne sera jamais généralisée.
Le Minitel Photographique est capable de transmettre, comme son nom l'indique, de véritables photographies en noir et blanc, grâce à une carte graphique améliorée ainsi qu'une capacité de transmission quadruplée par rapport à un Minitel 1 Standard.


Le 15 avril 1992, l'ouverture du service Télétel Vitesse Rapide (TVR) apporte le débit nécessaire pour faciliter les délais de transmission des photographies sur 64 niveaux de gris pour une définition de 320 x 240 pixels. Ainsi une image plein écran est-elle transmise en 16 secondes, soit 4 fois plus rapidement qu'à la norme ordinaire.

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En Février 1993 : présentation du nouveau LEcteur de Cartes A Mémoires (LECAM-2), qui remplace le premier modèle. Le corps change de couleur et devient blanc.

En Mai 1993 : présentation d'un prototype de Minitel 12 produit par Philips incluant un Lecteur de Carte A Mémoire (LECAM), destiné aux payements bancaires électroniques via Minitel.
Ce prototype n'a pas été retenu. Seuls des LECAM séparés auront été commercialisés (depuis l'année 1987).

Au 31 décembre 1993, le parc en service de Terminaux est de 6.300.000 Minitel en France - 110 millions d'heures de connexion et plus de 2 milliards d'appels.

Le 15 décembre 1994, sont proposés deux nouveaux terminaux Minitel :
Minitel Sillage 2000, qui intègre un téléphone avec fonction main-libre, un minitel avec écran à cristaux liquides monochrome et un répondeur-enregistreur numérique vocal, disponible en couleur sable (Référence : 158.055.X) ou bleu marine (Référence : 129.501J). Vendu 2190 francs.
Minitel Magis, avec écran cathodique monochrome de 7 pouces de diagonale, lecteur de carte à puce intégré, disponible en couleur indigo, anthracite, pourpre, sable, safran ou graphite. Loué 29,50 francs par mois.

Le 23 octobre 1995 sont proposés deux nouveaux terminaux Minitel :
Minitel Sillage 1000, d'aspect identique au Minitel Sillage 2000, mais dépourvu de répondeur / enregistreur de messages vocaux. Loué 55 francs par mois ou vendu 1790 francs.
Minitel Magis Club, qui conserve le style de finition du Magis, tout en reprenant la forme générale du Minitel 1 de la CIT Alcatel avec écran vertical et clavier articulé, il permet un accès au Télétel à Vitesse Rapide (par le 3623) à une vitesse 8 fois supérieure aux autres terminaux. Loué 55 francs par mois, ou vendu 3300 francs.

Le 15 juin 1998 est proposé un nouveau terminal Minitel :
Minitel Sillage 2000 VR, qui intègre en plus du Sillage 2000 les fonctions Télétel Vitesse Rapide (3623), et un Lecteur de Cartes à Mémoire (LECAM) pour le télépaiement, ainsi que les Service Class, Présentation du Numéro par exemple. Loué 50 francs par mois ou vendu pour 1690 francs.
Alcatel a produit toute la gamme Sillage.

Le 21 septembre 1998 est proposé un nouveau terminal Minitel :
Minitel Sillage 1000 VR, qui intègre en plus du Sillage 1000 les fonctions Télétel Vitesse Rapide (3623), et un Lecteur de Cartes à Mémoire (LECAM) pour le télépaiement, ainsi que les Service Class, Présentation du Numéro par exemple. Loué 40 francs par mois.
Alcatel a produit toute la gamme Sillage.

Fin 2002 il a également existé un terminal Minitel :
Minitel Sillage 3000 SMS, dont a été ajoutée la fonction envoi et réception de SMS en repartant du modèle Sillage 1000 VR.
Alcatel a produit toute la gamme Sillage à 350.000 exemplaires, dont le Minitel Sillage 3000 SMS à environ 35.000 exemplaires (Informations communiquées par M. l'Ingénieur Gilbert Guyot chargé du développement du projet Sillage-Alcatel) .

Le 1er septembre 2007, l’Annuaire Électronique, accessible par le 3611, devient désormais payant dès la connexion. La franchise des 3 premières minutes disparaît. Ainsi, dès la connexion, l'appel est désormais facturé 0,112 euros les 5 premières minutes, puis 0,112 euros toutes les 2 minutes.

Le principe de ce changement de tarification avait déjà été autorisé par l'Autorité de Régulation des Télécommunications depuis le 7 décembre 2001 (Avis n° 01-1149), en raison de la nécessité d'équilibrer le coût d'exploitation du service Annuaire Électronique, ce qui n'était plus possible depuis la généralisation de l'émulation du Minitel par ordinateur ; ordinateurs qui étaient pourvus de logiciels qui coupaient systématiquement la consultation en cours juste avant la fin des 3 premières minutes gratuites..

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Stagnation et défaillance : 1993-1998

Dans le début des années 1990, le système est bien en place et le nombre d’heures de connexion en croissance. Cependant la mode passe un peu, surtout auprès des utilisateurs des services érotiques du Minitel. En effet, ce service ne représente plus que 10 % des communications autour de 1992, alors qu’il atteignait plus de la moitié des appels en 1990. Désormais Minitel affirme plutôt son rôle de prestataire de services. Le nombre total de services augmente, notamment ceux qui ont une forte valeur ajoutée (par exemple, les conseils juridiques représentent en 1991 plus de 30 % des appels).

Mais les limites techniques du Minitel, comme moyen de communication, deviennent évidentes, notamment les procédés archaïques de vidéo et de transmission. Le caractère rudimentaire de la technologie en limite l’attrait. En effet, l’utilisateur est contraint par la configuration de la page affichée sur l’écran et par le système de terminaux non intelligent qui limite fortement sa capacité de traitement de l’information. De plus, l’architecture du Minitel ne permet pas un passage facile et immédiat d’une page à l’autre. Les échanges horizontaux manquent de souplesse, surtout par rapport à l’apparition de nouveaux modes de communication. Cela est très visible autour de l’année 1993 : c’est au cours de cette année que le nombre de terminaux Minitel et d’heures de connexion commencent à décroître. Cela correspond avec l’année d’apparition du World Wide Web, qui est un succès foudroyant pour l’Internet. Il offre à l’utilisateur une formidable quantité d’informations, grâce à l’apparition du langage HTML, qui repose sur l’existence de liens entre documents au travers de mots clés ou d’images dits « hypertextes », ce qui facilite énormément la recherche d’informations. De cette façon, tout ce qui techniquement manquait au minitel semble se retrouver avec l’Internet.

Un deuxième facteur qui peut expliquer le frein dans le développement du Minitel est la fin de la mise à disposition gratuite du matériel électronique, ce qui était l’un de ses principaux atouts. Désormais sont commercialisés deux nouveaux types de terminaux : Sagis qui dispose d’un lecteur de carte bancaire intégrée pour payer les commandes en toute sécurité ; et Sillage, poste qui intègre téléphone, Minitel et répondeur. Mais d’après la courbe du nombre de terminaux, le public ne semble pas manifester un grand engouement pour ces nouveaux appareils.
Finalement le Minitel, ne correspond-t-il pas à un public restreint, qui demande des services spécifiques (et en ce sens il diffère du téléphone portable dans lequel tout le monde peut trouver son utilité) ? D’après les enquêtes étudiées, à la différence des réseaux de services publics, le Minitel n’est pas considéré comme indispensable (71,4 % des non-utilisateurs justifient leur choix en disant qu’ils n’en ont pas besoin). Il lui manque donc la capacité nécessaire pour devenir un service universel

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Expériences à l'étranger

Au milieu des années années 1980 seuls 50 000 à 70 000 terminaux avaient été exportés et aucun pays n'avait accepté le système français de Vidéotex en entier.

Deux groupes de presse anglo-saxons, Times Mirror et Knight-Ridder, ont abandonné en 1986 leurs expériences de "Vidéotex", qui était alors le nom générique du minitel à l'international, après y avoir perdu 80 millions de dollars, faute d'avoir su mettre les appareils à la disposition du public visé à un coût supportable.

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Une forte expansion

Le Minitel (programme Télétel) revint à plus de huit milliards de francs en équipements de terminaux avec une durée de vie estimée de huit ans pour les Minitel [réf. nécessaire]. Pendant le même laps de temps, le chiffre d'affaires des services télématiques atteint les 3,5 milliards de francs et les économies de papier atteignirent 500 millions de francs par an.

Au cours de l'année 1985, le million de Minitel est dépassé en trombe et la croissance du trafic est telle qu'au cours de l'été 1985 les ordinateurs du réseau Transpac, qui véhicule le trafic Télétel, sautent, prenant de court l'administration des PTT. Cette panne de juin 1985, causée par le succès des services liés au 36 15, conduit à une altération prolongée du service pour la plupart des abonnés au Minitel. La situation ne redeviendra normale qu'au bout de deux semaines.

Au cours de la même année 1985, le réseau affiche plus de 15 millions d’heures de communication via le minitel par mois. Puis « fin janvier 1986, le parc des minitels atteint 1,4 million d'unités (dont 300 000 dans les entreprises et 1,1 million au domicile des particuliers) ».

Au début des années 1990, le Minitel équipait 6,5 millions de foyers. Il dépassait de loin le nombre d'utilisateurs du réseau CompuServe, qui offrait en Amérique du Nord des services semblables, et plus encore de Prodigy (en) qui lui ressemblait davantage parce qu'utilisant lui aussi une interface graphique rudimentaire.

Au tournant des années 1980-1990, les Américains s'intéressèrent de très près au réseau Vidéotex français : à un moment où les Français s'interrogeaient sur l'avenir du Minitel, le futur vice-président Al Gore envoya un jeune homme, David Lytel, enquêter en France non sur les techniques utilisées mais sur les contenus des services Teletel offerts].
Ce rapport contribua à la préparation du discours sur « les autoroutes de l'information » prononcé par Al Gore en 1994.

Le réseau Télétel du Minitel comportait au départ deux types de facturation : 3613 (communication payée par le service) et 3614 (communication payée par l'usager, 20 francs – 3,05 € – par heure environ, pas de rémunération du service, réduction en heures creuses).
En février 1984 fut créé le système kiosque avec le 3615. La rémunération du service est 60 francs – 9,15 € – par heure environ, payés par l'usager, dont 40 F (6,10 €) pour le service et 20 francs (3,05 €) pour France Télécom, système de « taxation arrière » souhaité par l'industrie de la presse pour rendre son contenu payant[réf. nécessaire].

Ces numéros courts à quatre chiffres ont remplacé les numéros initiaux, au gré de l'évolution du plan de numérotation de l'opérateur historique :
11 jusqu'au 18 octobre 1996 à 23 h, puis 3611
(16) (3) 613 91 55, puis 36 13 91 55 après le 25 octobre 1985 à 23 h, puis 3613 depuis le 10 juillet 1986
(16) (3) 614 91 66, puis 36 14 91 66 après le 25 octobre 1985 à 23 h, puis 3614 depuis le 10 juillet 1986
(16) (3) 615 91 77, puis 36 15 91 77 après le 25 octobre 1985 à 23 h, puis 3615 depuis le 10 juillet 1986

L’apparition du kiosque en 1984 fait exploser le nombre de services qui passe de 145 en 1984, à 2 074 en 1985, 5 000 en 1987 et 25 000 en 1995.
Cette année-là, les services génèrent près d’un milliard d’équivalents euros de revenus pour un parc installé de 6,5 millions de terminaux.
Les messageries dont les messageries roses participent fortement à la diffusion du Minitel. Elles représentent 50 % des appels en 1990.

Les serveurs (numéros de téléphone) auxquels on se connectait avec un Minitel étaient appelés des services Télétel. C'était en effet des passerelles vers le réseau Télétel, basé sur Transpac, qui permettait de mettre en relation les Minitel avec les serveurs des prestataires de service.

En marge de ces services Télétel, il était tout à fait possible de composer des numéros classiques à 8 puis 10 chiffres, que ce soit pour se connecter à un autre Minitel configuré en mode « retourné »[N 1] ou pour accéder à des serveurs « RTC » directement connectés sur le réseau téléphonique commuté, donc non surtaxés.
Une communauté de passionnés fréquentait ainsi régulièrement ces micro-serveurs similaires (en plus accessibles) aux serveurs BBS qui se développaient aux États-Unis et ailleurs. À l'échelle locale, des collectivités proposaient également de tels serveurs Minitel à accès direct. Aujourd'hui encore, de nombreux systèmes de télégestion utilisent ce système, aussi bien en appel entrant (visualisation de données et d'événements ou émission d'ordres) qu'en appel sortant (télé-alarme).

France Télécom engage un processus pour proposer l'annuaire électronique 3611 sur ordinateur et plus seulement sur Minitel et développe le site www.pageszoom.com (qui sera vendu en 2006 à l'Américain KKR).

En octobre 1995, la Direction des annuaires de France Télécom en présente une maquette au salon International des Télécommunications à Genève. En avril 1997 le site Les Pages Zoom (www.lespageszoom.com) ouvre.
Il comporte les Pages jaunes, les Pages blanches, un service de photos de ville (qui sera copié dix ans plus tard par Google Street View), une cartographie et un moteur de recherche de pages web intégrant celui de la société Echo.
En juillet 1998, le service Les Pages Zoom obtient le LISA Award du meilleur annuaire au monde sur Internet à Boston et le portail voila.fr ouvre au public.
Les annuaires de France Télécom sont ensuite devenus accessibles sous la marque « www.pagesjaunes.fr ». La gestion du service des annuaires de France Télécom est transférée à l'ODA.

En 2000, le Minitel est encore utilisé par près de 25 millions de personnes (pour 60 millions d'habitants), avec un parc de près de 9 millions de terminaux.
Il restait toujours très utilisé, y compris pour les transactions commerciales, à tel point que certains moteurs de recherche comme Yahoo! ou AltaVista avaient un service Minitel. Cependant les services à facturation de type 3615 ou supérieur étaient vivement concurrencés par le Web.

L'arrêt prévu, en mars 2009 du service 3611 annuaire électronique, est reporté devant le nombre significatif de connexions.
En 2008, le 3611 a enregistré 200 000 à 300 000 connexions par mois, et représentait encore « 80 des 220 millions de connexions Minitel réalisées » l'année précédente, en 2007.

Le 3611 s'arrêta, comme les autres services Minitel, le 30 juin 2012.

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Après 2005, détrôné progressivement par Internet, le Télétel se retrouve progressivement marginalisé...
Le Télétel est de plus en plus considéré comme un Internet lent et bien moins perfectionné, comparé à lui (bien qu'étant bien plus sécurisé et fiable).
Aussi, il ne pouvait plus être possible de maintenir indéfiniment un réseau spécifique et un ensemble de commutateurs frôlant la trentaine d'années de service.
Le foisonnement d’initiatives ne contribue pas à la lisibilité des offres proposées sur minitel. Dans le même temps, le minitel entre de plus en plus en concurrence avec Internet. Progressivement, les collectivités qui disposaient d’un service télématique spécifique décident d’abandonner ce système pour passer sur Internet. La Région Lorraine était présente sur le minitel depuis 1985. Elle met en service son site Internet en 1997. La Région Alsace s’était contentée jusqu’alors d’encourager la création de divers services télématiques, mais n’était pas présente en tant que telle sur le minitel. Elle inaugure son site Internet le 26 mars 1996. La Région Champagne-Ardenne, quant à elle, ouvre son site Internet en 1999.
Le Minitel, réseau uniquement national, est limité technologiquement et risque de constituer un frein au développement des applications nouvelles et prometteuses des technologies de l’information » 

Face à cette situation, la stratégie adoptée par le système télématique de France Télécom a alors été d’offrir la possibilité de relier le réseau Minitel au réseau mondial d’Interne.
Désormais, l’évolution du Minitel ne passe plus par le développement du terminal lui-même, mais par le téléchargement du logiciel à partir du site Internet I-Minitel. C’est la meilleure façon pour faire survivre le réseau Minitel, qui est désormais consultable à partir d’un ordinateur. Cela laisse la possibilité à un nombre grandissant d’internautes d’avoir un accès Minitel à partir de leur ordinateur.

Ainsi si le parc de terminaux Minitel diminue de 250 000 unités par an, cette nouvelle utilisation du Minitel, selon Vincent Barnaud (directeur commercial des activités kiosque chez France Télécom), connaîtrait un « surprenant succès » : 500 000 téléchargements du logiciel depuis l’année 2000, 250 000 utilisateurs par mois. Le nombre des utilisateurs potentiels du Minitel reste ainsi supérieur à celui des internautes : 15 millions de Français ont accès au réseau services télématiques chez eux ou au travail, contre 9 millions pour l’Internet. Mais ce succès est peut-être à nuancer : télécharger le logiciel est une chose, et l’usage que l’on en fait en est une autre.
Le fait est que le Minitel résiste à mourir. D’un côté, il garde encore ses adeptes. Ils regrettent quelques points forts du Minitel, qu’ils ne retrouvent pas sur le réseau Internet : sa grande simplicité d’utilisation (notamment pour les personnes âgées) ; l’investissement faible dans le Terminal, qui permet l’accessibilité à tous ; l’anonymat de l’usager et l’environnement de confiance dans le commerce électronique. D’un autre côté, les prestataires de services y trouvent encore un intérêt économique non négligeable. Par exemple, pour la SNCF, le réseau télématique est un canal intéressant, car c’est un des rares réseaux qui rapporte plus que ce qu’il ne coûte, même si le service est en baisse (en 2001, le service Minitel de la SNCF a connu une baisse de 12-13 % de son chiffre d’affaires, de 18 % de consultations et de 10 % d’achats). C’est pourquoi on constate aussi une adaptation de certains services de l’Internet sur le Minitel : désormais plusieurs serveurs du Web, comme Yahoo, sont consultables à partir d’un poste Minitel.

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Le 1er décembre 2009, le nouvel arrêté ministériel (NOR : INDI0928051A) portant désignation de l'opérateur chargé du service universel n'oblige désormais plus France Télécom à fournir l'accès à son réseau TRANSPAC X25.
Le 29 janvier 2010, France Télécom Orange annonce par Communiqué de Presse :
1) - la fin de commercialisation aux nouveaux clients du réseau TRANSPAC X25 pour le 31 juillet 2010,
2) - la fermeture technique définitive au 30 septembre 2011. L'arrêt du Réseau TRANSPAC X25 supportant entre-autres le Télétel, cet arrêt revient à arrêter le Télétel au 30 septembre 2011.

- Mais suite aux réclamations de certains éditeurs télématiques, la fermeture du Télétel est suspendue in-extremis le 20 juillet 2011 pour permettre aux clients de se tourner vers Internet d'ici la mi-2012. (source Le Monde du 21 juillet 2011)
Le 20 juillet 2011, Orange reporte l'arrêt du Service Minitel en procédant ainsi :
arrêt de commercialisation aux nouveaux clients à la date du 1er mars 2012,
arrêt de la location-entretien de tous les Terminaux Minitel à la date du 7 mars 2012,
arrêt technique définitif du Service Minitel à la date du 30 juin 2012.
(pas de communiqué de presse Orange archivé ni retrouvé à ce jour.)

Le 29 juin 2012, M. Gérard Théry, Directeur Général des Télécommunications contemporain de l'avènement du Minitel donne une interview au média Économiematin.fr à la veille de l'arrêt définitif du Télétel en France..

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Technique des premiers modèles

Les premiers modèles ont été livrés avec un clavier alphabétique (ABCDEF), choix de suite critiqué au moins par un ingénieur de La Radiotechnique impliqué dans le projet, déroutant pour les habitués des claviers normalisés des machines à écrire ou des terminaux informatiques en AZERTY ou QWERTY, sans arranger réellement les non-familiers des claviers.
Ils ont été vite abandonnés au profit de la disposition AZERTY. Les premiers modèles ne permettaient pas de garder à l'écran la mémoire de la dernière page consultée quand on se déconnectait du service consulté en ligne, car la page d'accueil du réseau s'affichait aussitôt.
Deux solutions s'opposaient : rester connecté (et continuer à payer) pour garder cette page à l'écran, ou placer un boîtier de mémoire entre la ligne et le Minitel. Ces deux solutions étant coûteuses, la solution vint d'utilisateurs ayant trouvé qu'il suffisait de débrancher la prise téléphonique sans appuyer sur « Fin de Connexion ». Une autre possibilité était de frapper très rapidement, deux fois, cette même touche.

Au sein même de l'équipe de création du premier Minitel, la majorité était favorable à la technique du terminal passif, finalement adoptée. D'autres défendaient l'idée d'équiper le Minitel d'un processeur avec un bus, ouvrant la possibilité de cartes d'extension et un système d'exploitation. Les partisans de cette option, rétrospectivement plus favorable, n'ont pas obtenu gain de cause, principalement pour des raisons de prix de revient. Pendant quelques semaines a été exposé à la Fnac, magasin français de vente de matériels électroniques et libraire, un curieux hybride le VP 100 de Mageco qui intégrait un micro-ordinateur, le Sinclair ZX81, dans un Minitel. Ainsi était réalisé le mariage du clavier écran modem sans processeur (le Minitel) avec le micro-ordinateur sans écran (le Sinclair). Pour trouver un micro-ordinateur communicant à cette époque, il faut se tourner vers le SMT Goupil G1, équipé d'un modem acoustique.

