Les PTT - France Telecom - Orange

Sous la Révolution française, en 1792, le premier réseau de communication voit le jour pour permettre d'acheminer rapidement les informations dans un pays en guerre et peu sûr. Il s'agit du réseau de télégraphie optique de Chappe.

Les P&T
Après l'invention du télégraphe électrique et ensuite du téléphone, l'État français crée en 1879 un ministère des Postes et Télégraphes.
C
réé, sous la troisième République, il est issu de la fusion de deux administrations : d'une part, la Direction de l'exploitation postale, rattachée jusqu'alors au ministère des Finances ; d'autre part, la Direction des lignes télégraphiques, qui avait longtemps relevé du ministère de l'Intérieur.

À ces deux administrations réunies en un ministère unique en 1879, vient s'ajouter en 1889, celle du téléphone, dont le monopole, concédé dix ans plus tôt à la Société générale des téléphones, est repris par l'État.
Entre 1887 et 1930, les trois secteurs (Postes, Télégraphe, Téléphone) sont successivement placés sous l'autorité de directeurs généraux ou de secrétaires d'État rattachés d'abord au ministère des Finances puis à celui du Commerce et de l'Industrie ou encore des Travaux publics.

Doté d'un budget annexe en 1923, cette administration constitue à nouveau un département ministériel autonome à partir de 1930, sous l'appellation de ministère des Postes, Télégraphes et Téléphones. Ce dernier prendra le nom de ministère des Postes et Télécommunications en 1959, lors de la réunion de l'exploitation télégraphique et de l'exploitation téléphonique en une seule entité, la direction des télécommunications


Ce n'est qu'en 1923, que le second « T » apparaît, le ministère des P & T devenant celui des PTT.
En 1941, une Direction générale des Télécommunications est créée au sein de ce ministère et, en 1944, le Centre national d'études des télécommunications (CNET), a pour mission de développer l'industrie des télécommunications en France.


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Nouvelle identité visuelle des PTT à partir de 1953

C'était une administration d'État relevant du ministère des PTT. Mais selon les gouvernements successifs des différentes Républiques, ce ministère avait la charge d'autres activités comme l'industrie, l'espace ou la télédiffusion.

Entre 1950 et 1965, la demande d'abonnements téléphoniques est très supérieure aux possibilités de raccordement des P&T, le temps d'attente peut atteindre plusieurs années dans les grandes villes, des numéros de téléphones se revendent très cher.

Cette institution fonctionnait avec des fonctionnaires de l'État, des véhicules et des bâtiments du parc immobilier du domaine de l'État. Elle est transformée au fur et à mesure des réformes de l'État en deux sociétés de service public : France Télécom, en 1988, et La Poste, en 1991, ainsi que des organismes de régulation – direction des réglementations générales (DRG), devenues autorité de régulation des télécommunications (ART), devenue Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP).

Après l'éclatement des PTT en deux entreprises publiques, l'État a cédé les véhicules et le parc immobilier à ces deux identités commerciales,
La Poste et France Télécom. Les fonctionnaires ont été affectés au sein de ces entreprises sans perdre leur statut de « fonctionnaire de l'État ». En revanche, La Poste et France Télécom se doivent de prendre en charge les traitements. Après un dernier concours externe fonctionnaire en 2001, le personnel recruté est embauché sous statut de droit privé. C'est-à-dire qu'il n'a pas le statut de fonctionnaire.
La dénomination « Postes, télécommunications et télédiffusion » a été officiellement celle du ministère des PTT, ministère de tutelle, dans les années 1980. Elle était surtout utilisée dans les campagnes françaises, sur les textes non officiels, dans les journaux de communication internes et lors de tournages de films. La télédiffusion (qui regroupe les services de chaînes de télévisions et les organes de la radio) a toujours été indépendante.


Dans les années 1970, la France met les bouchées doubles pour rattraper son retard sur plusieurs autres nations avec le programme « Delta LP » (accroissement des lignes principales). C'est à cette époque que fut construite la plus grande partie de la boucle locale.
De plus, avec le concours des industriels français, sont mis au point par les ingénieurs et chercheurs du CNET, la commutation numérique, le Minitel en 1980, le réseau Radiocom 2000 en 1986, la norme GSM.
À cette époque, le service public du téléphone est arrivé à développer un réseau extrêmement dense, parmi les plus performants du monde, il assure à tous ses employés le statut de fonctionnaire.

Réorganisations de la partie opérationnelle de France Télécom
En 1980, deux types de directions existent en France : les directions régionales et les directions opérationnelles (DOT) qui sont sous la coupe des premières et supervisent un département. Toutes ces directions dépendent de la Direction générale des télécommunications (DGT). Les établissements opérationnels sont organisés selon le schéma « CCL/Agence/CPE/ » qui va persister une quinzaine d'années. Ce schéma correspond à une vision du cycle de vie de la ligne téléphonique : création en CCL, vente en agence, service après-vente et comptage en CPE. Chacun de ces établissements comprend environ cent-cinquante personnes. À cela s'ajoutent des fonctions en back-office : renseignements téléphoniques, centre de facturation.
En 1984, se rajoutent les délégations de zone, échelon intermédiaire entre les directions régionales et la DGT. Ces délégations de zones sont cependant supprimées au bout d'un an d'existence environ. Vers 1987, l'informatisation supprime environ un tiers des postes de travail en back-office. Les personnels ainsi libérés sont affectés aux agences commerciales ou à de nouvelles fonctions (vendeurs) pour vendre des abonnements téléphoniques, des terminaux ou des fax. L'introduction de la TVA et de la première libéralisation, celle des services à valeur ajoutée pour laquelle il n'y aura jamais de concurrents à se déclarer.

Les Directeurs généraux des Télécommunications :
1941-1951 : Charles Lange
1951-1957 : Jean Rouvière
1957-1967 : Raymond Croze
1967-1971 : Pierre Marzin
1971-1974 : Louis-Joseph Libois
1974-1981 : Gérard Théry
1981-1986 : Jacques Dondoux
1986-1990 : Marcel Roulet

Le bâtiment du ministère des PTT Le 103, rue de Grenelle à Paris.
À sa création, le ministère des PTT s'installa au 103, rue de Grenelle dans le 7e arrondissement de Paris. En 1939, l'administration centrale du ministère déménage dans le quartier de l’École militaire pour faire corps avec le nouveau ministère de la Marine marchande.
Le nouveau bâtiment, avenue de Ségur, moderne et fonctionnel, est conçu par Jacques Debat-Ponsan (1882-1942), architecte en chef des PTT.
Le nouvel édifice aux lignes modernes s'étend sur trois cents mètres de façade dans un style néo-classique.
Le ministère des PTT est demeuré dans ce bâtiment jusqu'à sa disparition consécutive à la création des opérateurs de droit public, La Poste et France Télécom. Des services de l'Industrie puis l'administration centrale de l’Écologie ont par la suite occupé cet immeuble3 qui fait depuis 2016 partie de l'ensemble Ségur-Fontenoy.

