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L'Afrique-Équatoriale française AEF

 

L’acquisition de nouvelles colonies :

L'Afrique Equatoriale avait toujours souffert des difficultés et de la lenteur imposées par la nature à ses communications intérieures.
Une part importante de l'emprunt de 21 millions accordé à la colonie en 1910 fut donc consacrée à la construction des lignes télégraphiques les plus urgentes, et les premiers efforts furent orientés de manière à tirer de son isolement la région qui en souffrait le plus : le territoire militaire du Tchad.
Le but à atteindre était de relier Fort-Lamy le plus rapidement possible, d'une part avec Bangui et Brazzaville, d'autre part avec le réseau de l'Afrique Occidentale, et par lui avec Dakar et la France

Le décret du 15 janvier 1910
, porte création du gouvernement général de l'Afrique équatoriale française (AEF),

Entre 1910 et 1958,
l'Afrique-Équatoriale française (A.-E.F.) était un gouvernement général regroupant au sein d'une même fédération quatre colonies françaises d'Afrique centrale .
le Gabon, le Moyen-Congo, le Tchad et l'Oubangui-Chari .

Une organisation comparable, l'Afrique-Occidentale française.
Si l’AOF a des côtes et des ports, et se trouve accessible par la mer et les grands fleuves, ce tout aussi immense pays qu’est l’AEF est enclavé au cœur du continent, sans débouché autre sur la mer qu’une côte peu commode, longue de 800 km, entre Massabé et la frontière sud du Cameroun.

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Constituée en plusieurs étapes et s'étendant du désert du Sahara au fleuve Congo et de l'océan Atlantique aux monts du Darfour, elle réunit à terme le Gabon, le Moyen-Congo (dont une partie correspond au Gabon, une autre à l'actuelle République du Congo), le Tchad et l'Oubangui-Chari (devenu la République centrafricaine).
Sa superficie atteignait 2 500 000 kilomètres carrés, soit environ quatre fois celle de la France. Son chef-lieu était Brazzaville (République du Congo), résidence du gouverneur général
.

En 1899 le télégraphe n’existe au Congo que le long de la côte, entre Cap Lopez et Massabe, et, vers l’intérieur, de Loango à la Loubomo.
Palais du gouverneur de Brazzaville

Puis en 1919 - Après la Première Guerre mondiale, le Togo et le Cameroun, deux anciennes colonies allemandes, sont désormais administrées par la France, sous mandat de la Société des Nations (SDN).
Cette même année, les possessions du Haut-Sénégal sont divisées pour donner naissance à trois nouvelles colonies, la Haute-Volta (devenu le Burkina Faso), le Niger et le Soudan français (devenu le Mali).

L'Afrique coloniale

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Le Moyen--Congo

Le Congo français ou Moyen-Congo à partir de 1903 était une colonie composée de l'actuel Gabon et de la République du Congo de 1882 à 1906, puis uniquement de l'actuelle République du Congo.

La Loi française du 30 novembre 1882, approuve les traité et acte signés, les 10 septembre et 3 octobre 1880, entre Pierre Savorgnan de Brazza, enseigne de vaisseau, et le roi Illoy Ier, Makoko, suzerain des Batekès (ou Tékés).
En 1883 est créé pour Savorgnan de Brazza un commissariat du gouvernement dans l’ouest africain.
Ce commissariat est transformé en 1886 en un commissariat général au Congo dont relève un lieutenant-gouverneur pour le Gabon.
Le commissariat général est créé par le décret du 11 décembre 1888 qui réunit les établissements du Gabon aux Territoires du Congo, sous l'autorité du commissaire général du Gouvernement au Congo.
Le décret du 30 avril 1891 donne le nom de Congo français aux possessions du centre africain.
Aux termes du décret du 29 décembre 1903, « portant organisation du Congo français et dépendances »5, le commissariat général comprend :
- La colonie du Gabon ;
- La colonie du Moyen-Congo ;
- Le territoire de l'Oubangui-Chari ;
-- Le territoire du Tchad.
En 1906, la France a découpé cette colonie en deux :
- le Gabon avec comme capitale Libreville
- le Moyen-Congo avec Brazzaville

Le commissariat général au Congo est devenu un gouvernement général du Congo français en 1909.
Le décret du 15 janvier 1910, portant création du gouvernement général de l'Afrique équatoriale française (AEF), substitua celui-ci au gouvernement général du Congo français.

En 1911, à la suite de la seconde crise du Maroc, elle cède après un compromis avec l'Allemagne signé à Fès, la partie nord du Congo, qui sera rattachée au Cameroun allemand. Cette bande de territoire est récupérée durant la Première Guerre mondiale en 1914-1915.

Congo 1910 la Compagnie générale de télégraphie sans fil, jeune société fait ses preuves en Afrique-Équatoriale française, sur la liaison Brazzaville à Loango , grâce à l'allongement de la longueur d'onde, d'excellents résultats sont obtenus après des débuts difficiles.

Les travaux du chemin de fer Brazzaville-Océan, commencent en 1921 à partir de Pointe-Noire et la ligne est ouverte en Juillet 1934.
Deux grandes gares sont construites aux extrémités de la ligne pour lui donner son prestige et sa respectabilité, une à Pointe-Noire et une à Brazzaville, et sur la ligne on trouve quatre stations intermédiaires et vingt-trois haltes avec des voies d’évitement placées tous les vingtaines de kilomètres. Un point d’eau est situé tous les trente kilomètres environ.
Une ligne téléphonique à douze fils est installée : six fils pour le téléphone du chemin de fer avec quatre pour les liaisons de gare à gare et deux pour les liaisons de bout en bout, plus deux pour le télégraphe avec retour par la terre, et quatre autres pour le téléphone public.

En 1930, au point de vue de la télégraphie sans fil, Brazzaville possède un grand poste intercolonial construit et entretenu par la Métropole. Son émission est à arc et a une puissance de 115 kw. Ses pylônes ont 150 mètres de haut. Pointe-Noire, Port-Gentil, Bangui, Lamy, Abéché, Ati, Fada, Mao et Faya sont aussi pourvus de postes d'émission de puissances diverses. Des postes à ondes courtes sont en outre installés à : Port-Gentil, Lambaréné, Pointe-Noire, Bangui et Lamy.
En A. E. F. des câbles relient Brazzaville à Léopoldville, Pointe-Noire à Port-Gentil et Libreville, qui est en communication de son côté avec Cotonou et par suite avec la France.
Comme lignes télégraphiques terrestre, il existe les lignes suivantes :
1° Brazzaville, Pointe-Noire, Port-Gentil, Lambaréné,
2° Libreville, Ndjolé ;
3° Brazzaville-Pangala-Kimboto et embranchement Pangala-Djambala ;
4° Liranga, Bangui, Crampel, Arcbambault, Massenva, Lamy, avec un embranchement, Kabo à Batangafo.

A partir de 1955, la technique de commutation ayant évolué considérablement, c'est avec un matériel système Crossbar que les centraux de l'Office Equatorial avaient été équipés les plaçant ainsi parmi les plus modernes. Ils étaient construits par la Société des téléphones Ericsson (C.P.400).
En ce qui concerne Pointe Noire : 1200 lignes fonctionnaient depuis le 28 octobre 1961.
Fin mai 1963
La Compagnie Générale de constructions téléphoniques installait aussi du matériel de sa fabrication à Brazzaville : 1000 lignes d'extension en type R6 , portant sa capacité à 3000 lignes (Dolisie : 300 lignes).

Cependant le central de Pointe Noire n'aurait pu répondre à la demande importante d'abonnements nouveaux si l'Office Equatorial n'avait conclu fin 1962 un marché pour l'extension de nouvelles lignes.
On reprochait souvent aux responsables de l'équipement de consacrer un large investissement aux grandes cités et d'ignorer l'intérieur du pays.
L'Office Equatorial étudiait alors la possibilité de doter également les centres secondaires d'autocommutateurs.
Au cours du dernier trimestre de 1963, Mossendjo, Makabana, Fort-Rousset et Dolisie s'équipaient en centraux de 200 et 100 lignes du type Crossbar.
La modernisation des centraux urbains et leur extension en nombre d'abonnés ne pouvaient s'accommoder des réseaux de câbles et de lignes aériennes existants ; c'est pourquoi, simultanément aux montages des autocommutateurs, des équipes posaient des câbles et réalisaient de de nouvelles installations à :
-Pointe Noire : 10 km de câble étaient posés dont certains en conduite
-Brazzaville : le réseau le plus important du pays et même de l'Office Equatorial, où les secteurs de Poto-Poto et de Bacongo avaient reçu une extension très large.
C'était principalement en raison des distances par la radiotéléphonie que les liaisons interurbaines étaient établies.
Cependant, en bordure du chemin de fer Brazzaville-Pointe Noire, une artère téléphonique ancienne à 6 circuits (3 circuits PTT, 3 circuits C.F.C.Q.) desservait toutes les villes outre la Capitale du Congo et son Port.
Grâce à l'emploi du courant porteur, elle avait pu écouler le trafic mais avec attente. Déjà dès 1965 elle ne suffisait plus. (En 1955, elle fut équipée d'un TRT. 12 voies s'y ajoutait donnant en plus 4 voies Brazzaville-Oolisie, 6 voies Brazzaville-Pointe Noire, 6 voies Dolisie-Pointe Noire. Quelques temps après un équipement nouveau allait répondre à la demande téléphonique interurbaine de cet axe important.).
En ce qui concerne le fil, en 1962 une ligne de 250 km était construite avec fils Coperweld par l'Office Equatorial pour le compte de la compagnie minière de l'Ogoué. Sur cette ligne physique, l'Office Equatorial disposait de liaisons par courants porteurs A.M.E. pour les liaisons au Congo entre Dolisie-Makabana-Mossendjo-Binda. Dans le troisième trimestre 1963, la ligne Kinkaka-Kindamba (130 km) était construite en fil sur appuis télescopiques légers.
Des systèmes de courants porteurs du type Stackable TRT allaient être installés sur des sections de lignes chargées, sur l'artère Brazzaville-Pointe Noire. La carte, qui reproduit schématiquement le réseau interurbain du Congo, est suffisamment explicite sur la disproportion régionale et sur le nombre de liaisons interurbaines entre celles établies par fil et celles assurées par radio.

L'internationale : Brazzaville était relié à Paris, Tananarive, Douala, Ouagadougou, Abidjan, Léopoldville, Dakar.

Le Congo était constitué d'un réseau télégraphique à grande distance reliant Brazzaville* aux états de l'Office Equatorial des Postes et Télécommunications ; ces liaisons fonction naient en téléimprimeur sur voie radioélectrique, ainsi que Brazzaville à Pointe Noire en télégraphie harmonique sur courants porteurs.
Le service Télex était ouvert au mois de juillet 1961 à Brazzaville. Il comptait en 1965 14 abonnés à Brazzaville. Le trafic était principalement dirigé vers la France et sur le Congo-Léopoldville (aujourd'hui le Zaïre, dont la capitale est Kinshasa).