Sur les premiers modèles de Minitel 10 (équipés d'un téléphone), la touche permettant de composer sans décrocher n'était pas une touche ordinaire, mais exerçait une pression sur le contact de détection du combiné au travers d'une tringle munie d'un ressort (ce qui lui donnait un toucher très particulier). Le Minitel de base ne comportait pas de numéroteur (il fallait numéroter sur le téléphone et appuyer sur « Connexion/Fin »). Néanmoins comme il était également muni d'une prise péri-informatique (une simple liaison série), certains programmeurs arrivèrent à le faire numéroter en envoyant des séries de décrocher/raccrocher simulant la numérotation par impulsion. Ceci a été appelé la procédure « takatakata ».

Le Minitel a été ponctuellement utilisé en Côte d'Ivoire et des modèles ont été conçus pour le Japon et la Grèce . Il a été intégré dans diverses applications industrielles (terminal de gestion de magasins de stockage, de lignes de production, d'enregistrement de résultats de contrôles qualitatifs et quantitatifs, de gestion de programmes d'équipements informatisés, etc.) ou de service [commandes par les réparateurs des pièces détachées auprès de Service SA (groupe Philips), par exemple].
En 1987, pour réaliser les premières connexions transatlantiques, Jean-Louis Fourtanier, directeur du centre serveur CTL qui héberge nombre de services Vidéotex de presse, exporte clandestinement des Minitel aux États-Unis et au Canada permettant à des utilisateurs des deux rives de dialoguer en direct

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L'Aventre du_minitel en bande dessinee .

Le Minitel est un terminal informatique passif, c'est-à-dire qu'il se comporte uniquement comme un clavier et un écran, avec une très faible capacité de traitement (traitement du protocole vidéotex) et pas de dispositif de stockage.
Les services sont accessibles depuis une ligne de téléphone grâce au modem V23 incorporé (1 200 bit/s en réception, 75 bit/s en émission).
Le Minitel était muni de prises en T pour la connexion au réseau téléphonique de France Télécom.

L'écran du Minitel est une matrice texte d'une taille de 25 lignes par 40 colonnes en mode Vidéotex (8 nuances de gris) et se base sur un système de codage qui lui est propre.
Un jeu de caractères graphiques, chacun constitué de 6 gros pixels, lui permet d'afficher des images en mode « mosaïque », un peu à la manière de l'art ASCII.

Caractéristiques du Minitel 1

La Radiotechnique Telic
Modem V.23 (1 200 bit/s en réception - 75 bit/s en émission) intégré.
Affichage Vidéotex en 40 colonnes et 8 couleurs (alpha-mosaïque).
Transmission par voie série entre un micro-ordinateur, au moyen d'un connecteur DIN, et le Minitel jusqu'à 1 200 bit/s
Consommation : 10 W en veille, 30 W en utilisation.

Caractéristiques du Minitel 1B
Telic Specifications techniques d'utilisation du minitel 1B (pdf)
Toutes les caractéristiques fonctionnelles du Minitel 1 plus :
Modem V.23 « retournable » (pouvant passer en réception 75 bit/s et émission 1 200 bit/s).
Mode d'affichage supplémentaire téléinformatique 80 colonnes type VT100.
Touches supplémentaires : flèches 4 directions, touches Fnct et CTRL permettant d'accéder à des fonctionnalités supplémentaires telles que l'insertion/suppression de caractères/lignes (avec scroll hardware local), ou caractères supplémentaires ou de contrôle propres à un terminal VT100 (TAB, BRK, LF, BS, CAN).
Transmission par voie série étendue jusqu'à 4 800 bit/s.

Caractéristiques du Minitel 2
Telic
Toutes les caractéristiques fonctionnelles du Minitel 1B plus :
Jeu de caractères étendu DRCS (voir plus bas)
Transmission par voie série étendue jusqu'à 9 600 bit/s.
Microcontrôleur 80C32 cadencé à 14,318 18 MHz avec 256 octets de mémoire vive[56]
8 kio de mémoire vive dynamique
Le logiciel du Minitel est stocké sur une EPROM de 256k bits
Détecteur de sonnerie téléphonique intégré (permet de prendre un appel en tant que serveur, avec le modem retourné, sans avoir besoin d'un câble de détection de sonnerie externe).

Les caractéristiques techniques des Minitel étaient décrites dans des ouvrages de référence intitulés « STUM » (Spécifications Techniques d'Utilisation du Minitel), qui se déclinaient par modèle (STUM 1, STUM 1B, STUM 10, etc.). Elles étaient disponibles initialement auprès du CNET puis de France Télécom.

En dépit de normes détaillées, il existait de légères différences entre modèles, et surtout entre fabricants. Il était possible pour le serveur d'« interroger le Minitel » pour en récupérer le modèle exact et, éventuellement, adapter le service :
-
Minitel 1 standard : fonctionne en standard ASCII qui permet le dialogue avec des banques de données internationales. L'affichage est en 8 nuances de gris (noir et blanc y compris).
- Minitel 1 couleur : les 8 nuances de gris sont converties en couleurs : noir, rouge, vert, jaune, bleu, magenta, cyan, blanc (selon l'ordre des codes employés) ; noir, bleu, rouge, magenta, vert, cyan, jaune, blanc (selon l'intensité de gris) ; le clavier de ce modèle était par ailleurs extérieur à l'écran.
- Minitel 1 dialogue : ce terminal, destiné principalement aux sourds et malentendants, dispose d'un logiciel de messagerie instantanée qui utilise le mode « retourné » du modem, il permet ainsi un dialogue par écrit avec un correspondant utilisant un autre Minitel de n'importe quel modèle, en s'appelant directement par le réseau téléphonique sans passer par l'intermédiaire d'un serveur.
- Minitel 1B : son clavier est équipé de nouvelles touches, dont Fnct et Ctrl, permettant de modifier certains paramètres (minuscules/majuscules, retourner le modem, modifier le débit des communications…). Il est capable d'afficher 80 colonnes de texte, possède des fonctions supplémentaires d'affichage (« insérer ligne », « supprimer ligne »…), et son modem peut être retourné, c'est-à-dire que les débits en réception et en émission seront inversés. De plus, il est dit « bistandard », car il peut fonctionner en mode Videotex (24 lignes de 40 caractères) ou VT52 (24 lignes de 80 caractères).

- Les Minitels 1 étaient équipés de « mouchards » : deux zones mémoire de 8 caractères qui pouvaient être écrites et/ou lues par le serveur auquel le Minitel était connecté (équivalent d'un « cookie » sur le Web). La Commission nationale de l'informatique et des libertés les déclara illégaux, en particulier parce que le contenu des mouchards ne pouvait pas être directement consulté par l'utilisateur du terminal. Dans la pratique, quelques serveurs permettaient à l'utilisateur de consulter ces mouchards et d'y écrire les caractères de son choix. SM permettait aussi d'écrire un message de son choix dans les mouchards d'un autre utilisateur connecté à ce service, qui en était prévenu par un message.

- Minitel 2 : permet à l'utilisateur de protéger, par un mot de passe, l'accès à son terminal. Le Minitel 2 dispose en outre d'une fonction répertoire (possibilité de pré-enregistrer jusqu'à 10 numéros). Il permet aussi un affichage graphique plus évolué en permettant de redéfinir les caractères (DRCS, Dynamical Redefinable Character Set — en français, JCRD, Jeu de Caractères Dynamique Redéfinissable). Cette fonction est peu utilisée car elle est lente et que le parc de Minitel 2 n'a jamais été assez étendu.

- Minitel 5 : Minitel portatif à cristaux liquides qui a les mêmes fonctions que le Minitel 10 bistandard, combiné téléphonique en moins.

- Minitel 10 : cumule les fonctions du Minitel et d'un téléphone sophistiqué. Il existe aussi une version bistandard (10b).
Telic

- Minitel 12 : répondeur télématique capable de prendre une communication, d'afficher une page d'accueil et d'enregistrer le message écrit laissé par le correspondant.

- Minitel Magis : apparu à la fin des années 1990, ce modèle redessiné apporte plusieurs innovations comme la possibilité de mettre un mot de passe, un assistant et un lecteur de carte à puce pour les achats en ligne.

- Magis Club : Minitel pouvant afficher des images au format JPEG en 64 niveaux de gris. Son modem peut se connecter à 9 600 bit/s. Ce mode est souvent appelé TVR, pour Télétel Vitesse Rapide. Quelques services ont été spécifiquement créés pour cette version de Minitel, qui sait aussi gérer le DRCS et le mode bistandard, et inclut même un lecteur de carte à puce.

- Sillage 1000 VR ; ce téléphone-répondeur-minitel compact fabriqué par Alcatel intègre un petit écran à cristaux liquides.
Le 4 mars 1986, présentation à la Presse du premier prototype de Minitel à Cristaux Liquides (écran LCD), conçu par le Centre National d'Études des Télécommunications.
3 années ont été nécessaires pour sa conception et son développement.

Le 14 avril 1986 présentation au SICOB du nouveau Minitel 1 Bi-Standard (avec norme ASCII) affichage 40 colonnes et désormais 80 colonnes, avec 7 touches supplémentaires. Loué 85 francs par mois.

Appareils bien étranges sont des visiophones « Opus » d’Alcatel, faisant aussi office de Minitel.
Leur design reprend la forme de La Grande Arche, bâtiment où ils ont été mis en place dans les locaux du Ministère de l’Équipement lors de son transfert dans ce nouveau site. Une soixantaine de ces appareils ont été déployés et utilisés entre 1989 et 1994.

Commercialisé à partir de 1982, le minitel a cessé d’émettre en juin 2012. En 2010, 10 millions de connexions par mois étaient recensées avant de chuter en 2011 à 420 000 utilisateurs réguliers du réseau de communication.

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GENESE -. GRETEL : LA MESSAGERIE INTERACTIVE HISTOIRE D'UN PIRATAGE
Thierry BRUHAT

Etude réalisée pour le SPES/DGT sur les messageries électroniques de GRETEL et TELETEL

L'initiative laissée au serveur, c'est-à-dire, aux DNA, est assez grande. La DRT s'est accordée avec cette logique d'ouverture, de promotion et d'expérimentation.
Si nous devions rencontrer la naissance de Gretel, nous confronterions volontiers trois discours selon qu'ils émanent de la DRT, des DNA, ou bien des utilisateurs.

Grétel est un nouveau jeu. Il est "irréel". Il ouvre sur un monde du simulacre, les dialogues sont fictifs dans la mesure où ils ne renvoient à aucun principe de réalité.
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Lire le document en entier (pdf)
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La genèse institutionnelle de Grétel n'est pas classique car la mise en communauté n'est ni la réminiscence d'un passé, calme et paisible, d'un état de nature, ni la promesse d'un futur radieux, d'un monde sans états d'âmes, mais contrairement à toutes ces extériorités, le vécu actuel de dialogues extra-sociaux, la réalisation d'imaginaires micros collectifs par des phénomènes de démultiplication des personnalités.

Le lien de pertinence organisationnel n'est pas dans le spectre visible, il est dans la frontière entre ces deux mondes qui interagissent sans arrêt l'un sur l'autre. Il faut tenir la frontière, les deux mondes en l'état, l'expérience technique et l'univers des pirates. L'un ne peut vivre sans l'autre, et il faut trouver des bonnes raisons de complicité objectives entre les institutions pour préserver une tout autre complicité, celle du clin d'oeil du pirate.

La messagerie de Grétel tient son fondement de l'instantanéité de la communication qu'elle permet : communiquer "sans entrave", s'exprimer "librement". La maîtrise par les pirates de la technologie à désacraliser le vidéotexte. Tout un chacun peut se l'approprier, en faire sa chose. Ce n'est plus l'affaire de quelques uns. Ce n'est plus une expérience, un objet-gadget dont se dotent quelques administrations, journal ou banque pour marquer leur différence, mais un espace et un lieu de rencontre. Le "piratage" a été un second acte de naissance pour GRETEL; II a non seulement permis "concrètement" la création de la messagerie interactive mais a également révélé symboliquement à l'ensemble des utilisateurs que la technologie n'était pas un frein et que les forteresses télématiques n'étaient pas château de sable. L'emploi du terme même de piratage est significatif. La messagerie interactive est perçue et vécue par les utilisateurs comme un viol de la technologie et comme un acte de violence contre les institutions à l'origine de GRETEL. La messagerie interactive est un butin, un trésor acquis de haut lutte ...peu importe alors ce qui s'y dit ou, plus exactement se qui s'y dit ne peut être que le reflet de la liberté fantasmatiquement gagnée que "Papa Grétel", par le dialogue/antagonisme qu'il instaure avec les pirates, discute et confirme à chaque instant.

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Langage et interaction dans une situation conversationnelle médiatisée : les messageries conviviales du minitel
Emmanuelle LÉVY C.R.L. Paris X - Nanterre

Les messageries CONVIVIALES du minitel nous paraissaient un terrain idéal pour croiser deux approches : linguistique et sociologique. Idéal en ce sens qu'elles offrent au chercheur un matériau brut, direct et dont la transcription pose moins de difficultés qu'à l'oral (pas de chevauchements, tours de parole gérés par la technique...).

Dans cette étude, nous avons cherché à mettre en évidence l'articulation entre les processus langagiers et les processus d'interaction et à analyser de quelle façon l'introduction d'un média dans une relation interpersonnelle pouvait avoir des conséquences aussi bien sur la relation que sur le langage.
Sur le langage. C'est un écrit mais utilisé de façon interactive. Il prendra donc, nous en avons fait l'hypothèse, des traits de l'oral. En outre, le canal de transmission est un support technique qui lui imprime ses propres spécificités. Enfin, c'est avant tout un écrit. Le langage "minitélique" aura donc trois caractéristiques : écrit, oral, technique.
Sur l'interaction, il en va de même. Le moyen naturel que constitue habituellement le langage oral pour converser est ici transformé en écrit et le média introduit des paramètres inhabituels dans la communication (anonymat...). Ces modifications entraînent un type d'interaction qui a ses particularités.
Ainsi, langage et interaction étaient indissociables.
Pour mener ce travail, nous avons constitué un corpus de conversations. Nous les avons recueillies au cours de trois soirées (trois heures environ chacune) par l'intermédiaire de "compères" à qui nous n'avions donné aucune instruction sinon de dialoguer "le plus naturellement possible" avec des correspondants. Pour notre part, nous étions assis à côté d'eux, nous contentant de faire fonctionner rimprimante pour minitel et d'enregistrer les messages sur magnétophone. Nous avons pris conscience que cette situation était parfois difficile pour nos amis. En effet, ils se sentaient "observés" et ont peut-être inconsciemment exercé un contrôle sur leurs écrits. Nous n'avons malheureusement pas pu agir autrement dans la mesure où nous ne possédions pas le matériel informatique adéquat qui aurait permis d'éviter cette situation, embarrassante pour certains.

Une fois le matériel recueilli, il nous fallait le retranscrire intégralement. Nous avons pris garde de reproduire exactement les messages tels qu'ils apparaissaient sur l'écran avec leurs fautes d'orthographe, leur disposition spatiale originale, leurs procédés typographiques particuliers (majuscules, ponctuations...). Par la suite, les conversations se superposant (il est en effet possible de dialoguer avec plusieurs interlocuteurs en même temps), nous avons replacé les messages par connecté, dans l'ordre de leur apparition. Notre corpus comprend une trentaine de conversations (plus ou moins longues).

Avant d'aborder les hypothèses que nous avons développées, nous tenons à présenter les messageries, ce qu'elles sont, comment elles sont nées et surtout ce qui les caractérise du point de vue technique et donc du point de vue du langage et de l'interaction.
I. Les messageries

Tout d'abord, une définition: "Système de communication électronique permettant à des utilisateurs de recevoir et d'émettre des messages via des terminaux connectés à un serveur. Une messagerie dialogue permet, en temps réel, l'échange de messages entre deux utilisateurs" {Guide de h télématique, 1990).

En outre, précisons que les messageries conviviales sont distinctes des messageries roses en ce sens qu'elles n'ont pour objectif que l'instauration d'un contact débouchant éventuellement sur une rencontre alors que les messageries roses sont plus centrées sur le sexe et l'expression de multiples fantasmes. La messagerie conviviale s'apparente en définitive plus à une place de village ou à un bistrot. Celle sur laquelle nous avons travaillé se prénomme d'ailleurs BAR (ou BISTRO selon le code d'accès employé) et est de type convivial, comme le laisse supposer son nom.
I
I La naissance des messageries

Au départ, les promoteurs du minitel avaient pour idée d'en faire un média de service. Très rapidement, les usagers se sont appropriés l'outil pour en faire un média de contact. Les messageries conviviales sont nées de façon spontanée à deux endroits différents : à Vélizy (FORUM) et à Strasbourg (GRETEL). La première a vu le jour grâce à l'utilisation détournée d'un jeu (la bataille navale) et a donné naissance aux Salons (dialogue entre plusieurs personnes en simultané, chacun ayant accès à tous les messages). La seconde, ancêtre des messageries dialogue (possibilité d'entrer en contact avec plusieurs personnes mais toujours deux à deux), est née du piratage d'un service qui donnait des informations aux usagers sur le média.

Ces deux types de messageries, nées des utilisateurs eux-mêmes, ont connu un succès exceptionnel à leurs débuts pour ensuite être reléguées à un phénomène plutôt marginal qui n'a cessé de décroître ces dernières années (de 22% en 1987 du total des heures de connexion, elles sont passées en 1990 à 13%). Quoi qu'il en soit, elles représentent un phénomène social à ne pas négliger et un terrain privilégié d'étude.

1.2. Les spécificités de la communication par minitel
Nous avons repéré un certain nombre de particularités dues à l'architecture même des messageries. Nous verrons en quoi elles introduisent des facteurs inattendus dans la communication.
I.2.1. La disparition presque totale des repères sensoriels
Le minitel est un nouveau pas vers une communication appauvrie en repères sensoriels. Dans la communication orale traditionnelle, tous les sens ou presque sont en éveil et en particulier la vue et l'ouïe. Avec l'apparition de la communication par téléphone, on assiste à la disparition de la presque totalité des sens excepté l'ouïe. Avec le minitel, enfin, le problème se pose de manière plus complexe. Certes, la perception sensorielle y est réduite mais il en reste une : la vue. Elle y prend une place particulière dans la mesure où elle n'a pas la même fonction que dans une communication traditionnelle. En effet, elle ne se centre plus sur l'observation des lieux, de l'aspect physique, des expressions, des gestes... mais sur l'écrit lui-même. C'est ainsi que nous avons pu observer dans la forme de l'écrit des procédés particuliers: disposition spatiale des messages originale, orthographes singulières, jeu avec les mises en relief diverses (majuscules...). De tels indices visuels ne sont donc pas à négliger. Ils sont importants dans la perception qu'ont les interactants de l'outil.
I.2.2. La multiplicité des interlocuteurs
Nous l'avons vu, il est posssible de dialoguer avec plusieurs personnes en même temps mais les conversations se font deux à deux et les messages se croisent. Un même interlocuteur peut donc jouer sur différents registres, s'inventer des personnages toujours nouveaux, changer de sexe à loisir... Le risque est alors de ne plus savoir ce que l'on a dit à telle ou telle personne.
I.2.3. L'anonymat
II constitue une des dimensions centrales de la communication par minitel. Tous les acteurs sont anonymes. La seule indication dont nous disposions est le pseudonyme. Du plus banal (jean-paul, Mychelle), au plus évocateur (david Vincent, Rakham le rouge, caressante), il prend une importance considérable quand on sait que c'est essentiellement par lui que se fait le premier contact. Il est un visage, une représentation dans un univers où la fiction est omniprésente.
I.2.4. La libération de la parole
L'absence de repères en tous genres (voix, visage, temps, espace...) permet à l'utilisateur, tel un personnage masqué, de "parler" librement, sans contraintes. Les barrières sociales (telles l'âge ou la situation sociale) n'ont plus de réalité. Cependant, nous avons pu constater que cette liberté n'était parfois qu'apparente. Nous pouvons en effet supposer que les interlocuteurs continuent, tout comme dans la vie courante, à exercer un certain contrôle sur leurs écrits et qu'il existe malgré tout des règles sous-jacentes.
I.2.5. Le jeu
II intervient à différents niveaux. Tout d'abord, il y a jeu autour du processus technique de communication. En effet, nous avons vu que les messageries sont nées d'un piratage, en cela assimilable à un jeu. Ensuite, il y a jeu autour du langage. Les interlocuteurs se servent des moyens techniques de l'objet minitel pour donner une forme particulière à leurs écrits. Enfin, il y a jeu autour de l'identité, généré par l'anonymat et le pseudonyme choisi. Les participants jouent à savoir qui est l'autre et à se dévoiler eux-mêmes tout en conservant un certain mystère. La dimension ludique prend donc une grande importance aussi bien au niveau de la forme des messages que de leur contenu.
I.2.6. L'argent
La communication par minitel est payante (1,25 FF la minute en 3615). Cette composante a son importance et il y aurait sans doute beaucoup à dire sur le fait de payer pour dialoguer...