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Entre 1981 et 1997, l'appellation du ministère reflète ses changements de mission : le ministère se verra attribuer tour à tour la télédiffusion, l'espace, les technologies de l'information, dépendant tantôt du ministère de l'Industrie, tantôt de celui de l'Économie et des Finances.
C'est une période de grande transformation avec la naissance en 1988 de France Télécom puis en 1991 de l'entreprise La Poste.


FRANCE TELECOM
est créée et enregistrée à l'INPI le 14 novembre 1986 dans le domaine des télécommunications, pour répondre à une directive européenne et réorganiser le secteur des télécommunications français suivant le modèle existant aux États-Unis d'un marché concurrentiel des télécommunications (téléphonie fixe principalement) sur lequel opèrent des entreprises commerciales internationales cotées en bourse.
La Direction générale des télécommunications, qui est alors une administration, prend le nom de France Télécom le 1er janvier 1988.

La loi du 2 juillet 1990 transforme l'administration France Télécom en un établissement de droit public, dont Marcel Roulet est le premier président ; il est doté d'une personnalité morale distincte de l'État et acquiert une indépendance financière. Auparavant, le budget de dépense des Télécommunications était inscrit au sein du budget annexe des PTT voté chaque année par l'Assemblée nationale, tandis que les recettes étaient considérées comme des taxes et encaissées par le Trésor public, laissant chaque année un très important excédent à l'État[réf. nécessaire]. Avec la nouvelle organisation, France Télécom conserve ses recettes, les utilise pour ses dépenses et reverse l'excédent très important[réf. nécessaire] à son actionnaire unique qui est l'État.

Le 1er octobre 1991, France Telecom commence à Strasbourg une expérience-pilote de téléphonie sans-fil grand-public, en ville. Le Bi-Bop est commercialisé « en grand » à partir d’avril 1993 à Paris, Lille et dans quelques lieux de villégiature.
En 1992, France Télécom doit mener deux réformes de front. La réforme des classifications remplace sept-cents grades de fonctionnaires par quatre classes et trois niveaux dans chaque classe. Cela engendre une certaine protestation même si la masse salariale augmentera largement plus que ce qui était anticipé. Les directions régionales sont supprimées, les deux à trois mille personnes qui y travaillaient sont reversées dans des Organismes nationaux de soutien (ONS). En 1998, la quasi-totalité de ces ONS est supprimée.


Le 1er juillet 1992, France Télécom lance Itineris, le premier opérateur de téléphonie mobile à la norme de 2e génération GSM.
En 1993-1994, l'accord Atlas conclut un rapprochement France Télécom-Deutsche Telekom.
En juin 1994, France Télécom et Deutsche Telekom prennent une participation dans Sprint, 3e opérateur américain.
France Télécom devient également un fournisseur d'accès à Internet en 1995 avec la création de Wanadoo, deux ans après les premiers fournisseurs, et après avoir tenté d'empêcher l'arrivée d'internet en France.
En septembre 1995, Michel Bon est nommé à la tête du groupe France Télécom.

Une nouvelle réorganisation, en 1995, structure l'entreprise selon trois marchés (résidentiel, petits professionnels et grandes entreprises) pour faire face aux besoins croissants des différents clients, et l'arrivée de la concurrence (SFR). L'organisation est désormais conçue autour des usages des clients et non plus des produits. Les personnels sont donc réaffectés avec changement de métier. En 2000, le marché « petits professionnels », créé en 1995, est supprimé. Il ne semble pas y avoir eu de motivation commerciale, organisationnelle ou économique à cette restructuration. Des établissements techniques de tailles régionales[Quoi ?] sont créés. Les agences sont réorganisées doublement sous l'angle géographique (doublement de la surface).

En 1993, le gouvernement a décidé de créer des nouveaux grades de fonctionnaires (« Reclassification ») dans les deux établissements publics France Télécom et La Poste ; chaque employé s'est vu attribuer un nouveau grade selon l'emploi occupé et la possibilité de choisir de conserver l'ancien grade ou d'opter pour le nouveau (intégration directe sans examen ni concours). Ainsi cohabitent actuellement, des grades issus de l'administration classique (grades PTT) dits de « Reclassement » et des nouveaux grades dits de « Reclassification ». De nombreux agents ayant gardé leur grade de reclassement s'estimant lésésà la suite de l'absence d'évolution et de promotion dans leur carrière (à France Télécom comme à La Poste) ont déposé des recours qui ont abouti à la condamnation de ces deux entreprises et solidairement à l'État. Les personnes qui ne sont pas sous statut de fonctionnaire, sont en CDI dans le droit de leur pays. La moitié du personnel travaille hors de France.

Pour préparer l'ouverture à la concurrence au 1er janvier 1998, une loi est votée en juillet 1996 transformant l'exploitant public en société anonyme dont l'État français est le seul actionnaire.

Entrée en bourse et bulle Internet (1997-2000)
En 1997, le capital de la nouvelle société anonyme a été ouvert avec succès.
1998 voit le début de la généralisation des intranets au sein de l'entreprise, ainsi que l'explosion d'internet et des offres dans ce domaine. France Télécom fonde Wanadoo et rachète plus d'une centaine de sociétés.
L'action est vendue 27 euros. Une seconde ouverture eut lieu en 1998, malgré la crise des marchés émergents, puis la bulle Internet rend les bourses euphoriques en 1999.
Partie en retard dans le train de l'internationalisation lancé par des concurrents internationaux tels Vodafone, France Télécom se met à chercher des cibles au plus fort de la valorisation des années de la bulle Internet. Cela d'autant plus que son alliance avec Deutsche Telekom, caractérisée par une participation au capital croisée de 2 %, a éclaté lorsque cette dernière a annoncé un projet de rapprochement avec Telecom Italia (finalement abandonné) sans avertir les Français.

En mars 2000, l'action France Télécom atteint 153,30 € puis son plus haut historique à 219 € avant de redescendre, brutalement.

Le groupe France Télécom rachète la grande majorité d'Orange en 2000 et l'intégralité en 2003 ; il fusionne ensuite ses activités mobiles (Itinéris, OLA et Mobicarte) en une filiale nommée Orange.
France Télécom procède également à de nombreuses autres acquisitions de sociétés (revendues pour certaines) dans le monde devenant le quatrième opérateur mondial par sa taille (GlobalOne, Equant, Internet Telecom, Freeserve, EresMas, participation dans Wind, NTL, Mobilcom, etc.).
En 2003, les agences sont divisées en deux spécialités (agences spécialisées dans la vente à distance et les agences spécialisées en vente physique). Les tailles géographiques doublent aussi (et le nombre d'agences est divisé par deux).