Le réseau téléphonique
Malgré l'effort actuel de l'accès au téléphone pour la majorité de la population, le phénomène de discrimination spatiale existe et persiste toujours. La répartition régionale du téléphone, est assez frappante. Il y a une concentration autour deu deux pôles : Pointe Noire et Brazzaville et le reste du pays est vide. Plus des 3/4 des installations de télécommunications se trouvent dans les zones urbaines qui ne regroupent que 20 % de la population.
On sait bien que la tendance consiste à équiper d'abord les grands centres et à créer ainsi une discrimination spatiale dans la diffusion de l'innovation et à essayer de déterminer des priorités dans les plans d'équipement.
Les services de téléinformatique, télécopie rapide, ej:c.... ont des points précis de couverture du territoire : les villes (Brazzaville et Pointe Noire). Leur diffusion est loin d'être aussi large. Or, de tels réseaux constituent en aménagement du territoire un outil important pour le désenclavement informationnel et culturel des zones éloignées des principaux centres urbains. (La création des réseaux de transmission a facilité en grande partie la décentralisation administrative).
La hiérarchisation du réseau téléphonique est à 5 niveaux : Il va du centrer de transit national (CTN) aux postes d'abonnés, en passant par le centre de transit régional (CTR), le centre de regroupement (CR) et les centres locaux.
Il existe un câble coaxial de 120 voles téléphoniques d'une longueur de 515 km, posé en 1970 entre Brazzaville , Loubomo et Pointe Noire. Ce câble saturé permet le raccordement de 11 centraux automatiques, les points de sorties intermédiaires sont : Kinkala, Mindoli, Loutété, Madingou, Nkayi, toudima, toulombo.
Quant à la communication téléphonique, le nombre de centres automatiques a augmenté les dernières années. On comptera près d'une vingtaine de centres.
Par contre, les faisceaux hertziens constituent l'outil idéal en matière d'aménagement du territoire puisqu'ils offrent instantanément et en tous lieux par le biais d'une antenne, des capacités de transmis¬ sions susceptibles de satisfaire les exigences techniques.
Dans l'axe Brazzaville-Ouesso, il existe un faisceau hertzien de 600 voies (téléphoniques et télévisuelles à visibilité directe).
Ouesso est relié avec Impfondo par un faisceau troposphérique de 120 voies (il devra être prolongé vers la République Centraficaine) .
Un faisceau de 24 voies relie Ngo-Djambala et Gaaboma.
Par ailleurs, sur l'axe Brazzavd.Pointè Noire il existe un faisceau hertzien d'une capacité de 960 voies (téléphoniques , télégraphiques , télévisuelles, radiophoniques et de télex).


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Le Tchad


Une part importante de l’emprunt de 21 millions accordé à la colonie en 1910 fut donc consacrée à la construction des lignes télégraphiques les plus urgentes, et les premiers efforts furent orientés de manière à tirer de son isolement la région qui en souffrait le plus : le territoire militaire du Tchad.
Le but à atteindre était de relier Fort-Lamy le plus rapidement possible, d’une part avec Bangui et Brazzaville, d’autre part avec le réseau de
l’Afrique Occidentale, et par lui avec Dakar et la France.
Même en utilisant la ligne belge déjà construite le long du Congo, depuis le Stanley-Pool jusqu’en face de Liranga,au confluent de l’Oubangui, il restait encore à combler un intervalle de 2.200 kilomètres entre ce poste et N’Guigmi, premier bureau télégraphique de l’Afrique Occidentale Française au Nord du Tchad .

La Télégraphie

La mission du capitaine P.Lancrenon (1905-1906) (Lien sur ce document)
En 1905-1906, il est chargé de mener une mission d'exploration au Tchad et d'établir le tracé d'une route dans les régions des rivières Sangha et Logone afin de relier le poste de Carnot au Tchad (Centrafrique actuelle). Ce territoire étaient encore largement inconnu de l’adminisatration française et les seules routes utilisables passaient par le territoire du Cameroun allemand.
L’expédition partit de Carnot le 5 juillet 1905. Elle était composée, outre le lieutenant, de deux sergeants français, d’un civil, de tirailleurs et d’auxiliaires, et d’une troupe de porteurs recrutés dans la population locale.
Après avoir exploré le bassin du Sangha, l’expédition arriva sur les bords du Logone. Elle fut attaquée par des guerriers du peuple Laka à plusieurs reprises. Le 4 septembre 1905, la colonne arrive à Laï, point ultime de l’exploration.
La mission fut de retour à Carnot le 6 novembre. Une nouvelle expédition fut très vite organisée, partie le 23 décembre 1905 de Carnot vers Lai pour tracer de nouveaux itinéraires, avant de poursuivre jusqu'à Fort-Lamy.
À la suite des accords franco-allemands de 1911, une partie des territoires explorés par la mission Lancrenon furent cédés à l’Allemagne et rattachés au Cameroun allemand.

En 1910, Lancrenon est de retour au Tchad. Le Lieutenant-Gouverneur de l’Oubangui-Chari-Tchad (au Nord de l'AEF) le charge de la mission télégraphique du Tchad.
Entreprise en 1910 et terminée en 1913, elle avait pour but d'améliorer les communications au sein de la colonie française d'Afrique Equatoriale, nouvellement créée, ainsi que ses liens avec le territoire militaire du Tchad.
La nouvelle ligne télégraphique permit de relier Fort-Lamy à Bangui et à Brazzaville, et de faire la jonction avec le réseau déjà existant de l'Afrique Occidentale Française.
Lancrenon et ses ouvriers travaillèrent sur deux tronçons successifs : d’abord entre Fort-Lamy et Fort-Crampel (soit environ 860 kilomètres) puis entre Fort-Lamy et Rig-Rig (soit 520 kilomètres).
Avant de superviser les travaux d’installation de la ligne, Lancrenon dut explorer la région entre Fort-Crampel et Fort-Lamy afin de relever le terrain et préparer le tracé de la ligne. Une équipe d’une cinquantaine d’hommes travailla ensuite à déboiser une piste, planter des poteaux et y installer la ligne télégraphique. Plusieurs bureaux télégraphiques ont été construits le long de la ligne.
Bien que les ouvriers fussent payés, leur travail s’inscrivait dans le cadre des corvées imposées aux populations locales, comme l'indique Lancrenon dans son rapport :
Les plus gros travaux, principalement le débroussement et le transport des poteaux, ont été faits par des manœuvres temporaires. Ceux-ci ont très généralement été fournis sans aucune difficulté par les chefs indigène . […] Chacun était nourri et payé, puis rentrait chez lui sa tâche accomplie. Deux fois seulement, j’ai dû demander la secours de quelques tirailleurs ou gardes régionaux pour éviter des pertes de temps.
Après avoir achevé la deuxième partie de sa mission Lancrenon aprit qu’une autre mission avait été ordonnée pour installer la télégraphie sans fil, rendant ainsi son ouvrage obsolète à peine terminé.
Monteur télégraphique

Le capitaine Lancrenon combattit sur le front français dès 1914. Il fut nommé chef d’escadron du 239ème Régiment d’artillerie de campagne. Son courage au combat dans les tranchées lui vaut d’être nommé Chevalier de la Légion d’Honneur et de recevoir la croix de guerre1. Il meurt au combat le 28 juin 1917, au bois Camart (Meuse), alors qu’il était parti reconnaître les lignes ennemies

La TSF

Les travaux commencèrent partout en 1910 et se poursuivirent sans interruption; la T. S. F. fut installée entre Fort-Lamy et N’Guigmi dans le courant de 1912, et enfin le 11 octobre de cette même année, j’ai eu la satisfaction de passer le premier télégramme de Kabo à Fort-Crampel, soudant ainsi le dernier maillon de cette chaîne immense qui relie le câble Brest-Dakar aux points les plus méridionaux de notre Afrique Equatoriale.
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Le Cameroun

Le Kamerun allemand
Dans les années 1860-1870, les Français et les Allemands commencent à s'intéresser au Cameroun.
Le gouvernement allemand envoie Gustav Nachtigal négocier la mise sous tutelle allemande du Cameroun avec les chefs doualas. Deux traités en ce sens sont signés avec des chefs de l'estuaire du Wouri appelé Cameroon River par les Britanniques : les traités germano-doualas. Le premier de ces traités, qui date du 12 juillet 1884, marque la naissance internationale du Cameroun moderne.
Le 14 juillet 1884, le drapeau allemand flotte à Cameroon Towns devenu Kamerun pour les Allemands et plus tard Douala, et ce territoire devient sous protectorat allemand du Kamerun.
En 1890 La télégraphie optique ou aérienne est introduite au Cameroun.
En 1912, arrive la télégraphie sans fil ou radiotélégraphie.

Lorsqu'en juillet 1911, après la deuxième crise marocaine, l'Allemagne obtint un objet de compensation d'au moins 280 000 kilomètres carrés sous la forme du Nouveau Cameroun, les attentes d'une zone coloniale centrafricaine contiguë furent libérées.
L'idée est devenue un objectif de guerre allemand après 1914. Mais après le déclenchement de la guerre, les Français, les Britanniques ont envahi les colonies allemandes et ont tenté de satisfaire leurs intérêts de sécurité en chassant un concurrent gênant.
En août 1914, début de la Première Guerre mondiale, le réseau est d’environ 1 390 km de lignes, avec 25 bureaux de poste et de télégraphie et une station radiotélégraphique.
Quant à la téléphonie, le réseau allemand comporte 200 postes et seulement 82 km de lignes.
Après la Première Guerre mondiale, pendant laquelle le Cameroun fut conquis par les forces franco-britanniques, la colonie allemande fut partagée en deux territoires confiés par des mandats de la Société des Nations (SDN) en 1922, à la France (pour les quatre cinquièmes) : le Cameroun français ; et le reste au Royaume-Uni : le cameroun britannique.
Pendant la Première Guerre mondiale, les Allemands ont suivi une politique de la terre brûlée qui impliquait la destruction des lignes de communication, y compris le téléphone et le télégraphe.

Le Cameroun français
La majeure partie du Cameroun constitue la colonie allemande du Kamerun, puis s'y ajoute le Neukamerun pour les territoires cédés par la France en 1911 après la crise d'Agadir. Une partie du Cameroun est confiée à la France par la Société des Nations au terme de la Première Guerre mondiale. Cette partie, la plus vaste (431 000 km²), mais peu peuplée (environ 2 000 000 d'habitants), est dirigée par un Haut-Commissaire, et placée sous le régime colonial de l'indigénat, qui consiste à laisser aux indigènes le soin de régler les problèmes qui ne concernent qu'eux par le biais de leurs autorités traditionnelles.
Le Cameroun, administré par la France de 1916 à 1960 était un protectorat allemand placé par la Société des Nations sous le mandat puis, sous la tutelle de la France et non, comme il est souvent écrit, une colonie française. Etat spécifique au statut particulier, le Cameroun ne sera pas intégré à l’Afrique équatoriale française (AEF), même si le modèle colonial et les méthodes d’administration coloniales lui seront appliqués.

Lorsque la France prend possession du Cameroun français conformément au plan de partage de mars 1916, elle continue l’extension des réseaux télégraphique, téléphonique et radiotélégraphique. Exceptée la radiotélégraphie déjà existante pendant le mandat, l’extension de la télégraphie et de la téléphonie n’est effective au Nord-Cameroun que pendant la tutelle, particulièrement à Ngaoundéré, Garoua et Maroua.