En définitive, nombre de ces caractéristiques nous permettent de comparer le minitel à un bal masqué. Chacun y a en effet un masque (le pseudonyme) et les relations qui se mettent en place se font sous le signe du jeu, du badinage, de la séduction. Cependant, sous cet aspect ludique, il semble y avoir un aspect plus dramatique : l'argent dépensé à communiquer serait-il le signe d'un malaise profond de la société, une sorte de "mal-être communicationnel"? Ce plongeon dans l'irréalité, dans la semi-fiction, serait-il un refus de la réalité? Nombreuses sont les questions que pose ce type de communication.

II. Le langage

Nous l'avons vu, les canaux traditionnels de la communication sont réduits sur minitel : le seul matériel concret qui reste est le langage écrit. Il est donc naturel d'observer un changement dans la forme même des messages transmis. Il y aurait, nous en faisons l'hypothèse, un français "minitélique", un français influencé par les caractéristiques du média, un langage propre au minitel. Nous verrons tout d'abord comment les caractéristiques techniques de ce média pèsent sur la forme et le contenu des messages puis nous verrons tous les procédés utilisés qui vont dans le sens d'une oralisation du message écrit.

II.1. Le poids des caractéristiques techniques
Différents éléments influent à la fois sur la forme, sur le contenu des messages ainsi que sur l'interprétation et la représentation des interlocuteurs.
II.1.1. L'espace
Les connectés ne sont pas en co-présence. De nombreux messages vont ainsi être consacrés à la matérialisation des lieux mais aussi de l'aspect physique..., toutes ces indications permettant de se faire une représentation visuelle de l'autre:
* skippy entre la banlieu du 92 et la normandie
* Shalimar sourire... je suis brune, cependant- plus ronde que la dame de l'affiche, les yeux plus clairs, la peau plus blanche. .. mais brune.
La non co-présence implique également l'absence de tout signe d'ordre visuel ou auditif (gestes, mimiques, regards, intonations...) qui aident l'interprétation dans une communication traditionnelle. Chacun ne dispose donc plus que de sa propre interprétation. On peut parler d'effet miroir. Comment s'effectue dès lors la construction du sens si l'interprétation se réduit à celle du message transmis et celle du message précédent (ce dernier apparaît toujours en bas de l'écran) ?
II.1.2. Le temps
Sur minitel, l'instantané d'une situation quotidienne est remplacé par un léger différé. Ainsi, et ajouté à la multiplicité des interlocuteurs, es risques de confusion entre les personnes sont grands et ne facilitent pas la spontanéité.
II.1.3. La page-écran
Sa dimension est réduite en longueur et en largeur. Elle impose des contraintes au niveau de la taille des messages (ils ne doivent pas être trop longs sous peine d'être coupés arbitrairement). Les messages ont donc pour la plupart la caractéristique d'être brefs, concis, de comporter de multiples abréviations, des écritures phonétiques... Ils vont droit au but et font penser, à certains égards, au style de la bande dessinée.
II.1.4. Le clavier
II se présente sous la forme d'un clavier classique de machine à écrire. Cependant, les touches sont petites et certaines sont plus difficiles d'accès que d'autres (les accents, par exemple au profit des ponctuations du type interrogation ou exclamation). L'écrit minitélique est caractérisé par une absence d'accents, de ponctuations "syntaxiques" et les fautes d'orthographe ainsi que les ponctuations "expressives" y sont nombreuses. Plus qu'au clavier, nous pensons que cela est dû à la dimension temporelle. Les interlocuteurs semblent privilégier, parmi les signes typographiques à leur disposition, ceux qui font sens. "Sur minitel, le temps est toujours compté! Il y a toujours un risque d'une coupure sur le réseau, ou le risque que le destinataire s'en aille. Il y a toujours urgence.(G- ANIS, 1987).
Tout donc, dans la configuration technique du minitel, contribue à donner à l'écrit une forme brute.

II.2. L'oralisation de l'écrit
Lorsque nous lisons les textes produits par l'intermédiaire du minitel, nous avons l'impression d'avoir affaire à des conversations orales qui ne sont pas sans rappeler ce qu'on peut entendre dans les lieux de fêtes, de réception... tous les lieux qui rassemblent des personnes anonymes. Ce nouveau langage, comme l'ont remarqué J. ANIS (1987), F. DEBYSER (1989) ou D. LUZZATI (1991) et comme nous l'avions nous-même constaté lors d'une précédente étude sur ce sujet, présente de nombreuses caractéristiques de l'oral sans toutefois en être réellement (il s'agit avant tout d'un écrit!). Nous avons affaire à un objet hybride "qui bouleverse complètement les classifications établies entre l'oral et l'écrit et qui pose la question fondamentale: de quel français s'agit-il? (...) s'agit-il d'une langue orale scriptée ou d'un écrit oralisé?" (F. DEBYSER, 1989). Il semble pourtant que les différences avec l'oral soient moins nombreuses qu'avec l'écrit. En effet, à l'écrit, on ne trouve que rarement des énoncés de ce type, caractérisés par une grande désinvolture, un recours à des niveaux de langue familiers et à des procédés linguistiques typiques de la langue orale. En réalité, il semble que nous soyons en présence "d'un oral transcrit à la va-vite" (F. DEBYSER, 1989). Ainsi, nous pouvons définir l'écrit minitel comme un énoncé écrit produisant un effet d'oral. La question qui se pose maintenant est de savoir ce qui, dans cet écrit, provoque un tel effet. Nous avons déterminé deux ensembles de procédés: les procédés typographiques et le style (lexique, syntaxe et pronoms).
II.2.1. Les procédés typographiques
II.2.1.1. LA PONCTUATION
Elle est, de loin, le procédé le plus utilisé pour donner de l'expressivité au message. Nous avons restreint l'étude de la ponctuation à son acception la plus commune (points, virgules, guillemets, parenthèses, points d'interrogation, d'exclamation...), les mises en relief diverses étant étudiées séparément. Nous avons choisi de classer la ponctuation en deux parties, selon sa fonction.
• La fonction syntaxique
Cette ponctuation (points, virgules, points virgules, deux points) est celle qui délimite des unités syntaxiques, qui clarifie le sens, qui évite l'ambiguïté. Elle facilite la lecture d'un texte écrit, donnant un certain nombre de repères.
Sur minitel, son emploi est variable. On trouve aussi bien des messages très ponctués que pas du tout. Ainsi, ces deux exemples:
*pain it black :
j'aime tourner longtemps autour de ma proie chacun son truc c'est savoureux quand enfin les désirs inexprimés explosent
* Shalimar
Bien sur...je ne sais pas bien tutoyer,
il ne faut pas m'en vouloir! mais je vais essayer... non, cette passion la n'etait pas destructrice, elle était simplement impossible. On coule et on relevé la tête...

Cependant, d'une manière générale, elle est peu présente en comparaison des ponctuations expressives. En fait, elle ne paraît pas suivre de règles; elle est livrée à l'imagination, au style de chacun. Nous avons pu remarquer que, généralement, lorsqu'un interlocuteur commence à l'employer, elle subsiste durant la totalité du dialogue. La ponctuation ferait-elle partie intégrante d'un style? Difficile de répondre à une telle question sans une analyse stylistique détaillée. L'absence de ponctuation pourrait tout aussi bien s'expliquer en rapport avec le degré d'instruction des interlocuteurs. Une telle hypothèse nous paraît cependant audacieuse.

Pour notre part, nous pensons que la rareté de la ponctuation syntaxique est essentiellement liée à la question du temps. En effet, comme nous l'avons vu, ce qui est important dans le dialogue sur minitel, c'est le contenu et non la forme. Les ponctuations syntaxiques ne seraient pas ici nécessaires à la compréhension, les messages étant d'une façon générale très brefs. Les interlocuteurs seraient alors amenés à privilégier les ponctuations expressives dans la mesure où ce sont elles qui, principalement, contribuent à donner du "sens" au message. Le souci d'expressivité primerait donc sur le souci de clarté.

* La fonction "expressive"
Nous avons inclus ici toutes les ponctuations qui, en français, sont destinées à donner du sens (ou du son) aux phrases : point d'exclamation, point d'interrogation, points de suspension. Nous avons intégré le point d'interrogation dans cette catégorie car, sur minitel, il est plus utilisé à donner de l'expressivité au message qu'à lui assigner une valeur d'acte.

Ces ponctuations représentent la majorité des ponctuations utilisées. Cela s'explique aisément dans la perspective de l'oralisation de l'écrit. En effet, nous avons affaire à des conversations, en cela proches de l'oral, mais qui passent par l'écrit. Il est donc nécessaire pour les interlocuteurs de se donner des clés de lecture et de compréhension. L'utilisation de ces ponctuations le permet en donnant un "ton" au message.

Les points d'interrogation sont utilisés, ou bien pour souligner une question ou bien pour exprimer un étonnement (ils sont souvent multipliés) :
* homard :
pourquoi aimes-tu la mer?
* skippy
(à caressante) : jusqu'à quel point??
caressante :
Les points d'exclamation, eux traduisent essentiellement des sentiments ou des émotions. Ils donnent une "couleur" au message, un style, un ton. Es viennent souvent souligner un sourire :
* Shalimar :
rires... oui: elles ont quelques moyens,
c'est en effet une constante!!!!!

Enfin, les points de suspension, très largement employés, ont différentes significations: de la simple pause (ou silence) à l'hésitation et surtout l'émotion leur valeur est loin d'être homogène. En voici quelques exemples qui montrent la diversité des usages:
* maille qui m'aille :
j'ai aime très fort une fille qui le portait...
Shalimar :
j'ai aime très fort un homme qui l'aimait...
* MARBRE :
auriez vous la bonté de.... de préciser votre pensée...
* Florian :
...chut skippy :

L'ensemble des ponctuations expressives est donc essentiel dans la communication par minitel. Ce sont elles qui contribuent pour une large part à donner "vie" aux messages en leur apportant une courbe intonative. Ils deviennent "auditifs" et non plus seulement "visibles". Un des canaux de la communication est ainsi artificiellement recrée, ce qui rapproche ces conversations de l'oral. D'autres procédés typographiques vont dans ce sens.

II.2.12. Autres procèdes typographiques
Divers procédés propres à l'écrit contribuent à produire un effet d'oral. Il s'agit de l'ensemble des moyens qui isolent un mot ou un groupe de mots: les capitales (Shalimar : il n'y a qu'UN parfumeur; pastel: du CHAMPAGNE!!!!); les guillemets (doinel : je me demandais juste pourquoi tu me disais "sois sympa"); les parenthèses (doinel : la même illustration dans fluide glacial (que je lis aussi) m'aurait paru fade..).

Enfin, on trouve un procédé qui consiste en la multiplication de lettres. Cela allonge la fin d'un énoncé (pastel : bigre!.... je suis seulllllll!!!!!!).

II.2.2. Le style minitélique : lexique et syntaxe
Ce "style minitélique", s'il en est un, se caractérise par:
* un vocabulaire familier (ex: "chouraver, piger, ouais, brancher, boulot" ...);
• des écritures phonétiques imitant le français parlé (ex: "a y est, chuis pantois, voui, pige po" ...);
• l'ellipse de certains morphèmes syntaxiques (homard : je le vois jamais; est ce sérieux ?? : tu navigues ???)
•l'ellipse de certaines lettres notamment celles des pronoms personnels (homard : t'étais parti(e) ou?; Asticot bordélique : j'te mets un disque des Rolling Stones...);
• une syntaxe, notamment pour les interrogatives, propre à l'oral (trouble : tu aimes la mer ?).

A la lumière de notre analyse, nous pouvons maintenant affirmer que de nombreux procédés, dans l'écrit minitélique, contribuent à oraliser le message. Quant aux raisons qui guident ces choix, nous pouvons ébaucher quelques hypothèses.

En premier lieu, il y a la situation même où le langage est utilisé. C'est une interaction. Deux interlocuteurs se trouvent en même temps, sur un même espace et ont le désir de communiquer. Seul l'écrit est à leur disposition. Mais comme ils désirent se rapprocher le plus possible de la réalité, ils emploient le langage de leurs conversations quotidiennes. Un langage hybride fait alors son apparition.

En second lieu, on trouve les conditions dénonciation liées à l'objet technique lui-même. L'écrit du minitel est par essence éphémère, ce qui le rapproche encore de l'oral. C'est un écrit qui s'envole, contrairement au proverbe. En outre, le clavier, le temps... engendrent des "phénomènes de bruit" (DEBYSER) (fautes d'orthographe, d'espace...) qui rapprochent encore cet écrit de l'oral.

Jusqu'à présent, nous n'avons évoqué que des facteurs externes. Il faut aussi prendre en compte la volonté consciente des interlocuteurs. Nous pensons en effet que les connectés ont un savoir inconscient; d'une certaine manière, ils savent "jouer" avec les mots, le style pour donner à leurs messages une tournure interactive. Il ne faut cependant pas exagérer ce savoir.

Une question reste pourtant: malgré toute l'interactivité que peuvent produire ces artifices, il n'en reste pas moins que c'est un écrit et que la construction d'une relation passe par lui. De quelle manière? Telle est la question qui a guidé la suite de notre réflexion.

III. L'interaction

De nombreux auteurs s'accordent à dire que la conversation constitue un type particulier d'interaction. Il y aurait un paradoxe à appliquer le terme de conversation aux échanges qui prennent place sur minitel dans la mesure où il sous-entend une idée d'oral. Néanmoins, nous pensons pouvoir élargir ce terme à ces échanges puisque, comme nous l'avons montré, ils prennent de nombreux traits de l'oral.

Avant d'aborder l'analyse des conversations, il nous paraît important de revenir de manière plus précise sur le contexte dans lequel elles se déroulent. En effet, il possède des traits singuliers. Nous en avons retenu deux :

III.1. La finalité d'une conversation par minitel
Précisons que nous avons affaire à des conversations de première rencontre: les interlocuteurs ne se sont jamais contactés auparavant, n'ont aucun passé commun.
Nous pouvons supposer, quant au but proprement dit de ces conversations, que les personnes présentes ont le désir ou du moins font comme si elles avaient le désir, à plus ou moins long terme, de se rencontrer. Nous avons employé l'expression "faire comme si" car nous pensons que le désir de rencontre ne va pas de soi. En effet, il n'est peut- être pas réel, il n'est peut-être qu'un prétexte à un autre but sur lequel nous ne risquerons pas d'hypothèse. Nous voulons seulement insister sur le fait que le désir de rencontre est à mettre en question dans sa réalité mais qu'il a en tout cas besoin d'être supposé par les interactants pour que l'échange ait lieu. La conversation est donc orientée vers cette finalité. Cela passe par la découverte d'affinités communes (d'où les questions portant sur l'activité professionnelle, les loisirs...). D s'agit en fait, en un minimum de temps, de cerner l'interlocuteur qui est en face afin d'évaluer la possibilité éventuelle d'une rencontre de visu. Tout, dans ces conversations, tourne donc autour de la question "est-ce que nous avons suffisamment d'affinités pour nous rencontrer ?".
III.2. La dimension imaginaire
Les seules réalités existantes sur minitel sont l'écran et les mots qui y figurent. Il existe donc une forte dimension imaginaire dans ces conversations. Elle intervient à différents niveaux.
Tout d'abord, rappelons-le, il y a l'espace, le lieu duquel on écrit. D n'a aucune matérialité sinon celle que lui donnent parfois les uns ou les autres. L'échange a lieu dans une autre dimension, dans un espace imaginaire.
Puis, et c'est sans doute le plus important, il y a les personnages crées de toutes pièces à travers les pseudonymes. Les identités ainsi fabriquées paraissent extraordinaires et sont bien souvent idéalisées (ce dont témoigne la déception qui apparaît parfois lors de la rencontre réelle). C'est ici que l'imaginaire entre en jeu. Chacun des partenaires, à partir du pseudonyme puis de l'écrit, se fait une image de l'autre, s'en donne une représentation qui va, en partie, déterminer son envie de poursuivre la conversation. Néanmoins, afin de garantir un ancrage dans le réel, les partenaires vont matérialiser un certain nombre de paramètres tels que l'âge, l'aspect physique... Peut-être pouvons-nous aller jusqu'à dire qu'une interaction par minitel plonge les interactants dans une sorte d'angoisse de savoir qui est l'autre dans la mesure où ils ont perdu tous leurs repères habituels. D'où ce désir de les recréer artificiellement en posant des questions et en choisissant de ne pas mettre en doute leur véracité. En effet, si le doute s'introduit à chaque message, rien ne pourra alors servir d'appui à la communication. L'important est donc de croire en ce que dit l'autre, peu importe que ce soit vrai ou faux. C'est une convention implicite, partagée par tous.

Nous avons pu constater que, sur minitel, tous les dialogues tournent autour de la question "qui es-tu?". Mais au-delà de ce désir exprimé de savoir qui est l'autre, peut-être est-ce une question sur soi- même, un "qui suis-je ?". Nous avons d'ailleurs souvent remarqué que beaucoup faisaient preuve d'une certaine passivité, attendant qu'on les interroge, comme s'ils attendaient du minitel d'être un miroir. Cette hypothèse tend à remettre en cause la dimension interactive des messageries... Quoiqu'il en soit, la fiction concernant l'identité détermine en grande partie les conversations sur minitel. Découvrir l'autre devient un but qui n'est pas sans prendre un aspect ludique.

Enfin, nous parlions d'identité imaginaire, nous devrions aussi parler de relation imaginaire. Dans une interaction en face à face la constitution du lien se fait non seulement par la parole mais aussi par une multitude d'autres facteurs: l'aspect physique, le regard, l'intuition, le sourire, la façon de s'exprimer etc.. Sur minitel, seuls les mots et l'image qu'ils véhiculent de leur interlocuteur sont à la base de la constitution du lien.

La construction de la relation interpersonnelle passe en outre par l'utilisation des pronoms personnels. Nous avons noté un certain degré "d'impersonnalisation" qui se traduit de deux façons: ou bien, il n'y a pas du tout de pronoms (pastel : maintenant suis ok...pour t'envoyer toute la joie du monde), ou bien, on trouve le pronom "il" utilisé de façon impersonnelle (alcibiade, par exemple, parle de lui à la troisième personne du singulier; d'une certaine façon, il se dédouble : il y a lui et son personnage. La conversation se passe non entre un "je" et un "tu" mais entre skippy et alcibiade). Pour finir sur les pronoms, nous avons noté un usage pour le moins non conventionnel du tutoiement et du vouvoiement. En fait, il semble que la règle soit le tutoiement au départ, pour tout le monde, et que le vouvoiement soit réservé à un interlocuteur privilégié, dans des moments de complicité ou d'affinités intenses. L'utilisation du "tu" et du "vous" est donc inversé par rapport à la réalité.
Suite à ces quelques remarques, il nous semble que le terme d'interaction soit quelque peu décalé par rapport à la réalité des conversations qui prennent place sur minitel. Cependant, nous pouvons nous demander dans quelle mesure, les conversations quotidiennes ne prennent pas les mêmes caractéristiques... Nous parlions de "mal-être communicationnel", devrions-nous parler de "mal-être interactionnel"?

III.3. L'architecture des conversations
Nous avons souhaité, en forme de conclusion, ébaucher une analyse des échanges minitéliques que nous limiterons aux séquences d'ouverture.

En analysant notre corpus, nous avons dégagé une structure générale des conversations:
• Une séquence d'ouverture
• Un noyau conversationnel dont le contenu est varié mais tourne autour du thème central : qui es-tu?
• Une séquence de fermeture (Facultative. Elle dépend en fait de la "réussite" de la conversation).

Les séquences d'ouverture
Par ouverture, nous entendons la prise de contact et le moment de "flottement conversationnel" jusqu'à l'accord sur une premier thème de discussion. Elle se passe en plusieurs temps:
"Initiation"
Avant tout, notons que ce sont toujours nos "compères" qui ont pris l'initiative du contact. Nos pseudonymes n'étaient-ils pas suffisamment "accrocheurs"? En ce qui concerne la prise de contact, nous avons constaté qu'elle s'effectuait toujours sur le thème du pseudonyme ou de la CV (Carte de Visite). Rien d'étonnant à cela dans la mesure où ils constituent les seuls indices "visibles" dont nous disposons. Ils déterminent l'envie d'entrer en contact.
• skippy à Caressante : jusqu'à quel point??
• maille qui m'aille à MMINOUCHE :
j'adore toutes ces consonnances en "m"

Ce thème va se poursuivre jusqu'à ce que l'un ou l'autre des interlocuteurs se décide à en proposer un autre. Nous faisons l'hypothèse que c'est de cette capacité à introduire un autre thème que va dépendre l'issue du dialogue. Si les interlocuteurs n'arrivent pas à dépasser ce stade, la conversation prendra fin.