La période post-bulle Internet (2000-2004)
À la suite d'un changement de qualification d'une partie de la dette de « long terme » à « court terme » en vue d'obtenir un meilleur taux d'intérêt, les actionnaires s'aperçoivent que, de 2002 à 2005, France Télécom doit rembourser chaque année entre cinq et quinze milliards d'euros de dette.
En juin 2001, France Télécom vend la totalité de sa participation (9,9 %) de l'américain Sprint.
Le cours de l'action s'effondre à 6,94 euros le 30 septembre 2002, alors qu'il était à 219 euros le 2 mars 2000. L'entreprise qui avait une capitalisation boursière de 580 milliards d'euros voit cette dernière chuter à 18 milliards d'euros.
Le 2 octobre 2002, le président-directeur général est Thierry Breton. Il a été appelé pour redresser l'entreprise qui était à ce moment-là, la deuxième entreprise la plus endettée du monde (69,7 milliards d'euros, en termes de dette à court terme).
Il a obtenu quinze milliards de réaménagement de la dette à prendre en charge par les banques et les investisseurs, quinze milliards d'augmentation de capital réclamés à l'État alors actionnaire majoritaire, et quinze milliards de trésorerie à dégager grâce à des économies en interne. Nommé ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie, il démissionne de France Télécom le 22 février 2005 pour rejoindre le gouvernement.

Les fusions opérées en mars 2004 par France Télécom avec sa filiale de téléphonie mobile Orange, achetée au prix fort lors de la bulle Internet de 2000, et avec sa filiale spécialisée dans l’accès à Internet Wanadoo, rebaptisée Orange, ont amené Colette Neuville, la présidente de l'Association de défense des actionnaires minoritaires (ADAM), à écrire à l'Autorité des marchés financiers (AMF) pour souligner qu’une action Wanadoo valait 19 euros au moment de son introduction en bourse au printemps 2000, et que France Télécom en a proposé 8,86 euros, seulement quatre ans plus tard.
En septembre 2004, l'État français cède une partie de ses actions pour passer en dessous de la barre des 50 %22. France Télécom devient alors une entreprise privée. Cent quinze ans après sa nationalisation, le téléphone redevient privé en France.

Le 27 juillet 2005, France Télécom annonce le rachat de 80 % de l'opérateur de téléphonie mobile Amena, détenteur de 24 % de parts de marché en Espagne, pour la somme de 6,4 milliards d'euros dont trois par augmentation de capital.
France Télécom a aussi annoncé le déploiement du plan NExT dont l'objectif est de fournir à ses clients, de façon intégrée, l'ensemble des services de télécommunications dont ils ont besoin.
Selon la société Dataxis, France Télécom serait en 2005 le deuxième opérateur ADSL mondial derrière China Telecom et devant l'américain SBC Communications. Il serait le premier opérateur ADSL européen.

A partir du 1er juin 2006, France Télécom tend à commercialiser l'ensemble de ses produits dans le monde sous la seule marque commerciale Orange, ainsi Wanadoo et Ma Ligne TV sont renommés Orange.
À cette occasion le logo (esperluette) de la marque France Télécom est devenu plus arrondi, la charte graphique (couleur et police) a été modifiée.

En 2006, les directions régionales sont réduites à la relation institutionnelle régionale avec un effectif divisé approximativement par dix. Le pouvoir d'organisation de l'activité opérationnelle de l'entreprise est transféré aux directions territoriales. Il y a deux fois moins de directions territoriales que de directions régionales. La taille des établissements gérés par les DT atteint couramment mille personnes.
En 2006, selon le bilan social officiel de l'entreprise, environ trois employés sur quatre ont perçu une rémunération brute comprise entre 2 150 et 4 150 euros par mois. La rémunération mensuelle moyenne brute est 2 924 euros .

En juin 2007, l'État français cède à nouveau 5 % de sa participation dans France Télécom. La participation publique (État français et ERAP) est portée à 27 %26. À cette même date, France Télécom revend Orange Pays-Bas et acquiert le fournisseur d'accès espagnol Ya27, ainsi que l'opérateur mobile autrichien One (en).

Les effectifs passent de 140 000 personnes en 1993 à quelque 190 000 personnes en 2007 après un pic à 220 000 en 2001, cette croissance étant due aux effectifs à l'international.
106 000 employés (56 %) sont en France, 16 % en Pologne, 12 % au Royaume-Uni, 2 % en Espagne.
Les 140 000 personnes en 1993 sont essentiellement des fonctionnaires français (fonctionnaires d'État issus du ministère des PTT).
Le turn-over est plus important à compter de 2005. Il s'agit de mouvements entrants d'ingénieurs confirmés qui sont séduits par la relative stabilité de France Télécom par rapport aux SSII. Les départs existent, soit par un système de préretraite pour les fonctionnaires, soit vers des sociétés de haute technologie. Les mouvements internes sont nombreux. De plus, la moyenne d'âge est de 48 ans, et la moitié des salariés français doivent partir en retraite d'ici 2018.

En mars 2008, les médias prêtent à France Télécom l'intention de racheter la société scandinave TeliaSonera. Le nouvel ensemble deviendrait le premier opérateur européen. Cette opération sera abandonnée.
Le 8 septembre 2009, Orange et T-Mobile annoncent un rapprochement au Royaume-Uni en fusionnant leurs activités dans le groupe Everything Everywhere, pesant alors 37 % et devenant le premier opérateur mobile.
Le 21 septembre 2010, France Télécom rentre au capital (40 %) de Meditelecom (marque Méditel), deuxième opérateur de téléphonie mobile du Maroc (dix millions de clients au moment de l'opération). L'accord prévoit la montée de France Télécom à 49 % du capital d'ici 2015.
En octobre 2011, France Télécom acquiert l'opérateur CCT en République démocratique du Congo.
En 2012, France Télécom s'est séparé d'Orange Suisse et de TP Emitel (pl) opérateur polonais de TNT.
Le 30 juin 2012, France Télécom - Orange ferme le service Minitel.
En février 2012, la ligne fixe France Télécom change de nom et devient la ligne fixe Orange. Tous les services d'Orange France portent désormais le même nom. Les sites internet de France Télécom renvoient tous vers les sites Orange. Toutefois, le nom juridique de l'entreprise, sa raison sociale, son adresse, son RCS restent France Télécom SA pour les offres fixe et internet.
Il reste 65 000 fonctionnaires en 2012 et d'ici à 2020 l'essentiel des fonctionnaires aura quitté France Télécom (néanmoins, l'arrêt des recrutements de fonctionnaires datant de 1996, l'extinction totale est prévue dans les années 2040).

Le changement complet de nom au profit d'Orange est finalement voté lors de l'assemblée générale du 28 mai 2013 avec effet à compter du 1er juillet 2013.