Période tutélaire (1946-1960)
Après la Seconde Guerre mondiale, l'ONU change le statut du Cameroun qui, de protectorat, devient mis en tutelle, mais est malgré tout intégré à l'Union française comme les autres colonies.
Au Cameroun français, l’administration a privilégié l’enseignement général au détriment de l’enseignement technique professionnel. Ainsi, le personnel qualifié manquait dans des services comme les postes et télécommunications, avec des conséquences sur le chiffre d’affaires et les recettes. En 1951, sont créés les centres d’instruction professionnelle qui ont formé des agents des postes et télécommunications jusqu’à l’indépendance du territoire en 1960. L’intensification des infrastructures gérées par ce personnel a eu des impacts importants .

En 1946, une Assemblée Représentative du Cameroun (ARCAM) fut constituée .
En 1956, la France accorde l’autonomie interne.

Le Cameroun britannique
Le Cameroun sous mandat britannique était administré en deux zones, le Cameroun septentrional et le Cameroun méridional.
Le Cameroun septentrional se composait de deux sections non contiguës, divisées par un point de rencontre entre les frontières du Nigeria et du Cameroun, et était administré comme une partie de la région du nord du Nigeria.
Lorsque la Société des Nations a cessé d'exister en 1946, le Cameroun britannique a été reclassé comme territoire sous tutelle de l'ONU, administré par le Conseil de tutelle de l'ONU, mais est resté sous contrôle britannique.
Le 12 juin 1946, les Nations unies ont approuvé les accords de tutelle pour que le Cameroun britannique soit gouverné par la Grande-Bretagne.

Au Cameroun britannique, de 1916 aux années 1950, les communications reposaient sur les coureurs de drapeaux qui ont été décrits comme des "lignes téléphoniques humaines". Les chemins suivis par les coureurs ont servi de base au développement des lignes télégraphiques sur le territoire. Par exemple, la ligne de Buéa-Kumba à Ossidinge utilisait les mêmes chemins que les coursiers. Au milieu des années 1930, le câblage du Cameroun britannique a reçu plus de soutien.

Le Cameroun français est devenu indépendant, sous le nom de République du Cameroun, le 1 janvier 1960, et l'indépendance du Nigeria était prévue pour la même année, ce qui a soulevé la question de savoir ce qu'il fallait faire du territoire sous administration britannique.
Après quelques discussions (qui duraient depuis 1959), un plébiscite est décidé et organisé le 11 février 1961. La zone nord à majorité musulmane a opté pour l'union avec le Nigeria, et la zone sud a voté pour rejoindre le Cameroun.
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Le 15 décembre 1953, M. Jourdain, secrétaire général du Cameroun français, crée une liaison radiotéléphonique entre Douala et Ebolowa.
En juin 1954, l’administration des postes et télécommunications engage la construction de la ligne téléphonique entre Douala et Nkongsamba pour un montant d’environ 40 millions de francs CFA85. Prévue pour des communications interurbaines directes ou en transit avec les abonnés de Yaoundé, elle est entièrement construite le long de la voie ferrée à la fin de l’année 1955.
Le 1er novembre 1954, une liaison radiotéléphonique est réalisée entre Douala et Paris.
Le 7 décembre 1955, une autre liaison radiotéléphonique est créée, cette fois entre le Cameroun et l’Afrique équatoriale française.
À l’extrême nord du territoire, une station radioélectrique est ouverte à Fort-Foureau au trafic télégraphique officiel et privé dans tous les régimes, le 1er août 1955 ; de même,
le 1er septembre 1955, 2 stations radio--électriques sont ouvertes à Yagoua et à Mora au trafic télégraphique officiel et privé dans tous les régimes.
En 1955, l’assemblée territoriale du Cameroun obtient la construction d’un bureau des postes et télécommunications à Yabassi,

En décembre 1959, le réseau télégraphique atteint 2 677 km de lignes avec 116 établissements.
De même, le réseau radiotélégraphique disposait de 37 stations radiotélégraphiques réparties sur tout le territoire .
Le service téléphonique, quant à lui, a 49 centraux urbains, 3 560 postes et environ 1 500 km de ligne.


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Extrait d'une étude : Télégraphe et téléphone dans les colonies allemandes : entre concurrence et complémentarité. De Fanny Dufétel-Viste

À la Poste impériale, ou Reichspost, était ainsi dévolue la charge d’implanter et de développer des réseaux de communication et d’information selon des critères politiques, mais aussi démographiques et économiques.
Pour ce faire, la Reichspost disposait d’une gamme d’outils allant du courrier simple aux instruments de vitesse que cette fin de XIXe siècle avait mis à sa disposition : radio, télégraphe et téléphone.
Si la radio joua alors avant tout un rôle militaire et international dans le contexte colonial allemand, le télégraphe et le téléphone, eux, connurent une utilisation beaucoup plus intensive et large au sein même des colonies.
C’est sur ces deux modes de communication, le télégraphe et le téléphone, que nous comptons nous pencher.
Comment s’articulaient-ils entre eux ? En effet, on est là en présence de deux outils, si similaires par la vitesse, et en même temps si différents par la nature même de leur support, électricité et papier pour le télégraphe, électricité et son pour le téléphone. Jusqu’où pouvait aller leur complémentarité et où commençait peut-être leur concurrence ?

Dans les colonies allemandes se posait cependant le problème de la « dilution » des moyens humains : en 1913, pour le Togo, 87 000 km2 sont occupés par 320 Allemands ; au Cameroun, 1643 Allemands sont répartis sur 795 000 km2, 12 292 Allemands sont recensés sur les 835 000 km2 du Sud-Ouest africain et 4107 vivent sur les 995 000 km2 de l’Afrique de l’Est.
Seule une communication rapide pouvait dès lors suppléer à cette fragilité structurelle et surmonter l’obstacle que représentait l’immense superficie peu peuplée des colonies.

Dès les premiers temps, l’État allemand et une entreprise clé de l’industrie allemande comme Siemens se sont en effet positionnés sur le marché de la téléphonie. Cependant, et c’est là un facteur qui donnait l’avantage au télégraphe par rapport au téléphone, ce dernier était handicapé par sa faible portée et une médiocre qualité d’écoute. C’était le cas dès que l’on dépassait quelques dizaines de kilomètres, surtout dans des colonies situées en zone tropicale, comme le Cameroun ou la Nouvelle-Guinée, avec des lignes téléphoniques qui subissaient les effets conjugués de la chaleur et de l’humidité. La transmission par télégraphe, si elle était aussi défectueuse par moments, n’en était pas moins globalement plus fiable et stable. Enfin, contrairement au téléphone qui ne véhicule qu’un message oral, donc éventuellement sujet à déformation, le télégramme, lui, transmettait un message sous forme fixe. Dans un contexte politique et administratif, le télégramme semblait donc offrir une garantie d’exactitude, de « vérité » dans le rendu de l’information. Le télégraphe fut ainsi l’instrument privilégié pour relier les centres de décision politiques et économiques aux localités de chaque colonie. Le développement du télégraphe entre 1903 et 1907 est particulièrement remarquable sur le continent africain. Un des facteurs à envisager pour expliquer cette hausse est à chercher dans les conflits colons-colonisés qui secouèrent justement à cette époque les colonies allemandes d’Afrique .
Gr 1
Des centaines et même des milliers de kilomètres de lignes télégraphiques furent alors construits pour des utilisations militaires, la Reichspost récupérant alors, une fois la paix revenue, une grande partie de ces lignes. Le développement du télégraphe s’en trouva subitement accéléré, ce qui est particulièrement flagrant dans le cas du Sud-Ouest africain et de l’Afrique de l’Est, mais beaucoup moins pour le Cameroun.

Qu’en est-il alors du téléphone ?
On pourrait penser que sa part est réduite à peu de chose. Pourtant, les chiffres des conversations téléphoniques sont loin d’être insignifiants ainsi que l’on peut le voir sur le graphique 2 (Communications téléphoniques Afrique) et sur le graphique 3 (Communications téléphoniques îles du Pacifique et Kiautschou). En comparant les trois graphiques, on constate d’abord une particularité en ce qui concerne le Sud-Ouest africain : entre 1907 et 1913, le nombre de télégrammes expédiés depuis cette colonie ou arrivés diminue nettement alors que le nombre de télégrammes en transit, c’est-à-dire provenant d’autres territoires que le Sud-Ouest africain, connaît une augmentation très conséquente, entraînant d’ailleurs une hausse globale du nombre de télégrammes traités. Pourquoi ce recul au sein du Sud-Ouest africain ? Différents facteurs peuvent expliquer ce phénomène. Un de ces facteurs est sans doute le développement du téléphone à la même époque : on constate en effet qu’exactement à la même période - entre 1907 et 1913 - où le télégraphe est de plus en plus utilisé pour l’international (en transit) et moins au sein même du Sud-Ouest africain, le téléphone, lui, connaît un très important développement. Certes, le retrait des troupes allemandes du Sud-Ouest africain après le règlement du conflit contribuait à cette baisse de l’utilisation du télégramme, mais ce n’était pas tout.
Gr 2Gr3
Même s’il ne faudrait pas établir un schéma de vases communicants, ces chiffres incitent en effet à penser que le téléphone a pris, au moins partiellement, la place du télégraphe localement et régionalement au sein de cette colonie. Cette évolution fut d’ailleurs perçue par la Reichspost. Dans le rapport suivant daté de 1909 et concernant Windhoek (Sud-Ouest africain), il est ainsi expliqué :
« Le trafic des télégrammes a certes diminué de 17,6% pour l’année de référence. Cette baisse est à mettre en liaison avec la démobilisation et le retour chez eux de nombreux éléments de la troupe. Cependant, une partie des anciens échanges télégraphiques a été remplacée par les communications téléphoniques directes suite au développement des installations de téléphonie. […] nous sommes parvenus à augmenter le trafic téléphonique vers l’extérieur - autrement dit le moyen de remplacement du trafic télégraphique - de 43,5%. » 

Il est intéressant de souligner qu’ici, l’auteur considère à deux reprises explicitement le téléphone comme un réel outil, sinon de remplacement, du moins complémentaire du télégraphe. Il faut cependant souligner que c’est là un schéma propre au Sud-Ouest africain. La forte hausse du téléphone y est aussi à mettre en relation avec le boom économique que connut la région de Lüderitz avec la découverte des premiers filons diamantifères justement en 1908 : de grandes compagnies s’y développèrent dans une ambiance fortement concurrentielle, des compagnies pour lesquelles le téléphone représentait un outil de gestion au quotidien. Dans le Sud-Ouest africain (graphique 2) la Reichspost a ainsi transmis en 1913 pas moins de 3 410 000 communications téléphoniques, à Kiautschou pour la même année (graphique 3), ce chiffre s’élève à 1 194 000. Même pour des colonies où le développement du téléphone ne paraît progresser que beaucoup plus difficilement, on retrouve des chiffres en fait non négligeables si on veut bien les replacer en perspective avec le développement économique et la population du territoire. Au Togo (graphique 2), toujours en 1913, la Reichspost transmit 55 000 communications téléphoniques, dans les îles du Pacifique (Nouvelle-Guinée allemande, îles Carolines, Palau, Mariannes et Marshall, à l’exception de Samoa cependant, graphique 3) ce chiffre fut de 52 000. Si l’augmentation des communications téléphoniques est nettement moins spectaculaire en ce qui concerne les trois autres colonies africaines, voire quasi insignifiante pour le Togo, elle n’en est pas moins réelle et est loin d’être négligeable. Comment expliquer alors cette percée d’un outil coûteux comme le téléphone ? Il est en effet nécessaire de rappeler qu’à la différence de la métropole et du continent européen plus largement, les colonies allemandes n’offraient pas a priori une clientèle potentielle suffisante et dense pour justifier la mise en service de lignes de téléphone. En fait, le téléphone va parvenir à se tailler une place réelle dans le secteur des communications coloniales et même, de manière qui peut paraître de prime abord paradoxale, une place tout à fait spécifique à mettre justement en relation avec le contexte colonial. La politique volontaire de la Reichspost et de l’Allemagne en matière de téléphonie, si elle est un facteur sans aucun doute décisif, ne saurait en effet expliquer à elle seule le développement que le téléphone connut dans les colonies allemandes.