Reaction
Les réactions à la prise de contact sont diverses: certains n'ont pas du tout répondu; d'autres ont répondu mais en excluant le dialogue prétextant un manque de temps, par exemple. D'autres encore, ont tout de suite embrayés de manière active. D'autres enfin, se sont contentés de répondre mais sont restés d'une certaine manière "passifs", c'est-à-dire qu'ils se sont contentés de répondre mais n'ont pas cherché à engager de nouveaux thèmes de discussion.

Le flottement conversationnel
II s'agit de ce moment de battement entre la prise de contact et l'introduction du premier thème. Ce temps est plus ou moins long et se nourrit principalement de jeux de mots sur le pseudonyme.

LE PREMIER THEME vient plus ou moins naturellement et tourne, la plupart du temps autour de la question "qui es-tu". Pour pouvoir dire que la conversation a "prise", il faut non seulement qu'un premier thème soit introduit mais aussi que le deuxième interlocuteur le ratifie. S'il n'y a pas ratification la conversation s'arrête. Ainsi, dans l'exemple suivant, la non ratification du thème par Est ce sérieux ?? va engendrer la fin du dialogue:

• Maille qui m'aille :
le regard des bebes sur le golfe ?"
Est ce sérieux ?? :
non non...pas sur le golfe....sur l'avenir....

Les ouvertures constituent donc le moment-dé d'une interaction par minitel. De leur réussite va dépendre la réussite de la conversation, réussite qui passe par une prise de contact "accrocheuse" et la capacité à passer rapidement à un autre thème de discussion ratifié par les deux interlocuteurs.

Les spécificités d'une interaction par minitel se résument donc en deux points:
• la dimension imaginaire dans la mesure où elle détermine, pour une large part, le dialogue. Elle en fournit les thèmes essentiels.
• le choix qu'offre l'objet technique sur les interlocuteurs. On choisit d'ouvrir le dialogue avec qui l'on veut, on choisit de le fermer à tout moment. Rien n'est en effet plus facile sur minitel que de ne pas répondre: l'interlocuteur disparaît alors dans un univers où il est impossible de le retrouver.


Conclusion

Notre investigation nous a permis de constater que les messageries conviviales ont créé leur propre langage, leur type d'interaction. Si l'on ajoute à cela les rituels d'initiation des débutants et toutes les règles sous-jacentes à cet espace de communication, nous avons tous les éléments pour faire l'hypothèse qu'une micro-société a vu le jour. Cependant, il nous faut relativiser une telle hypothèse. En effet, si les messageries ont connu pendant un temps un énorme succès, elles sont actuellement en baisse de fréquentation et semblent désormais être reléguées à un statut de phénomène marginal. Les "solutions" aux problèmes de communication dans la société qu'elles paraissaient apporter auraient donc vite été perçues comme des leurres, peut-être parce qu'en fin de compte la communication prétendue n'était qu'une illusion. Nous avons longuement insisté sur cet aspect: illusion des identités, illusion de la relation et finalement illusion de communication. Notre propre expérience corrobore cette idée. Nous avons été frappée par l'effet miroir du minitel: les heures défilent rapidement avec cette impression formidable d'être en contact direct avec une multitude d'identités différentes. Or, lorsque l'écran s'éteint, un vide s'installe, un sentiment de solitude nous envahit; nous étions en fait seule à écrire, à interpréter, à communiquer avec nous-même. L'illusion semble donc avoir été totale. Les messageries ne seraient alors qu'un jeu, un carnaval où des personnages masqués évoluent en se donnant l'illusion de nouer des relations. Quel avenir pour les messageries?...

Emmanuelle LÉVY


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Le Minitel rose
L'expression Minitel rose désigne tous les services de messageries roses développées pour le Minitel.

Cachés derrière des pseudos, les utilisateurs s’envoient des messages coquins et plus si affinités. Apparaissent alors les services de messageries érotiques 3615 Monique, 3615 Aline; ULLA etc. Au total, les services libertins occupent 30% des connexions des utilisateurs. Un business qui va se révéler très lucratif. En effet, les utilisateurs payent à la minute. Xavier Niel, le fondateur de Free a d’ailleurs bâti sa fortune grâce au Minitel rose. Les services de messageries conviviales appartenaient d’ailleurs à des groupes de presse. Par exemple, le Nouvel Observateur possédait 3615 Aline. Et Libération possédait 3615 Turlu.
Tout est mis en œuvre pour inciter les utilisateurs à utiliser le service payant. Mais surtout à le faire rester le plus longtemps possible sur la messagerie. Ce qui a donc engendré de nombreuses « arnaques ». En effet, des robots ou mêmes des personnes physiques, se font passer pour des femmes afin d’entretenir des conversations érotiques avec les utilisateurs. Appelée hôtesses ou animatrices, ces personnes étaient rémunérées pour faire durer la conversation.
Mais avant que les dérives apparaissent, certaines personnes ont pu se rencontrer grâce au Minitel rose, et même trouver l’amour ! L’ancêtre de Tinder et de tous les sites et applications de rencontre.

Extrait de l'interview d'un responsable de société de télématique : « Internet n’a pas le côté sulfureux du minitel », estime Vincent Hutin. Étant incapable d’afficher une quelconque photographie, tout est dans la suggestion. Autre atout du minitel rose : un sentiment d’anonymat. « Le minitel ne permet pas d’identifier les utilisateurs, contrairement à Internet qui laisse des traces plus facilement. Le minitel est extrêmement discret ».
Exemples de services fournis :
- dialogue en direct avec d'autres utilisateurs par de courts messages, à la manière d'une messagerie instantanée ;
- messagerie (courrier électronique entre les utilisateurs du même serveur) ;
- petites annonces.
En 1992, les services de Minitel rose continuaient de poser problème à l'autorité et aux associations familiales, il était par exemple « demandé à France Télécom, dans le souci de satisfaire les associations familiales, de promouvoir les systèmes de contrôle d'accès au Minitel : cadenas sur le Minitel de base, mots de passe ».
Ce service étant facturé à la minute, diverses pratiques gardées sous silence permettaient de prolonger la durée de connexion des clients.

En 2007, le PDG d'une entreprise ayant travaillé dans ce secteur indique dans un commentaire d'un article sur le Web, que « Il est cependant probable que la proportion de trafic animé par des robots, des animateurs, ou de fausses inscriptions était sensiblement plus élevée sur Minitel (20 à 35 % du trafic) que sur Internet (5 à 10 % du trafic). »

La taxe sur les services d'informations ou interactifs à caractère pornographique, dite taxe sur le Minitel rose ou taxe sur les messageries pornographiques, est une taxe française créée en 1988 et abrogée en 2021. Le ministre du Budget admet en 1995 que la taxe s'avère très difficile à mettre en œuvre.

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Le dossier noir du minitel rose
/ Denis Périer -- 1988 Disponible en librairie
"Un cadavre de femme sur une décharge publique. Encore une victime des réseaux de maniaques sexuels qui se constituent grâce aux messageries roses du Minitel. La police, abasourdie, se demande comment stopper la prolifération de sexualités interdites (pédophilie, zoophilie, etc.) dont les adeptes peuvent enfin se reconnaître et se rencontrer sans trop de risques grâce au caractère éphémère des annonces passées sur leurs écrans domestiques. S’agit-il, comme veulent le laisser croire les pères du plus spectaculaire des produits de France-Télécom, d’une déviation imprévisible de l’outil ? L’enquête, rigoureuse mais pittoresque, menée par Denis Perier, prouve qu’il n’en est rien. Au prix d’une étroite et active complicité, hauts fonctionnaires et patrons de presse ont organisé un vide juridique permettant que les ébats érotiques tarifés rentabilisent ce nouvel instrument de communication, en échappant aux sanctions pénales et pour le plus grand bonheur des marchands de sexe."
Disponible sur Ebook

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Vu sans L'Obs Publié le 04 août 2017 .
L'âge d'or du 36-15 : le Minitel, roi des services et de la drague virtuelle
Une étudiante s'informe par Minitel sur les inscriptions en université, en juillet 1989 (ARCHIVES / AFP)

Plongée dans les archives du "Nouvel Observateur" autour de l'informatique. Dans les années 1980, la France raffole du Minitel, exclusivité hexagonale. Par Thierry Noisette ·

Les années 70 ont vu apparaître les premiers micro-ordinateurs, les années 80 sont celles, en France, du Minitel : "Le Nouvel Observateur" lui consacre de nombreux articles et dossiers au fil des années 80 et 90, qui vont de la curiosité initiale à l'esquisse des réseaux mondiaux puis d'Internet qui le détrônera, en passant par les conseils pratiques et des cocoricos.
Le 25 novembre 1983, Fabien Gruhier écrit, dans un article appelé "Votre Minitel m'intéresse", sur l'accès bientôt généralisé à nos informations bancaires :
"Plus question d'invoquer une quelconque distraction, une ignorance du solde pour expliquer un découvert : chacun pourra à tout instant, nuit et jour, sept jours sur sept, vérifier 'en temps réel' sa position bancaire. [...]
Prenez un Minitel – vous savez, ces petits terminaux qui se branchent sur une simple prise téléphonique, que les PTT [Postes, télégraphes et téléphones : les PTT ont existé de 1930 à 1990, et sont "l'ancêtre" d'Orange – lui-même d'abord France Télécom – et de la Poste,] vont peu à peu distribuer partout gratuitement pour la consultation sur l'écran de l'annuaire téléphonique et que les citoyens pressés peuvent, en attendant, louer pour une somme modique dans la téléboutique du coin."

La consultation de l'annuaire et celle des comptes bancaires sont les plus mises en avant par les PTT et les plus citées, mais la montée du Minitel correspond aussi à un tout autre usage, imprévu par ses créateurs : les forums, les échanges en ligne et la drague virtuelle – les messageries roses, ces 3615 de tous genres, vont bientôt constituer un univers en soi, avec leurs publicités partout et leurs animatrices (qui pouvaient aussi bien être des hommes salariés pour se faire passer pour des femmes).

Le 4 janvier 1985, Mariella Righini expose "la fièvre du Minitel" qui a saisi Strasbourg : le Gretel (Groupement régional de télématique) propose plusieurs services en ligne, comme un journal électronique avec le quotidien "Les Dernières Nouvelles d'Alsace". Pour dépanner les usagers en difficulté, un logiciel de communication a été mis au point.
"De jeunes pirates découvrent ce trésor de la communication et le détournent à leur usage et profit. Le temps que les logiciels s'en aperçoivent, les clandestins du Gretel se sont démultipliés comme des bretzels.
Trop tard pour sévir. Alors que partout ailleurs on peut écrire 'ennui' sur le centimètre de poussière qui recouvre ces machines inoffensives, à Strasbourg on se les arrache.[...] On se connecte des heures et des heures, de jour comme de nuit, jusqu'à saturation des lignes téléphoniques d'accès à l'ordinateur. [...] On minitèle à table, au lit, à la cuisine, aux toilettes. Infernale passion, cocktail de scandale et de technologie, qui a mis toute une ville sens dessus dessous.
Ce que Tinder dit de nous : immersion dans les applis de rencontres
Le cas de le dire. Car c'est son âme, son cœur ou son cul – on appellera ça comme on voudra -, juste habillés d'un pseudo, qu'on affiche à l'écran. Un numéro d'appel pour se connecter au système, les trois lettres MSG sur le clavier et on voit apparaître la liste d'une cinquantaine d'autres pseudos prêts à dialoguer. A chacun de choisir son interlocuteur ou de se laisser choisir par celui avec qui on échangera des messages très personnels. [...]

Figures très libres. L'anonymat autorise toutes les fictions. Glissements de sexe, d'âge, de statut. On peut se faire passer pour n'importe qui. Et se dire n'importe quoi. Confessionnal télématique, divan cathodique, pas de censure sur MSG. Gretel peut draguer Hans, son petit frère, et même la sorcière si ça lui chante.
Car c'est bien de 'ça' qu'il s'agit. Même si, officiellement, personne n'y pense. On 'fait de la communication', on 'expérimente un nouveau langage', on compare les mérites respectifs de 'la chose dite' et de 'la chose écrite'. 'Au niveau du vécu...', enchaînent les intellos. Tu parles. Ils draguent tous comme des bêtes."
Et citant plusieurs cas de figure, la journaliste conclut par :
"Ce couple libéré qui télémate chacun de son côté, jusqu'au jour où la femme découvre le pseudo de son mari, s'en attribue un autre, se branche sur lui à partir de l'appareil d'une amie, et se fait draguer comme une chienne. Trop c'est trop. Elle rentre comme si de rien n'était et se couche sans broncher. Au réveil, l'imprudent bute sur une forme dure qui dépasse de la couette. C'est le Minitel qui dort sur l'oreiller."

"Français, vous êtes les seuls à l'avoir", clame en surtitre "le Nouvel Observateur pour son premier numéro de 1987, titré "L'année du Minitel".
Le dossier l'affirme : "Il est plus connu que Christophe Lambert, plus enivrant que le beaujolais nouveau, plus branché que Mourousi, plus rentable que Bernard Tapie, plus contagieux que le sida, plus érotique qu'Adjani, plus sérieux que le pape."
Il raconte la genèse du petit terminal – la volonté d'en finir avec le coûteux annuaire téléphonique papier -, et Fabien Gruhier met en avant cette révolution :
"Mesure-t-on bien ce que cela signifie au plan des libertés publiques ? Avec un micro-ordinateur et une ligne téléphonique, n'importe qui peut diffuser, sans aucun contrôle, n'importe quel message. En texte et en images. Les équipements nécessaires – innombrables – sont vendus partout. Pour, disons, moins de 20.000 francs [5.141 euros en équivalent 2016], vous pouvez vous aussi devenir 'serveur télématique'. Il suffit en somme d'avoir quelque chose à dire.
Le Minitel a donc ouvert une ère de communication sauvage. Aujourd'hui, des milliers de micro-serveurs diffusent dans la nature des millions d'informations libres. Des associations, des particuliers, des épiceries de quartier, des mairies de villages, des clubs informatiques, des scouts, des bonnes sœurs, des prostituées, des salons de coiffure, des restaurateurs... balancent par téléphone leurs écrans informatifs. Il suffit de connaître le téléphone et de payer la communication."

Aux côtés de ces communications "sous le radar", les services les plus connus du Minitel sont accessibles via trois numéros, 36-13, 36-14 et 36-15, ce dernier étant le plus répandu. Le tout constitue un écosystème fort rentable :
"Tout est limpide : le serveur diffuse librement son produit. Le client appelle, consulte, utilise le service. On lui facture une taxe de base toutes les 45 secondes. La somme est collectée par les PTT – de façon indifférenciée dans les factures téléphoniques. Mais les deux tiers du pactole sont reversés par la Poste au prestataire du service.
Les PTT auront ainsi, en 1986, payé 700 millions de francs [180 millions d'euros en équivalent 2016] aux serveurs de tous les produits télématiques (messageries roses, horaires SNCF, commandes aux Trois Suisses, etc.) qui transitent par Télétel. 700 millions en 1986, 285 millions en 1985, 14 millions en 1984 : la progression est donc fulgurante."
3 minutes par jour par poste en moyenne
Les investissements de la Direction générale des télécommunications (DGT) sont arrivés au succès en 1986, souligne le journaliste : "La télématique est devenue un marché solvable – ce qui la distingue de l'avion Concorde, autre victoire de la technologie française. Deux millions et demi de Minitel sont installés. La France constitue ainsi un laboratoire télématique en vraie grandeur, avec une densité de terminaux unique au monde [...].
On ne peut plus prendre le métro, ouvrir un magazine ou écouter la radio sans tomber sur de la pub de tel ou tel serveur. L'annuaire électronique permet de retrouver instantanément n'importe quel cousin éloigné et perdu de vue – que peut-être on aurait préféré ne pas retrouver, mais c'est votre problème, n'allons pas mélanger les prouesses de la technologie avec vos difficultés familiales."
Les chiffres ? "
Chaque poste Minitel est utilisé en moyenne trois minutes par jour, ce qui nous fait un total mensuel de 2,5 millions d'heures. [...] On considère que de 30 à 40% des Minitel gratuits distribués par les PTT sont inactifs – dorment dans un placard à la suite d'une expérience malheureuse avec une facture téléphonique jugée excessive. Il s'ensuit que tous les autres Minitel, ceux qui ne sont pas inactifs, font vraiment très fort."

Le pactole du Minitel
Dans le même numéro, Caroline Brizard décortique les chiffres du Minitel (et ceux qui n'ont connu qu'Internet comprendront leur bonheur à ne pas payer en fonction du temps passé, que ce soit devant un ordi ou un smartphone...) : "Le particulier paie à la DGT 59,20 francs [15,2 euros en équivalent 2016] l'heure sur Télétel 3 [le plus répandu, celui des 36-15]" ; et quand on arrive à la douloureuse, le coût mensuel du Minitel pour les particuliers est estimé fin 1986 à 96,10 francs [24,16 euros] voire sur Minitel loué à 220,50 francs

La journaliste cite "une grosse pointure du kiosque" (numérique), Yves Memmi, qui dirige une nébuleuse qui "coiffe une trentaine de services (Obs, Aline, Jane, Mimi...) avec 210.000 heures de connexion mensuelle et un million d'appels par mois. Chiffre d'affaires annoncé ? 70 millions de francs [18 millions d'euros en équivalent 2016] pour 1986 dont 55 millions de francs pour les seuls services de 'Sciences et Avenir'."

Un pactole pour certains alors. Dans un autre article, Guy Sitbon dépeint le petit monde des forums de discussion, où chaque service est un village, dans lequel "nous sommes tous plus beaux, plus heureux, plus intelligents, plus..., plus... Nous nous donnons à voir tels que nous souhaiterions être et ça nous réchauffe tant le cœur !" Sa conclusion sur ces univers virtuels : "L'heure du Minitel est chère mais n'est-ce pas le plus abordable et le moins toxique des tranquillisants ?"
Mais cet âge d'or (pour les tenanciers des serveurs) ne sera pas éternel ; et ce Minitel d'abord vanté sera progressivement frappé d'obsolescence, une décennie plus tard.

Du Minitel à Internet, l’épopée tricolore
Le 30 mars 1995, Dominique Nora annonce "les tombeurs du Minitel". Certes, ce terminal rustique a réussi alors que "de l'Allemagne aux Etats-Unis, tous les services vidéotex des années 80 échouaient, les Télétel et Audiotel français, eux, établissaient un score époustouflant : 6,5 millions de terminaux, 24.600 serveurs et 9,2 milliards de francs [1,87 milliard d'euros en équivalent 2016] de chiffre d'affaires en 1994. Impressionnant !

"Ils changeront la vie de vos enfants !"
Demain, pourtant, cette télématique à la papa sera démodée, remplacée par une nouvelle génération de services 'en ligne' sur micro-ordinateur : ils sont plus rapides, plus multimédias [expression qui fait florès dans ces années 90], et surtout ils autorisent la manipulation des données par l'usager alors que le Minitel, lui, ne permet que leur consultation.
Attention cependant ! A l'instar des premières automobiles, ces services exigent de l'utilisateur un coûteux équipement (de 10.000 à 12.000 francs [2.028 à 2.434 euros en 2016] pour un ordinateur complètement équipé) et un certain apprentissage. En dépit de ce handicap, ils deviendront un jour grand public... et s'ils ne changent pas votre vie, ils changeront sûrement celle de vos enfants !"

Extraits d'articles du "Nouvel Observateur", de Fabien Gruhier, Mariella Righini, Guy Sitbon, Caroline Brizard et Dominique Nora, entre 1983 et 1995. Equivalences des prix en euros estimés avec le convertisseur de l'Insee. Les transitions, intertitres, vidéos et liens sont (évidemment) des ajouts de 2017.

Edité par Thierry Noisette, avec l'aide du service documentation.

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Conséquences d'Internet

À la fin des années 1990, le Minitel commence à être directement concurrencé par certains sites web (Internet), bien que le taux d'équipement en Minitel soit encore sans comparaison avec celui des micro-ordinateurs équipés d'un modem et d'un abonnement Internet.

En 1997, le Minitel rapportait six milliards de francs. Puis, Lionel Jospin, le Premier ministre, a souhaité favoriser Internet au détriment du Minitel.

En 2003, le Minitel représentait 47 % des revenus de l'ensemble Télétel, Audiotel, Internet.