Identité visuelle (logo)
Dans les années 1980 et 1990, le bleu ciel était la couleur de France Télécom. Les véhicules de l'entreprise arboraient cette couleur et les téléphones publics étaient bleu foncé ou bleu ciel et bleu foncé pour les plus récents.
Les premiers logos des « Télécoms » sont plutôt classiques, représentant un téléphone d'abord avec un cadran puis modernisé avec un clavier.
Logo du 1er janvier 1976 au 31 août 1981.
Le logo adopté en janvier 1993 est plus original, il représente toujours un clavier téléphonique mais évoque aussi les panneaux solaires des satellites et le progrès technique.
Logo utilisé du 1er septembre 1981 au 6 septembre 1983
Le logo apparu en mars 2000 est radicalement différent : l'esperluette symbolise le lien entre les hommes et la communication.
Logo du 7 septembre 1983 au 31 mars 1987.
Logo utilisé du 1er avril au 31 décembre 1987
Logo du 1er janvier 1988 au 31 décembre 1992
Logo du 1er janvier 1993 au 29 février 2000.
Logo du 1er mars 2000 au 31 mai 2006.
Logo de 1er juin 2006 au 8 février 2012.
En 2013, France Telecom était la 121e entreprise mondiale, elle employait près de 172 000 personnes dont 105 000 en France, et servait près de 226 millions de clients dans le monde. Elle prend le nom de sa filiale Orange le 1er juillet 2013.

L'orange est la couleur dominante, ce logo ayant été adopté au moment du rachat de la marque Orange par France Télécom.
Les trois dernières lettres du nom France Télécom, elles aussi orange, faisaient référence au « .com » des sites internet.
L'esperluette est modernisée en juin 2006 et c'est tout le mot Télécom qui devient orange.

À partir de février 2012, France Télécom utilise le logo d'Orange, très simple et sobre, pour sa communication.

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L'Affaire France Télécom, procès France Télécom et affaire des suicide désignent une affaire judiciaire française visant l'entreprise France Télécom (devenue Orange en 2013) pour harcèlement moral.
Les faits, sur la période 2006-2011, atteignent leur paroxysme en 2009 dans une période surnommée la « crise des suicides » — 35 suicides en 2008 et 2009 selon l’Observatoire du Stress et des mobilités forcées, les syndicats et la direction. En décembre 2019, Orange et plusieurs de ses cadres et dirigeants sont condamnés à une amende de 75 000 euros pour harcèlement moral.

Plan NExT et nouvelles méthodes de management
Le plan NExT introduit un management violent. En 2004, 4 000 employés sont formés durant dix jours afin d'accomplir sur le terrain le plan NExT : la réduction des effectifs est une priorité, de nouvelles techniques de managements sont introduites, la méthode est de dégrader les conditions de travail, afin de pousser psychologiquement une partie des employés au départ volontaire, réduisant ainsi les indemnités à payer. Ainsi, les managers ont pour objectif d'inciter des salariés à démissionner, d'en muter dans d’autres secteurs de la fonction publique ou de signer des congés de fin de carrière. Des stages apprennent à ces managers des schémas sur les courbes du deuil qui définissent six étapes par lesquelles tout salarié qui se voit annoncer la suppression de son poste, doit passer : l’annonce de la mutation, le refus de comprendre, la résistance, la décompression qui peut aller jusqu'à la dépression, la résignation et l’intégration du salarié (harcèlement qui peut aussi se terminer très mal par des suicides.

Le 27 février 2005, Didier Lombard devient PDG de France Télécom. Il poursuit et amplifie la politique de réorganisation du groupe initiée par son prédécesseur Thierry Breton. Le projet présenté et mis en œuvre par Didier Lombard, le plan NExT, est un plan de redressement de l'entreprise qui vise, entre autres objectifs, au départ en trois ans de 22 000 des 120 000 salariés, dans un contexte d'ouverture à la concurrence.
Le plan NExT introduit un management violent.

En octobre 2006, Didier Lombard « a porté la décision d’accélération des déflations d’effectifs et des mobilités imposées ». Il présente et assume pleinement sa méthode lors de la convention de l’Acsed (association des cadres supérieurs et dirigeants de France Télécom). « Ce sera un peu plus dirigiste que par le passé, y déclare-t-il. C’est notre seule chance de faire les 22.000 pour pouvoir recruter les 6.000. […] En 2007, je ferai les départs par la fenêtre ou par la porte. » Un événement « détonateur », pour la cour d’appel, « constitutif d’un tournant dans la violence des mots et dans la systématisation de la méthode dirigiste et autoritaire ».
Ces propos de Didier Lombard à l'époque ont marqué les esprits.

Lors d'un événement interne en janvier 2009, il précise sa pensée : « Y compris les populations qui ne sont pas à Paris. Qui pensent que la pêche aux moules est merveilleux eh ben, c'est fini ! ». Et pendant une conférence de presse le 15 septembre 2009, Didier Lombard évoque une « mode des suicides ». Une formulation qu'il a regrettée ensuite, en prétextant avoir, par erreur, « utilisé le mot "mode" qui était la traduction du mot mood (humeur) en anglais », mais qui choque profondément salariés, syndicats et opinion publique.
Ainsi, les managers ont pour objectif d'inciter des salariés à démissionner, d'en muter dans d’autres secteurs de la fonction publique ou de signer des congés de fin de carrière. Des stages apprennent à ces managers des schémas sur les courbes du deuil qui définissent six étapes par lesquelles tout salarié qui se voit annoncer la suppression de son poste, doit passer : l’annonce de la mutation, le refus de comprendre, la résistance, la décompression qui peut aller jusqu'à la dépression, la résignation et l’intégration du salarié (harcèlement qui peut aussi se terminer très mal par des suicides).

« En dépit des alertes » « Il n’est reproché [aux anciens dirigeants], ni les modalités de la réorganisation, le nombre de sites à fermer, les salariés à muter ou à reconvertir, ni encore le nombre de départs ou d’embauches à réaliser pour améliorer la compétitivité de la société, mais bel et bien la méthode utilisée pour y parvenir, qui a excédé très largement le pouvoir de direction et de contrôle du chef d’entreprise », insiste l’arrêt.

Parmi ces victimes, Michel Deparis. Alors que France Télécom - devenue Orange en 2013 - fait la Une des médias en raison de suicides parmi ses salariés, ce technicien marseillais met fin à ses jours en juillet 2009 en critiquant dans une lettre le «management par la terreur». «Je me suicide à cause de France Télécom. C'est la seule cause», écrivait-il. Deux mois plus tard, une première plainte est déposée par le syndicat Sud. Courant 2006, la direction de France Télécom, privatisée deux ans plus tôt, met en œuvre une politique de déflation massive des effectifs visant à transformer l'entreprise de 100.000 salariés.

En septembre 2010, le nombre de suicides après le lancement du plan NExT s’élevait à cinquante-huit. Le 26 avril 2011, un cadre de France Télécom, Rémy Louvradoux, s'est suicidé en s'immolant par le feu.

Les changements de postes à l’intérieur de l’entreprise sont nombreux (14 000 entre 2006 et 2008). L'alliance CFE-CGC/UNSA et SUD ont créé dès 2007 l'Observatoire du stress et des mobilités forcées, pour en étudier les conséquences sur l'organisation du travail. Les suicides liés au travail, six pendant l’été 2009, posent la question de cette gestion du personnel .