Qui étaient alors les usagers du téléphone ?
Assez logiquement on trouve l’administration coloniale comme cliente régulière, même si elle restait très attachée au télégraphe. On peut d’ailleurs supposer avec quelque certitude - mais sans preuve définitive - que les communications téléphoniques de service, à l’image des télégrammes de service, bénéficiaient de la gratuité, ce qui aurait évidemment constitué une incitation forte à l’usage. Des chiffres de quelques millions d’appels téléphoniques sur une année ne sauraient cependant s’expliquer totalement par l’usage qu’en faisaient l’administration coloniale et quelques milliers d’Européens, et ce pour les colonies les plus peuplées encore. Il ne s’agit pas là uniquement d’un moyen de communication utilisé par des Européens, mais bien d’un moyen utilisé par des composantes plus larges de la population résidant dans ces colonies allemandes. Les données manquent pour établir que le téléphone ait été très utilisé par les indigènes. En revanche, ce qui apparaît régulièrement et avec insistance, c’est l’usage assez intensif qui en était fait par les commerçants indiens ou arabes sur le continent africain et par les commerçants chinois dans la concession portuaire de Kiautschou. Une raison essentielle, et c’est sûrement là qu’il faut voir aussi la clé du développement spécifique du téléphone dans les colonies allemandes, était que cette population commerçante ne maîtrisait que peu ou pas l’alphabet latin, indispensable pour rédiger les télégrammes.

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Le Gabon

C’est un pays forestier avec une faible population. La France occupe le Gabon progressivement à partir du milieu du XIXe siècle, après un traité signé avec le « roi Denis », en 1839.
Les explorateurs commencent à pénétrer l’arrière-pays (tels le Franco-Américain Paul Belloni Du Chaillu, qui donnera son nom au massif du Chaillu, ou Pierre Savorgnan de Brazza qui remonte le cours de l'Ogooué en 1874, puis 1876-1878 et 1879-1882).

En 1886, le Gabon devient une colonie qui, dès 1888, est fusionnée avec celle du Congo sous le nom de Gabon-Congo puis, en 1898, de Congo français21.
En 1904, à la suite d'un décret du 29 décembre 190322, le Gabon redevient une colonie distincte, le reste du Congo français formant les deux colonies du Moyen-Congo et d'Oubangui-Chari et le territoire militaire du Tchad.
En 1910, les colonies du Gabon et du Congo sont intégrées dans l'Afrique-Équatoriale française AOF.

En 1946, le Gabon devient un territoire d'outre-mer.
Le 17 août 1960, le Gabon accède à l'indépendance.

Peu de travaux ont été consacrés au domaine des télécommunications au Gabon.
La difficulté à faire l’historique des télécommunications au Gabon est corrélative à la quasi-absence d’une mémoire nationale.
Une défaillance en termes d'archivage des données au Gabon est à relever.

En 2014 il ya  : 18 700 Lignes de téléphone fixe et 2 942 719 Téléphones portables.

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L'Oubangui-Chari

Le territoire est contesté par le Sultan d’Égypte. Après la défaite des forces égyptiennes, la France établit une administration coloniale dans ce territoire en 1903. En 1898, la mission militaire du commandant Marchand tente d'incorporer l'actuel Sud-Soudan au territoire de l'Oubangui-Chari, mais la mission se heurte aux forces de l'armée britannique de Kitchener, à Fachoda, donnant lieu à la crise de Fachoda.

La colonisation de l'Oubangui a commencé avec l'établissement de l'avant-poste Bangui en 1889, sur la rive droite française de l'Oubangui, face au poste belge de Zongo sur la rive gauche.
Le territoire appelé Oubangui-Chari en 1904 est formé de la réunion de la région du Haut-Chari et des territoires du Haut-Oubangui.

Le 1er décembre 1958, par une libre et unanime décision des représentants élus du peuple, l'Oubangui-Chari a choisi de se constituer en « République centrafricaine », État membre de la Communauté.

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Rien à voir avec les télécommunications, mais avec la colonisation.

LA SOCIETE FRANÇAISE D'EMIGRATION DES FEMMES AUX COLONIES (1897 - 1898) par Yvonne KNIBIEHLER

Le 12 janvier 1897, une conférence attire un nombreux public au siège de l'Union Coloniale, 50, rue de Provence.
L'orateur est le publiciste Joseph Chailley-Bert, "coloniste" actif (1), qui vient annoncer et expliquer la création d'une Société française d'émigration des femmes aux colonies.
La séance est présidée, circonstance inattendue, par le comte d'Haussonville, personnalité du parti royaliste, peu favorable à la politique coloniale mais connu pour avoir facilité l'émigration des Alsaciens Lorrains en Algérie et aussi pour animer diverses œuvres de bienfaisance au profit des femmes et des enfants (2). La réunion de ces deux hommes symbolise une brève rencontre entre "l'idée coloniale" et la condition féminine : rencontre importante quoique brève car elle les éclaire l'une et l'autre à un moment important.
L'allocution d'ouverture prononcée par d'Haussonville et la conférence de Chailley-Bert (3) font connaître les intentions et les objectifs des fondateurs de la Société ; ultérieurement, la presse, notamment la Quinzaine coloniale et la Revue des Deux Mondes indiquent les résultats de l'expérience.
L'idée parait d'une simplicité lumineuse. D'un côté, dit Chailley-Bert, le mot "politique coloniale" est en train de changer de sens : pendant vingt ans il n'a signifié que conquêtes,désormais il signifie organisation politique et administrative, exploitation économique ; il faut donc à présent envoyer aux colonies des colons et des fonctionnaires ; ceux-ci sont le plus souvent célibataires mais, dit d'Haussonville, "point de mariage, point de famille et point de colonies d'avenir". Justement, d'un autre côté, un "stock" (4) important de jeunes filles françaises restent, elles aussi "sons avenir". D'Haussonville est surtout sensible au sort pitoyable des "non classées" celles que la politique scolaire a pourvues de diplômes et de prétentions, mais qui ne peuvent trouver d'emploi ; Chailley-Bert insiste davantage sur le fait qu'elles ne trouveront pas de mari faute de dot (à cause du déclin des revenus agricoles et des taux d'intérêt). La Société d'émigration des femmes aux colonies veut résoudre ensemble, et l'un par l'autre, le problème colonial et le problème féminin : d'où "l'immense intérêt social"des solutions qu'elle propose.
Mais lorsqu'il s'agit de préciser ces solutions dans le détail, la confusion s'installe, la pensée des fondateurs apparaît pleine d'incertitude et de contradiction.

(1) Chailley-Bert est le gendre de Paul Bert, gouverneur de l'Annam et du Tonkin en 1386.
(2) Entre autres une Société de protection des Alsaciens Lorrains, et une Oeuvre des mères ; il publiera en 1900 Salaires et Misères de femmes
(3)Elles sont publiées aussitôt (1897) chez Armand Colin. J. CHAILLEY-BERT, L'émigration des femmes aux colonies. Collection Questions du temps présent, 63 pages.
(4) Le mot est de Chailley-Bert, qui s'excuse de cette "expression commerciale". On le sait l'Union Coloniale est surtout soucieuse de développement économique ; le langage de ses membres s'en ressent.

PREMIERE INCERTITUDE. JUSQU’OÙ IMITER LES ANGLAIS ?
Dès le départ on se réfère explicitement à l'exemple anglais, mais en même temps, on le répudie. La United British Wotnen's émigration association envoie des prospectus dans toute l'Angleterre pour attirer des jeunes rurales, elle les rassemble à Londres dans des hôtels exclusivement réservés à leur usage, les dirige sur un port, les embarque au nombre de 100 ou 150, accompagnées d'une ou plusieurs femmes d'âge et de responsabilité ; à la colonie, elle fait escorter chacune d'elles jusqu'à l'endroit où un emploi l'attend et reste en contact pendant encore un an ou plus. "Au bout d'un certain temps presque toutes se marient, et la Société a atteint le double objet qu'elle se proposait : procurer aux jeunes femmes de la métropole une situation et aux colons des épouses". Si on suppose en outre qu'ils sont heureux et qu'ils ont beaucoup d'enfants" l'entreprise ressemble à un conte de fées, et c'est sans doute ce qui fait rêver Chailley-Bert. Pourtant, il juge "ridicule de rassembler sur un point détermine 100, 150, 200 femmes pour les former en bataillon sacré" (1) et surtout il déclare que les colonies françaises n'ont pas besoin d'un grand nombre de femmes ("quelques dizaines au plus" pour les premières années) ; il ne croit donc pas nécessaire d'envoyer des circulaires. Et néanmoins il veut mettre sur pied comme les Anglais une infrastructure solide et sûre, donc probablement coûteuse, sans se demander si elle sera rentable, pour déplacer seulement quelques personnes chaque année. Il est vrai qu'il lance son imagination à travers les siècles : il faut "tenir compte de choses qui se passeront dans un siècle ou deux"... ; il prévoit une émigration masculine sans cesse accélérée (l'Afrique du Nord peut nourrir 10 millions de personnes, dit-il), et il veut être en mesure de mettre le "contingent d'émigration féminine (...) à la hauteur de tous les besoins".

SECONDE INCERTITUDE. FAUT-IL CREER UN BUREAU DE PLACEMENT ?
Officiellement la Société, suivant toujours le modèle britannique, fonctionnera comme bureau de placement. "Nous nous proposons de procurer dans les colonies une situation à celles qui, sans faute de leur part, n'ont pu s'en faire une dans la métropole". Mais les Anglais transportent leurs jeunes campagnardes en Afrique du Sud et en Australie, c'est-à-dire dans des pays tempérés où les exploitations rurales se multiplient rapidement, et où l'on a besoin de fermières. Alors qu'aucune colonie française n'offre les mêmes perspectives, et Chailley-Bert le sait bien puisqu'il affirme "Nous aurons cinquante fois plus de demandes que de situations à accorder". Il évoque quelques places de gouvernantes, d'institutrices, de sages-femmes, de modistes, de couturières ; mais surtout il espère que le gouvernement va confier à des femmes, au moins dans les villes, des emplois de télégraphistes, employées de postes etc..
Bref les places sont encore à créer, et elles restent, bien entendu, subalternes... Est-ce une simple coïncidence ? En 1900 va paraître un petit livre intitulé La femme aux colonies (2). L'auteur, Grâce Corneau, ne fait aucune mention de la Société d'émigrationdes femmes.
Elle encourage elle aussi l'émigration féminine, mais dans des conditions bien différentes : elle explique comment se procurer une concession (prix, délais, salaires de la main d'œuvre, cultures rémunératrices) et comment devenir femme colon ; ce n'est pas plus difficile pour une femme que pour un homme, affirme-t-elle ! Et d'encourager les Françaises à se changer ainsi en "marquises de Carabas"... Encore le conte de fées !

