CANADA,
AMÉRIQUE DU NORD
Le Québec :
« La Nouvelle-France » désignait lensemble
des territoires de lAmérique du Nord sous administration
française, avant 1773. Dans sa plus grande dimension, avant le
Traité dUtrech de 1713, la Nouvelle-France comprenait cinq
colonies : le Canada, lAcadie, la Baie dHudson, Terre-Neuve,
la Louisiane... Le premier explorateur Giovanni VERRAZZANO, mandaté
par le roi de France François Ier, décrivit la côte
allant de la Floride jusquà Terre-Neuve et donna le nom «
Nova Franca » en 1524
Dix ans plus tard, le malouin Jacques CARTIER découvrit le golfe
du Saint-Laurent, et remonta le cours du fleuve. Le Canada, à son
tour, était ainsi nommé et Jacques CARTIER en prend possession
au nom du roi François Ier
»
Lexploration est reprise sous les règnes dHenri
IV et de Louis XIII par un hardi aventurier, Samuel de CHAMPLAIN, qui
fonde la ville de Québec
» À partir de
1534, les Français explorent le canal du Saint-Laurent. La Nouvelle-France
est fondée.
En Amérique, la Nouvelle-France s'accroît de façon
spectaculaire et comprend presque la moitié de l'Amérique
du Nord. Elle forme quatre colonies dont l'Acadie, le Canada, Terre-Neuve
et la Louisiane
En 1627, la Nouvelle-France est concédée par RICHELIEU à
la Compagnie des Cents-Associés, mais en 1663 Louis XIV dissout
la compagnie et réorganise la colonie sur le modèle dune
province
Au cours du XVIIIe siècle la rivalité franco-anglaise
débouche sur la guerre des Sept Ans (1756-1763)
Le marquis
de MONTCALM prend le commandement des troupes françaises
Le
13 septembre 1759, MONTCALM est mortellement blessé dans la défense
de la ville de Québec
Cédée à lAngleterre
par le traité de Paris, la Nouvelle-France est rebaptisée
« Province of Quebec »
LAcadie :
« Dans les colonies nouvelles, les Espagnols commencent par bâtir
une église, les Anglais une taverne et les Français un fort
» (Chateaubriand : Itinéraire de Paris à Jérusalem)
Le 24 juin 1497, Jean CABOT découvre Terre-Neuve.
Le tout premier établissement français en Acadie fut installé
en 1604, sur lîle Sainte Croix, par Pierre Du GUA. Ensuite
il fonde la ville de Port-Royal.
Après le traité d'Utrecht en 1713, la colonie
perd l'Acadie (partie sud), la Baie-d'Hudson et Terre-Neuve (Plaisance).
Cependant, elle forme deux nouvelles colonies : l'isle Royale et isle
Saint-Jean.
Après la chute de Québec, et la main mise des Anglais sur
ces territoires, en 1755, une politique de déportation des acadiens
français est instauré :
Le Grand Dérangement. Sur une population acadienne dorigine
française de 13000 âmes, 7000 sont déportées,
renvoyées en France, puis ensuite vers la Louisiane, où
en 1773 est fondé Saint Martin Ville
Tout s'écroule avec le traité de Paris en
1763, après la guerre de Sept Ans, où elle perd le Canada,
l'Acadie, isle Royale, isle Saint-Jean, et la partie est du Mississippi,
qui faisait partie de la Louisiane, et la partie ouest qui revient à
l'Espagne, pour sa perte de la Floride aux dépens des Anglais.
La France reprit la Louisiane occidentale à condition de ne pas
la vendre ni à l'Angleterre ni aux Américains, ce que Napoléon
fit trente ans plus tard, sans l'appui ou l'approbation de l'Assemblée
Nationale en 1803. L'Amérique du Nord devient alors en majorité
anglophone.
sommaire
Les réseaux de communication
avant le téléphone
Lintérêt
daborder les précédents et de traiter
de la coexistence des réseaux de communication urbaine
relève de deux arguments.
Tout dabord, les technologies, comme le démontre
leur histoire sociale, sinsèrent dans un milieu
déjà marqué par des pratiques établies.
Avant lintroduction du téléphone, certaines
habitudes de communication interpersonnelle et de transmission
des messages vont, sur un plan qualitatif, marquer
et nécessairement influencer lintroduction
et la portée de la nouvelle technologie.
Ensuite, létude des rapports entre les formes
de communication permet détablir des liens sur
le plan institutionnel entre le service télégraphique
et le service téléphonique. Les entreprises
télégraphiques sont en effet les premières
à fournir le service téléphonique. Elles
en font aussi la promotion en proposant gratuitement ce nouveau
service à quelques-uns de leurs abonnés.
Quelle est la nature des communications urbaines
avant la fin des années 1870 ?
Est-ce que celles-ci limitent les possibilités déchanges
sociaux et de circulation des messages ?
Qui sont les principaux instigateurs des innovations ?
Seront considérées ici exclusivement les pratiques
de communication qui font appel à un intermédiaire,
cest-à-dire celles qui utilisent un médiateur
pour transmettre les messages (la lettre, dans le cas du service
postal ; le messager, dans le cas du service de courrier ;
le télégramme et le messager, dans le cas du
service télégraphique).
Les services postaux et les services de messagerie.
Dentrée de jeu, cest
dans un contexte colonial quil faut situer le développement
des premiers réseaux postaux.
Structuré dans un premier temps par les dirigeants
du régime français, le système postal
couvre, sous le régime britannique, une bonne partie
du territoire du Bas-Canada.
Dès la fin du XVIIIe siècle, il relie déjà
les villes principales (Montréal, Québec, Trois-Rivières).