Après dépouillement d'un questionnaire soumis à tout le personnel de France Télécom, les consultants d'un cabinet, Technologia, remettent leurs conclusions le 14 décembre 2009 et évoquent une « ambiance de travail tendue, voire violente ». « Le ressenti général est très dégradé, notamment en ce qui concerne les conditions de travail, la santé, le stress… ». Dans la « vague de suicides », ils pointent « la grande défaillance du management ». « Les personnels de France Télécom semblent plus que jamais orphelins de sens, de leaders »

La plainte
Le syndicat SUD PTT dépose une plainte le 14 décembre 2009 (plainte enregistrée en mars 2010) contre la Société FRANCE TELECOM SA (Orange) et MM. Didier Lombard, Président Directeur Général, Olivier Barberot, Directeur des Ressources Humaines et Louis-Pierre Wenès, Directeur Exécutif Délégué.
La CFE CGC et SUD sont les seuls syndicats à s'être constituées partie civile.

Le procès
Il s'agit du premier procès d'une entreprise du CAC 40 pour harcèlement moral. Le principal prévenu est Didier Lombard, président-directeur général de l'époque. L'affaire est « devenue un symbole de la souffrance au travail ».
Le 6 janvier 2015, l'enquête est close sur la vague de suicides et qui pourrait ouvrir la voie à la reconnaissance par la justice d’un harcèlement moral institutionnel.
En juillet 2016, le parquet de Paris demande le renvoi devant le tribunal correctionnel, pour harcèlement moral, de la société Orange, en tant que personne morale, et de six responsables : Didier Lombard, ancien dirigeant du groupe, Louis-Pierre Wenes, son ancien numéro 2, Olivier Barberot, l'ancien responsable des ressources humaines ainsi que quatre cadres pour complicité. La CFE-CGC Orange a pour sa part réclamé la qualification d'homicide involontaire en lieu et place de harcèlement moral. C'est la première fois qu'une grande entreprise est poursuivie en France pour ce délit.
En juin 2018, la justice décide de faire comparaître en 2019 pour harcèlement moral l'entreprise France Telecom, son ancien PDG Didier Lombard et ses seconds Louis-Pierre Wenès et Olivier Barberot.
Trente-neuf cas individuels (19 suicides, 12 tentatives de suicide, 8 dépressions ou arrêts de travail) sont discutés lors du procès en 2019.
Le 20 décembre 2019, Orange, ex-France Télécom, son ancien PDG Didier Lombard et six autres cadres et dirigeants ont été condamnés pour « harcèlement moral », près de dix ans après une crise sociale durant laquelle plusieurs dizaines de salariés se sont suicidés.

Pour leur défense, Didier Lombard et Louis-Pierre Wenès ont affirmé à de nombreuses reprises qu’ils n’avaient pas conscience de la gravité de la situation, faute de remontées jusqu’à eux. La cour démontre l’inverse. Aucun des deux ne peut « prétendre avoir vécu dans une tour d’ivoire à l’abri d’alertes émanant de la presse ». Il en est de même pour les alertes des syndicats et instances représentatives du personnel.
Les anciens dirigeants ont poursuivi « l’accélération impérative de la déflation des effectifs », « sans égard pour le sort des salariés pris dans l’étau, sacrifiés aux priorités financières, en dépit des alertes disponibles ». Il est probable que l'affaire aille désormais devant la Cour de cassation.

En France, l'affaire a fait évoluer certaines pratiques en matière de management et de ressources humaines, avec notamment des efforts sur la prévention des risques psychosociaux et une meilleure prise en compte du harcèlement moral.

Dans son procès sur sa politique de gestion des ressources humaines d'Orange, Didier Lombard est condamné à un an de prison, dont huit mois avec sursis, et 15 000 euros d'amende. Le groupe, rebaptisé Orange en 2013, doit payer une amende de 75 000 euros. Didier Lombard a décidé d'interjeter appel.

En reconnaissant le harcèlement moral institutionnel de France Télécom, le tribunal ouvre la porte à d'autres demandes de réparations.
Les juges affirment que tous les membres du personnel de France Télécom salariés pendant la période de prévention retenue par le tribunal sont fondés à demander réparation. C'est donc potentiellement les 130 000 salariés en poste en France pendant le plan NExT du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008 qui pourraient avoir intérêt à agir. La base de réparation retenue allant de 10 000 jusqu'à 45 000 euros, c'est-à-dire 2 milliards d'euros minimum de demandes de réparations potentielles auxquels est exposé Orange.

Orange, qui ne fait pas appel du jugement, décide en juillet 2019 de créer une commission d'indemnisation, dont la mise en œuvre fait l’objet d’échanges avec les Organisations Syndicales.

Rôle des CHSCT
L'’inspectrice du travail, Sylvie Catala, adresse un courrier à Didier Lombard lui indiquant qu’il est urgent d’agir, en évoquant les 64 PV de CHSCT et les très nombreux rapports de médecine du travail qui alertent sur les suicides.
La direction, au plus haut niveau, décide de faire obstruction aux tentatives des élus CHSCT de faire prévaloir leurs droits aux expertises, enquêtes, droits d’alertes, aux conseils des inspections du travail, des médecins du travail, des caisses d’assurances maladie. Les juges relèvent une pièce du dossier d’instruction à propos de la politique de l’entreprise vis à vis des CHSCT. Il n’y a pas d’ambiguïté : il faut mener une « guérilla juridique » contre les CHSCT.
Sans le travail d’alerte, d’enquête et d’expertise des CHSCT, ce procès n’aurait sans doute pas pu avoir lieu. Les ordonnances Macron et la disparition de cette instance font craindre que ce procès des méthodes de management mortifères ne soit le premier et le dernier.

Procès en appel
Le procès en appel s'ouvre le 11 mai 2022.

La culpabilité du PDG, Didier Lombard, et du numéro deux, Louis-Pierre Wenès, de France Télécom à l'époque des faits, a été confirmée par la cour d’appel de Paris. La notion de « harcèlement moral institutionnel » reconnue par le jugement du 20 décembre 2019 est confirmée. Les peines des deux dirigeants sont de un an d’emprisonnement assorti du sursis et à 15 000 euros d’amende.

« Le juge qui prononce une peine d’emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité en dernier recours au regard des faits de l’espèce, de la gravité de l’infraction, de la personnalité de l’auteur, ainsi que du caractère indispensable de cette peine et inadéquat de toute autre sanction », expose la cour d’appel dans son arrêt du 30 septembre 2022.
La gravité des faits et leurs « conséquences dévastatrices » justifie « le prononcé d’une peine d’emprisonnement » – un an étant la peine maximale prévue par la loi à l’époque des faits. Néanmoins, « ni pour [Didier Lombard] ni pour [Louis-Pierre Wenès], la cour ne partage l’appréciation des premiers juges quant à la justification d’une peine d’emprisonnement ferme », notamment parce que les deux anciens dirigeants sont aujourd’hui retraités, respectivement âgés de 80 et 73 ans. En première instance, ils avaient écopé d’un an d’emprisonnement dont 4 mois ferme.
Brigitte Dumont est la seule dont la peine est augmentée. Elle est « complice de l’infraction, sa participation personnelle a permis que le harcèlement managérial s’accomplisse ». La cour la désigne comme la « porteuse du programme Act ». Retraitée depuis quelques mois, après avoir fini sa carrière chez Orange, elle est condamnée à 6 mois avec sursis, contre 4 mois en première instance.
La cour d’appel ajoute à ses qualités – directrice du management des compétences et de l’emploi, puis directrice du développement et des performances RH – celle de DRH France au moment des faits.
Quant à Nathalie Boulanger, qui a fournit « une assistance durant plusieurs phases décisives », sa peine est légèrement diminuée, passant de 4 mois en première instance, à 3 mois, toujours avec sursis.
« Le risque de réitération de faits similaires est quasi-inexistant, estime la cour d’appel, tant la sensibilisation aux risques psychosociaux apparaît prégnante, à l’aune de la médiatisation de l’affaire, puis du déroulement des débats. »