(1) Notons qu'il ne songe pas à la traite des blanches : le trafic international des prostituées ne sera révélé aux Français qu'en 1902 et avant cette date personne n'y pense. Cf. Alain CORBIN, Les filles de noce. Aubier Montaigne, 1978.
(2) Grâce CORNEAU, La femme aux colonies. Librairie Nilsson, Per Lam successeur, Paris, 1900, 109 pages.


TROISIEME INCERTITUDE. COMMENT CREER UNE AGENCE MATRIMONIALE ?
"A parler franc, continue Chailley-Bert, ce qu'il s'agit d'organiser, c'est une sorte d'agence matrimoniale ; seulement cette agence doit revêtir certains déguisements qui feront des jeunes personnes qui recourront à elles des complices inconscientes de notre but". La nécessité des "déguisements" fait problème. En effet, les deux conférenciers s'affirment convaincus que "le mariage est, bien plus encore que l'école, le télégraphe ou le téléphone, la véritable carrière de la femme" (1). Et pourtant, nouvelle contradiction, ils ne veulent pas de filles "en quête de maris" : "nous ne souffrirons pas qu'elles partent avec ce seul projet en tête". Pourquoi ? La seule réponse claire est celle-ci : c'est "une bien mauvaise condition pour trouver un mari que d'afficher la prétention d'en chercher un avant tout et tout de suite". En fait ce qu'on veut c'est sélectionner des filles épousables mais sans leur parler de mariage pour laisser plus de liberté aux colons.
Sélectionner n'est pas trop fort (2). "Ce ne seront pas lés candidates qui manqueront, affirme Chailley-Bert : il y en aura abondance et surabondance". La Société pourra faire sur chacune d'elles une enquête très poussée à l'aide d'un questionnaire aux questions "bien calculées", pour connaître "sur ses talents, ses aptitudes, son caractère, sa moralité, sa santé, des renseignements complets" ; on exigera en outre des certificats du médecin, des éducateurs, des employeurs éventuels. Mais ce n'est pas assez : il faut aussi une photographie pour s'assurer que la postulante a un physique agréable. En effet, si en France le mariage n'est encore qu'une affaire, il n'en est plus ainsi aux colonies ; ce n'est pas que le colon "répugnerait à épouser quelque riche héritière ; mais comme il sait qu'à peu d'exceptions près les riches héritières ne seront pas pour lui (3), il retourne ses prétentions d'un autre côté ; il veut, n'ayant à choisir qu'entre des filles de condition humble ou modeste, en choisir au moins une qui soit d'un physique agréable. Ne vous récriez pas. C'est là une exigence bien naturelle ; ce qui n'est pas naturel, c'est que cette exigence ne nous paraisse plus naturelle". En somme, les colonies ressuscitent le mariage d'inclination.
Observons au passage que les garanties sont toutes du même côté : on trie les futures épouses sur le volet et on ne leur promet rien. Ce qui donne aux colons le maximum d'avantages. Mais qui trie les futurs maris ?

(1) Allocution de d'Haussonville.
(2) On sait que l'Union Coloniale aide des Français à partir aux colonies, mais elle exige qu'ils aient une petite fortune, une bonne réputation, de l'énergie. Elle ne veut pas favoriser l'émigration de "fruits secs".
(3) 'On ne les prend qu'au dessous du pair" dit encore Chailley-Bert, décidé ment porté aux métaphores économiques
.

Au fond Chailley-Bert poursuit un rêve bien masculin : celui du colon célibataire et laborieux, en passe de réussir, à qui on amène un choix de filles jeunes, belles et sages ne demandant rien , mais disposées à tout donner. Toujours le conte de fées... La réalité est tout autre, et il le sait bien : le nombre des hommes célibataires est si élevé aux colonies que les jeunes filles, à peine débarquées, auront 300 paires d'yeux braqués sur elles. "Tandis qu'en France elles sont, de par les mœurs et la vie, réduites à attendre et à subir le choix des hommes, là-bas, la proportion des nombres étant renversée, c'est elles qui ont en main le droit de choisir". C'est dire que les grands déplacements de l'ère coloniale accroissent les chances de l'émancipation féminine, non seulement dans le domaine économique, mais aussi dans le domaine sentimental.
Mais le rêve de l'orateur se poursuit : il s'émerveille des heureux effets qu'on peut attendre de ces mariages. "Dans les colonies ce sera une vie décente et digne ; ce sera la fixité et le calme remplaçant la mobilité et l'agitation" ; du coup la prospérité des établissements se développera, la fécondité naturelle de la race reparaîtra (et d'évoquer non seulement l'exemple des Franco-canadiens, mais aussi celui des colons d'Algérie (1) ; "notre langue française se répandra dans le monde", "les colonies seront de véritables écoles d'héroïsme", et toutes nos discordes s'y apaiseront. Là encore la réalité contrarie l'imaginaire, et l'orateur l'ignore moins que quiconque ; il nous montre les colons "gens impatients du résultat, plantant leur tente, travaillant fiévreusement pour gagner de quoi retourner vivre en France», peu désireux en fait de se marier et de faire souche outre mer...
Au fond la meilleure stratégie consiste à marier les futurs colons ou les futurs fonctionnaires (2) en France, avant leur départ, ou pendant un, congé. C'est finalement vers cette idée que s'oriente peu à peu le conférencier. La Société d'émigration des femmes jouerait alors son vrai rôle, sans hypocrisie : elle tiendrait un dossier recensant des jeunes filles qui consentent à s'expatrier, et elle l'ouvrirait au choix des jeunes hommes désireux de convoler avant leur départ. Pourtant, au début de sa conférence, Chailley-Bert avait plaisanté à propos des mariages précipités qu'on tolérait sous l'Ancien Régime au moment d'embarquer. Sans souci de se contredire encore, le voilà qui dénonce la formalité actuelle des fiançailles.
"Quelles garanties apporte-t-elle donc ? Permet-elle aux fiancés de faire connaissance ? En rien. A partir du moment où ils ont dit qu'ils entendaient s'étudier, ils commencent à avoir mutuellement les yeux fermés ; ou plutôt, ils jouent au jeu bien connu du boulet et de la cuirasse "Je te percerai, tu ne me perceras pas ; je te connaîtrai, tu ne me connaîtras pas". En fait ils ne se connaissent pas... A dire vrai, j'estime que nos procédés à nous, nos enquêtes faites par nous, indifférents, et corroborées par celles de l'intéressé, offrent plus de garanties".
Et ce marieur têtu en vient à souhaiter que "dans nos écoles de tous degrés, par exemple les écoles de la Légion d'honneur", on prépare les jeunes filles à devenir femmes de colons... Il ne songe cependant pas a ouvrir une section spéciale à l'Ecole Coloniale !
Bref, le discours de Chailley-Bert présente un projet mal étudié, plein d'incohérence, ou l'imagination cherche à transfigurer des réalités peu reluisantes. Mais l'imagination accomplit parfois des miracles. Voyons si ce fut le cas pour la Société d'émigration des femmes.

(1) "et qui sait Dans un siècle ou deux peut-être faudra-t-il y créer des Sociétés qui auront un but contraire à celui que nous poursuivons aujourd'hui et qui ramèneront dans la métropole la population surabondante des colonies"...Troublante prophétie
(2) Chailley-Bert s'indigne que certains fonctionnaires coloniaux soient trop mal payés pour pouvoir faire venir leur femme.


On trouve des nouvelles de la Société d'émigration des femmes (1) dans la Quinzaine Coloniale (issue, en janvier 1897, du modeste Bulletin de l'Union coloniale, et dirigée par Chailley-Bert) ainsi que dans la Revue des Deux Mondes (2). Le n° 1 de la Quinzaine Coloniale annonce la création de la Société en se référant essentiellement à l'exemple anglais ; les numéros suivants citent les membres d'honneur, bienfaiteurs, associés, simples adhérents.
En juillet 1897, le ministre des Colonies, André Lebon, s'inscrit et accorde une subvention. En novembre 1897 c'est le Président de la République Félix Faure qui devient membre d'honneur, ainsi que son épouse et sa fille Lucie : il fait don de 500 F. Au jour de son premier anniversaire, la Société compte 128 membres, dont seulement trois membres d'honneur (qui viennent d'être cités) ; parmi les 22 membres bienfaiteurs, on compte des établissements industriels (Dollfuss-Mieg de Mulhouse et Angel de Paris) ainsi que la Ligue colonial(r) de la jeunesse - parmi les 42 membres associes, on compte aussi des établissements industriels (Schneider du Creusot ; Maletra du Petit Quevilly...), des personnalités parisiennes (Mme
Paul Bert, le prince d'Arenberg..?), des Chambres de Commerce (chose curieuse : celle de Marseille n'est citée qu'en juin 98, alors que Marseille est le lieu d'embarquement de toutes les émigrantes). Un réseau d'adhérents et de correspondants se constitue peu à peu dans les colonies ; Urne Doumer préside la Société en Indochine, Mme Jules Cambon fonde un comité à Alger.
Le 10 janvier 1898 (n° 26 de la Quinzaine Coloniale) Mme Pegard, secrétaire générale de la Société fait le bilan de la première année d'exercice. Elle a reçu 400 à 500 demandes de jeunes femmes, elle n'a pu en satisfaire qu'une quinzaine et des négociations sont en cours pour une trentaine d'autres. Ce qui manque le plus c'est l'argent. On avait espéré un concours plus empressé des grandes maisons commerciales et industrielles, ainsi que des colonies elles-mêmes : "Pourquoi n'avouerions-nous pas que nous avons eu une déception, grande". Il a fallu recourir à des œuvres de bienfaisance, au risque de faire apparaître la Société comme une institution de charité, alors qu'il s'agit d'une institution patriotique". Il a fallu aussi recourir à l'aide de Miss Leffroy, secrétaire de la British Women's Emigration Association" et à celle de Mrs Cos, vice présidente de la Women's prospective Immigration Society... L'avenir reste sombre.

(1) Les Archives de l'Union Coloniale sont en cours de classement aux Archives d'Outre-Mer, rue Oudinot à Paris ; on ne sait pas encore si elles contiennent un dossier concernant la Société d'émigration des femmes.
(2) Comte d'HAUSSONVILLE, les non classées et l'émigration des femmes aux colonies in Revue dos Deux Mondes, 15 juin 1898, p.779 à 810.

POURQUOI FAUT-IL TANT D'ARGENT ? QUI SONT LES FEMMES DESIREUSES D'EMIGRER ?
En janvier 1897, toute la presse parisienne avait fait un écho retentissant à la conférence de Chailley-Bert. La plupart des journaux étaient favorables ; certains s'égayaient du projet, en multipliant les allusions grivoises ; quelques-uns exprimaient une franche hostilité que d'Haussonville résume ainsi : "Pas une femme respectable ne témoignera le désir d'émigrer.