Les échanges entre ces villes et la métropole
anglaise sont prédominants ; ce qui explique la mise
en place dun réseau postal relativement efficace
entre Montréal et Londres. De plus, à la même
époque, on instaure un service mensuel de distribution
entre Montréal et New York. En fait, cette dernière
ville constitue le cur de tout le réseau du continent
nord-américain. En étant directement connecté
à celui de New York, le service montréalais
de distribution du courrier se trouve donc incorporé
dans un ensemble territorial étendu. Dailleurs,
au début du XXe siècle, cette convergence du
réseau postal canadien vers Montréal fait la
fierté des gens daffaires. Selon eux, limportance
et le développement dune grande ville peuvent
se mesurer au nombre des affaires taitées par la poste
: « Or Montréal sur ce point est la ville qui
fait le plus daffaires par la poste. »
Lhistoire du service postal est liée
de près à celle des réseaux de transport
et, par extension, à la croissance des responsabilités
étatiques.
Au XIXe siècle, lÉtat est devenu un élément
indispensable dans la transmission des informations et dans
la mobilité des personnes. Ses interventions dans le
domaine des communications et des transports obéissent
néanmoins à des règles particulières
qui correspondent à certains principes mis de lavant
par le libéralisme économique, notamment le
principe de la libre concurrence et celui du respect des initiatives
individuelles. Cest pourquoi on retrouve, concurremment
au réseau public, des réseaux privés
de transmission des messages. Ainsi, au fur et à mesure
que les instances fédérale et provinciale obtiennent
de nouveaux pouvoirs, leur capacité dintervention
saccroît-elle. Il en va de même pour leurs
obligations relatives aux services publics qui se posent en
termes de qualité et daccessibilité. En
outre, le modèle du libéralisme économique
prédominant incite le secteur privé à
construire et à exploiter, en marge des instances publiques,
des réseaux de transport et de communication.
Les améliorations notables dans
les transports apparaissent surtout après les années
1850.
On crée alors des lignes de chemin de fer qui traversent
le pays et le continent. Ainsi, le réseau ferroviaire
résout-il en partie les difficultés de distribution
des envois postaux. Bien que plusieurs routes et lignes maritimes
et ferroviaires convergent vers Montréal, le service
postal demeure irrégulier et, par conséquent,
peu fiable. Les longs délais dans la livraison du courrier
constituent le principal problème de ce service.
Le caractère incohérent
du service postal apparaît aussi dans les communications
locales.
Avant les années 1870, les possibilités de communications
interpersonnelles, hormis les contacts face à face,
sont très limitées sur le territoire montréalais.
Le premier bureau de poste est ouvert en 1840 dans le quartier
des affaires. En 1860, le gouvernement canadien complète
le réseau postal en installant des boîtes aux
lettres dans les rues5. Quoiquil introduise une nouvelle
forme déchange, le courrier postal local nacquiert
pas le statut doutil de communication de masse. Il demeure
un service peu utilisé par la population. Ses principaux
clients proviennent du milieu des affaires qui y ont recours
pour compléter leurs transactions courantes : envoi
de bordereaux de commande, de factures, correspondance daffaires
générale, etc. La distribution de journaux et
de circulaires constitue aussi un usage qui accapare une bonne
partie du réseau postal.
Les principales qualités dun
service de courrier postal recherchées par les gens
daffaires sont la promptitude et la fiabilité.
La possibilité de joindre un grand nombre de personnes
dans une zone très étendue représente
également un atout incontestable : chaque adresse bénéficie
de la livraison du courrier. Par contre, selon certains témoignages,
le système postal local ne remplit manifestement pas
les conditions defficacité et de rapidité.
Cette incapacité est encore plus apparente dans les
années 1920 alors que le nombre de lettres et de colis
expédiés quotidiennement à Montréal
se situe dans les centaines de milliers. Les doléances
provenant du milieu des affaires persistent : on réclame,
entre autres, la « construction dédifices
postaux à proximité des gares pour permettre
un service plus adéquat et rapide».
Il demeure difficile dévaluer
la qualité et lefficacité du service postal
avant 1900. Mais les quelques plaintes formulées par
certains groupes, notamment celles provenant des membres de
la Chambre de commerce, précisent le nombre insuffisant
de boîtes aux lettres, « du moins dans certains
quartiers de la ville».
Pour répondre aux besoins croissants,
on inaugure en 1876 un nouvel hôtel des postes à
langle des rues Saint-François-Xavier et Saint-Jacques,
en plein cur du quartier des affaires. Après
1900, on améliore nettement la desserte du service.
On ajoute au bureau central des succursales et des comptoirs
postaux. En 1900, on compte 20 bureaux de poste de quartier.
En 1914, 9 succursales et 80 comptoirs postaux desservent
le territoire de lagglomération montréalaise.
Le nombre de boîtes aux lettres fait aussi lobjet
dune hausse importante durant cette période :
de 1900 à 1914, il passe de 180 à 568. Quant
aux tarifs exigés, laccroissement du service
permet de les diminuer considérablement.
Les améliorations continuelles
de ce service public réduisent, sans doute, les principales
insatisfactions du milieu des affaires. Pourtant, un service
privé parallèle est mis en place et offre à
lensemble de la communauté la possibilité
déchanger sa correspondance sans devoir subir
la lourdeur du service postal central.
Des propriétaires de chevaux
et de diligences mettent ainsi sur pied un service de courrier
privé. Cette pratique, que les autorités publiques
tentent dendiguer avec peu de succès, sétait
dabord développée à Londres. Vu
la popularité de lexpérience londonienne,
le service privé de messagerie se propage rapidement
dans la plupart des grandes villes nord-américaines.
Pour obtenir une livraison plus rapide, les citadins nhésitent
pas à recourir au service offert par les compagnies
de messageries (express service).
À Montréal, au début
du XXe siècle, ce service est offert depuis plusieurs
décennies et constitue alors un véritable système
commercial : lindustrie des messageries. Les principales
compagnies qui offrent un tel service disposent dun
grand nombre de véhicules et de chevaux. Plusieurs
centaines de charretiers recueillent sur une base quotidienne
les lettres et les colis chez autant de distributeurs situés
en de nombreux points dans la ville. Dans les gares ferroviaires,
ces compagnies comptent des centaines demployés
chargés du tri, de la distribution et de lexpédition
du courrier. Le service fourni par ces « commissaires
particuliers » semble correspondre davantage aux attentes
de la clientèle daffaires montréalaise.