Plusieurs points clés différencient le Minitel et Internet :
L'ergonomie des systèmes informatiques ainsi que celle des services disponibles par Internet a évolué de façon plus rapide que celle du Minitel, tant en matière d'affichage (la résolution graphique des images, puis plus tard des vidéos, a été supérieure sur ordinateur) que d'interface homme-machine (la souris, et plus tard les écrans tactiles, n'ont pas eu d'équivalents pour le Minitel) ;
Le débit moyen des connexions Internet a continuellement progressé, alors que celui des Minitels est resté identique ;
La rapidité de démarrage du Minitel a été rattrapée par celle des ordinateurs (dans les années 1990, un ordinateur pouvait demander plusieurs minutes pour démarrer, alors qu'il est désormais possible de le faire en quelques secondes, dans le cas d'une veille prolongée ou avec les ordinateurs où le système est installé sur SSD par exemple).

Il existe cependant un débat autour de la question « le Minitel a-t-il favorisé, ou pas, l'émergence d'Internet ? » :
L'argument qui semble l'avoir favorisé est l'aspect éducatif, et plus particulièrement la familiarisation à utiliser le couple clavier/écran ainsi que l'interrogation d'un moteur de recherche (avec l'Annuaire électronique de France Télécom) ;
La thèse opposée explique que la France accusait un retard notable en accès Internet dans les années 1990 (retard rattrapé dans les années 2000).

Cependant, l’intérêt porté par France Télécom au Minitel n’a eu aucun effet à long terme sur le développement des sociétés basées sur le WorldWideWeb ou l’adoption de l’utilisation d’Internet en France ; les rangs de la France sont à peu près égaux à ceux des États-Unis et de l'Allemagne en ce qui concerne la pénétration actuelle[Quand ?] de l'internet à haut débit dans les ménages.

Le Minitel étant un terminal ; techniquement il peut être utilisé pour accéder à Internet en mode texte. Anecdotiquement, des passerelles Minitel/Internet ont été mises en place pour accéder à certains services internet depuis le Minitel (messagerie électronique et Usenet) et même des services professionnels (bancaires …). Un serveur de conversation comme XYZ créa quelque temps un site web du même nom permettant de se connecter depuis un ordinateur. Les connectés par ce moyen ne rapportaient rien, mais assuraient une « masse critique » de connectés susceptible de retenir les usagers Minitel du même serveur.

i-Minitel
i-Minitel est une norme lancée en 2000, qui permettait à l'utilisateur d'accéder à des services Minitel via l'Internet avec un ordinateur, une connexion bas débit ou haut débit, et un logiciel navigateur spécialisé. Le service n'est pas disponible hors de la France métropolitaine (outre-mer ou étranger) parce qu'il faut avoir une ligne fixe France Télécom. Le service est désormais fermé du fait de la fin du Minitel.

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Si Ulla et ses copines ont disparu des requêtes des internautes, remplacées par d’autres services en ligne qui n’ont rien à leur envier, la rupture mise en avant entre Minitel et usages du Web a positionné le premier comme un archétype d’une voie française désormais archaïque voire comme une figure repoussoir, celle de la centralisation, de la fermeture, face à l’ouverture et au caractère distribué que qu’incarne le « réseau des réseaux ». Avant même que Benjamin Bayart, fondateur du fournisseur d’accès à Internet historique qu’est FDN (French Data Network) ne dénonce la « minitélisation » de l’Internet sous la poussée de géants de la communication qui cherchent à réintroduire centralisation et contrôle dans l’Internet,
le Minitel est devenu le responsable du retard français dans l’Internet à la fin des années 90.

En 2013 Louis Pouzin recevait le prix Queen Elizabeth for Engineering des mains de la reine d'Angleterre, aux côtés d'autres inventeurs anglo-saxons de l'Internet et du Web. La France (re)découvrait alors la part qu'elle avait jouée dans les années 70 dans la constitution de ce qui devient un des protocoles phare de l’Internet, TCP/IP. S’il est légitime de se demander si la France n'a pas raté alors le virage qui pouvait l'amener à jouer un rôle majeur dans le développement de l'Internet il est toutefois difficile de considérer que le Minitel a été une erreur. Outre que l’on peut mettre à l’actif de la petite boîte beige d’avoir permis à la fois des bénéfices conséquent côté administration des télécommunications mais aussi du côté des fournisseurs de services ou encore des industriels qui travaillent au développement de la télématique, il faut rappeler derrière Jacques Chirac qu’au milieu des années 1990 la boulangère de Gennevilliers peut consulter son compte bancaire en ligne alors que celle de New York ne le peut pas encore.
Si la France avec le projet Cyclades à l’Institut national de recherche en informatique et automatique a bien joué un rôle dans la naissance historique de l’Internet 32 , ce dernier reste à l’époque encore étroitement limité au monde des chercheurs et des ingénieurs et il ne connaît un développement grand public qu’avec le Web, inventé au Cern (Centre européen de recherche nucléaire) à la fin des années 1980, ainsi qu’avec le développement de navigateurs comme Mosaic, qui va dès 1993 populariser et faire rentrer l’Internet dans le grand public. Quant au retard français dans l’Internet, s’il est effectivement par rapport à ses voisins européens sensible au milieu des années 1990, l’accoutumance des Français à des services en ligne va
rapidement leur permettre de rattraper ce retard initial, lié à une transition entre Minitel et Internet qui doit être pensée autant en termes de continuité que de rupture.
Lorsque en 1997 Lionel Jospin dans son discours à Hourtin se prononce avec vigueur en faveur d'un passage de la France dans la société de l'information et qu'il propose une rupture avec le Minitel, cette transition n’est pas si évidente à réaliser.
Certains en appellent plutôt à la modernisation du Minitel, à l’instar de Louis Roncin, président du syndicat national de la télématique et PDG d’AGL, qui souhaitait surtout voir le dispositif évoluer. Si le Minitel s’est adjoint des éléments de périminitélie comme des imprimantes, globalement le terminal reste rudimentaire : l’écran est toujours en majorité noir et blanc dans les foyers, les messages apparaissent page à page, le système de l’hypertexte et des icônes n’est pas utilisé, il n’y a aucun dispositif de sauvegarde prévu en standard. On peut lui reprocher sa lenteur, la pauvreté des graphismes, la taille réduite de l’écran, ou l’absence de mémoire.
Du côté des offreurs de services, certains prennent le train en route et montrent une belle capacité d’adaptation.
C’est le cas de l’emblématique patron de Free qui continue de défrayer la chronique aujourd’hui. Ses premiers pas dans les messageries roses lui permettent de se constituer un trésor de guerre qu’il réinvestit dans le rachat de 50% des parts de Fermic Multimédia en 1990 bientôt transformé en Illiad. Xavier Niel se lance alors dans ce qui s’avère une phase de transition avec ses passerelles d’accès à Internet à partir de 1994, avant d’obtenir en 1999 le droit d’exploiter son propre réseau et de fonder Free.
D’autres passent également avec succès du Minitel à Internet : on peut citer les parcours de Denys Chalumeau avec seloger.com, Jean-David Blanc et Allociné, ou encore celui de Daniel Kaplan, qui avant de développer la FING (Fondation Internet Nouvelle Génération) a fait ses débuts dans les réseaux télématiques, en lançant en 1986 une entreprise qui créait des services sur le Minitel, JKLM. Un véritable entrepreneuriat numérique fait ses classes avec la télématique et investit durant les années 1990 un marché Internet embryonnaire.
Du côté des usagers, la transition se fait également durant la seconde moitié des années 1990. Le mythe de la gratuité d’Internet face aux coûts de connexion du Minitel empêche aujourd’hui bon nombre d’analystes de comprendre la périodisation de la transition entre télématique et Internet. En effet, si les coûts de consultation du Minitel sont élevés, de l’ordre de 60 francs de l’heure en moyenne, le terminal est gratuit. Il n’en va pas de même pour l’accès à Internet qui non seulement fait payer la consultation à la minute jusqu’à l’apparition des premiers forfaits « illimités » en
1999, mais demande également un coût d’équipement initial de plusieurs milliers de francs pour acquérir un micro-ordinateur capable de se connecter grâce à son modem.
Du côté des pratiques, la facilité d’usage du terminal de France Télécom n’a rien de commun avec les difficultés rencontrées face à une micro-informatique dont les interfaces graphiques naissantes ne font pas disparaître bugs et complexité (Thierry, 2012). Il suffit de lire un extrait de la Carte française des inforoutes de Cédric Curtil (1996) pour se convaincre du fossé qui sépare nos pratiques actuelles de l’Internet de celle du milieu des années 1990 : « Un utilisateur moyen devrait passer près d’une heure par jour sur Internet. Cette durée peut paraître longue mais le réseau est
tellement encombré qu’il faut entre 10 et 20 minutes au minimum pour trouver et charger le document souhaité. Chaque mois, l’utilisateur dépenser donc 325 francs de téléphone s’il n’utilise Internet que les jours ouvrables et se repose le week-end !
Cette somme correspond au double de la facture moyenne de téléphone pour les ménages français ».
Avec le Web, peut-on également lire ailleurs, « l’utilisateur a ‘l’embarras du choix dans le sens négatif du terme : les premiers usagers d’Internet parlent même de ‘ surfer sur le Net’, cette expression [qui] caractérise bien la navigation aléatoire’».
Face à cette « navigation aléatoire » et mal maîtrisée, parmi les premières offres proposées en France, certaines ne sont que des applications internes, des services limités à leur communauté d’abonnés qui facilitent certes la recherche mais proposent des parcours balisés, et les pages d’accueil mettent en belle position l’icône permettant l’accès au Minitel, tandis que l’option Internet reste facultative. En outre, les ténors de la nouvelle économie comme Yahoo et Altavista proposent des offres Minitel : Yahoo lance ainsi le 3615 Yahoo en 2000 . L'offre Minitel d'Altavista
France s'appuie sur la technologie Taxy de la société française NetFront annoncée en 2000. Les Français sont aussi d’importants clients d’émulateurs, pour naviguer sur Minitel depuis leur micro-ordinateur : en 2001, I-minitel, qui permet de bénéficier sur un ordinateur d'un accès aux services Minitel classiques, a été téléchargé 500 000 fois depuis octobre 2000 et France Télécom revendique 200 000 utilisateurs réguliers qui
génèrent 40 000 connections par jour (soit 10% du trafic total du Minitel).
On voit que la rupture entre Minitel et Internet est loin d’être brutale et la séduction qu’exerce le Web ne fait pas pour autant l’objet d’un rejet brutal et massif du Minitel.
Il convient aussi de penser la transition Minitel/Internet dans la continuité, par exemple dans les efforts de numérisation et de mise en ligne des services, notamment publics, depuis le Minitel. Si un article de la Tribune du 27 avril 2000 note : « Christian Scherer, haut fonctionnaire et créateur autodidacte du site Adminet en 1995 le premier Web français sur l’administration -, savoure à sa juste valeur cette prise de ‘Net-conscience’ de l’Etat. ‘En 1995 certaines ambassades françaises avaient décidé de créer des sites Internet pour communiquer sur la France : tourisme, culture,
formalités, paroles de la Marseillaise..., se souvient-il. Le Quai d’Orsay a alors tout simplement interdit ces sites. Motif : Les Etats-Unis c’est l’Internet, la France, c’est le Minitel’ », avant que l’Etat planche sur « la mise au Net des services publics » comme le note l’article, il a entrepris un passage par les services en ligne bien plus précoce que d’autres pays européens et dispose ainsi d’importantes bases de données.
C’est véritablement durant les années 2000 que le rattrapage devient sensible.
En 2004, l’Europe connaît un taux moyen de connexion mensuel de 47% de ses foyers, la France se situe alors dans la moitié haute avec 49%. En 2007, 72% de la population se sont connectés au cours des trois derniers mois à leur domicile et 40% sur leur lieu de travail. En 2009, 19,8 millions de personnes se connectent à Internet tous les jours. Le temps de connexion atteint une heure et vingt minutes par jour

:Postérité(s) d’un ringard avant-gardiste ?
Innovation franco-française, disparue depuis juin 2012, la télématique peut donner lieu à un premier bilan à l’issue de ce rapide passage en revue des points saillants de son histoire.
Issue d’un long processus de rapprochement de l’informatique et des réseaux, la télématique émerge durant la décennie 1970 comme un projet technique, mêlant normes et réalisations concrètes au sein des laboratoires du Cnet et du CCETT.
Appuyée sur un projet modernisateur incarné par le célèbre rapport Nora-Minc, la télématique se transforme en projet politique en 1978 qui passe par une longue phase d’expérimentation « en vraie grandeur » avant de conquérir peu à peu, à partir de 1984, plusieurs millions de foyers et de salariés jusqu’à représenter 6,5 millions de terminaux en service simultanément au mitan des années 1990.
Avant-gardiste, le Minitel interroge dès les années 1980 les objets qui encore aujourd’hui constituent les points d’achoppement de la rencontre entre numérique et société. En cela, il constitue un terrain particulièrement fécond de réflexion et de mise en perspective qui évite l’approche présentiste, trop souvent adoptée dès lors que l’on aborde le numérique.
Du point de vue économique, la télématique interroge ainsi la monétisation de l’information en appuyant son système de création de valeur sur le paiement du temps d’attention. Le Kiosque est à cet égard le précurseur d’une répartition que l’on retrouve à la fois dans l’Imod de NTT DoCoMo, mais également dans l’App Store d’Apple qui repose sur la position d’intermédiaire et de portail pour la commercialisation d’applications. En but aux idéologies originelles et anticommercial qui ont présidé à la naissance de l’Internet dans les années 1970, ces
nouvelles géométries annoncent peut-être une « minitélisation » du réseau des réseaux.
Du point de vue des usages, le Minitel constitue également une avant-garde particulièrement précoce. La VPC, le sexe et les rencontres en ligne, l’information et les services annoncent les principaux centres d’équilibre de l’offre ultérieure en matière de services online. Enfance numérique de la France, la télématique a ainsi joué un rôle non négligeable d’éducateur pour une part importante de la population hexagonale.

Rapport de Valérie Schafer (ISCC, CNRS) Benjamin Thierry (Université Paris-Sorbonne).

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Impact environnemental et démantèlement

En 2004, un article de ZDNet annonce que « l'opérateur historique « cède à titre gracieux » les Minitels de première génération à ses clients. Pour les associations écologistes, France Télécom se défausse de ses responsabilités en matière de recyclage des déchets ». Ce que dément l'opérateur . La même année, un article du site web Brest-ouVert estime que « par un tour de passe-passe France Télécom s’apprête à se débarrasser de ces millions de minitels de la première génération, en fin de vie, que la réglementation l’obligerait bientôt à collecter puis à recycler ».

En 2012, La Dépêche du Midi écrit : « dans un souci de préservation de l'environnement, Orange a mis en place un dispositif de collecte et de recyclage des Minitels »[70], ce qui est confirmé par France Télécom - Orange.

C'est à Toulouse que sont démantelés les Minitel collectés par France Télécom - Orange.

Minitel 2.0
Benjamin Bayart a proposé d'appeler « Minitel 2.0 » le processus de centralisation d'Internet en général, et du Web en particulier, lors des 8es Rencontres mondiales du logiciel libre, à Amiens le vendredi 13 juillet 2007. Cette tendance à la centralisation, porteuse d'atteintes à la neutralité du réseau et de réduction des potentialités des acteurs de ce réseau, rapprochent, selon lui, Internet du modèle du Minitel : un dispositif totalement centralisé dans lequel il faut solliciter l'autorisation d'émettre et où la norme est la réception.

Préservation et restauration

Depuis l'arrêt officiel du kiosque télétel en juin 2012, plusieurs initiatives font renaître le patrimoine numérique autour du Minitel :
En 2013, le projet Cervin a ressuscité des minitels en leur permettant d'envoyer des tweets depuis une passerelle Arduino.
En 2017, plusieurs micro-serveurs Minitel sont encore en fonctionnement, accessibles par numéro direct à 10 chiffres.
Printemps 2018, des services emblématiques sont « recréés » et accessibles en ligne via un émulateur fonctionnant dans un navigateur web.
Du 21 au 27 mai 2018 Exposition d'Art Minitel 3615LOVE au CCIC, Cerisy-la-Salle, créée par le laboratoire PAMAL. Artistes, œuvres & seconds originaux : Armandine Chasle, Jacques-Elie Chabert et Camille Philibert (L'objet perdu), Eduardo Kac (Videotex Poems), Chris Marker (Conversations), Marie Molins.
30 juin 2018 (date anniversaire 6 ans après l'arrêt de télétel) : ouverture du site internet du Musée du Minitel.

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Hors de France

Le système Minitel a été implanté avec plus ou moins de succès dans plusieurs pays :
Allemagne : Bildschirmtext ou BTX, qui est un système centralisé, à l'encontre du Minitel français ;
Belgique avec Belgacom ;
Espagne : Ibertex via Telefonica. En 1991, il y avait 275 000 terminaux installés. L'installation coûtait l'équivalent de 255 € et le coût mensuel variait entre 179 € et 409 €, selon la vitesse du modem (de 2 400 à 9 600 bauds) ;
Grande-Bretagne : Prestel, mais ce système ne réussit pas à s'implanter au niveau résidentiel;
Irlande : Telecom Eireann (1988) ;
Italie : SIP (1985) ;
Pays-Bas : Viditel et Vidéotex ;
Afrique du Sud Beltel 1986 avec Telkom ;
États-Unis : via Qwest à Minneapolis et Omaha (1990);
Canada : En 1988, Bell Canada lance Alex, « un service électronique d'information et de transactions fortement influencé par le système français Minitel ». Le service est d'abord offert à Montréal puis à Toronto. En 1991, il comptait 32 000 abonnés, mais le taux de rétention est proche de zéro en raison des frais de connexion. L'intérêt baisse rapidement à mesure que se répand l'usage du Web. Le service est abandonné en décembre 1994. Un autre système nommé "Telidon" est également testé.
Japon : système "Captain".

En 1988, le professeur Bruno Lussato disait : « On nous dit que le monde entier nous envie le Minitel. Je ne sais pas s’il nous l’envie, messieurs, mais je peux en tout cas vous dire une chose avec certitude, c’est qu’il ne nous l’achète pas».

 

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Temoignages

Le minitel, l’arrivée de la banque à domicile


Cliente de la BNP testant à son domicile la technique du télétexte permettant de diffuser du texte sur un téléviseur connecté à un boitier branché dans la prise téléphonique et de dialoguer avec le centre Télétel, 1982
Le secteur bancaire est le reflet des mutations sociales et technologiques. Dans les années 1960, l’informatique s’impose dans l’organisation de la banque. La télématique constitue une nouvelle étape, avec le développement du Minitel. Dès le début des années 1980, la BNP et Cetelem s’engagent sur cette voie. La banque arrive au domicile des Français.
En 1982, les premiers terminaux Minitel sont offerts au public. Chaque abonné au téléphone a la possibilité d’adopter cette innovation dans son agence locale France Telecom. Dans le secteur bancaire, on perçoit le potentiel de cet outil. Cetelem décide de l’expérimenter sans tarder dans différents commerces. Il faut dans un premier temps former les employés de magasins, à commencer par l’usage du clavier… Mais le bénéfice est net, pour Cetelem comme pour les vendeurs, puisque les clients de ces commerces peuvent en quelques minutes obtenir une réponse à une demande de crédit – et donc acheter dans la foulée. En 1984, 3000 commerçants sont connectés au Cetelem par Minitel. La BNP investit elle aussi sur la télématique et l’intègre à sa stratégie commerciale.

