Le Phonautographe de Scott de Martinville
Le phonautographe est une machine à
enregistrer le son, construite en 1857 par le Français Scott
de Martinville, bien avant le téléphone de Bell qui
fut inspiré par toutes ces techniques de traitement du son
donc de la parole.


Photo du phonautographe du Teylers Museum ( Haarlem), construit
par Koenig en 1865.. En gravure, le premier modèle
du phonautographe (Scott, 1859)
Un Précurseur : En
1807, le savant anglais, Thomas YOUNG invente un dispositif
qui enregistre les vibrations d'un diapason à la surface d'un
cylindre rotatif enduit de noir de fumée. Ce principe devait
permettre l'inscription et l'analyse des sons
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Scott
de Martinville est un pionnier méconnu et touche-à-tout.
Préparateur de copies, éditeur et libraire, sa carrière
de typographe comme de sténographe l’incite à
améliorer sa prise de notes et donc à s’intéresser
à l’enregistrement du son pour reproduire les textes
qu’on lui dicte le plus fidèlement possible.
En 1849 Il écrit d’ailleurs une Histoire
de la sténographie depuis les temps anciens jusqu’à
nos jours dans l’optique d’améliorer
son efficacité.
Cet intérêt scientifique de la part d’un amateur
n’est pas le fruit du hasard : Scott de Martinville a nourri
sa curiosité en lisant toutes les parutions récentes
liées à l’acoustique.
Il se focalise sur le fonctionnement du tympan de l’oreille
et produit ainsi le phonautographe en l’espace de cinq ans.
Dès 1856, Léon Scott conçoit le Phonautographe.
Le 25 mars 1857 il obtient le Brevet d’invention n°
31.470.
S’il peut enregistrer le son sous forme de gravure, il ne
le restitue pas.
Au 9 de la rue Vivienne, dans le IIe arrondissement de Paris,
sur les murs de la Bibliothèque Nationale, une plaque rappelle
qu'à cet endroit se dressait la maison dans laquelle mourut
Léon Scott de Martinville le 26 avril 1879. |
Ses premiers tracés , connus et conservés
aux archives de l’Académie des sciences, datent de 1860.
Scott s’associe ensuite avec le fabricant
d’instruments (notamment de diapasons très précis
puis plus tard des capsules à flammes manométriques)
Rudolph Koenig (1832-1901), ancien apprenti du luthier Jean
Baptiste Vuillaume.
1861 Scott en fera une démonstration du phonautographe
à l'Académie des sciences .

La gravure représente le second modèle de phonautographe
construit par Rudolph Kœnig vers 1861 (Gravure, Die neueren apparate
der akustik par Franz Josef Pisko, 1865).
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Le fonctionnement du phonautographe peut être considéré
comme analogue à celui du sismographe actuel, les vibrations
des tremblements terrestres remplaçant celles du son.
La membrane, placée au bout d’un
tube acoustique, transmet les vibrations créées par
le son à un stylet qui les grave sur un cylindre enduit de
noir de fumée ou de cire.
La machine de Scott de Martinville ne permet cependant pas d’entendre
le son enregistré mais juste de le stocker ;

Phonautographie de la voix humaine à distance, Édouard-Léon
Scott, Brevet d’invention n° 31.470 délivré
le 25 mars 1857
Essai d’écriture phonautographique, document 8/54-19b
reçu le 16 novembre 1857
Il dépose en Mars 1857 le brevet du « phonautographe
», grâce auquel il a pu inscrire une gravure sonore sur
un rouleau de papier enduit de noir de fumée.
Quelques exemplaires sont vendus à des laboratoires scientifiques
étudiant le son, mais son invention reste un échec commercial.
L’Angleterre a chaleureusement accueilli une
découverte française, le phonautographe. Aubry-Foucault
dans la Gazette de France du 28 octobre 1859 rapporte qu’il a
été présenté devant 2 000 personnes émerveillées
lors de la dernière séance de l’association pour
le progrès des sciences à Aberdeen. Au moins, l’invention
est-elle appréciée outre-Manche (à lire dans
Le
Temps 16 avril 1878 )
Koenig est obsédé par la transmission et la propagation
des ondes sonores et les implications scientifiques du phénomène
acoustique ; faute de moyens les chemins des deux hommes divergent,
Koenig continuera de fabriquer et améliorer le phonautographe
qui devient pourtant vite désuet.
Il entreprend sans succès de faire reconnaître les mérites
du phonautographe.
Résigné et redevenu marchand d’estampes et libraire,
Scott s’éteint en 1879, et ne sera pas reconnu comme le
pionnier du son qu’il avait espéré devenir.
Nous n'apportons qu'un fait anecdotique, de 1875 à 1880 était,
rue Vivienne tout près de l'entrée du passage Vivienne,
un petit magasin d'estampes anciennes , tenu par un petit bonhomme
vif, assez replet, et sa petite femme assez chétive. L'homme
suivait les ventes d'estampes faites à l'Hôtel Drouot,
par Vignères. Il était fort cultivé, disait «je
suis gendelettre», et s'appelait Scott, même Scott de
Martinville. Il parlait de son invention du phonautographe.. (Cité
par Henri Beraldi, L'Intermédiaire des chercheurs et des curieux
du 20 mai 1927).
Vingt ans plus tard, estimant qu’Edison lui a
volé son invention, Scott de Martinville effectue des démarches
sans suite pour faire reconnaître ses recherches. Sa création,
bien qu’imparfaite, réunissait pourtant tous les éléments
des machines postérieures…
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Actionné par des poids, le phonautographe perfectionné
permet une inscription régulière des sons.