Aboutissement de la plainte déposée en 2009
Lors d'une conférence de presse tenue par les syndicats et leurs avocats, Patrick Ackermann, de SUD PTT, s'est montré plutôt satisfait : « C'est l'aboutissement de la plainte que l'on a déposée en 2009, même si l'on comprend la déception des parties civiles qui ont été écartées de cet arrêt. » Si les constitutions des 120 parties civiles n'ont pas été contestées par la cour, certaines victimes font part de leur amertume d'être déboutées des indemnisations obtenues en première instance ou de les voir réduites.
Jonathan Cadot, avocat de la CFDT, souligne cependant que « cette reconnaissance de culpabilité est une étape importante pour la reconstruction des victimes ». Cela rappelle aussi aux entreprises qu' « on ne peut pas tout faire au détriment de la dignité humaine », ajoute-t-il, avant de s'interroger : « On peut quand même se poser la question de la condamnation à un an avec sursis. Il serait intéressant de mener une réexion législative sur de possibles aggravations de peine pour harcèlement moral managérial. » De son côté,
Christian Mathorel, secrétaire général de la CGT Fapt, estime que « cette conrmation de la condamnation des principaux dirigeants est un point important pour peser sur le monde du travail. Après les plans Next et Act chez France Télécom, le plan Scale Up, mis en place chez Orange actuellement, consiste à réaliser 1 milliard d'euros d'économie (d'ici n 2023), dont 500 millions sur la masse salariale ». Pour Sébastien Crozier,
président de la CFE-CGC, « cette décision est historique. Mais ça a aussi été possible grâce à notre détermination sans faille. »
Pourtant, cette lutte menée par les syndicats, qui se sont tous portés partie civile, n'a pas été prise en compte. Au titre des frais de justice, la cour ne leur a octroyé que 1 500 euros. Pour Sylvie Topaloff, avocate de SUD PTT : « Cet arrêt est le résultat de la pression que les organisations syndicales ont exercé sur la direction.
Sur le plan du droit, c'est une avancée considérable. Mais cette faible indemnisation des avocats est une manière de dire aux syndicats : "Vous avez eu raison d'agir, mais vous devez en payer les conséquences." »
Reste que ce jugement a une portée inédite en termes de reconnaissance du harcèlement moral institutionnel. « Nous sommes à un degré supérieur de juridiction, ce qui permet à cet arrêt de prendre plus d'impact de manière jurisprudentielle, explique Agnès Cittadini, l'avocate de la CGT. Nous avons ici la conrmation qu'avec ce type de harcèlement, nous ne sommes pas dans le cas d'une relation de type interpersonnelle, mais dans celui d'une entreprise qui pour faire des prots a pris des décisions qui entrent dans le cadre d'un délit. Nous avons là une trame pour analyser les situations dans les autres entreprises et les faire condamner. » L'avocat de Didier Lombard ne s'est pas encore prononcé sur un éventuel pourvoi en
cassation.

Le 5 juillet 2022 PÉNAL

À la cour d’appel de Paris, la huitième et dernière semaine d’audience était consacrée aux plaidoiries en défense des six prévenus appelants. Le délibéré sera rendu le 30 septembre 2022.
« J’ai approuvé l’essentiel du réquisitoire », lâche l’un des trois avocats du PDG, Didier Lombard, « mais vous avez eu tort, monsieur l’avocat général, de considérer que l’État n’avait pas de responsabilité. Il a [au contraire] une responsabilité majeure ». Le même estime qu’au moment de
la mise en œuvre du plan Next, son client s’est retrouvé « dans une situation ingérable », et « prisonnier » de décisions politiques. Au point que, selon lui, « ce n’est pas [vraiment] Lombard qui gère l’entreprise », mais plutôt « le ministre ». Sa consœur souligne pour sa part que les prévenus
sont revoyés pour des faits commis « courant 2007 à 2010 ». Or les deux « péchés originels » imputés à son client, à savoir l’annonce des 22 000 suppressions d’emploi et les propos tenus lors d’un séminaire de hauts cadres, remontent à 2006 : « Les deux seuls faits reprochés concrètement
à [Lombard] au bout de treize ans [de procédure], ils sont prescrits, ils sont hors prévention, et ils ne constituent pas des faits de harcèlement moral ». Sur ce point, lors des réquisitions de la semaine précédente, il fut considéré que le PDG avait par la suite continué à donner des
« instructions ». Un raisonnement qui reposait entre autres sur les notes manuscrites prises par un membre du comité de direction, avec notamment plusieurs occurrences de l’expression « mettre la pression ». L’avocate raconte avoir passé « trois heures et demie » à les relire, sans « rien trouver qui ressemble à une instruction ».
Son dernier avocat observe que, « pour compenser ce manque de preuves, on joue sur les focales, et on vient donner une dimension générale à des situations individuelles. Mais ça ne marche pas ». Il enchaîne sur les multiples alertes psychosociales : « Je ne dis évidemment pas qu’il ne savait rien. Oui, il a pu être averti de certains drames. » Avant de tempérer : « Après coup, il est facile de prendre pour un oracle tel ou tel élément, mais dans le maelstrom quotidien, c’est infiniment plus compliqué. […] On est incapable, dans les messages transmis par les syndicats, de distinguer les signaux forts des signaux faibles, on n’a pas de hiérarchie. » Il conteste la lecture combinée d’arrêts des chambres sociale et criminelle faite par les parties civiles et les avocats généraux, puis ajoute : « Vous allez devoir interpréter le droit, c’est une évidence, mais cette interprétation ne peut se faire que dans le respect des autres principes qui gouvernent le droit pénal. » Il cite ou évoque ceux de légalité, de prévisibilité et d’intelligibilité, et trouve que « condamner pour harcèlement moral institutionnel sans aucun lien interpersonnel […] serait une violation de l’article 7 » (de la Convention européenne des droits de l’homme).
Du côté de la défense de Louis-Pierre Wenès, le « numéro deux », on raille le concept de « harcèlement moral industriel ». « Je parlerais pour ma part de harcèlement moral évanescent », lance un premier avocat, qui explique n’avoir trouvé qu’un seul arrêt, et largement postérieur aux faits, sur ce qu’il paraphrase comme « des techniques de management perverses à l’encontre de l’ensemble des salariés » d’une entreprise. Avant d’interroger à la cantonade : « Qui dans cette salle a déjà géré 80 000 personnes ? » La seconde avocate de Wenès se lance dans la lecture d’un
communiqué du syndicat Sud-PTT. Il y est question d’un suicide, de « souffrance au travail », de « détresse », de « conditions de travail [qui] n’ont cessé de se dégrader, essentiellement à cause de la déflation des effectifs », et d’un « aveuglement de l’entreprise ». Elle ménage son effet, mais finit par préciser qu’il date du 6 juin 2022. Sur les quantums maximaux encourus (1 an et 15 000 €), elle considère que « si [le législateur] avait voulu sanctionner ce qui est soumis aujourd’hui à votre cour, il n’aurait pas prévu ce type de peine ».