Un documentaire

An incredible succes story

En 2003, le Minitel fêtait ses vingt ans et son milliard de connexions.
Cet anniversaire et ce record auraient pu être l’occasion de faire le point sur cette technologie unique, qui à sa façon, préfigurait l’internet. Et pourtant... Ringard, cher, infréquentable, inventé par des technocrates qui ont dépensé stupidement l’argent de l’état, franco-français, dépassé technologiquement, responsable du retard que la France a pris en matière d’accès à l’internet, à l’origine d’une honteuse libération des mœurs, machine à fric etc.
Nous avons tout entendu sur le Minitel et pas seulement de la bouche des dignes représentants des ligues de vertu.
Quel paradoxe ! Tout le monde critique sans ménagement cette petite boîte mais tout le monde s’en est servi ou s’en sert encore. Vingt-et-un ans après son lancement, on compte encore 4,3 millions en activité.
En 2001, France Télécom annonçait 55 millions d’heures de connexion, un chiffre d’affaires lié au trafic de 686 millions Euros et 200 Millions d’Euros de revenus nets sur les services télématiques.
Le Minitel est donc toujours là, bien connecté, malgré une mort annoncée maintes fois. Et les analystes d’outre-manche n’hésitent pas à rendre hommage au terminal de France Télécom. Et quel hommage ! Qui aurait imaginé lire que cet objet au design rustique avait été “ le premier système online qui avait fait de la France un pays envié par ses voisins ”, que le Minitel avait “ symbolisé la virilité technologique de la France des années 80 ”, qu’avec “ 17 millions d’utilisateurs en France, le Minitel apparaissait comme une incredible succes story ”.
Des phrases irréelles dans une presse plutôt habituée à décrier les excès d’un état français trop dirigiste, d’une économie pas assez libérale.
La fin de l’article nuança notre enthousiasme naissant. Le journaliste du Guardian comparait la merveille française à un autre objet très apprécié et “ very French ” : la 2CV...
A l’heure où l’internet et la téléphonie mobile se croisent pour inventer le I-Mode, que reste-t-il du Minitel ? Assurément, les vieilles boîtes de plastique marron peuvent être reléguées dans un irréel musée de la technologie.
Mais pourquoi des utilisateurs fidèles et des fournisseurs de codes d’accès retardent-ils la migration vers l’internet ?
Le Web grand public introduit en France en 1994 cacherait il, sous une image high tech, un modèle économique immature ?
Et l’expérience du Minitel, que nous at-elle apporté ?
Une libération des mœurs, un modèle économique performant, une familiarisation des Français avec l’outil informatique ? Symbole méconnu de la vitalité d’un secteur technologique peu médiatisé, le Minitel est peut-être le dernier survivant d’une époque où l’état initiait de grands programmes scientifique et techniques.
Bref, une spécificité hexagonale comme le sont la DS ou le TGV. Tous brocardés mais tous enviés. L’histoire du Minitel comporte bien des surprises.
La raconter c’est se replonger dans une époque pionnière où l’ordinateur individuel était encore inaccessible, une époque où la rentabilité du Minitel faisait l’envie des développeurs de l’internet.
C’est évoquer les 4 bouleversements sociaux et culturels que provoqua l’apparition de ce nouveau média. C’est retrouver une France qui, depuis vingt ans, de l’agriculteur au cadre supérieur, a appris à taper 3615 pour trouver un horaire de cinéma, consulter un compte en banque ou découvrir de nouveaux plaisirs.

Nathalie Bougeard, Fabrice Richard et Jean-François Le Corre

Ulla et ses copines
Incontournables dans les mémoires, les messageries roses constituent un élément majeur de l’histoire de la télématique. Service extraordinairement rentable du fait du système Kiosque, la messagerie rose constitue à partir de 1984 un espace de liberté pour les usagers et une fabuleuse occasion de profits pour ses promoteurs.
Il faut d’abord souligner que l’idée de faire de la télématique un outil de communication et pas seulement un dispositif de consultation est une idée présente dès le début à l’esprit de ses concepteurs. Ainsi, dès Vélizy, les télécommunications offrent la possibilité d’user d’une boite aux lettres, de listes de diffusion de messages dans le cadre de M3V, la première messagerie en différé du Minitel. La messagerie est à Vélizy l’un des services les plus dynamiques. Elle est pour l’équipe-projet l’occasion de découvrir que le nombre des plus gros consommateurs de temps de connexion est faible, ne représentant qu’un cinquième des connectés , mais que ceux-ci représentent dans le même temps plus de la moitié de la durée totale de
connexion au service.
M3V permet en effet une grande variété de communication : dialogue 1 vers 1, dialogue 1 vers N, en direct ou en différé28. Les messages font 17 lignes de 40 caractères et le dialogue en direct, qui préfigure le chat, a été expérimenté dans trois groupes baptisés « Forum ». Une cinquantaine de groupes aux intérêts variés y voient le jour.
Cet appétit pour la communication interpersonnelle n’échappe pas aux premiers fournisseurs de service et, dès l’ouverture nationale en 1984, les messageries de tous types se multiplient à grande vitesse sur le réseau. Au début des années 1990, elles représentent la part la plus importante des revenus liés aux usages du Minitel.
Globalement ces messageries génèrent de 50 à 60 % des revenus du kiosque. La nécessité d’être connecté pour échanger, le fait que nombre de services « roses » utilisent des hôtesses pour maintenir l’intérêt des minitélistes, expliquent cet état de fait. Alors que tous les services de consultation (horaires de train, banque, informations, etc...) visent à la rapidité et à la précision de l’information donnée pour espérer voir le minitéliste revenir (on recommande d’ailleurs de ne pas « faire durer artificiellement » les durées de connexion car cela ne pousse pas la clientèle à
revenir), les messageries constituent un service qui capte l’attention et génère ainsi de fabuleux revenus.
Ulla sera probablement la plus connue de ces arènes du dialogue débridé. En 1986, la diffusion massive du Minitel inspire à Louis Roncin la création de la société Assistance Génie Logiciel. Très rapidement, ce sont les messageries qui s’avèrent être le produit le plus rentable : avec 3615 CUM puis 3615 ULLA, AGL crée les poids lourds du secteur.
Du côté de la presse, le Nouvel Observateur (avec Aline) ou Le Parisien Libéré s’abreuvent à la manne télématique. En 1985, Le Parisien Libéré compte 43 personnes qui travaillent à temps plein au service télématique. Comme le remarque Jean-Marie Charon en 1985, la source principale de revenus du journal est alors sa messagerie ce qui questionne le modèle de la presse « en ligne » qui ne trouvera jamais sur Minitel les moyens de se financer par l’unique fourniture d’informations aux usagers.

« 3615 Monique » : 5 questions sur le minitel rose (Léa André-Sarreau 2020-12-17)

Inspirée de la révolution technologique et sociale suscitée par le minitel rose au début des années 1980, cette série en 10 épisodes au charme vintage, diffusée sur OCS , nous a donné envie de remonter aux origines du flirt électronique, pour y voir clair entre mythe et vérité.
Ce que dit la série

Début des années 1980, dans l’amphi défraîchi d’une fac de la banlieue française. Toni (Paul Scarfoglio), étudiant à la tchatche infatigable, présente devant ses camarades sceptiques un exposé sur le minitel, petite boîte noire composée d’un écran et d’un clavier, créée par le ministère des Postes et Télécommunications. Une machine révolutionnaire, qui posera les prémisses du futur Internet, des transmissions dématérialisées, via un système de services en ligne tentaculaire… mais à laquelle personne ne croit encore. Sauf Tony, donc, qui a flairé les potentiels économiques, sociaux, et surtout érotiques, de cette invention.
Avec Stéphanie (Noémie Schmidt) et Simon (Arthur Mazet), il crée la première messagerie rose sur minitel : tels des Cyrano modernes et grivois, ils proposent des conversations sulfureuses à des hommes, tarifées à la minute, par le biais de messageries privées. Propice à la réalisation des fantasmes sexuels individuels en tout anonymat, cet espace de liberté devient très vite le symbole d’une société en quête de désinhibition, incarnée par l’élection de Mitterand en 1981, après une décennie giscardienne traditionaliste.
Pour ce Social Network frenchy, qui emprunte autant au charme des sitcoms eighties qu’au réalisme du Péril Jeune, les créateurs Emmanuel Poulain-Arnaud et Armand Robin se sont librement inspirés de faits réels et d’un jargon geek pointu (attentions aux oreilles, ça parle de terminal actif passif et de mémoire de masse) – ce qui nous a donné envie de nous plonger dans l’histoire vraie, et pas toujours rose, du minitel rose. En cinq questions, remontons aux origines du flirt électronique.

Qui a inventé la première messagerie rose sur minitel ?

À l’origine, le minitel a été inventé pour proposer des services informatifs par le biais du réseau téléphonique – notamment le 3611, annuaire national gratuit. Mais très vite, divers services payants émergent (consultation de la météo, achat de billets de train, site de jeux), regroupés sous le numéro 3615 – dont les messageries roses, qui rencontrent un succès fulgurant, popularisées sous l’expression « Minitel rose ».
Claude Baltz, chercheur en sciences de l’information et de la communication, raconte l’invention du Minitel rose dans son livre MSG Gretel : Images de personne (1984).
Fin 1982, un petit génie de l’informatique, sorcier sur les bords, pirate le service internet du minitel du quotidien. Les Dernières Nouvelles d’Alsace, nommé GRETEL, pour se connecter et communiquer à plusieurs.
Rapidement, GRETEL est envahi par une multitude de dragueurs en ligne au point que le serveur saute. Les premiers salon de tchat et système de messagerie privée sont nés, notamment grâce au responsable informatique du journal, d’esprit libertin, qui ferma les yeux en ne bloquant pas le serveur. Comme quoi, l’histoire donne toujours raison aux audacieux.

Le minitel rose est-il l’ancêtre des sites de rencontre ?

Un peu de sociologie amoureuse, histoire de vérifier ce que Tinder doit au 3615. Si le minitel rose n’est pas strictement l’équivalent des sites de rencontres d’aujourd’hui (sur lesquels les profils sont plus sophistiqués, et où le but est de se « rencontrer en vrai », contrairement à la messagerie rose où l’échange était purement virtuel et anonyme), il en a préfiguré certains codes. D’après Josiane Jouët, qui a observé sous un angle ethnographique plusieurs messageries afin d’analyser les comportements de ces communautés, l’innovation technique et sociale qu’est le minitel a participé à « l’émergence d’un nouveau protocole de rencontre sur écran, fondé sur une communication interactive et anonyme ».

Maintenant banalisée, cette pratique a permis à l’époque un affranchissement des conventions sociales, « dans un contexte historique où le primat de l’individu s’imposait, et pas seulement dans le domaine économique, avec l’essor du néolibéralisme », et qui perdure aujourd’hui à travers « l’expressivisme »,« une forme d’individualisme exacerbé, où les individus livraient beaucoup d’eux-mêmes, à travers leurs fantasmes, pas seulement sexuels. » Cependant, certaines mutations montrent que l’héritage du minitel rose a été remplacé par de nouvelles dynamiques. Le brassage social qu’il offrait s’est transformé en un ciblage sélectif, sa pratique transgressive s’est muée en norme majoritaire (1 Français sur 4 s’est déjà inscrit sur une appli), et la communication par les mots, génératrice de fantasmes, a été supplanté par le règne de l’image.

Qui sont Monique, Ulla et autres Aline ?

Dans la série 3615 Monique, Tony a le béguin pour la mère de son coéquipier. Femme au foyer élégante et sensuelle, attentive à l’émancipation érotique de son fils, elle lui inspire le doux nom de sa messagerie rose. Dans la vraie histoire du Minitel Rose, d’autres prénoms ont incarné un archétype de la féminité : 3615 Ulla, 3615 Aline… Mais qui répondait vraiment aux individus qui se connectaient au service ? La plupart du temps, il s’agissait d’hommes, et surtout d’étudiants, qui faisaient ce job en parallèle de leurs études. C’est le cas de Jean-Marie, aujourd’hui journaliste, dont on découvre le témoignage dans cet article de L’Obs.

Non sans ironie, celui qui a été embauché comme « animatrice » dans les années 1990 se confie sur son « coming out télématique », expliquant comment il faisait « l’hôtesse sur les réseaux », pour des hommes persuadés « de causer avec JFbi21ans ou Jacqueline69 » : « J’ai ainsi pu « discuter » avec beaucoup de vigiles, qui s’ennuyaient, la nuit, mais également avec des cadres supérieurs qui, eux, se connectaient à 6 heures du matin en arrivant au bureau, en passant par des ados-nymphos mal dans leur peau, des mythos, une nana uro qui « polluait » notre forum, un dominateur qui, pensant écrire à une femme et alors que je ne suis ni homo ni sado-maso, avait quand même réussi à me « séduire »… » Être payé pour faire fantasmer des hommes aurait même éveillé sa vocation de « cyberféministe » : « Plus ils se comportaient comme des mufles, plus ils étaient grossiers, goujats ou mal élevés, plus je prenais plaisir à les garder connectés avec moi, histoire de faire grimper leur facture, mais également de résister à l’image qu’ils se faisaient des femmes » explique-t-il.

Les services de 3615 du Minitel Rose appartenaient-il à la presse ?

En 1982, la commercialisation grand public du minitel permit aux entreprises et aux foyers d’accéder entre autre à l’annuaire téléphonique, à la vente par correspondance et à des sites de jeux. Mais l’Etat veut également s’en servir pour moderniser la société, en numérisant les petites annonces, comme l’explique cet article de La Revue des médias. Face à cette informatisation, la presse écrite s’inquiète : cette « Little French Box » sera la tombe des journaux d’antan. Pour calmer le jeu, Valéry Giscard d’Estaing lance en 1984 le système du « Kiosque » (le fameux 3615 payant) dont il réserve le monopole aux seuls éditeurs de presse. Traduction dans le langage commun : n’importe quel journal détenteur d’un numéro de commission paritaire pouvait ouvrir un 36 15, et faire gonfler son chiffre d’affaire via des activités de messagerie rose, au tarif de 1 franc (15 centimes d’euros) la minute, déduit de la facture de téléphone.

Résultat, de grands titres comme Le Nouvel Observateur (36 15 ALINE), Libération (36 15 TURLU) ou Le Parisien se remplissent les poches grâce à ce marché rose. Et plein de gens créent des journaux fantôme afin de monter à leur tour des messageries coquines. Cette archive de l’INA nous dévoile un scandale ô combien plus croustillant : certains se faisaient embaucher par le minitel rose comme animateurs de messagerie érotique pour obtenir la carte de presse et se rendre au Festival de Cannes. Tout ça mérite une enquête à la Spotlight.

Le minitel rose a-t-il fait la fortune de ses pionniers ?

On le rappelle, tous les personnages de la série sont fictionnels (désolé de vous décevoir). Ceci dit, les héros de 36 15 Monique pourraient être les versions jeunes (et plus sympathiques) d’une vraie génération de figures tutélaires du minitel rose, aujourd’hui millionnaires, dont Libération a retracé la généalogie dans cet article. Parmi eux, Xavier Niel, aujourd’hui PDG de Free, surnommé le « petit cochon rose », qui dès ses 16 ans, en 1983, créait des messageries coquines « En prépa, il fait double journée : en cours le jour et sur son ordi la nuit. Ses «à-côtés» lui rapportent, dit-il, «plusieurs dizaines de milliers de francs par mois » détaille Libé. Un Pape du Minitel qui partage beaucoup de caractéristiques avec les héros mercantiles de la série.

Quant à la concurrence qui fait rage pour dominer le marché rose – et qui prend dans la série une tournure plutôt ludique – elle était en réalité bien plus féroce. Louis Roncin, à qui l’on doit le fameux 3615 Ulla, sérieux concurrent de Niel (propriétaire de 3615 ANNU) lui a assigné un procès pour racolage : « Il venait sur mes sites, caché sous un pseudo, et il débauchait mes clients en les invitant à venir sur ses sites à lui » rapporte aussi Libé. Une bataille d’influence digne de la mafia sicilienne, qui pourrait presque inspirer Martin Scorsese pour son prochain film. Malheureusement, cette saga prendra fin à partir de 1996 avec l’essor d’Internet, fournisseur concurrent beaucoup plus rapide et international, accessible via un ordinateur personnel. Tout en préparant le terrain pour le Web, le minitel a aussi signé son déclin progressif, et disparaîtra définitivement en 2012.

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Architecture technique, Historique du Kiosque Téléphonique

Nonobstant la mission principale des Commutateurs E10.5 constituant les accès télématiques au Videotex/Télétel et à l'Annuaire Électronique, les Commutateurs E10.5 sont aussi capables de traiter du trafic voix, avec en plus de bonnes dispositions pour l'acheminement du trafic en masse, y inclus la gestion des taxations les plus complexes et les plus diversifiées que l'on puisse concevoir...
Taxation au Quantum (c'est à dire au forfait, à chaque début de communication)
Taxation à la Durée par impulsions périodiques, à différentes cadences possibles, et à plusieurs tarifs,
Taxation par combinaison au Quantum et à la Durée,
Répartition des gains entre l'Opérateur téléphonique et les éditeurs de services privés (à proportion variable suivant les types de services et les conventions signées entre les PTT/France Télécom et les éditeurs de services privés).

Mais avant l'utilisation des Commutateurs E10.5 PAVI pour ces services, il est procédé à l'ouverture du KIOSQUE TÉLÉPHONIQUE dès le 11 avril 1984 (dénomination initiale : TÉLÉMICROSERVICE) selon le mode unique et simplifié de la Taxation au Quantum (c'est à dire pour un prix d'appel fixe facturé en début de communication : les fameux 2,19 francs/appel et 3,65 francs/appel - utilisés abondamment par les jeux TV notamment).

Le Kiosque Téléphonique débute donc le 11 avril 1984 uniquement en Île-de-France. Il faut attendre l'année 1987 pour que le Kiosque Téléphonique s'implante dans certaines régions : Lille, Lyon, Marseille, Nantes et Bordeaux.

En Août 1986, il est notifié par l'Administration des PTT un marché d'études concernant le Kiosque Téléphonique à la société Techniphone, pour la conception d'un prototype d'une machine de diffusion de messages enregistrés, d'une capacité de diffusion simultanée de 320 voies.

Lors des débuts du Kiosque Téléphonique en Île-de-France, ce sont d'abord des Commutateurs d'Abonnés classiques qui supportent cette charge, régulièrement croissante : des Commutateurs Métaconta 11F et MT25.
Avec ces Commutateurs d'Abonnés déjà occupés à acheminer leurs propres abonnés, il n'est pas possible de créer des modes de taxation trop complexes.

De plus, la charge instantanée, pour les jeux radio et surtout TV à des moments précis, durant des émissions à grande écoute, s'avère tellement lourde qu'il est nécessaire de découper les Indicatifs ABPQ en Milliers séparés, de répartir ces Indicatifs ABPQ sur plusieurs Commutateurs d'Abonnés à la fois, en ne faisant porter qu'un seul ou deux Milliers de Numéros Kiosque par chaque Commutateur d'Abonnés choisi.
Aussi, lorsque le besoin se fera sentir de créer d'autres services (notamment les messageries roses), la nécessité de changer d'architecture deviendra évidente : l'utilisation des E10.5 PAVI dans l'acheminement des nouveaux services Kiosque Téléphonique complexes s'imposera comme la solution la plus logique et rentable... Ce sera le cas à partir du 6 mai 1992.

À partir du 6 mai 1992 (ouverture commerciale), ce seront les Commutateurs E10.5 PAVI qui reprendront progressivement cette tâche devenue trop lourde pour les Commutateurs d'Abonnés classiques.
Les Services KIOSQUE TÉLÉPHONIQUE sont en cette occasion renommés AUDIOTEL.
Sont techniquement créés dès le 15 avril 1992 (et commercialement ouverts le 6 mai 1992) les services AUDIOTEL taxés à la Durée.
Sont techniquement repris par les E10.5 PAVI entre le 16 mai 1995 et le 29 février 1996 les services AUDIOTEL taxés au Quantum (portés jusques alors par des Commutateurs MÉTACONTA 11F et MT25 puis tardivement par des Commutateurs E10B3).

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Ouvertures Techniques du KIOSQUE TÉLÉPHONIQUE :

Les numéros d'appel des services Kiosque Téléphonique sont des numéros à 8 chiffres (puis à 10 chiffres à partir du 18 octobre 1996 à 23H00).
Ils sont créés initialement en Île-de-France à partir de 1984 avant de commencer leur généralisation à l'échelon national en 1987 :

Ci-dessous : historique le plus complet possible d'Île-de-France. (TB = Taxe de Base entre 1945 et 1986 - UT = Unité Télécom depuis 1987).