Dans la ville, le travail de messager
occupe des centaines de jeunes gens. Même après
lintroduction du télégraphe et du téléphone,
la tâche de messager conservera son importance et son
attrait. Ces messagers au service des entreprises de courrier
encombrent les rues de la ville. Leur affluence dans les artères
principales risquerait même, aux yeux de certains, de
congestionner le centre des affaires. À lère
des gratte-ciel, leur présence pourrait aller jusquà
paralyser complètement la circulation à lintérieur
des bâtiments « centralisateurs ». Cest
du moins lun des arguments avancés par les promoteurs
du téléphone au début du XXe siècle.
La livraison des messages par les courriers privés
rendrait les grands bâtiments non viables sur le plan
économique : la superficie de plancher réservée
à leurs déplacements serait disproportionnée
par rapport aux besoins spatiaux des autres activités.
Solution à ces problèmes, le service de téléphone
aurait même conduit à la construction des gratte-ciel
jamais vérifiée empiriquement, cette
hypothèse est cependant utilisée de manière
récurrente pour justifier les avantages du téléphone.
En fait, on constate que léchange
du courrier saccroît au fil des ans et cela malgré
lintroduction de nouveaux outils de communication qui
pourraient le rendre inutile. Ainsi est-on confronté
à une situation de multiplication des moyens de communication
et de transport. Complémentaires, ces divers réseaux
de distribution de linformation participent tous du
même mouvement général : lintensification,
dune part, de la mobilité et des échanges
dans la ville et, dautre part, des contacts sociaux
qui résultent de ces mouvements circulatoires.
Le réseau télégraphique
Par rapport au service postal, le
réseau télégraphique accélère
nettement les échanges.
Dans la situation où les deux interlocuteurs possèdent
un appareil, le délai démission est presque
aboli. Toutefois, et cest un cas fréquent, lorsquun
seul des interlocuteurs dispose dun poste émetteur,
la transmission des messages exige toujours la présence
dun messager, porteur de télégramme. La
séparation entre le transport et la communication nest
pas entière et le messager demeure indispensable. De
plus, à linstar du réseau postal, le télégraphe
est dabord conçu en fonction des besoins marchands
et pour faciliter le contrôle de lÉtat.
La finalité première de ce service nest
donc pas daméliorer les communications interpersonnelles.
Dès son origine, le service télégraphique
fait lobjet dun intérêt soutenu des
milieux financiers montréalais. Lapanage de cette
technologie par ce groupe dacteurs sexplique avant
tout par sa nature commerciale. Par conséquent, le
principe qui préside à linstallation des
équipements télégraphiques se définit
en termes économiques. Montréal doit être
en bonne position par rapport aux grandes capitales financières.
Il faut le connecter notamment à Londres et à
New York qui sont, dans la seconde moitié du XIXe siècle,
les principaux centres dattraction pour le trafic télégraphique.
Les financiers montréalais sont ainsi mis en contact
avec ces marchés et peuvent rapidement prendre connaissance
des transactions commerciales.
À partir du moment où
les communications télégraphiques sont possibles
sur de grandes distances, on propose détendre
le réseau à léchelle continentale.
À cet égard, dans les années 1840, les
membres du conseil du Board of Trade examinent la possibilité
détablir une liaison télégraphique
raccordant Montréal à Québec, Toronto
et New York. Ce projet collectif vise à renforcer la
position de Montréal au sein de léconomie
canadienne et nord-américaine. Dans un premier temps,
le réseau télégraphique est pris en main
par des gens daffaires montréalais. Mais certains
investisseurs et gestionnaires reliés à lindustrie
télégraphique montréalaise viennent aussi
dailleurs. Cest le cas notamment du premier directeur
de la compagnie Montreal Telegraph invité par les membres
du Board of Trade : Orrin S. Wood. Celui-ci est un beau-frère
dEzra Cornell, homme daffaires très actif
aux États-Unis dans le secteur des communications télégraphiques.
Wood vient à Montréal en 1847 pour diriger la
construction du premier réseau et assumer ladministration
de Montreal Telegraph. Les autres acteurs locaux qui prennent
part à ce projet sont les initiateurs des réseaux
de transport ferroviaire et maritime, notamment James Dakers,
H. P. Dwight et Hugh Allan. On le voit bien, la propension
à investir dans les communications et les transports
relève de la volonté dun groupe restreint
dacteurs économiques de maîtriser les marchés
montréalais et canadiens.
Mis en place pour relier les grandes
villes, le réseau télégraphique qui dessert
Montréal entretient très tôt des rapports
institutionnels et économiques avec celui du nord-est
des États-Unis. En 1847, un premier câble télégraphique,
qui raccorde Montréal et Québec, est installé
par Montreal Telegraph. Dans les années 1840 et 1850,
dautres compagnies sont formées et offrent des
liens télégraphiques vers le sud des États-Unis,
Toronto et lest du Québec. De courte durée,
leurs activités commerciales sont reprises par Montreal
Telegraph. Tant et si bien que la compagnie, qui exploite
plusieurs lignes dans les années 1850, est parvenue
à construire un système à léchelle
canadienne.
En plus dêtre connectées
au réseau télégraphique étatsunien,
les villes canadiennes sont graduellement reliées aux
métropoles européennes. Un câble sous-marin,
installé en 1866, permet dentretenir des contacts
rapides avec les grandes villes britanniques. Les instigateurs
de la consolidation du réseau télégraphique
recherchent en priorité un moyen de communication comportant
une dimension stratégique, soit la surveillance des
événements qui se déroulent sur les territoires
britanniques. Cette détermination se reflète
dans la structuration même du réseau.