Publié sur Dalloz Actualité (https://www.dalloz-actualite.fr)
« On ne peut faire de la divination un devoir »
Elle voit dans cette procédure une forme de « ballon d’essai pour faire modifier la loi », mais ajoute que son client n’est « pas un punching-ball ». « Il y a effectivement eu de la souffrance dans cette société », poursuit-elle, « mais je pense que cette souffrance elle était extrêmement ancienne ».
Selon elle, c’est bien « la privatisation » qui en est à l’origine, en ce qu’elle a conduit à la création d’un « monstre juridique » faisant cohabiter des travailleurs sous plusieurs statuts : « On essaie de nous dire que c’est une politique qui a duré trois ans qui l’aurait déclenchée… Ce n’est pas
raisonnable. » « Je voudrais vous dire encore deux choses à titre liminaire », lâche-t-elle au bout de plus d’une heure de plaidoirie. Elle tente de démontrer que l’objectif des 22 000 départs était parfaitement tenable sans recourir à aucun procédé harcelant : « Ce n’était pas impossible, [donc] le mobile, [également] devenu un élément constitutif de l’infraction, il n’existe plus. » Elle ajoute : « peut-être y a-t-il eu des gens qui ont fait l’objet d’un harcèlement individuel par leur manager, [et] c’est tout à fait anormal. […] Mais ça n’a rien à voir avec une volonté de harceler ». Bref, « je pense qu’il a été sacrifié sur l’autel de cette crise ».
Le premier avocat de Brigitte Dumont, directrice de tout et de rien, souligne que, « quand on fait une lecture attentive des arrêts visés dans l’ORTC et le jugement, [ils ne portent que sur] des relations interpersonnelles dans des PME, [et pas] des groupes de plusieurs dizaines de milliers de personnes ». S’il devait en aller autrement, « cela reviendrait à la possibilité de sanctionner pénalement […] un chef d’entreprise à partir du moment où il met en place une réorganisation ou un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), qui intrinsèquement entraînent de l’anxiété ». Et quand
bien même ce serait désormais le cas, « à l’époque des faits, aucun juriste, aucun avocat n’aurait indiqué à ses clients le risque d’un harcèlement moral institutionnel dans le cadre d’une réorganisation ». La seconde avocate de la même estime que, notamment sur les formations des
managers ou la note sur les parts variables de certains de ces derniers, sa cliente « n’est pas pulvérisée par le dossier, bien au contraire ». Sur l’intention, elle souligne « l’absence de prévisibilité de l’infraction de harcèlement moral institutionnel », considérant qu’on « ne peut faire
de la divination un devoir ». Avant d’expliquer que, « dans le dossier, vous ne trouverez pas un mot [de Dumont] visant à déstabiliser quiconque ».
Du côté de Nathalie Boulanger, directrice des actions territoriales, on concède : « Elle reconnaît une responsabilité morale et humaine ». Sur les écrans, la présentation PowerPoint fait cohabiter deux dispositions relatives au harcèlement moral, pour illustrer ce que lui qualifie de « voile d’ignorance législatif ». À gauche, celle du code du travail (art. L. 1152-1) ; à droite, celle du code pénal (art. 222-33-2). L’avocat interroge : « Comment le citoyen moyen, qui n’est pas censé ignorer la loi, peut-il savoir […] où termine le droit social, et où commence le droit pénal ? » En sous-texte, on croit comprendre que la coexistence de dispositions dans deux codes impliquerait donc de démontrer la conscience de violer spécifiquement celle des deux qui fonde ensuite l’action, ici la seconde. D’ailleurs, il considère que « tout pénaliser, cela revient à faire disparaître le droit social ».
Or, à l’époque, « personne ne parle de pénal, ça ne vient à l’esprit de personne », puisque le droit d’alerte en CNHSCT, par exemple, reposait exclusivement sur des notions de droit social, tout comme les articles de presse, du moins jusqu’en septembre 2008. L’avocat ajoute que, lorsque
deux syndicats ont créé l’observatoire du stress et des mobilités forcées, ils ont précisément souligné qu’il leur manquait un outil pour prendre la mesure de la situation : Boulanger ne pouvait donc que se trouver dans la même ignorance qu’eux.
« On a souvent fait le procès des mots »
L’avocate de Guy-Patrick Cherouvrier, le DRH France, rappelle que « seules 77 situations de souffrance sont portées à la connaissance des juges d’instruction, […] et seulement 39 sont retenues. […] Ça fait 0,03 % à l’échelle de l’entreprise ». Elle exclut ainsi les constitutions de parties civiles directement devant le tribunal correctionnel, mais aussi devant la cour, et dont la recevabilité a été contestée en mai (joint au fond). L’avocat général avait pour sa part retenu les près de 2 000 dossiers d’indemnisation présentés devant la commission d’indemnisation de l’entreprise, mais elle objecte sur le même terrain que « c’est 1,3 % de la masse salariale [sic] ».
Elle dénonce une « procédure boiteuse » et un « habillage » : « Il fallait des complices pour qu’il y ait des auteurs. » « Il est profondément blessé et malheureux de cette souffrance, […] mais il n’en est pas coupable », ajoute-t-elle : « la politique des prévenus n’est pas la cause de cette souffrance ». Selon elle, « on vient […] lui reprocher de ne pas avoir démissionné, mais où est l’acte positif dans le fait de ne pas démissionner ? Et pourquoi tous les cadres qui n’ont pas démissionné ne sont-ils pas prévenus ? » Elle explique qu’il « a tenu à consacrer une part immense de son temps à l’information et à la consultation du personnel ». Et ajoute que son client « n’a pas su, pas vu qu’il y avait un malaise généralisé », lequel était jusqu’ici plutôt contesté.
Après avoir posé qu’un acte de complicité « doit être antérieur ou concomitant à l’infraction consommée », le premier avocat de Jacques Moulin, directeur territorial, considère que sa condamnation en première instance reposait essentiellement sur « ses bons résultats. […] Mais un résultat n’est pas un fait, et en plus, il est nécessairement postérieur à l’infraction ». Puis il explique qu’on fait souvent à son client « le procès des mots » qu’il aurait écrits ou prononcés (« low performers », « déstabilisation positive », etc.). Lui y voit une démarche comparable à celle de la phrase attribuée, sans doute à tort, à Richelieu : « Qu’on me donne six lignes écrites de la main du plus honnête homme, j’y trouverai de quoi le faire pendre. » Le second avocat de Moulin revient également sur des mots, mais ce sont ceux qu’il a entendus ces dernières semaines dans le
prétoire, et on perd un peu le fil : les prévenus ne seraient pas « anormalement normaux », mais « normalement anormaux ». Soit. Toujours est-il qu’il considère que l’avocate générale n’a pas trouvé l’ombre d’un acte positif de complicité. Plus largement, il prête au ministère public la
réflexion suivante : « On a Moulin, eh ben on va faire avec Moulin. » Souligne au passage que très peu des homologues de ce dernier ont été entendus en procédure. Et que, lorsqu’il a par la suite été nommé DRH, si les organisations syndicales ont accepté de parler avec lui, c’est en substance qu’il ne devait pas avoir si mauvaise réputation.
Au terme de ces presque quarante demi-journées d’audience : derniers mots. Lombard a « deux petits points qui [lui] tiennent à cœur ». Le premier consiste à « vous redire toute l’émotion qui m’a étreint […] en écoutant les [paroles] de certaines parties civiles. […] J’en resterai, moi,
personnellement, marqué à vie ». Le second, à « tirer de ces discussions l’impression […] que certaines d’entre elles ont engagé un processus de reconstruction. […] Je pense que ce serait extrêmement bon pour la collectivité de France Télécom ». De son côté, Wenès ajoute que le procès a mis en lumière « beaucoup d’enjeux politiques, […] de civilisation [et] de pouvoir », et déplore : « Au bout de dix ans, je me fais encore traiter d’homme froid, calculateur, menteur, qui jette ses équipiers par-dessus bord. […] Ça me blesse dans mon identité, et je ne vois aucune preuve à l’appui de tels propos ». Conclusion de la présidente : « Il y aura forcément des mécontentements à la lecture de l’arrêt à venir. » Selon elle, quoi qu’il arrive, les prévenus auront été « sensibilisés aux risques psychosociaux ». Aux victimes, terme dont elle rappelle l’étymologie,
elle adresse finalement : « Je vous appelle à ne pas être vaincus, quel que soit l’arrêt rendu par la cour. »
Délibéré le 30 septembre 2022.