Cet article donne d'utiles statistiques sur les "non classées", jeunes femmes instruites qui sollicitent en vain des postes dans l'Instruction publique, les PTT, les banques, les sociétés industrielles.
Celles qui s'adresseront à la Société ne seront que des aventurières, des demoiselles avec tare dont on ne voudra plus dans les agences matrimoniales. Ce serait un triste cadeau à faire aux colonies"... Réaction conforme à l'idéologie du XIXe siècle qui valorise la "femme d'intérieur" et juge avec méfiance, voire avec mépris, toutes celles qui sortent de chez elles.
Cette prophétie pessimiste se trouve démentie par les lettres de candidature dont font état Mme Pegard puis d'Haussonville. Ce dernier recense 68 institutrices, gouvernantes et demoiselles de compagnie ; 67 employées ; 25 sages-femmes ; 1 doctoresse ; 1 dentiste ; 78 couturières ; 20 modistes ; 16 cuisinières ; 18 femmes de chambre ; 19 bonnes à tout faire ; 30 femmes sans profession; etc.. Il remarque l'"écriture fine et distinguée" de la plupart des postulantes ainsi que "leur mélancolie, leur découragement, parfois leur désespoir". Il souligne leur intelligence, leur courage, leur résolution et aussi leur droiture, leur dignité : une quinzaine de jeunes filles avouent simplement leur désir de se marier et l'impossibilité de trouver un mari en France faute de dot; elles se disent gaies, robustes, pas poltronnes du tout" (d'Haussonville). Toutes d'ailleurs ne sont pas des vaincues de la vie : quelques-unes sont très jeunes (l'une a seize ans) ; ce sont des romanesques, des Imaginatives, à qui la vie en France semble prosaïque et qui voudraient voir de nouveaux horizons. Le mirage colonial joue donc aussi sur le sexe dit faible, qui se révèle ici plus décidé, plus audacieux que certains n'aiment à le décrire.
Mais on ne peut satisfaire ces demandes sans argent, car la plupart de ces personnes, dépourvues de toutes ressources, sont hors d'état de payer leur voyage et même de se constituer un trousseau décent ; quelques-unes ont des dettes. Autre difficulté, les offres d'emploi restent peu nombreuses : 39 seulement en juin 1898. Les colonies, dit d'Haussonville, "n'avaient pas confiance dans ce nouvel article d'exportation... la qualité leur en paraissait douteuse". En outre les offres et les demandes ne coïncident guère (les colonies semblent avoir surtout besoin de cuisinières et de femmes de chambre ; une usine tunisienne demande des ouvrières)... Enfin, il est parfois nécessaire d'enseigner un métier aux postulantes avant leur départ.
Mme Pegard cite quelques exemples : Mme B." veuve d'un industriel et mère d'un enfant de 10 ans, apprend la couture et sollicite les amis de son mari pour pouvoir partir. Mlle de S., de vieille famille noble ruinée par l'un des krachs, fait des stages dans les maisons de couture de la rue de la Paix pour devenir "première" à 500 F par mois dans une grande ville coloniale. Mlle de N., nièce de la précédente, veut seulement aller rejoindre ses parents ; c'est une société anglaise qui lui avance l'argent. Mlle L., dentellière aux yeux fatigués, part comme gouvernante ; il faut payer son loyer, lui avancer 6 mois de gages. Mme R., sage-femme veut qu'on trouve une place pour son mari. Un jardinier sollicite une aide pour emmener sa femme. 4 jeunes filles vont rejoindre leurs fiancés ; l'une d'elles, pauvre orpheline qui "n'avait jamais connu un jour de bonheur dans sa vie", a emporté jusqu'à son voile de mariée et sa couronne de fleurs d'oranger dans un petit carton... C'est l'unique fois, semble-t-il, où la Société a joué ouvertement le rôle d'agence matrimoniale ; le prétendant, ancien gendarme très bien noté, devenu surveillant de prison, n'avait pu obtenir un congé pour venir en France chercher femme et s'était adressé à la Société.
Toutes celles qui sont parties ont transité par Marseille ou une correspondante les a accueillies et accompagnées ; elles écrivent, après le voyage, des lettres pleines de satisfaction et de reconnaissance (du moins, Mme Pegard ne publie que celles-là...).
La Société d'émigration des femmes n'a donc pas réussi. Elle apparaît un peu comme une bulle, vite éclatée, dans le bouillonnement intense de "l'idée coloniale" (1) en cette fin du XIXe siècle. Maie elle permet quelques remarques (valables pour le seul moment considéré, et qu'on ne saurait extrapoler) à propos de l'histoire des migrations, à propos de l'histoire de la colonisation, à propos de l'histoire des femmes.
Les migrations de femmes ont été peu étudiées. Celle dont il vient d'être question n'a guère d'importance démographique, ni économique. C'est que la pression démographique est inexistante à cette date en France, où on s'inquiète plutôt de la "dépopulation" : l'émigration des femmes est donc dépourvue de justification "biologique". A-t-elle des justifications économiques ? Le chômage féminin est un phénomène mal connu bien que les philanthropes et les féministes fassent beaucoup de bruit autour ; mais de toutes façons, dans les mentalités de ce temps, le chômage féminin n'est pas un problème économique : sa solution est le mariage, non l'émigration ou la création d'emplois. Donc l'opinion française n'est pas prête d'accepter un déplacement massif et organisé des femmes : elle réagit en dénonçant ce déplacement comme ridicule, ou immoral, et elle refuse de le financer. Autre remarque : la migration masculine ne semble pas attirer une migration féminine postérieure équivalente ; ce ne sont pas les hommes qui attirent les femmes, ce sont les familles déjà constituées ; on est ici au seuil des problèmes complexes du mélange des "races", du métissage, de la dimension sexuelle dans les faits migratoires et coloniaux. (2)
Ce qui conduit à l'histoire de la colonisation. La tentative de la Société d'émigration des femmes révèle d'abord le prestige, à cette date" du modèle britannique, qu'on prétend adapter et qu'on imite en fait, sans l'analyser. Le discours de Chailley-Bert souligne aussi fortement la puissance de l'imaginaire, même dans les milieux réalistes de l'Union Coloniale ; les colonies ne sont plus seulement une source de richesse, ou un substitut de la revanche, elles deviennent un substitut des contes de fées, un lieu d'utopie où la race française se régénère dans une vertu et une fécondité retrouvées. Et la colonie sera moralisée par la seule arrivée de la femme française, anti dote au défoulement évoqué ci-dessus. Quand il s'agit de femmes, l'irrationnel n'est jamais loin dans le discours masculin.
Pour l'histoire des femmes, la Société apporte quelques lueurs sur l'évolution des mentalités. Certes la Société cherche à disposer d'elles, à leur insu, pour des fins qui les dépassent. Mais en même tempe, elle préfère leur proposer des situations indépendantes plutôt que des maris ou des secours ; elle n'hésite pas à transporter d'honnêtes filles au-delà des mers, et elle trouve de nombreuses postulantes : signes que l'émancipation économique des femmes n'est plus refusée. En outre la Société escompte que les mariages d'inclination supplanteront les mariages d'argent, et elle accepte que les femmes aient "le droit de choisir" : signes que l'émancipation affective et sexuelle progresse. Pourtant, l'opinion, dans sa masse, oppose encore une forte résistance passive à cette émancipation.
Peu importe au fond que la Société ait échoué dans ses objectifs : c'est sa signification symbolique qui compte. On espère en avoir montré l'importance relative.

(1) Voir Raoul GIRARDET, L'idée coloniale en France (1871-1962), La table ronde,
1972, Première partie, chapitre IV.
(2) Une étude des chansons qui, durant l'entre deux guerres" ont évoqué les colonies (Ma tonkinoise, La fille du Bédouin) révèle l'importance du facteur sexuel dans l'attrait des colonies. Les frustrations subies en métropole (Cf. Alain CORBIN, op.cit.) font de la colonie une vaste zone de défoulement. A la limite, dans la sensibilité d'un Européen, la colonie est perçue comme femelle, facile à posséder.

sommaire

Organisation des réseaux de télécommunications dans l'Afrique coloniale francophone
FCR Compagnie française des Câbles sous-marins et de Radio

FCR Compagnie française des Câbles sous-marins et de Radio. avant le 1er novembre 1959, ses ascendants directs s’appelaient FC France Câbles ou Sudam Câbles Sud américains. En ce qui concerne la Radio, l'activité de FCR se limita dans un premier temps au continent africain.
la structure d'organisation des réseaux de télécommunications dans l'Afrique coloniale francophone à la fin des années 50.
Deux ministères en avaient la charge :
         1. le Ministère de la France d'Outre-mer pour les réseaux internes à chacune des trois entités : AOF, AEF, Madagascar.
         2. le Ministère des PTT pour les réseaux "internationaux" : liaisons avec les autres continents, liaisons interfédérations
S’agissant du Ministère des PTT, sa tutelle s’étendait sur deux systèmes de télécommunications :
- un réseau radioélectrique
- un réseau de câbles sous-marins télégraphiques.

Le réseau radioélectrique : baptisé Réseau Général Radioélectrique (RGR) dépendait de la Direction des Services Radioélectriques (DSR). Il était constitué de quatre centres :
- trois d’entre eux étaient localisés dans les capitales des Fédérations : Dakar (AOF), Brazzaville (AEF), Tananarive (Madagascar).
- un quatrième était implanté à Bamako (Soudan Français) pour des raisons liées à l’histoire de la colonisation.
Le réseau fut en effet créé après la première guerre mondiale par le Général Ferrié pour des besoins stratégiques de communications entre la Métropole et ses colonies d’Afrique. Il fut par la suite transféré pour son exploitation à l’Administration civile, en l’occurrence le Ministère des PTT.
Rappelons, pour la petite histoire, que le réseau Ferrié fonctionnait en ondes longues (myriamétriques) et utilisait la seule technique disponible à l’époque : celle des alternateurs HF dont les puissances s’exprimaient en centaines de kilowatts. C’est la raison pour laquelle, pendant très longtemps, ont subsisté dans les centres RGR les restes "archéologiques" des grands pylônes supports des antennes OL : brins rayonnants verticaux et nappes capacitives horizontales.


Le réseau des Câbles Sous-Marins Télégraphiques : Le réseau fut géré par la Direction des Câbles Sous-marins jusqu’en 1952 date à laquelle cette dernière transféra l’exploitation à une filiale créée à cet effet : la Compagnie France Câbles (FC).
En 1959 ce réseau formait un feston de câbles le long de la côte ouest africaine, de Dakar à Douala, avec des "escales" à Conakry, Monrovia, Grand-Bassam, Cotonou et Douala et deux extensions Conakry-Freetown et Dakar-Recife.
Vers la métropole, le prolongement au delà de Dakar se faisait par les moyens radioélectriques du centre RGR. C’est ainsi qu’à Dakar avant 1959, coexistaient sous le régime de la " paix armée ", un centre purement PTT, le RGR et un centre FC (filiale à 100% des PTT).

En cette fin des années 1950, l'Afrique coloniale française évoluait très rapidement vers les indépendances individuelles des territoires de l'AOF, de l'AEF et de Madagascar.
La tutelle du Ministère des PTT sur ses réseaux africains devait à court terme être transférée aux nouveaux Etats en voie de fondation. Dans cette perspective, le Gouvernement français décida de "privatiser" la totalité des activités africaines du Ministère des PTT, décrites ci-dessus, en les filialisant au sein d'une nouvelle organisation : la Compagnie Française de Câbles Sous-marins et de Radio (FCR), créée à cet effet le 1er novembre 1959.
Cette opération complexe fut, en fait, conçue et pilotée de bout en bout par un homme tout à fait exceptionnel, M. Lhermite qui, à l'époque, était à la tête de la Direction des Services Radioélectriques (DSR).
A la création de FCR, il en devint le premier Président, le Président Fondateur. Il devait rester à ce poste jusqu'en 1970. Avec la collaboration d'un très grand Directeur Général, M. Colin de Verdière, FCR devait connaître un développement extraordinaire et devenir une entité mondialement reconnue dans le domaine des Télécoms.