Les autres grands utilisateurs du télégraphe
électrique sont les journaux et les entreprises ferroviaires.
Une étude de géographie historique a démontré
que les dépêches viennent surtout de Londres,
qui assume la direction de la colonie, et de Liverpool : deux
villes britanniques dont la classe politique et la classe
daffaires sont directement concernées par lutilisation
dun instrument de contrôle fiable.
Quelques années plus tard, le
service télégraphique devient également
utile à la circulation de linformation à
lintérieur de la ville. Parallèlement
aux échanges commerciaux et journalistiques interurbains,
des pratiques de communications locales sont introduites de
manière graduelle.
Le télégraphe dalarme municipal
Ladoption du réseau
téléphonique sinscrit dans un cadre urbanistique
marqué par la présence de divers instruments
de communication. Certains recourent à lélectricité,
dautres exigent des déplacements physiques. Quoique
innovateur, dans un premier temps, le téléphone
est considéré comme le prolongement dun
service existant : le service télégraphique
qui remplit, à lintérieur de lespace
urbain, de nombreuses fonctions.
Sa première fonction vise à
combler des besoins de plus en plus pressants de sûreté
publique. Avec limplantation des réseaux de communication
urbaine, les services de sûreté publique sont
en mesure de faire appel à de nouveaux outils de contrôle
dès la seconde moitié du XIXe siècle.
À linstar des grandes villes
nord-américaines, les autorités montréalaises
adoptent le service télégraphique pour permettre
aux citadins dalerter rapidement les postes de pompiers.
Suivant lexemple des villes comme Boston, New York,
Philadelphie, Saint-Louis et Baltimore, qui sont équipées
dun tel système, la Ville de Montréal
fait appel à des spécialistes étatsuniens.
Elle confie ainsi la conception de son système télégraphique
dalarme (Montreal fire alarm telegraph) à la
firme J. F. Kennard & Co. de Boston. Inauguré en
1863, ce service permet dutiliser des postes-avertisseurs
(fire call boxes) connectés aux casernes de pompiers.
Au fil des ans, les nombreux appareils
automatiques servant à envoyer des signaux dalarme
sont installés dans les lieux publics et privés
: sur les trottoirs, dans les gares, les hôpitaux, les
manufactures, etc. Leur nombre est particulièrement
élevé dans le centre des affaires et près
des districts manufacturiers, là où le risque
des conflagrations est plus grand. De manière générale,
ces systèmes permettent un meilleur accès à
différents services de sûreté publique
qui deviennent ainsi indispensables.
Quelques années plus tard, on
relie également le service de police au réseau
télégraphique municipal. Par contre, compte
tenu de la nature différente du service de police
complexité de linformation échangée
et plus grande mobilité des agents , ladoption
du système télégraphique y est plus lente.
De ce point de vue, lintroduction du téléphone
répond à limpératif de la communication
bidirectionnelle. De fait, la combinaison des technologies
télégraphique et téléphonique,
qui permettent démettre rapidement des signaux
tout en offrant un échange dinformations détaillées,
est plus adaptée aux exigences du service de police.
Ce nouveau réseau de communication
interne nest pas sans conséquences pour ladministration
municipale. En assurant avec une attention accrue la protection
de ses citoyens, elle se trouve investie de nouvelles fonctions
sociales. Dès lors, elle doit revoir ses pratiques
de fourniture des services urbains. Le système technique
nest donc pas isolé du contexte sociopolitique
de sa mise en uvre : en matière de lutte contre
les incendies et la criminalité, il entraîne
aussi des effets sur la configuration des composantes administratives
municipales.
Dans ce contexte dévolution
des communications intra-urbaines, des entreprises privées
considèrent en élargir loffre et lusage
afin den faire, à terme, les supports dune
nouvelle gamme de services. Cest le cas notamment du
service dappel télégraphique.
Le service d'appel télégraphique
Le service dappel télégraphique
est, sous certains aspects, analogue au téléphone.
Il est assumé à Montréal par lentreprise
Canadian District Telegraph, mise sur pied dans les années
1870. Inauguré la première fois à New
York en 1872, ce service répond à une demande
urbaine précise : obtenir les services de messagers.
À linstar du téléphone, il nécessite
chez labonné, comme seule installation, un appareil
muni dune manivelle (un poste dappel) relié
par un câble au central télégraphique.
À Montréal, les principaux bureaux de la compagnie
sont situés au cur du centre des affaires, mais
le service dappel est également offert dans les
quartiers périphériques (ouest, est et uptown)
où lon retrouve des comptoirs ouverts jour et
nuit.
Après avoir fixé la manivelle
vis-à-vis du nom du service demandé, labonné
appuie sur un bouton qui transmet un signal au central avec
lequel sa demeure est connectée. Le central télégraphique
transmet ensuite la commande. Outre la pratique courante de
faire venir un messager, la réservation de voitures
taxis ou encore le recours au service de police ou à
la brigade dincendie sont des usages très appréciés
par les abonnés. Chaque abonné étant
relié au réseau municipal dalarme par
le biais dun central, on peut définir ce réseau
intra-urbain de communication comme un service auxiliaire
au système dalarme municipal.
La rapidité avec laquelle le
service permet détablir une communication bidirectionnelle
constitue un net avantage par rapport aux messagers traditionnels.
De plus, certains commerçants et professionnels, notamment
des médecins, sont directement reliés au réseau.
Lorsque les clients leur transmettent un signal, un messager
de la compagnie de télégraphe effectue la liaison.
On le voit, ce service nest pas tout à fait aussi
rapide que le sera plus tard le téléphone. Lintroduction
de ce dernier à la fin des années 1870 va dailleurs
concurrencer, voire supplanter, le réseau dappel
télégraphique.