Pièces, films, livres, documentaires sur cette affaire

- Le livre, paru en 2005, La société malade de la gestion de Vincent de Gaulejac montre comment les individus sont enfermés dans un système "qui les conduit à une soumission librement consentie" et dénonce cette gestion qui rend malade parce qu'elle est porteuse de non-sens et d'insensé, qu'elle invite à faire toujours mieux et gagner toujours plus, qu'elle transforme chaque individu en capital humain.
- En 2007, bien avant que la presse ait commencé à se faire l'écho des suicides, une pièce de théâtre de la compagnie Naje, Les Impactés, met au jour le système France Télécom-Orange et la souffrance de ses salariés.
- En 2009, Serge Moati réalise un documentaire de commande sur la réussite de France Télécom. Ce film inédit, tourné au pic de la crise dans l'entreprise, est diffusé au procès, au grand dam des prévenus car les salariés s'expriment sans fard sur leurs conditions de travail.
- Le livre Orange stressé (2010) d'Ivan Du Roy décrit un management « sournois » et « vicieux » par le stress à France Télécom, laboratoire pour la gestion du personnel par la souffrance au travail.
- Le roman Les Visages écrasés (2011) de Martin Ledun, et la pièce de théâtre Un Incident de Vincent Farasse, traitent de cas fictifs proches.
- Le film Corporate (2017) de Nicolas Silhol a été imaginé à la suite de cette affaire.
- Le livre de Didier Bille DRH La machine à broyer.(2018) l'auteur, qui a officié ailleurs, décrit les techniques utilisées par les RH pour se débarrasser des salariés.
- Le roman de Sandra Lucbert Personne ne sort les fusils (2020) attaque la langue du capitalisme utilisée par les cadres de France Télécom.
- La raison des plus forts (2020) rassemble les chroniques du procès sous la plume de romanciers, chercheurs, artistes..
- Le documentaire Souffrance au travail : on lâche rien ! (2022) de Daniel Kupferstein montre comment une mobilisation sociale et solidaire permet aux victimes ou à leurs familles de faire reconnaître les souffrances au travail en accident du travail ou en maladie professionnelle et le cas échéant faire condamner au pénal ces employeurs responsables.
- La pièce de théâtre Babylone (2022) de Maurici Macian-Colet, mise en scène par Max Millet, s'inspire de l'affaire France Télécom pour parler d'une campagne de harcèlement moral à grande échelle du point de vue d'un manager.
- Le documentaire Par la fenêtre ou par la porte (2023) de Jean-
Pierre Bloc fait le récit de l'affaire, recueillant les témoignages des acteurs de la lutte, syndicalistes, avocats, ou encore médecins du travail.
- A consulter, le site https://proceslombard.fr/

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De France Télécom à Orange

Après la réforme de 1990, sont présidents du groupe :
Avant septembre 1995 : Marcel Roulet, président d'honneur de France Télécom.
De septembre 1995 au 12 septembre 2002 : Michel Bon.
Du 12 septembre 2002 au 27 février 2005 : Thierry Breton, président d'honneur de France Télécom.
Du 27 février 2005 au 1er mars 2010 : Didier Lombard.
Du 1er mars 2010 au 1er mars 2011 : Stéphane Richard : Didier Lombard est président non exécutif, et Stéphane Richard directeur général.
Du 1er mars 2011 au 4 avril 2022 : Stéphane Richard, qui, après avoir quitté son poste de directeur général début 2022 se verra remplacer par Christel Heydemann à la tête du Groupe Orange.

En août 2000, France Télécom rachète Orange plc à Vodafone et adopte un nouveau logo dans lequel l'orange est la couleur dominante.
Le 21 juin 2001, Itinéris, Ola et Mobicarte, les activités de téléphonie mobile de France Télécom, sont regroupées sous la marque Orange.

En septembre 2004, l'État français cède une partie de ses actions pour passer en dessous de la barre des 50 %
France Télécom devient alors une entreprise privée. Cent-quinze ans après sa nationalisation, le téléphone redevient privé en France.

Le 1er juin 2006, Wanadoo et Ma Ligne TV deviennent Orange. Equant devient Orange Business Services. Le logo de France Télécom est modifié.
En janvier 2007, France Télécom R&D devient Orange Labs et la Fondation France Télécom devient la Fondation Orange.
À partir de 2011, France Télécom communique en tant que Groupe France Télécom - Orange et les agences France Télécom deviennent des boutiques Orange.
Le 9 février 2012, les services de téléphonie fixe de France Télécom sont commercialisés sous la marque Orange.

En 2013, France Telecom était la 121e entreprise mondiale, elle employait près de 172 000 personnes dont 105 000 en France, et servait près de 226 millions de clients dans le monde.
Finalement le changement de nom est voté au cours d'une assemblée générale le 28 mai 2013.
Le changement de nom est effectif au 1er juillet 2013, France Télécom devient alors définitivement Orange.
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