Période Pré-E10.5 PAVI :
Création Indicatif 369 (Millier 1) (futur 4369 après le 25 octobre 1985) pour le système Télémicroservice, service de diffusion de messages au Quantum 3 TB (futur Kiosque Téléphonique), sur Commutateur MÉTACONTA 11F Ségur 2 ES1 (AD92) le 11 avril 1984 - (Télex du 28 mars 1984).
Création Indicatif 4667 Kiosque Téléphonique au Quantum 3 TB, sur Commutateur MÉTACONTA 11F Auteuil 2 ES1 (AB15) le 5 mars 1986 - (Télex des 25 et 26 février 1986).
Extension Indicatif 4369 (Millier 6) Kiosque Téléphonique au Quantum 3 TB, sur Commutateur MÉTACONTA Auteuil 2 ES1 (AB15) le 15 juillet 1986 - (Télex 8 juillet 1986).
Création Indicatif 3669 (Millier 1) Kiosque Téléphonique au Quantum 3 UT, sur Commutateur MÉTACONTA 11F Ségur 2 ES1 (AD92) le 14 avril 1987 - (Télex des 8 et 9 avril 1987). En équivalence avec le 4369 (Millier 1).
Extension Indicatif 3669 (Milliers 3 et 7) Kiosque Téléphonique au Quantum 3 UT, sur Commutateur MÉTACONTA 11F Auteuil 2 ES1 (AB15) le 10 juin 1987 - (Télex du 4 juin 1987). En équivalence avec le 4369 (Milliers 3 et 7).
Suppression Indicatif 4667 Kiosque Téléphonique le 9 juillet 1987 - (Télex du 9 juillet 1987).
Extension Indicatif 3669 (Millier 5) Kiosque Téléphonique au Quantum 3 UT, sur Commutateur MÉTACONTA 11F Ménilmontant 1 ES1 (AC73) le 20 août 1987 - (Télex du 6 août 1987).
Suppression Indicatif 4369 (Milliers 1, 3 et 7) Kiosque Téléphonique le 1er septembre 1988 - (Télex du 18 août 1988). Le 4369 est définitivement remplacé par le 3669.
Création Indicatif 3665 Kiosque Téléphonique au Quantum 5 UT, sur Commutateurs MÉTACONTA 11F Auteuil 2 ES1 (AB15) (Millier 6), Ségur 2 ES1 (AD92) (Millier 8), Ménilmontant 1 ES1 (AC73) (Millier 3) ; et sur Commutateur MT25 Molitor 3 ET2 (CC34) (Millier 7) le 30 septembre 1988 - (Télex du 27 septembre 1988).
Suppression Indicatif 3669 Kiosque Téléphonique le 3 juillet 1989 - (Télex du 26 juin 1989). Le 3669 est définitivement remplacé par le 3665.
Création Indicatif 3668 Kiosque Téléphonique au Quantum 5 UT, sur Commutateurs MÉTACONTA 11F Auteuil 2 ES1 (AB15), Ségur 2 ES1 (AD92), Ménilmontant 1 ES1 (AC73) et sur Commutateur MT25 Molitor 3 ET2 (CC34) le 31 octobre 1990 - (Télex du 29 octobre 1990).
Création Indicatif 3666 Kiosque Téléphonique au Quantum 5 UT, sur Commutateurs MÉTACONTA 11F Auteuil 2 ES1 (AB15) (Millier 4), Ségur 2 ES1 (AD92) (Millier 0), Ménilmontant 1 ES1 (AC73) (Millier 3) et sur Commutateur MT25 Molitor 3 ET2 (CC34) (Millier 7) le 23 mars 1992 - (Télex du 17 mars 1992).
Suppression Indicatif 3668 Kiosque Téléphonique le 2 avril 1992 - (Télex du 31 mars 1992). Le 3668 est définitivement remplacé par le 3666 en tant que Kiosque Téléphonique au Quantum 5UT.

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Période E10.5 PAVI :
Création Indicatifs 3664, 3667, 3668 et 3670 Kiosque Téléphonique à la Durée (Audiotel), sur Commutateurs E10.5 PAVI le 15 avril 1992 - (Télex du 2 avril 1992) - Ouverture Commerciale le 6 mai 1992.
3664 : 1 UT par minute.
3667 : 2 UT par minute.
3668 : 3 UT par minute.
3670 : 12 UT au Quantum + 3 UT par minute.
Création Indicatif 3635 Audiotel à la Durée (réservé SNCF), sur Commutateurs E10.5 PAVI le 9 décembre 1993 - (Télex du 7 décembre 1993).
Création Indicatif 3669 Audiotel à la Durée 3 UT par minute, sur Commutateurs E10.5 PAVI le 24 avril 1995 - (Note ONS du 11 avril 1995).
Transfert Indicatif 3666 Audiotel Jeux (au forfait), sur Commutateurs E10.5 PAVI le 16 mai 1995 - (Télex du 5 mai 1995). (Les Commutateurs MÉTACONTA 11F arrivant en fin de vie à moyen terme (1996-2000).
Transfert Indicatif 3665 (Millier 7) Audiotel Jeux (au forfait), sur Commutateurs E10.5 PAVI le 9 janvier 1996 - (Télex du 2 janvier 1996). (anciennement MT25 Molitor 3 ET2 (CC34)).
Transfert Indicatif 3665 (Milliers 3 et 5) Audiotel Jeux (au forfait), sur Commutateurs E10.5 PAVI le 18 janvier 1996 - (Télex du 15 janvier 1996). (anciennement E10B3 Diderot 6 ET3 (AB96)).
Transfert Indicatif 3665 (Millier 8) Audiotel Jeux (au forfait), sur Commutateurs E10.5 PAVI le 25 janvier 1996 - (Télex du 18 janvier 1996). (anciennement E10B3 Brune 3 ET2 (AB44)).
Transfert Indicatif 3665 (Milliers 0, 1 et 2) Audiotel Jeux (au forfait), sur Commutateurs E10.5 PAVI le 7 février 1996 - (Note du 31 janvier 1996). (anciennement MÉTACONTA 11F Ségur 2 ES1 (AD92)).
Transfert Indicatif 3665 (Milliers 4, 6 et 9) Audiotel Jeux (au forfait), sur Commutateurs E10.5 PAVI le 29 février 1996 - (Note du 22 février 1996). (anciennement MÉTACONTA 11F Auteuil 2 ES1 (AB15)).
Création Indicatif 3636 Audiotel Libre Appel Gratuit, sur Commutateurs E10.5 PAVI le 4 novembre 1997 - (Note du 17 octobre 1997).
Création Indicatif 3671 Audiotel Télévote (1UT/appel), sur Commutateurs E10.5 PAVI le 4 novembre 1997 - (Note du 17 octobre 1997).

Période Post-E10.5 PAVI :
La solution de transférer le trafic Audiotel sur les Commutateurs E10.5PAVI a permis la suppression des Commutateurs Semi-Électroniques MÉTACONTA 11F choisis qui supportaient ces services depuis leur création.

Le 9 juillet 1997 il est décidé officiellement le transfert à terme de tout le trafic Audiotel supporté par les Commutateurs E10.5 PAVI vers une nouvelle architecture dite "Réseau Intelligent", où désormais le trafic Audiotel sera depuis lors entièrement supporté par les Commutateurs de Transit de type MT20 assurant soit la fonction de Centre de Transit Principal (que l'on dénommait autrefois Centres de Transit Nationaux), soit de Centre de Transit Secondaire (que l'on dénommait autrefois Centres de Transit Régionaux). La majeure partie des Commutateurs de Transit MT20 est retenue pour reprendre l'intégralité du trafic Audiotel.

Tous les Indicatifs Audiotel sont concernés par cette migration : (08)3635, (08)3636, (08)3664, (08)3665, (08)3666, (08)3667, (08)3668, (08)3669, (08)3670, (08)3671.
Début Juillet 1999, la totalité du trafic Audiotel est basculée sur le Réseau Intelligent via les Commutateurs de Transit Secondaires MT20.
De 1999 à 2012, les Commutateurs E10-5 PAVI n'achemineront plus que le trafic Télétel (incluant le trafic Annuaire Électronique).

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Structures et Matériels

Emploi des Commutateurs E10.5 dans le réseau français de Télécommunications
:

Le réseau télématique grand public français est entièrement articulé et construit avec des Commutateurs Téléphoniques spécialisés conçus par la société Alcatel, de type temporel portant la référence Alcatel 1130.
Dans l'Administration leur dénomination est devenue E10.5 (E10 dits de 5ème génération - même s'il ne s'agit pas vraiment de 5ème génération...).
Initialement la dénomination de ce nouveau modèle de commutateur était E10.S (E10 Satellite), renommée en E10.5 pour des raisons commerciales de tentative d'exportation aux USA par Alcatel (E10-Five).

E10.5 est un système développé et mis au point dans les centres de R&D de CIT-Alcatel, à Vélizy en Région Parisienne.
Au début des années 1980 est créé au sein de CIT-Alcatel à Vélizy le Groupe Petit Système. Profitant des évolutions mises au point dans le cadre du développement des systèmes E10 précédents (E10N3 et E10N1 en fin de développement) ainsi que du système E12 en fin de développement lui aussi, le E10.5 met en œuvre de nombreux nouveaux concepts et technologiques :
- circuits imprimés multi-couches,
- sysstème de commande générale répartie en plusieurs Unités de Commandes organisées en réseau,
- première vraie utilisation de la gamme de micro-processeurs banalisés Intel 8080, puis 8086, puis 80286, puis 80386 (avec une forte implication - des concepteurs américains du Personal Computer),
- réseau série, à haut débit, en boucle ouverte d'interconnexion temporelle des éléments processeurs (RIT),
- système modulable et aisément extensible,
- fonctionnement en mode dégradé possible, sans blocage important de ressources,
- premières utilisations de la norme de signalisations CCITT n°7,
- fonctionnement en environnement non climatisé,
- concept innovant d'architecture logicielle en "Machines Logiques" qui sera repris dans les Commutateurs de type E10B3 ultérieurement,
- utilisation maximisée des processeurs en tranche,
- procédures simplifiées d'installation et d'exploitation...

Le système E10.5 a été initialement conçu pour remplacer les commutateurs téléphoniques ruraux de faible capacité de type Crossbar (CP100 et sa variante simplifiée qui n'est pas à autonomie d'acheminement : le Socotel S1) sur le territoire français, il se révèle rapidement, capable d'accomplir des tâches bien plus perfectionnées que de la simple commutation de conversations téléphoniques courantes... La polyvalence de ce système étant due à son architecture répartie et modulable particulièrement évoluée.

Un Commutateur E10.5 est un Commutateur multiservices. Il est utilisable dans les fonctions suivantes :
- Centre rural d'Attachement d'abonnés à autonomie d'acheminement (USA) sous la dénomination T-SS-5. (En France ce rôle est assuré essentiellement par des Commutateurs E10N3 et E10N1)
- Centre Téléphonique à Autonomie d'Acheminement (CAA) - Utilisé à Monaco : Monaco 3 (AP01) mis en service en Décembre 1988 - par adjonction d'Unités Terminales de type CSE (telles qu'utilisées dans les E10N1).
- Expérimentation en Centre de Transit (CT) (Développé en laboratoire au CNET Lannion),
- Concentrateur de Terminaux Annuaire (CTA / Minitel : Annuaire Électronique) (France),
- Point d'accès Vidéotex (PAVI /Télétel) (France, Italie),
- Kiosque Téléphonique / Audiotel (France),
- Centre de Raccordement Terrestre (E10.5 CRT) : réseau de transmission de données à haut débit basé sur les premiers satellites de télécommunications "Télécom 1" : TRANSCOM, via au moins 3 Commutateurs E10.5 dédiés (Marseille, Mulhouse et Rennes)
- Transmissions de données par commutation de Liaisons Spécialisées TRANSPAC (au moins 1 Commutateur E10.5 dédié, implanté à Nice)
- Utilisé dans le Réseau de téléphonie mobile analogique 1G Radiocom 2000 à quelques exemplaires (5 Commutateurs E10.5 d'après nos recherches en zones montagneuses) (CORPAC)
Concernant la France, au moins 291 Commutateurs E10.5 ont été mis en service.
Concernant l'Île-de-France, les premiers E10.5 sont mis en service commercial en 1983-1984,
sur le Centre Téléphonique de "Longchamp" à Suresnes pour l'Annuaire Électronique (CTA)
sur le Centre Téléphonique de "Tuileries" à Paris pour l'accès aux services Videotex (PAVI).

Bien que le système E10.5 qui reprend les meilleurs acquis et se projette sur les technologies d'avenir n'ait pas obtenu tout le succès qu'il méritait, il demeure cependant une référence française en matière d'évolution des systèmes de commutation temporelle. La fusion entre CIT et ITT intervenue en 1986 entraîne la regrettable cessation de son développement.

En France, les derniers Commutateurs E10.5 sont mis à l'arrêt le 30 juin 2012, entraînant l'arrêt de l'Annuaire Électronique et des services Télétel - Videotex accessibles depuis un Minitel.
L'Audiotel est transféré sur une autre technologie dite Réseau Intelligent directement par les Commutateurs de Transit MT20TN.

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Séparation des réseaux Télétel - Videotex d'une part et Annuaire Électronique d'autre part :

Dans la Télématique grand public, seuls sont utilisés des Commutateurs Électroniques Temporels du type E10.5.

Dès le début de la création du Télétel, il est alors décidé de spécialiser les Commutateurs E10.5 en 2 catégories distinctes par des configurations logicielles différenciées (bien qu'il s'agisse des mêmes machines matérielles) :
-
Catégorie E10.5 Concentrateur Terminal Annuaire (CTA) assurant l'accès à l'Annuaire Électronique,
- Catégorie E10.5 Point d'Accès Videotex Intermédiaire (PAVI) assurant l'accès aux services Télétel.

Ainsi, les Commutateurs E10.5 CTA et les Commutateurs E10.5 PAVI cohabitent côte à côte dans les mêmes locaux techniques et accomplissent séparément leurs tâches spécialisées.

Architecture de Principe de la Télématique Commutée en France.

L'usager a le choix en numérotant, d'accéder à l'architecture Annuaire Électronique par le 11, ou d'accéder à l'architecture Télétel par les Numéros Courts (3615 par exemple).

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Architecture propre au réseau Télétel - Videotex :

Le Point d'Accès Videotex Intermédiaire (PAVI) constitue l'élément intermédiaire entre le Réseau Téléphonique Commuté et le Réseau TRANSPAC.
Le PAVI permet donc à un usager d'atteindre des serveurs télématiques à partir d'un terminal installé par exemple à son domicile, ou sur son lieu de travail. À partir de ces serveurs télématiques, l'usager peut accéder à des banques de données, des systèmes de transaction ou de traitement de l'information.

Le Centre Serveur en Information Bibliographique et Factuelle est mis en service le 1er juin 1979.
Il est inauguré le 22 juin 1979 par M. le Secrétaire d’État des Postes et Télécommunications - Norbert Ségard.
Il appartient à la société Télésystèmes, filiale de France Câbles et Radio, une société d'économie mixte sous tutelle de la Direction Générale des Télécommunications. Il est equipé d'une unité de calcul IRIS 80 à bi-processeur.
Devenu accessible par le Système Télétel vers 1983, les usagers du Minitel se connectant à Télétel, via leur Commutateur E10.5 PAVI au réseau TRANSPAC, se voient mis en relation avec le Centre Serveur souhaité : par exemple celui-ci.
Schema de base Acces à Teletel

Ci-dessus : abonnés connectés aux services télématiques de leur choix, via TRANSPAC et via un Commutateur E10.5 PAVI.

Le PAVI permet la communication entre un serveur et un usager, au moyen d'un code d'accès ou d'un numéro TRANSPAC.
Le PAVI assure l'assemblage à la norme Transpac des caractères frappés sur le clavier alphanumérique du terminal de l'usager.
Le PAVI assure la concentration du trafic en provenance des terminaux qui lui sont raccordés simultanément.
Le PAVI assure le retour sur l'écran du terminal de l'usager, en "mode écho", des caractères frappés par l''usager sur son clavier alphanumérique. Ceci permet à l'usager de contrôler la validité de sa frappe et de sa bonne réception au Centre de Télécommunications,avant de valider l'envoi de ses demandes vers le serveur souhaité.
Le PAVI doit aussi pouvoir permettre à l'usager de corriger des caractères erronés, tant que la touche envoi n'a pas été appuyée. (Touches Correction, Retour, Sommaire...)
Le PAVI assure le désassemblage en caractères des paquets à la norme TRANSPAC en provenance du serveur auquel il est connecté.
Le PAVI doit pouvoir signaler à l'usager les incidents de connexion ou de fonctionnement pouvant intervenir au cours de la communication avec le serveur de son choix.
Le PAVI assure la rupture de communication en fin d'utilisation, lorsque l'usager appuie une dernière fois sur la touche Connexion/Fin.


Architecture Transitoire Télétel :

Au tout début de l'implantation du Télétel en France, les Commutateurs E10.5 dans leur version dédiée PAVI, n'étaient pas encore entièrement mis au point et validés. Il faudra attendre 1984 pour que les premiers Commutateurs E10.5 soient mis en service.
Un des premiers Commutateurs E10.5 mis en service en France, sinon le premier est Toulouse E10.5 CTA 1 (TL62) au mois de Janvier 1984.
Le tout premier Commutateur E10.5 PAVI est mis en service le 25 octobre 1984.
Aussi, en attendant, il a été décidé d'implanter provisoirement des machines simplifiées permettant l'accès aux tous premiers services Télétel et Annuaire Électronique. Il s'agit alors de Points d'Accès Télétel Simplifiés (PATS).
Chaque PATS n'autorise que 24 connexions simultanées... Ces machines sont provisoirement "greffées" sur quelques commutateurs téléphoniques locaux (uniquement sur des Commutateurs Électroniques d'abonnés, Temporels ou Spatiaux), si possible près d'un Commutateur de Transit.
En effet, ces machines provisoires sont rapidement remplacées par des Commutateurs E10.5 PAVI, capables de bien meilleures performances (jusqu'à 240, 360, 480 voire 660 connexions simultanées suivant les modèles).
En outre, le trafic du Télétel 1 (Indicatif 36.13 créé le 1er octobre 1982 devenu Numéro Court 36.13 le 8 juillet 1986) demeure supporté par les PATS jusqu'à sa reprise par les Commutateurs E10.5 PAVI à la date du 3 février 1988. (Pourquoi avoir tant attendu ? Pour amortir les PATS et basculer ce trafic une fois le réseau de Commutateurs E10.5 PAVI suffisamment dimensionné.)

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Architecture propre au réseau Annuaire Électronique :


L'architecture d'accès au système d'Annuaire Électronique a été dissociée dès sa création des autres serveurs télématiques "ordinaires".
La structure de l'Annuaire Électronique est alors traitée séparément du reste du trafic Télétel.
Des Commutateurs E10.5 configurés en tant que Concentrateurs de Terminaux Annuaires (CTA) sont alors dédiés spécialement à cet usage.
Chaque Commutateur E10.5 CTA autorise la connexion simultanée jusqu'à 240 abonnés vers le serveur de l'Annuaire Électronique, et uniquement vers ce serveur.
D'un point de vue du Réseau Téléphonique Commuté, l'architecture téléphonique des Commutateurs E10.5 CTA dans le réseau est identique à l'architecture téléphonique des Commutateurs E10.5 PAVI, mais elles sont totalement disjointes.
Commutateurs E10.5 CTA et E10.5 PAVI ne mélangent alors jamais leurs appels respectifs. Ainsi, un Commutateur E10.5 CTA n'achemine ses appels que vers le système de l'Annuaire Électronique.

Ci-dessus : abonnés connectés à la base de donnée de l'Annuaire Électronique, via un Commutateur E10.5 CTA.

Le Concentrateur de Terminaux Annuaire (CTA) constitue l'interface entre le Réseau Téléphonique Commuté et la partie informatique de la Chaîne Annuaire Électronique...
Le CTA réalise la gestion des terminaux d'abonnés (Minitel) de son secteur et procède à la concentration des accès en mode asynchrone à la norme V23 sur les liaisons de données.
Chaque CTA dessert au minimum sa Zone à Autonomie d'Acheminement (ZAA), voire une Zone de Transit (ZT) en cas de faible densité de population.
Les CTA sont reliés au Réseau Téléphonique Commuté via des liaisons numériques MIC normalisées.
Les CTA sont reliés au serveurs de l'Annuaire Électronique de l'Administration de sa région par des Liaisons Spécialisées fixes (LS).

Le Centre d'Interrogation (CI)
Le Centre d'Interrogation permet le dialogue entre Abonné et Service Annuaire.
Le Centre d'Interrogation propose de l'aide aux usagers : il aide l'abonné à formuler correctement et complètement sa demande.
Le Centre d'Interrogation vérifie ensuite l'exactitude des informations récupérées et les valide le cas échéant.
Le Centre d'Interrogation aiguille les questions posées par l'usager vers les centres gérant le fichier.
Le Centre d'Interrogation, en retour, met en forme la réponse sur l'écran de l'abonné.
Chaque Centre d'Interrogation dessert jusqu'à 180.000 terminaux MINITEL.
Un Centre d'Interrogation est constitué par :
- 1 Calculateur 32 bit, modèle MINI 6/92 de la compagnie BULL.
- 1 Mémoire de masse constituée de 2 Disques Magnétiques de 64 Mo (type MCD) et 67 Mo (type SMD).

Le Centre de Documentation Régional (CDR)
Le Centre de Documentation Régional supporte une fraction de la documentation annuaire nationale.
Ainsi, au début de l'Annuaire Électronique en France, les abonnés ne peuvent pas avoir accès à toute la France, mais seulement à une fraction du territoire bien plus importante que leur seul département (ce que propose l'annuaire de son département de résidence.)
En pratique, il contient les informations de plusieurs départements en mémoire, typiquement les Pages Blanches, les Pages Jaunes et les informations publicitaires correspondant à environ 3 millions d'abonnés pour un CDR d'une capacité de 1000 erlangs, et 6 millions d'abonnés pour un CDR d'une capacité de 2000 erlangs.