Malgré son caractère quelque
peu incommode, ce système fait lobjet, selon
toute vraisemblance, dune certaine popularité
dans les grandes villes nord-américaines. À
Montréal, plusieurs centaines de maisons et places
daffaires ainsi que la plupart des bâtiments publics
et des églises sont reliés au réseau
local. En outre, les individus ont la possibilité dutiliser
le service à partir des nombreux postes publics installés
dans la ville.
Lentreprise Canadian District
Telegraph propose aussi à ses abonnés un service
de messagerie similaire à celui offert par les bureaux
de poste : envoi de lettres, de colis ou de télégrammes.
Dautres tâches peuvent également être
effectuées par les messagers à pied : accompagnement,
achats, courses, surveillance des chevaux, etc. Autrement
dit, les messagers sont mandataires de fonctions qui débordent
souvent celles prescrites par leur employeur.
De toutes les technologies de communication
à distance, celle du service dappel télégraphique
demeure la plus comparable au téléphone. Dailleurs,
à Montréal, cest la compagnie Canadian
District Telegraph qui exploite le premier réseau téléphonique
installé en 1879. Ses dirigeants prennent alors linitiative
doffrir le nouveau service aux abonnés déjà
munis dun poste dappel pour lutilisation
du télégraphe.
Le marché du
téléphone se structure peu à peu autour
des services offerts par le réseau télégraphique.
À cet égard, le service de messagerie demeure
populaire auprès des citadins qui nont pas directement
accès au téléphone. Par exemple, en 1880,
pour un tarif comparable à ce quil en coûte
pour expédier un télégramme (entre 10
? et 25 ? selon la distance de la course), la Compagnie de
Téléphone Bell met à la disposition des
habitants des quartiers centraux montréalais un service
de messagerie. La tarification est basée sur trois
éléments : la distance parcourue, le temps employé
et la possibilité de réexpédier immédiatement
un message. Les clients peuvent aussi retenir le service dun
messager pour plusieurs heures.
En tant que moyen de communication intra-urbaine,
la technologie du télégraphe est demeurée
transitoire. Le passage dune technologie à une
autre ne se fait pas soudainement. Bien quil soit un
moyen rapide de transmission des messages sur des longues
distances, le service télégraphique reste une
technologie spécialisée et, somme toute, peu
répandue dans la société. Par exemple,
des restrictions limitent sa diffusion à des fins de
communication interpersonnelle : dans le cas du télégraphe
électrique utilisant le morse, des connaissances techniques
sont indispensables, dont la maîtrise de ce code.
Aussi, le télégraphe ne rejoint-il
pas, sinon très peu, lunivers de la vie privée.
De plus, compte tenu du nombre dactions comprises dans
le processus dappel télégraphique, les
délais de transmission demeurent importants. Dans certains
cas, un messager à pied est plus rapide quun
télégramme. Les actions multiples rattachées
à lenvoi, au décodage, à la réception
et parfois à la livraison des messages exigent des
infrastructures complexes et des coûts dexploitation
relativement élevés.
Par contre, dans dautres cas,
les avantages sont évidents. Par exemple, le caractère
confidentiel des messages est mieux protégé
car seuls quelques individus ont les connaissances pour les
décoder. La présence dinformations écrites
représente aussi un élément apprécié
par les principaux usagers du réseau télégraphique.
Les Montréalais ont accès
à un service de communication à distance dont
les usages demeurent spécifiques, voire exclusifs.
Le télégraphe dalarme constitue tout de
même un service public apprécié. Indirectement,
les citadins bénéficient aussi de lemploi
du télégraphe par les agences de presse. En
effet, les dépêches expédiées promptement
alimentent, sur des bases quotidienne et hebdomadaire, les
journaux qui sont alors les principaux moyens de communication
de masse.
Malgré leur diffusion restreinte
à lintérieur de quelques groupes socio-économiques
(les financiers, les dirigeants politiques, ladministration
municipale, les agences de presse, etc.), les premiers outils
de communication à distance constituent une source
dinformation sur un certain nombre déléments
déterminants dans le développement ultérieur
du réseau téléphonique. Lintroduction
de ces outils modifie le climat et la vision de lordre
public. Progressivement investies de tâches administratives,
les autorités locales élargissent leurs fonctions,
notamment dans le domaine de la sûreté publique.
Derrière ce mouvement se profile un intérêt
clair pour projeter limage dun corps municipal
en voie de modernisation et soucieux de la sûreté
de la population. Lidée dattirer et de
protéger les investissements est aussi sous-jacente
au rôle accru que joue lappareil administratif
municipal dans la gestion des services urbains.
Cest dans un contexte de métropolisation
quil faut tenter de comprendre la portée aménagiste
des réseaux techniques urbains, dont celui du téléphone.
Les promoteurs privés et publics cherchent alors à
mettre en place un aménagement apte à répondre
aux nouvelles exigences de la production et de la consommation
de masse. On prend aussi en compte la mobilité accrue
des personnes et la diversification des goûts en termes
de milieux de vie. Il sagit en fait dune importante
phase de modernisation à lintérieur de
laquelle priment de manière successive les impératifs
suivants : dabord, la salubrité publique entre
les années 1850 et les années 1900, quoique
les exigences de la salubrité demeurent encore dactualité
pendant plusieurs années ; ensuite, lembellissement
urbain qui est particulièrement populaire au tournant
du XXe siècle, et ce, jusquà la veille
de la Première Guerre mondiale ; enfin, lefficacité
économique qui vient remplacer les préoccupations
esthétiques.
Associées à lidée
de métropole, les images de la ville contribuent à
encourager les demandes pour des instruments de communication
à distance qui, dans certains cas, vont au-delà
de la simple utilité. Par contre, en dépit des
préférences manifestes pour des réseaux
rapides et efficaces de communication, il apparaît que
la pertinence du téléphone pour répondre
aux besoins de communication de lagglomération
montréalaise soit indéterminée. Lattitude
des planificateurs publics à lendroit du service
demeure difficile à cerner, dautant plus, comme
on le verra, quils disposent de peu de moyens concrets
pour diriger les activités des opérateurs privés.