Les année 60
A La création du réseau FCR .
L’outil juridiquement adéquat était ainsi mis en place pour permettre à FCR, dans la perspective des indépendances, la poursuite des activités d’opérateur télécoms exercées par le Ministère des PTT tout au long de la période coloniale.
Encore fallait-il, que dans chaque état indépendant, ce projet soit accepté. Des négociations à cet effet furent donc engagées avec les gouvernements nouvellement au pouvoir sur la base générale suivante :
- FCR propose de mettre en place tous les moyens nécessaires pour créer, développer, exploiter un réseau de télécommunications internationales.
- FCR en assume toutes les charges (investissements et frais d’exploitation)
- FCR est rémunérée par une quote-part sur les recettes générées par l’exploitation du trafic acheminé, le solde revenant au gouvernement.
C’est ainsi que furent signées, entre 1959 et 1964, des conventions avec de nombreux états entre lesquels il convient de distinguer deux groupes :
a) le groupe des États qui disposaient, dès l’époque coloniale, de systèmes de télécommunications internationales : télégraphe, téléphone.
- Sénégal
- Mali (ex Soudan Français)
- Congo (Brazzaville)
- Madagascar
b) le groupe des Etats qui pour leurs relations internationales devaient transiter par l’un des quatre premiers centres énumérés ci-dessus :
. Dakar et Bamako pour l’AOF/Togo
. Brazzaville pour l’AEF/Cameroun
Pour ces pays, le fait de pouvoir désormais disposer de leurs propres centres de télécommunications internationales constitua une amélioration considérable par rapport à la situation antérieure.
En voici la liste :
Afrique de l'Ouest : Côte d'Ivoire, Togo, Dahomey (Bénin), Niger, Haute-Volta (Burkina Faso).
Il convient d'y ajouter le Liberia où la licence d'exploitation de télégraphie sous marine fut étendue à la création d'un réseau radioélectrique (téléphone, télégraphe).
Afrique Centrale : Tchad, Cameroun, Centrafrique et Congo.

La stratégie adoptée (avec des variantes suivant les pays) était en gros toujours la même : mise en place très rapide (quelques semaines) des équipements nécessaires pour établir une liaison téléphonique et télégraphique avec la France, prioritairement.
Etaient utilisées pour ce faire des infrastructures provisoires (bâtiments et terrains) mises à disposition, en général, par les Offices locaux des PTT ou plus rarement loués par FCR à des propriétaires privés.
Après cette première étape, essentielle pour des pays qui, devenus indépendants faisaient de leur désenclavement une priorité absolue, était lancée la réalisation des infrastructures définitives :
. centres émetteurs HF
. centres récepteurs HF
. terminal téléphonique, télégraphique, télex dotés en matériels en fonction des besoins, accroissement de trafic, ouverture de nouvelles liaisons directes.
Parallèlement, l’exploitation des câbles sous-marins télégraphiques du feston ouest-africain était abandonnée progressivement :
- Douala et Cotonou très rapidement, dès la mise en service des centres radioélectriques,- Monrovia, Abidjan, Conakry, Dakar, beaucoup plus tard car pour des raisons politiques il fallait maintenir :
. à Monrovia, l’exploitation des câbles sous-marins télégraphiques  Monrovia – Abidjan et Monrovia – Conakry,
. à Conakry, la liaison avec Freetown,
. à Dakar, la liaison avec Recife.
A noter que pour améliorer l’exploitation, la création du Centre Radioélectrique d’Abidjan amena FCR à transférer en 1964 de Grand-Bassam à Port-Bouet (Abidjan) l’atterrissement du câble télégraphique avec Monrovia. La station de Grand-Bassam fut fermée et l’exploitation ramenée à Abidjan au terminal radioélectrique récemment implanté en ville.

B. La gestion du réseau
Le réseau FCR dans sa plus grande extension comportait donc une quinzaine de centres dont l’organisation locale était identique, à l’importance près en fonction des pays.
Pour tous les anciens qui y ont servi, cette décennie 1960 restera dans leur mémoire comme une période d’activité intense – une période pionnière – particulièrement enrichissante où chacun a voulu et pu donner le meilleur de lui-même.
Période pionnière, pourquoi ? Parce que dans le nouvel environnement géopolitique de l’Afrique francophone, les personnels des centres FCR se sont trouvés confrontés à des situations inédites. Certes, ils disposaient du soutien de la Direction Générale de FCR – à Paris - dont il sera dit un mot par la suite, mais sur place leur situation était celle d’une équipe de PME, tout à fait autonome, et ayant à gérer au quotidien et sous leur responsabilité un ensemble de problèmes de toutes natures :
- relations directes avec les autorités locales (ministres de tutelle, offices des PTT)
- relations avec la clientèle
- gestion des personnels locaux (recrutement, formation, ….)
- gestion administrative et comptable
- gestion technique et opérationnelle des infrastructures et équipements.
 Dans tous ces domaines les personnels de FCR devaient essentiellement compter sur leurs qualités professionnelles bien sûr, mais aussi et surtout sur leurs qualités personnelles, initiative, débrouillardise, sens des relations humaines …Ce qu’ils surent faire avec beaucoup de talent.

Dans cette organisation le rôle de la Direction Générale était de leur apporter le soutien le plus efficace possible.
Les « Africains » avaient donc à Paris un certain nombre de « correspondants » spécialisés sur lesquels ils savaient pouvoir compter :
- Service opérationnel Afrique pour tous les problèmes techniques et d’exploitation
- Comptabilité trafic
- Direction financière
- Direction du Personnel (qui deviendra ultérieurement la DRHA)
- Centrale d’achats
Pour les personnels des Centres en Afrique, la Centrale d’achats constitua un rouage fondamental de leur travail au quotidien. Les services éminents rendus sous la responsabilité d’un chef charismatique sont restés légendaires dans toutes les mémoires.

Les années 1970
A. Les évolutions structurelles et techniques
La décennie 1960 a donc permis la création dans les pays précédemment cités de centres d’exploitation « modernes » - pour l’époque - et qui en assurant leur désenclavement a apporté une contribution appréciable au développement des jeunes Etats.
Mais dès le milieu de cette décennie 60, il est apparu que les moyens mis en place, fondés sur la technique HF (ondes décamétriques) allaient à court terme se trouver dépassés par l’avènement des techniques de transmission à grande capacité et de haute qualité (satellites et câbles sous-marins téléphoniques).
Afin de préparer cette échéance, la Direction Générale de FCR, dès 1965, créa un département « Transmission par satellites » chargé de développer au sein de la Compagnie une compétence et une expertise dans cette technique qui s’avérait particulièrement bien adaptée aux besoins africains.
Mais la mise en œuvre de ces moyens, à prévoir à l’horizon des années 1970, supposait, aussi, la refonte des structures de gestion telles qu’elles avaient été conçues à l’époque des indépendances.
Les télécommunications par satellites, de par leur nature, s’organisaient à l’échelle mondiale avec pour noyau central INTELSAT, consortium international à multiples facettes : politique, technique, opérationnelle …
Le volet politique faisait que les Etats devenaient dans leurs pays respectifs le pilote de la gestion de leur système de télécommunications par satellites, même si dans beaucoup de domaines (techniques et opérationnels notamment) ils déléguaient leurs pouvoirs à des organismes spécialisés.
Dans cette perspective, FCR dès la fin des années 1960, fut amenée à proposer aux Etats africains, à commencer par ceux avec lesquels elle avait conclu quelques années auparavant des conventions d’exploitation, un nouveau type de partenariat.
Il s’agissait cette fois de la création d’Entités d’Economie mixte (sous la forme juridique de SA ou SARL) associant l’Etat et FCR. Le principe de base de cette proposition était que ces Entités, de par leur nature, disposaient à la fois :
- par la présence de l’Etat, de la compétence « politique »
- par la présence de FCR, de la compétence technique et opérationnelle.

Et c’est ainsi, qu’au fil du temps, naquirent TELEMALI, TELESENEGAL, INTELCI (Côte d’Ivoire), INTELCAM (Cameroun), STIMAD (Madagascar), STIN (Niger), TIG (Gabon), SATELIT (Togo), TIT (Tchad), STID (Djibouti), SOCATI (République Centrafricaine), GETESA (Guinée équatoriale).
L’objectif prioritaire assigné à toutes ces sociétés étaient bien évidemment de faire basculer dans les meilleurs délais l’exploitation des télécommunications internationales dans l’ère spatiale.
En quelques années furent construites une douzaine de stations terriennes :
a) dans une première phase des stations « type A » caractérisées par leur antenne parabolique de 30 mètres de diamètre pour les pays de fort trafic, notamment : en 1972
- en Côte d'Ivoire : la station d'Akakro près d'Abidjan
- au Sénégal : la station de Gandoul près de Dakar
- à Madagascar : la station d’Arivonimamo près de Tananarive
en 1973
- au Cameroun : la station de Zamengoe près de Yaoundé
- au Gabon : la station de N'Koltang près de Libreville
en 1977
- au Togo : la station de Cacavelli près de Lomé.
b) dans une seconde phase des stations de « type B » (antenne de 11/13 mètres) pour les pays à plus faible trafic
La cellule « transmissions par satellites » de FCR apporta une contribution décisive dans la maîtrise d’œuvre de toutes ces stations :
- choix des sites d’implantation,
- conception des infrastructures (bâtiments, énergie)
- élaboration des termes de références pour la passation de marchés d’équipements essentiellement avec le Groupe TELSPACE (Alsthom, CIT-Alcatel, Thomson-CSF) et leur suivi jusqu’à la réception,
- réception des équipements
- formation des personnels, assistance au démarrage de l’exploitation.

A noter qu’au delà des interventions au bénéfice des sociétés partenaires de FCR, le Département « Transmissions par satellites » fut amené à « vendre » une compétence internationalement reconnue, à un grand nombre d’opérateurs étrangers partout dans le monde.

Avec la mise en place de ces nouveaux moyens de transmission, la qualité d'écoute n'avait plus rien de commun avec le passé et provoqua une poussée de la demande. Toutefois, la véritable explosion du trafic ne survint qu'avec la mise en place des équipements permettant l'accès automatique au service téléphonique international, sans intervention d'opératrices et sans délais d'attente : les Centres téléphoniques internationaux automatiques.
Pour l'étude et l'ingénierie de ces Centres, la Direction Générale de FCR avait également mis en place, dès 1973, une "cellule Commutation" qui participa à :
- la rédaction des cahiers des charges,
-  la passation des marchés (avec la CGCT pour les premiers centraux en matériel électromécanique Pentaconta, ultérieurement avec Thomson CSF Téléphone pour les centraux en matériel électronique MT 20),
- le suivi des marchés,
- la réception et la mise en service des équipements avec la collaboration du CNET.
C'est ainsi qu'à la fin des années 1970 les grandes capitales de l'Afrique francophone eurent accès au réseau téléphonique commuté international :
- en 1975 Abidjan,
- en 1979 Dakar et Yaoundé,
- en 1980 Libreville et Tananarive.
Tous les anciens qui ont participé à cette « révolution » se souviennent du fantastique bon en avant dans la qualité de service offerte aux clients avec pour conséquence une explosion des volumes de trafic.