Chaque Centre de Documentation Régional (CDR), d'une capacité de 1000 erlangs permet le raccordement de 4 Centres d'Interrogation (CI), extensible jusqu'à 8 Centres d'Interrogation (CI) pour un CDR de 2000 erlangs.
Nota : à partir de l'été 1984, la capacité des Centres de Documentation Régionaux est systématiquement fixée à 2000 erlangs. Les CDR de 1000 erlangs sont donc progressivement transformés en 2000 erlangs ou supprimés.
Au moins 5 CDR ont été prévus en métropole dès la création du projet Annuaire Électronique.
Un Centre de Documentation Régional de 1000 erlangs (CDR) est constitué par :
1 Interface FRONTAL CP8 (il s'agit d'un Commutateur de Paquets) qui gère les échanges avec les Centres d'Interrogation (CI) et un autre organe supplémentaire : le Centre de Gestion de la Documentation (CGD).
2 Calculateurs MINI 6/92 de la compagnie CII - Honeywell -BULL fonctionnant en partage de charge (qui constitue une première architecture de sécurisation).
1 Chaîne de Recherche constituée par 2 machines DIRAM 32, de la société Copernique, exploitant des disques durs de grande capacité de 600 Mo. Les DIRAM 32 accomplissant de surcroît certaines tâches qui allègent la charge des Calculateurs.
La seconde architecture de sécurisation consiste en un croisement des Calculateurs MINI 6/92 et des machines DIRAM 32 qui assurent la redondance en cas de panne sur l'un des 4 organes.
Chaque CDR d'une capacité de 1000 erlangs peut contenir jusqu'à 10 disques durs de 600 Mo chacun. Toujours en nombre pair, étant donné que chaque fichier ou chaque donnée de l'annuaire stocké(e) dans un Centre de Documentation Régional (CDR) est systématiquement dupliqué(e) sur deux disques durs différents. Il s'agit de la troisième architecture de sécurisation.
4 Dérouleurs de Bande Magnétique 6250 bpi.

Un Centre de Documentation Régional de 2000 erlangs (CDR) est constitué par :
- 2 Interfaces FRONTAL CP8 interconnectées, pour permettre l'accessibilité totale des recherches dans tous les organes mémoire,
- 4 Calculateurs MINI 6/92 groupés par 2, chaque paire de Calculateurs travaillant en partage de charge,
- 2 Chaînes de Recherche constituées chacune de 2 machines DIRAM 32 de la société Copernique, soit 4 machines DIRAM 32.
Chaque CDR d'une capacité de 2000 erlangs peut contenir jusqu'à 20 disques durs de 600 Mo chacun.
Toujours en nombre pair, étant donné que chaque fichier ou chaque donnée de l'annuaire stocké(e) dans un Centre de Documentation Régional (CDR) est systématiquement dupliqué(e) sur deux disques durs différents. Il s'agit de la troisième architecture de sécurisation.
- 8 Dérouleurs de Bande Magnétique 6250 bpi.

Le Centre de Documentation National (CDN)
À partir de la mi-1984, un Centre de Documentation National (CDN), regroupant l'ensemble des données de tous les annuaires de France est mis en construction.
À partir du 7 mai 1985, le Centre de Documentation National (CDN) s'interconnecte avec tous les Centres de Documentation Régionaux (CDR) et permet à n'importe quel usager de France de rechercher n'importe quel autre abonné au téléphone n'importe où sur le territoire national.

Le Centre de Gestion de la Documentation Régionale (CGDR)...
Chaque "Région Téléphonique" est à titre transitoire équipée d'un Centre de Gestion de la Documentation Régionale (CGDR).
Chaque Centre de Gestion de la Documentation Régionale (CGDR) assure la mise à jour de la documentation annuaire concernant les abonnés du seul Centre de Documentation Régional (CDR) auquel il est rattaché (et tous deux implantés dans le même local technique).
Chaque centre sert de liaison entre le système d'annuaire et les fournisseurs d'informations : Agences Commerciales des télécommunications (ACTEL), Office d'Annonce (ODA) et le Service National de l’Édition des Annuaires des Télécommunications (SNEAT).
La périodicité nominale d'actualisation de la base de données est de 15 jours.
Une fois mis en fonctionnement le futur Centre de Gestion de la Documentation Nationale (CGDN), toute l'activité des Centres de Gestion de la Documentation Régionale (CGDR) sera reprise par ce seul Centre de Gestion de la Documentation Nationale (CGDN) et tous les Centres de Gestion de la Documentation Régionale (CGDR) seront démantelés ou recyclés sous forme d'une extension des Centres de Documentation Régionaux (CDR).
Un Centre de Gestion de la Documentation Nationale (CGDR) est constitué par :
- 2 Calculateurs MINI 6/92 travaillant en partage de charge,
- 2 Machines DIRAM 32 de la société Copernique.
- 8 Disques durs de 600 Mo chacun.
- 8 Dérouleurs de Bande Magnétique 6250 bpi.

Le Centre de Gestion de la Documentation Nationale (CGDN)...
La France est à partir du 7 mai 1985 équipée d'un Centre de Gestion de la Documentation Nationale (CGDN) situé à Rennes.
Le Centre de Gestion de la Documentation Nationale (CGDN) assure la mise à jour de la documentation annuaire concernant les abonnés du Centre de Documentation National (CDN).
Ce centre sert de liaison entre la tête du système d'annuaire et les fournisseurs d'informations : Agences Commerciales des télécommunications (ACTEL), Office d'Annonce (ODA) et le Service National de l’Édition des Annuaires des Télécommunications (SNEAT).
La périodicité nominale d'actualisation de la base de données est de 15 jours.

Le Centre de Gestion Réseau (CGR) ...
Comme sa dénomination l'indique, il s'agit de superviser le fonctionnement en temps réel de l'ensemble du Service de l'Annuaire Électronique. Ce centre a été mis en service après l'année 1984.

Schémas basiques Architectures Télétel et Annuaire Électronique, CI et CDR - CDN - 1987.

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Transit des communications Télétel-Videotex / Annuaire Électronique :
Les communications télématiques commutées via les Commutateurs E10.5 PAVI ou E10.5 CTA de leur zone d'installation sont acheminées au travers du Réseau Téléphonique Commuté par les mêmes Commutateurs de Transit du trafic téléphonique.
De manière générale, il est préférable d'installer les Commutateurs E10.5 dans les mêmes locaux où est implanté un Centre de Transit Secondaire (Régional ou Urbain).
Il est en outre préféré de les installer à proximité d'un Centre de Transit Électronique Temporel, ou si l'on ne peut le faire autrement durant la phase de transition, à proximité du Centre de Transit Électromécanique de la zone devant être mis hors service en dernier.

Commutateur E10 CTA 1 Longchamp (SX51). Mis en service le 8 février 1984.

Les premiers Commutateurs E10.5 PAVI et E10.5 CTA de Tuileries ont été mis en service au début de l'année 1984, parmi les tous premiers exemplaires de France.

Commutateur E10.5 Captif de Paris-Cévennes destiné aux tests et à l'apprentissage.

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Parc de Commutateurs E10.5 en France Métropolitaine :

Toutes époques confondues, ont existé au moins : en France - 326 Commutateurs E10.5 répartis comme suit :
- 110 Commutateurs E10.5 CTA,
- 189 Commutateurs E10.5 PAVI (dont 38 ex-CTA identifiés par nos soins, sachant que 47 ex-CTA ont bien été convertis en tout).
- 21 Commutateurs E10.5 affectés à d'autres usages.

Détail :
Paris Intra-Muros - 29 Commutateurs E10.5 répartis comme suit :
- 13 Commutateurs E10.5 CTA,
- 2 Commutateurs E10.5 CTA MINICOM (36.12 messages entre Minitel),
- 14 Commutateurs E10.5 PAVI dont au moins 1 ex-CTA.
Île-de-France 1ère et 2ème couronne - 40 Commutateurs E10.5 répartis comme suit :
- 14 Commutateurs E10.5 CTA
- 26 Commutateurs E10.5 PAVI dont au moins 9 ex-CTA.
Province - 251 Commutateurs E10.5 répartis comme suit :
- 81 Commutateurs E10.5 CTA
- 149 Commutateurs E10.5 PAVI dont au moins 28 ex-CTA.
- 21 Commutateurs E10.5 affectés à d'autres usages : 2 Commutateurs E10.5 SIGPHONE (Systèmes complexes de distributeurs d'appels sur plateformes téléphoniques), 8 Commutateurs E10.5 CORPAC (RADIOCOM 2000), 3 Commutateurs E10.5 CRT (Satellites TELECOM 1), 3 Commutateurs E10.5 TRANSPAC, 1 Commutateur E10.5 BEFA (répondeurs), 1 Commutateur E10.5 Monaco 3 (AP01) - (Téléphonie), 3 Commutateurs E10.5 PAVI réservés aux tests pour le MEGAT.
Outre-Mer - 6 Commutateurs E10.5 PAVI (un par DOM + Nouvelle Calédonie + Polynésie Française).

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Architecture et descriptif de fonctionnement des Commutateurs E10.5 :

Le système E10.5 est un système de commutation téléphonique ou de données à commande répartie entre plusieurs organes différents et spécialisés. Il s'agit d'un système de commutation temporelle.
Chaque organe est au minimum dédoublé pour assurer la sécurité du système et ces organes fonctionnent en service normal, en partage de charge.
Le Commutateur E10-5 constitue le premier commutateur du monde où les fonctions de commande ne sont désormais plus liées à des organes matériels strictement définis et affectés à un unique rôle.
Désormais les fonctions de commande sont exécutées par des logiciels implantés dans des stations de processeurs banalisés, sous la forme de Machines Logiques (ML).
Ces Machines Logiques que l'on puisse caractériser comme virtuelles, n'en accomplissent pas moins un travail bien réel...
Ce nouveau concept plus abstrait sera repris dans le futur système de commutation ultérieur E10B3.

Son architecture matérielle est construite sur 3 niveaux :

- Le premier niveau est le système de Commande qui regroupe les Unités de Commande (UC) qui assurent le traitement des communications, la taxation, les accès aux mémoires de masse (qui sont des Disques Durs Winchester), ainsi que la Défense et l'Exploitation du Commutateur.
Les Unités de Commande de Données (UCD) sont spécialisées pour le traitement des Communications télématiques Videotex ou téléphoniques du Kiosque Audiotel. (de 2 à 16 UCD par Commutateur E10.5 suivant sa capacité souhaitée)
Les Unités de Commande de Signalisation (UCS) sont spécialisées pour le traitement de la Signalisation en code CCITT n°7 (une innovation). (de 2 à 3 UCS par Commutateur E10.5 suivant sa capacité souhaitée)
Nota : UCD et UCS sont aussi nommées Unités de Commandes Banalisées (UCB) suivant les documentations.
Les Unités de Commande de Périphériques (UCP) sont spécialisées pour l'Exploitation et la Défense du système, la gestion des alarmes ainsi que pour le Dialogue Homme-Machine et l'accès aux Disques Durs avec le reste du système. (4 UCP par Commutateur E10.5 quelle que soit sa capacité)

- Le deuxième niveau est le Réseau de ConneXion interne du Commutateur (RCX) constitué en un Réseau Temporel de type T à un seul étage, de telle sorte que son fonctionnement soit garanti sans blocage : chaque voie entrante trouve une voie sortante.
La capacité maximale du Réseau de ConneXion (RCX) d'un Commutateur E10.5 permet de commuter temporellement jusqu'à 128 Liaisons Numériques MIC normalisées Entrantes de 32 voies chacune vers 128 Liaisons Numériques MIC normalisées Sortantes de 32 voies chacune, soit 4096 voies télématiques entrantes pour 4096 voies télématiques sortantes.
Le Réseau de ConneXion (RCX) assure l'établissement, le maintien et la rupture des communications télématiques ou téléphoniques.
Pour raison de sécurisation, le Réseau de ConneXion (RCX) d'un Commutateur E10.5 est dupliqué en 4 parties (4 plans numérotés de 0 à 3) afin d'assurer une meilleure protection du Commutateur. En effet, en cas d'avarie sur une des 4 parties du Réseau de ConneXion (RCX), le 3/4 restant indemne peut continuer à fonctionner normalement. Chaque Plan du Réseau de ConneXion (RCX) permet la connexion et le brassage des 128 Liaisons Numériques MIC Entrantes vers 128 Liaisons Numériques MIC Sortantes.
Pour raison de sécurisation, chacun des 4 plans du Réseau de ConneXion (RCX) est lui-même divisé en 4 autres parties, appelés "Commutateurs/Marqueurs" (numérotés de 0 à 3). Chaque "Commutateur/Marqueur" permet la connexion et le brassage des 128 Liaisons Numériques MIC Entrantes vers 32 Liaisons Numériques MIC Sortantes. Ainsi, en cas d'avarie d'un "Commutateur/Marqueur", les 3 autres "Commutateurs/Marqueurs" continuent-ils de fonctionner...
Ainsi, par ces deux divisions combinées du Réseau de ConneXion (RCX) en 16 parties équipollentes, le système se trouve mieux protégé contre les avaries ou les surcharges d'appels.


Ci-dessus : architecture du Réseau de ConneXion d'un Commutateur E10.5, en configuration maximale, sur 4 Plans et 16 Commutateurs de base. Documentation Alcatel.

- Le troisième niveau est système de raccordement constitué en Groupe d'Unités Terminales (GUT) qui inclut :
les Circuits Numériques Voies (CNV) chargés de connecter les Liaisons Numériques entrantes et sortantes au Réseau de ConneXion (RCX),
les AUxiliaires MultiFréquences (AUMF) chargés d'émettre ou recevoir les signalisations nécessaires à la bonne coordination et à l'établissement des communications.
les circuits d'essais, circuits de mise en conférence, générateurs de tonalités et diffuseurs de films.
l'ensemble des modems de différentes normes nécessaires au traitement des appels de types télématiques (et propres au Télétel) : normes V23, V24, V32, V27ter, V29 et accès normalisés RNIS à 64kbit/s.
les Unités de Raccordement d'Abonnés de type CSE (dans le cas d’utilisation en commutateur d'abonnés tel qu'à Monaco - Monaco 3 (AP01)).

- L'architecture matérielle d'un Commutateur E10.5 est contrôlée par un logiciel fonctionnel découpé en plusieurs modules.
Chaque module logiciel constitue une Machine Logique (ML). Fait notable, il s'agit du premier Commutateur Téléphonique Temporel utilisant le concept de Machine Logique (concept repris avec succès dans les futurs Commutateurs E10B3 depuis 1991).
Ces Machines Logiques (ML) sont regroupées de manière cohérente suivant leur rôle au sein de groupes cohérents nommés Unités de Reconfiguration Logicielle (URL).
Les Unités de Reconfiguration Logicielle (URL) servent dans le cadre du service normal à permettre à chaque Unité de Commande (UC) d'accomplir son rôle dévolu suivant son type prédéfini (UCD, UCP, UCS).
Les Unités de Reconfiguration Logicielle (URL) servent, en cas d'avaries d'une ou plusieurs Unités de Commandes (UC), à sauvegarder le fonctionnement global du Commutateur malgré les défaillances : si une Unité de Commande (UC) tombe en panne, les URL (et les Machines Logiques (ML) qu'elles contiennent) se transfèrent d'elles-mêmes sur d'autres Unités de Commandes (UC) de même nature pouvant les accepter, pour que le Commutateur puisse continuer à fonctionner en "isolant" les équipement matériels défaillants. (l'alarme est donnée, ce qui permet aux équipes de techniciens d'agir rapidement pour localiser la panne et revenir dès que possible à une situation normale.)

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Convergence Télétel E10.5 PAVI et Annuaire Électronique E10.5 CTA :

Progressivement, à partir de l'année 1991, nécessité se fait sentir de faire évoluer l'architecture du Service de l'Annuaire Électronique (SAE).
L'infrastructure du Service de l'Annuaire Électronique date de l'année 1980.
Les derniers Commutateurs spécialisés Annuaire Électronique E10.5 CTA sont commandés en 1990 et mis en service en 1992.
Les deux E10.5 CTA mis en service le plus récemment en Île-de-France sont : Beaujon CTA3 le 19 février 1992 (Télex du 10 février 1992) et Trudaine CTA4 le 14 mai 1992 (Télex du 11 mai 1992).
Les serveurs Téléinformatiques de l'Annuaire Électronique atteignent désormais un âge canonique, eu égard à la vitesse de l'évolution informatique.
En raison de l'obsolescence des équipements informatiques et des logiciels utilisés, plus aucune amélioration des services n'est désormais possible.
La disponibilité des pièces de rechange, la cessation de leur fabrication, l'évolution des langages logiciels font que la vie du système en l'état va devenir erratique à maintenir à terme.
Le 20 janvier 1992 au cours d'un colloque, commence la réflexion sur cette évolution structurelle de grande ampleur.
L'ordre du jour en est : la Convergence CTA-PAVI.
Il est décidé d'implanter dès 1992 le protocole VIDEOPAD (norme de dialogue des Commutateurs E10.5 PAVI) dans les Centres d'Interrogation informatiques (CI) de l'Annuaire Électronique. Ainsi, désormais les Commutateurs E10.5 PAVI pourront eux aussi "dialoguer" avec les Centres d'Interrogation informatique de l'Annuaire Électronique.
À partir de l'année 1992, la croissance du trafic Annuaire Électronique supplémentaire est désormais assurée par les Commutateurs E10.5 PAVI. Le cas se présente cette année-là à Ajaccio et Lyon.
À partir de l'année 1993, la croissance du trafic Annuaire Électronique est assurée par les Commutateurs E10.5 PAVI de Besançon, Bordeaux, Dijon, Marseille, Montpellier, Orléans, Strasbourg, Toulouse et Paris. (Il s'agit d'une généralisation de cette technique à toute la métropole.)
À partir de l'année 1994, il existe en service 136 Commutateurs E10.5 PAVI et 88 Commutateurs E10.5 CTA. Il est envisagé de transformer la totalité des 88 Commutateurs E10.5 CTA en Commutateurs E10.5 PAVI pour harmoniser la structure en n'en faisant plus qu'une.
Lorsque les 88 Commutateurs E10.5 CTA seront convertis en Commutateurs E10.5 PAVI, il est envisagé :
Pour les zones à fort trafic : de spécialiser une partie des Commutateurs E10.5 PAVI en Trafic Télétel et l'autre partie des Commutateurs E10.5 PAVI en Trafic Annuaire Électronique. Cette spécialisation permet d'optimiser le rendement de chaque Commutateur en les mettant en charge de manière optimale.
Pour les zones à faible trafic : d'acheminer par le(s) même(s) Commutateur(s) E10.5 PAVI les trafics Télétel et Annuaire Électronique simultanément via le Réseau Commuté X25.
La totalité du trafic acheminé par les Commutateurs E10.5 CTA est de 12.000 erlangs qui devront être réacheminés par les Commutateurs E10. PAVI ainsi que par le Réseau Commuté par Paquets TRANSPAC.
Le 4 mars 1994, le principe de transformation des Commutateurs E10.5 CTA en Commutateurs E10.5 PAVI est validé par France Télécom. La conversion s'effectuera en 2 lots :
Le 1er lot de 61 Commutateurs E10.5 CTA sera converti en Commutateurs E10.5 PAVI à l'échéance du 31 décembre 1995.
Le 2ème lot de 20 Commutateurs E10.5 CTA sera converti en Commutateurs E10.5 PAVI à échéance du 31 juillet 1996.
Chaque Direction Régionale de France Télécom doit choisir son scénario, suivant le nombre de Commutateurs E10.5 en service et son trafic moyen à écouler.
Tous les Commutateurs E10.5 CTA doivent être convertis en Commutateurs E10.5 PAVI pour le mois de Septembre 1996 pour préparer l'arrêt total des acheminements affectés au 11 pour les réutiliser pour le futur Numéro d'Appel des Urgences Européen le 112.
Le 28 mars 1994, la société Alcatel est sollicitée pour réaliser les études de faisabilité de conversion et fournir les devis.
Le 30 octobre 1994, les choix technologiques sont validés, au niveau de la partie télématique. (changements ou modernisation des serveurs, extensions etc...)
Novembre 1994, pour une durée de 3 mois, les Commutateurs E10.5 PAVI de Bordeaux et le Centre d'Interrogation (CI) de Massy sont choisis pour expérimenter la mise en trafic réel entre Commutateurs E10.5 PAVI et CI.
Le 26 décembre 1994, le marché de convergence E10.5 CTA / E10.5 PAVI est notifié par France Télécom à la société Alcatel.
Au 31 décembre 1994, le Trafic Télétel atteint 87 millions d'heures pour 1200 millions d'appels,
Au 31 décembre 1994, le Trafic Annuaire Électronique atteint 23 millions d'heures pour 780 millions d'appels.
Fin Février 1995, il est procédé au bilan des sites prototypes convertis.
En Septembre 1996, ce sont finalement en tout 81 Commutateurs E10.5 CTA qui sont transformés en 47 Commutateurs E10.5 PAVI.
À cette date, tous les Commutateurs E10.5 en service en France sont des E10.5 PAVI.

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