Cela vient de ce quils narrivent pas à
maîtriser les capacités structurantes des réseaux
techniques urbains. Les formes nouvelles de la ville réticulée
échappent en grande partie aux acteurs publics concernés
par laménagement urbain.
|
sommaire
L'histoire du téléphone débute
lété 1869, ou le révérend
Thomas Henderson, de Paris, en Ontario. encouragea Alexander
Melville Bell, à émigrer au Canada. Melville
Bell est le père d'Alexander Graham Bell l'inventeur du téléphone.
Melvile Bell père, Alexander
Graham Bell fils et Brantford la maison familliale
Alexander Melville Bell, né le 1er mars 1819 à
Édimbourg et mort le 7 août 1905 à Washington,
D.C. est un universitaire et chercheur dans le domaine de la phonétique
acoustique. De nationalité britannique expatrié aux
États-Unis, il est l'auteur de nombreux ouvrages sur l'orthoépie
et l'élocution. Il est l'inventeur du livre Visible
Speech, une méthode créée afin d'enseigner
la parole aux sourds.
La famille Bell sétablit donc
au Canada en 1870, 94 Tutela Heights Road, Brantford
Ontario C'est ici, en juillet 1874, dans la maison de ses parents,
qu'Alexander Graham Bell conçut l'idée du téléphone,
sommaire
Agraham.Bell, le fils s'établit aux
États-Unis dAmérique un an plus tard,
ou il fonde en 1872 une école pour les malentendants
et débute ses travaux qui aboutiront au téléphone
comme on peut le lire dans la page Bell
rappel :
Aux USA, le Premier juillet 1875,
les essais de téléphone reprennent avec de nouveaux
appareils, le transmetteur équipé d'une menbrane
plus épaisse et d'une armature plus légère,
est installé au premier étage et est relié
au recepteur(gallow) posé au rez de chaussé.
Bell parle et chante au plus prêt de la membrane du transmetteur,
lorsqu'il fut interrompu par Watson tout exité "Monsieur
je vous ai entendu, faiblement, mais je vous ai entendu"
et Watson de répéter les mots qu'il a distingués.
Les deux hommes intervertissent les rôles , Bell colle son
oreille au récépteur, mais les résultats sont
décevants, Bell ne parvient pas à comprendre les mots
prononcés par Watson.
Puis Bell poursuivit ses travaux à
Brantford Canada en septembre 1875 .
À la suggestion du médecin de ses parents, il plaça
un mince disque de fer sur la membrane de parchemin et constata
que le son était devenu plus audible.
De retour à Boston plus tard ce mois-là, il commença
à préparer le mémoire descriptif de son invention
tandis que Watson perfectionnait lappareil. Bell avait
déjà vendu les droits pour les États-Unis à
Hubbard et les deux hommes souhaitaient ardemment vendre les
droits pour létranger. Étant donné que
lobtention dun brevet en Grande-Bretagne était
essentielle et que ce brevet ne pouvait leur être accordé
si une autre demande était en instance dacceptation
aux États-Unis, ils attendirent pour faire breveter leur
invention aux États-Unis.
Au début doctobre 1875 , Bell retourna à
Brantford dans lintention doffrir les droits
à sir Hugh Allan , puissant financier et président
de la Compagnie du télégraphe de Montréal.
Mais le voisin de ses parents et propriétaire du Globe de
Toronto, George Brown ministre des États du Canada,
à qui il avait demandé de le recommander à
Allan, lui offrit dacheter lui-même les droits. Il promit
également de déposer la demande de brevet en Grande-Bretagne
pendant son voyage à Londres, en février.
Bell remit à Brown le mémoire descriptif de son
invention à New York.
Brown et un associé sassurèrent quil ny
avait pas contrefaçon et déposèrent la demande
de Bell.
Brown, cependant, ne comprenait pas toute la portée des travaux
de Bell et semblait douter du caractère pratique de linvention.
Sans lavertir, il décida « de ne pas donner suite
à laffaire ».
Le 29 décembre 1875 Bell apprenant que Mr Brown n'est
pas encore parti, lui fit une seconde visite à Toronto et
lui remit les dessins de son appareil, avec un mémoire
à l'appui de sa demande de brevet.
Peu après Noël, les deux hommes conclurent une
entente à Toronto et, le 25 janvier 1876, soit
la veille du départ, Brown, rencontre Bell et Hubbard
à New York pour une dernière mise au point embarque
pour l'Europe le lendemain.
Arrivé à Londres Mr Brown, soumet à des électriciens
le mémoire et les dessins de Bell, mais ces savants ne trouvèrent
pas que l'invention fût sérieuse, de sorte que M Brown
hésitait à faire la demande du brevet.
Bell écrivait lettres sur lettres à son compatriote,
pour le presser d'exécuter sa promesse. Survint un évenement
tragique, Bell reçut une dépêche télégraphique,
lui annonçant que le ministre du Canada M Brown, avait
été assassiné dans une rue de Londres.
Il est pourtant évident qu'en 19 jours Brown n'a pas pu faire
la traversée de l'atlantique et de se rendre à Londres
et de contacter un expert conformément à la loi anglaise
sur les brevets.
A cette nouvelle, M. Grabam Bell, renonçant
à prendre pour le moment son brevet en Europe, s'occupa de
le prendre, sans autre relard, en Amérique.
....
Le 7 mars 1876 , Bell devint
titulaire du brevet sur le téléphone aux USA.
sommaire
Entre temps Bell de retour à
Brandford au Canada passe l'été 1876
chez son père, et imagine qu'il serait mieux de faire une
communication un peu plus longue que entre deux pièces, et
comme réaliser soit même une ligne pour une expérience
serait trop couteuse, il en profite pofite pour écrire à
Toronto au directeur de Dominion Telegraph
Thomas Swinyard, pour louer penant une heure la ligne télégraphique
entre Brandford et Paris dans Ontario sur sur des lignes télégraphiques
de 8 km et 68 km de long.