Et cerise sur le gâteau, le public découvrait que l’on pouvait aussi échanger des programmes de télévision avec des correspondants dans n’importe quelle partie du monde et promouvoir d’autres services encore plus professionnels, comme par exemple, la transmission de données (aujourd’hui support du WEB).

Dans un pareil contexte, la bonne vieille technique HF fut enterrée sans fleurs, ni couronnes, elle qui vaille que vaille, malgré ses limitations génétiques, avait tout de même rendu pendant quelques décennies de bons et loyaux services. Ainsi va la vie qui n’a de sens que dans l’évolution et le progrès.
Ceux qui ont débuté leur carrière aux temps "médiévaux" dans l’histoire des télécommunications en garderont un souvenir nostalgique, mais encore bien vivant.

B. La gestion des Sociétés mixtes
Comme indiqué précédemment l’objectif de base dans la création de ces sociétés étaient d’institutionnaliser un partenariat étroit entre les Gouvernements et FCR :
* pour tenir compte de l’évolution des techniques dans le domaine des télécommunications,
* pour donner aux Etats, après quelques années d’indépendance, un contrôle plus direct dans la gestion de leurs systèmes de télécommunications.
L’actionnaire majoritaire était généralement l’Etat et par voie de conséquence les instances de direction s’organisaient comme suit :
- une Assemblée d’actionnaires et un Conseil d’Administration présidés par une personnalité nationale,
- un Président Directeur Général, personnalité locale,
- un Directeur Général FCR.
Les fonctions exécutives étaient ainsi réparties :
- les relations extérieures, la direction du Personnel revenaient au Président,
- les tâches techniques, l’exploitation des liaisons se trouvaient placées sous la responsabilité du Directeur Général FCR.
S’agissant de l’ensemble de ces tâches, la Direction Générale de FCR par des accords de partenariat avec la Société apportait en tant que de besoin, sa coopération dans tous les domaines :
- comptabilité financière
- comptabilité trafic
- mise à disposition de personnels techniques expatriés pour la gestion des Stations et des Centres
- formation des personnels nationaux
- approvisionnements.
On comprend à travers cette énumération que la Direction Générale de FCR prolongeait dans le temps au bénéfice des Sociétés les mêmes services qu’elle assurait précédemment à ses filiales africaines.

Les années 1980
A. Développement des infrastructures internationales
Durant les années 80, FCR poursuit et diversifie sa collaboration avec les gouvernements africains pour l'installation de leurs infrastructures de télécommunications internationales.
* L'accès au système Intelsat et au réseau téléphonique international est ainsi réalisé
- en 1980 pour Djibouti
- en 1982 pour Niamey
- en 1984 pour Lomé
- en 1985 pour Nouakchott et Cotonou
- en 1987 pour N'djamena.
* La modernisation et l'extension des infrastructures en Côte d'Ivoire, au Cameroun et au Gabon amènent la mise en place :
- à Abidjan, en 1986, d'un centre international téléphonique électronique de technologie MT 20, en remplacement du centre électromécanique,
- à Douala, en 1986, d'une station terrienne et d'un centre international téléphonique électronique,
- à Libreville, en 1989, d'un centre international électronique en système MT 20.
* L'aide de FCR s'est également affirmée dans les domaines du télex, de la commutation de messages et des transmissions de données. A la fin des années 1980, la plupart des capitales que nous avons énumérées plus haut possédaient leur centre télex international et leur centre de commutation de messages mis en place avec l'appui des experts de FCR.
 * Citons également la part prise par FCR dans l'étude et la réalisation des réseaux domestiques par satellites au Mozambique et au Zaïre et la création à Zamengoe (Cameroun), après appel d'offres international, d'un centre de contrôle du réseau Intelsat.
*  Système de câbles sous-marin
Dans l'organigramme de FCR, existait un service très important : la Direction des Câbles Sous-Marins. Son "objet social" était, en liaison étroite avec le département Câbles Sous-Marins de France Télécom, d'assurer le pilotage de projets de de construction de systèmes internationaux de câbles sous-marins : étude de faisabilité, établissement des cahiers des charges, appels d'offres, suivi de réalisation , réception et mise en service.

Quelques uns de ces projets ont concerné certaines des Sociétés africaines associées à FCR :
Secteur Ouest africain :
 - Entre 1973 et 1980, la "guirlande cotière" Casablanca - Dakar - Abidjan - Lagos implique Sonatel et Intelci,
- En 1982, le système Atlantis Europe - Sénégal - Brésil implique Sonatel.
Secteur Est africain (Djibouti) :
De par sa position géographique très favorable, Djibouti s'est trouvé être un des points d'atterrissement des projets SEA-ME-WE, systèmes de câbles Asie du Sud-Est - Moyen Orient - Egypte - Europe de l'Ouest.
La STID, impliquée dans ces projets, eut un rôle opérationnel très important à jouer dans le fonctionnement de ces systèmes (technique coaxiale pour le SEA-ME-WE 1, fibres optiques ensuite).
Au fil du temps et en fonction de l'augmentation du nombre d'études, les équipes d'experts mises en place à Paris par FCR s'étaient étoffées.
Un département Ingénierie en Télécommunications Publiques fut créé. Il comprenait 4 Services :
- Télécom par satellite,
- Commutation publique,
- Transmissions terrestres,
- Energie et Bâtiments.
Créé pour les "besoins de la cause", à savoir la maîtrise d'oeuvre des projets d'investissement techniques de FCR dans une phase initiale, ce département étendit tout naturellement ses activités de consultance aux Sociétés mixtes dans une deuxième phase, puis à des "clients" totalement étrangers à FCR dans une phase ultime.
Au fil du temps, le département était ainsi devenu un consultant en télécommunications de renommée internationale. Hommage doit en être rendu à tous ceux qui, par leur compétence, réussi cette "success-story".
Pour des raisons d'organisation interne au Groupe France Télécom, il fut décidé en 1988 de rattacher ce département "Ingeniérie" à Sofrécom, elle-même filiale de FCR. Cette rupture avec la maison mère fut, pendant quelque temps, vécu assez difficilement par les personnels concernés.

B. L'évolution des Sociétés mixtes
Les années 1980 connurent l'apogée de la présence des gestionnaires et techniciens de FCR en Afrique.
En juillet 1988, on dénombrait 42 expatriés dans 14 pays différents.
Une nouvelle filiale, GETESA, a été créée en 1987 avec le gouvernement de la Guinée Equatoriale.

Cependant, au fil des années, en vertu de la philosophie à base du partenariat FCR/Etat et au fur et à mesure de la formation des personnels nationaux, la responsabilité de gestion allait être progressivement transférée à ces derniers.
La conséquence de cette évolution commença à se matérialiser au début des années 1980 par la volonté de certains états de nationaliser le capital de leur Société Mixte par le rachat de la participation de FCR.

Le processus s’amorça dans une première phase par les Etats les plus importants, Côte d’Ivoire (1981), Cameroun (1982), Sénégal (1985) et se généralisa tout au long de la décennie.
Cependant, au sein de ces nouvelles entités, les contrats de coopération opérationnelle avec FCR furent reconduits avec quelques aménagements en fonction des spécifications locales. Ainsi, même si FCR n’était plus co-actionnaire, elle conserva son rôle de partenaire opérationnel dans la gestion des sociétés, notamment par le maintien des personnels expatriés et de fournitures de matériel.
Progressivement, différents Etats souhaitèrent fusionner leurs télécommunications nationales et internationales dans un organisme de gestion unique, provoquant soit la disparition soit la modification des structures de la Société mixte comme :
- en 1984, l'absorption d'INTELCI par l'ONT de Côte d'Ivoire,
- en 1985, la fusion de TELESENEGAL et de la Direction des Télécoms de l'OPT pour former la SONATEL, société d'Etat,
- en 1989, en Centrafrique, la transformation de SOCATI en SOCATEL.

Ce processus d'intégration allait bientôt concerner d'autres filiales de FCR.

Les restructurations des années 1990
La vague de privatisation du secteur des télécommunications qui s’amorça au début des années 1990 dans les pays développés, traditionnellement sous monopole d’Etat, s’étendit également au continent africain et notamment dans les pays francophones.
Ces Etats ouvrirent leurs systèmes de télécommunications à la participation des investissements internationaux
* dans le secteur de la téléphonie mobile
* dans le secteur de la téléphonie fixe national ou international également.

Dans cette nouvelle phase, les acteurs français sont France Télécom directement ou par le biais de ses filiales spécialisées (Orange).
C'est ainsi qu'en 1997, France Télécom prit :
- 51 % du capital de CI- TELCOM, la nouvelle société ivoirienne de droit privé qui gérait depuis 1991 les télécoms de Côte d'Ivoire,
- 42,33 % du capital de la SONATEL au Sénégal.
A la fin des années 1990, Orange possédait quelques filiales en Afrique :
- Ivoiris en Côte d'Ivoire,
- Mobilis au Cameroun,
- Sonaten Alizé au Sénégal,
- Antaris à Madagascar,
- Caratel en Centrafrique
- Vista Cellular au Bostwana.
Dans les plus importantes de ces filiales, une partie du personnel expatrié associé à la gestion avait fait ses premières armes à FCR.

L'expérience d'EGT- I. au Cameroun
Un panorama de l'action de FCR en Afrique se doit d'évoquer le partenariat particulier que la Société eut avec le gouvernement camerounais pour l'ingénierie d'une grande partie de son réseau de télécommunications, ce qui constitua une activité très spécifique et très originale.

Ce partenariat, qui dura près de 20 ans, fut conclut à la fin des années 1960 entre le Ministère camerounais des Postes et Télécommunications et EGT-I, filiale à 100 % de FCR qui pouvait proposer ses services sous un autre nom.

Les contrats d'ingénierie, qui firent l'objet de plusieurs conventions successives, accompagnaient les différents programmes d'équipements de la plus grande partie du réseau téléphonique camerounais (hors zone anglophone), assurés par des constructeurs français, financés et supervisés par les organismes français de Coopération.
EGT-I (FCR) devait apporter une assistance totale aux ingénieurs et techniciens de la Direction générale des Télécommunications du Cameroun pour l'étude, les relations avec les constructeurs, la signature, le suivi et la réception de tous les marchés d'équipement du réseau de téléphonie publique.
Cela concernait tous les domaines du réseau :
- les centraux téléphoniques y compris les bâtiments qui les abritaient et la fourniture d'énergie dont il avaient besoin,
- les faisceaux hertziens qui les reliaient
- les réseaux urbains souterrains et aériens de rattachement des abonnés.
Pour mener à bien ces travaux EGT-I (FCR) mit en place une petite équipe permanente à Paris et procéda au recrutement et à l'expatriation à Yaoundé d'experts de l'Administration française des Télécommunications.

Cette collaboration étroite entre les ingénieurs camerounais et les spécialistes d'EGT-I (FCR) permit en quelques années, à la satisfaction de tous, la mise en place d'une infrastructure moderne de 34 centraux téléphoniques dans l'ensemble du pays et la modernisation des deux grands réseaux de Douala et Yaoundé.
Cette collaboration prit fin quand les autorités camerounaises se rapprochèrent des constructeurs allemands vers la fin des années 1980.

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