Première page des principes de phonautographie avec le pli
cacheté. - Académie des sciences,
En 1874, Alexander Graham
Bell, l'inventeur du téléphone, et le docteur Clarence
Blake cherchent à rendre visible la parole et à
déterminer les fonctions du mécanisme vocal .
Ils pensent qu'ils obtiendront les meilleurs résultats en utilisant
l'oreille humaine à la place du diaphragme du phonautographe.
Le stylet traçant était constitué par une tige
de paille était fixée aux osselets d'une oreille prélevée
sur un cadavre.
Lorsque quelqu’un parlait dans l’embouchure adaptée
sur l'oreille, le tympan vibrait et le stylet inscrivait ces vibrations
sur une plaque de verre recouverte de noir de fumée, mise en
mouvement par un engrenage ou un système de poids.
Avant Graham Bell, de nombreux chercheurs ont poursuivi
l'idée d'une écriture automatique du son, le savant
fut le premier à aboutir dans ce projet insolite.
148 ans plus tard est retrouvé le premier enregistrement
sonore fait sur papier 
Le 28 mars 2008, à l’université de Stanford, une
assemblée d’historiens, de musiciens, d’ingénieurs
du son, écoute, médusée, un extrait de «
Au clair de la lune ». Au milieu des crachouillis, la voix est
distincte ; la séquence dure dix secondes.
Datant du 9 avril 1860, dix-huit ans avant l’invention du
phonographe par Thomas Edison, c’est le plus vieil enregistrement
de voix humaine à ce jour.
Ce n’est que grâce à la technologie numérique
du XXIe siècle que ces signaux ont pu être traduits en
sons. On peut ainsi écouter la plusancienne voix humaine jamais
enregistrée.
ECOUTER SUR Ici
sur Youtube ou ici
Sur Youtube
L’inscription du phonautographe au registreinternational
de la Mémoire du monde
L’UNESCO a inscrit cette invention en septembre
2015 au registre international de la Mémoire du monde. Pour saluer
la décision de l’UNESCO, la Commission d’Histoire de
la Société d’Encouragement pour l’Industrie
Nationale, a organisé sous le patronage de la Commission nationale
française pour l’UNESCO, du Programme Mémoire du
monde de l’UNESCO, de l’Académie des sciences, et l’Institut
National de la Propriété Industrielle, une cérémonie
au cours de laquelle le certificat d’inscription au registre international
de la Mémoire du Monde a été remis au représentant
de l’Association for Recorded Sound Collections, First Sounds,
à l’Académie des sciences et à la Société
d’Encouragement pour l’Industrie Nationale.
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Un phonautographe construit par Arrighini Angelo
à Milan
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Ce phonautographe est
une copie ancienne du premier modèle conçu par Scott
de Martinville en collaboration avec Rudolpf Kœnig en 1859.
Il a été construit avant 1900 dans les ateliers
de Arrighini Angelo à Milan pour le cabinet de physique
d'un lycée.
On peut supposer que l'établissement a procédé
à une commande locale, de préférence à
l'achat couteux de l'original signé Rudolf Kœnig,
vendu 750 Francs par Max Kohl, le constructeur d'appareils scientifiques
réputé.
Le pavillon en bois couvert de tissus noir se caractérise
par sa forme ellipsoïdique. La manivelle utilisée
pour entrainer le cylindre se situe sur un volant que l'on ne
retrouve pas sur le modèle d'origine.
La membrane en baudruche, placée sur le plan de l'un des
deux foyers de l'ellipsoïde, est tendue comme la peau d'un
tambour au moyen d'un anneau serré par trois vis. Altérée
par le temps, elle a été récemment remplacée,
de même que le stylet constitué par une soie de sanglier
collée avec une goutte de cire.
Sur la base en bois, une plaque porte le nom d'Arrighini Angelo,
un constructeur milanais d'appareils scientifiques dont les instruments
pour la physique, les mathématiques et la médecine
furent présentées lors des principales expositions
industrielles européennes de 1871 à 1896. |
Jusqu’en 2008, le plus ancien enregistrement
d’une voix était considéré être celui
de la chanson Mary Had a Little Lamb, réalisé en 1877
sur papier d’aluminium par Thomas Edison. Mais en ce début
de XXIe s., le Lawrence Berkeley National Laboratory, un laboratoire
américain de recherche sur l’acoustique, exhume un phonautogramme
de 1860 et le convertit en version audible.
On y découvre alors une version lente des premières
paroles d’Au clair de la lune, sans doute chantée par
Scott de Martinville lui-même, ce qui en fait le plus ancien
enregistrement de voix et de chant du monde.
Le Lawrence Berkeley National Laboratory, en collaboration avec l’entité
First Sounds, a « traduit » une dizaine d’autres
enregistrements de Scott de Martinville produit entre 1857 et 1860.
Ils sont désormais déposés à l’académie
des Sciences en France et également disponibles sur Internet.
Un article de fond par Serge Benoit, Daniel Blouin,
Jean-Yves Dupontet Gérard Emptoz sur l’invention de Scott
de Martinville dans les Documents de l’histoire des techniques.
à consulter en pdf.
Le phonautgraphe
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