La permission d'utiliser cette ligne télégraphique
a été accordée par Lewis B. McFarlane,
un responsable télégraphique, qui adoptera une activité
téléphonique en 1879, il deviendra président
de la Compagnie de téléphone Bell du Canada de 1915
à 1925.
Swinyard s'exclama " encore une tête brulée
", et ajouta à l'intention du du directeur de bureau
de Toronto Lewis McFarlane : "à classer au paniers"
. McFarlane finit par convaicre Swinyard et apporta le concours
de Dominion Telegraph pour l'expérience.
Bell se servit donc dune ligne de la Compagnie de télégraphe,
quil brancha à la maison de son père avec du
fil métallique servant à consolider les tuyaux de
poêle.
le 3 août 1876 , le premier
appel interurbain au monde, depuis le magasin général
de Wallace Ellis à Mount Pleasant jusquà Tutelo
Heights, à quatre milles de là. Trois autres essais
sont faits de Brandford et Mount Pleasant à 5 km,
on récite des tirades, on chante .... tout marche.
Premiers modèles de fabirication Bell
Bell utilisait les fils télégraphiques
de la Dominion Telegraph
Company entre son bureau de Brantford et le bureau à
Paris.
Comme la puissance de la batterie disponible à Brantford
était trop faible pour les téléphones à
membrane de Bell, la Dominion Telegraph Company lui fourni l'énergie
à partir de Hamilton et de Toronto, en Ontario. Bell
a branché son téléphone émétteur
à membrane aux fils du bureau de Brantford, puis, le
récepteur (sorte de boîte en fer) au bureau de
Paris.
Bell pouvait entendre les voix de Brantford grâce aux
bobines électromagnétiques à haute résistance
sur chaque extrémité de la ligne, les sons étaient
transmis et reçus si distinctement que Bell pouvait reconnaître
les voix des haut-parleurs.
Le maire et tout le village écoutent pendant une heure
Macbeth, puis l'heure de fin convenue arriva, et ils refusaient
de quitter le bureau, il fallu télégraphier à
la Dominion Telegraph Company pour demander une ralonge de temps
sinon les fils auraient été débranchés. |
|
Le 10 août,
il parvint à relier Brantford et Paris, distants de
huit milles : les voix, la musique et les chansons venant de la maison
des Bell parvinrent jusquà la foule assemblée
dans le magasin de chaussures de Robert White. Grâce à
cet essai qui, selon le Daily Expositor, « ravit et informa
lauditoire », Bell attira encore lattention sur
lui et eut droit à un article dans le Scientific American
de New York, qui parru en septembre
1876, et publié dasn le monde entier.
L'article consacré au téléphone de Bell,
explique comment construire un appareil, Voir
page 163
C'est avec ce premier modèle de téléphone
que Bell équipera les premiers "Abonnés"
comme allons le voir.
sommaire
Les historiens Christopher Armstrong et H. V. Nelles
mentionnent que le service téléphonique est expérimenté
pour la première fois à Montréal en 1877 auprès
dun groupe de religieux. Rassemblés dans le hall dun
séminaire, les participants ont écouté un concert
transmis depuis une salle de musique. Toujours selon ces historiens,
les premiers téléphones en service à Montréal
relient un séminaire du centre-ville au cimetière
catholique situé chemin de la Côte-des-Neiges. Le téléphone
permet sans doute de mieux coordonner les activités tenues
dans deux secteurs assez éloignés, le cimetière
étant localisé à lextérieur des
limites de la ville pour des raisons daménagement et
dhygiène publique.
Officielemnt le
20 juin 1877 : Hugh Cossart Baker Jr. lance le
premier service téléphonique du Canada à Hamilton
Ontario.
|
Hugh Cossart Baker découvre l'invention d'Alexander
Graham Bell en 1877 à l'Exposition internationale de
Philadelphie
Il et décide de tester ce nouvel outil de communication
à Hamilton, il. loue quatre téléphones
Bell de premier modèle , afin que ses amis, partenaires
aux échecs, puissent se contacter directement (autrement
que par le télégraphe).
Melville Bell (le père d'Alexander) vint à
Hamilton et installa trois autres téléphones
sur la ligne de télégraphe privée
de Baker, dans les maisons de son ami C.D Cory, de la
soeur de Cory et de J. R. Thompson.
Les monteurs de lignes télégraphiques tirent la
ligne unique de maison en maison à travers les toits,
attachés aux arbres et à quelques poteaux de télégraphe
bien situés |
Dessin paru dans La Presse du 27 janvier 1912 qui illustre le
premier réseau de téléphone
Aux Usa le 9 juillet 1877
Bell, Watson, Gardiner Hubbard et Thomas Sanders
avaient constitué à Boston une société
fidiciaire , la Bell Telephone Company. Hubbard
en devient l'administrateur
Le lendemain, Graham Bell concéda 75 % de ses droits canadiens
à son père et le reste 25 % à Charles Williams,
son fabricant déquipement.
En échange Williams s'engage à fournir 1000 téléphones
à Melville Bell.
Le surlendemain Graham.Bell épouse Mabel Hubbard.
Côté Canada, Alexander Melville Bell nomma son ami
Thomas Henderson agent de son fils en Ontario.
Puis en août 1877, tous deux accordèrent à un promoteur
de tramways de Hamilton, Hugh Cossart Baker fils, lautorisation
exclusive de louer des téléphones dans cette province.
Le 24
août 1877, le Bureau canadien des brevets
octroie un brevet d'invention pour le téléphone
à Alexander Graham Bell.
Mais la législation canadienne stipule que les objets
protégés par un brevet doivent être fabriqués
au Canada après un an, ce qui aménera des soucis,
nous en reparlerons.
Le téléphone fit lobjet dune
première démonstration publique au Canada le 29
août 1877 ; Baker avait organisé
lévénement.
Après plusieurs essais réussis, une démonstration
publique de l'installation a été organisée
pour le 30 août
1877.
Les quatre téléphones utilisés pour la
manifestation publique du 30 août étaient les deuxièmes
téléphones loués au Canada, au prix de
45 $ par an.
Le premier contrat de location
déquipement téléphonique au Canada,
signé le 18 octobre 1877 ,
portait sur une connexion entre le domicile de Baker
et ceux de deux de ses collègues.
A Ottawa, Baker installa une ligne entre le bureau
du premier ministre Alexander Mackenzie et Rideau Hall,
pour relier le bureau de la résidence du gouverneur général
et le marquis de Dufferin.
Baker à la tête d'une compagnie de chemin
de fer, fait l'acquisistion d'une petite entreprise de télégraphie
: la Hamilton District Telegraph essentielement
pour relier des abonnées aux pompiers, à la police
... construit lui même un petit central rudimentaire .
Il avait aussi demandé dès 1878 à
la municipalité de Hamilton la permission de planter
des poteaux.
Ce sont les premiers abonnés de Hamilton du Canada.
|
|
Contrat entre Melville Bell et lhonorable Alexander Mackenzie
pour la location de deux téléphones manuels en bois et deux
téléphones en forme de boîte.
Ce téléphone ressemblant à un appareil photographique
a été le premier téléphone utilisé
dans un cadre commercial. Deux de ces appareils, en plus de deux téléphones
manuels en bois, ont été les premiers à être
loués au Canada, reliant le bureau du premier ministre Alexander
Mackenzie à Rideau Hall à la résidence privée
du gouverneur général Lord Dufferin.
Bell peu de temps après annonce le Hand-Téléphone,
modèle qui fera le tour du monde
le succès est foudroyant.
Eté 1877 en Nouvelle-Écosse, lors d'une visite de mine Gardiner
Hubbard apporte une paire de téléphones qui furent installés
au fond de la mine et à la surface, c'est certainement la première
application commerciale du téléphone au Canada.
Hubbard était membre du conseil d'administration de Caledonia,
une compagnie minière de Cap Breton .
Facture originale déquipement téléphonique
acheté par Thomas Henderson, agent principal de la Bell Telephone
Company of Canada, auprès de Charles Williams Jr., fabricant autorisé
pour la National Bell Telephone Company, 1877
15 juillet 1878 : ouverture
du premier central téléphonique de Hamilton, rue King
et Hughson, au dernier étage du bâtiment Hamilton Provident
and Loan.
Il sagissait du premier central téléphonique de lEmpire
britannique et du deuxième en Amérique du Nord.
En décembre 1878 il y avait 40 abonnés à
Hamilton, et passera à 150 en avril 1879.
Baker obtiendra de Melville Bell la permission les droits d'exploiter
le téléphone entre la baie la Baie Georgienne et le lac
Erié, y compris Hamilton.
Baker avait compris que l'avenir du téléphone passerait
par la création d'un réseau
.
Reproduction du premier standatd d'Hamilton en 1878.
Les abonnés du central téléphonique dHamilton
utilisaient ce téléphone à main à la fois
comme transmetteur et récepteur, en le déplaçant
de la bouche à loreille pour parler ou écouter. Le
téléphoniste opérait un standard téléphonique
à sept lignes, avec dix abonnés par ligne.
Cette publicité de 1879 illustre le nouveau téléphone
mural, créé dans le but de satisfaire aux utilisateurs qui
perdaient des bouts de conversation lorsquils déplaçaient
le transmetteur/récepteur de la bouche à loreille.
Un autre exemple des premiers usages du téléphone
est celui du propriétaire dune entreprise de camionnage (Shedden
Forwarding).
En 1878, à Monréal il décide de louer du professeur
Bell des appareils téléphoniques et fait installer une liaison
privée permanente entre ses bureaux, situés à langle
des rues Saint-Paul et Saint-Sulpice dans le quartier des affaires, et
ses entrepôts et écuries, localisés dans le quartier
Hochelaga. Agent principal pour la compagnie ferroviaire du Grand Tronc,
Shedden Forwarding devait assurer rapidement et avec efficacité
la coordination des activités de direction, de répartition,
dexpédition et dentreposage.
En 1878, James H. Cowherd bâtit le premier atelier
canadien consacré à la fabrication de téléphones.
Cet atelier était situé au 32, rue Wharf, à Brantford,
en Ontario. Le bâtiment fut démoli en 1992.
Alors que Melville Bell détient 75 % des droits
du brevet canadien, le reste est cédé à linventeur
Charles Williams Jr. de Boston, Massachussetts; en échange, ce
dernier doit fournir 1 000 téléphones sans frais. Toutefois,
après cette transaction, deux enjeux importants apparaissent. Dabord,
la demande en téléphones aux États-Unis, téléphones
pour lesquels M. Williams avait été payé, devient
tellement grande que ce dernier prend du retard dans les commandes placées
par Melville Bell. Ensuite, les frais de douanes canadiennes que doit
débourser Melville Bell pour chaque téléphone fabriqué
aux États-Unis sont élevés. De plus, les lois concernant
les brevets obligent les Canadiens à cesser limportation
de téléphones peu de temps après lémission
du brevet en 1877.
Il est donc évident que les téléphones
doivent désormais être faits au Canada. On décide
que James Cowherd, un électricien de Brantford, ira étudier
la fabrication des téléphones à latelier de
M. Williams; en décembre 1878, M. Cowherd commence à fabriquer
ses propres appareils. Comme le nombre de commandes augmente, ce dernier
bâtit un nouvel atelier le premier au Canada consacré
à la fabrication de téléphones. Le 15 décembre
1878, le premier téléphone à main en caoutchouc est
officiellement testé, et cest une réussite. Cette
même année, la ville dHamilton en reçoit la
première commande pour lutilisation par la municipalité.
James H. Cowherd a continué de fabriquer des téléphones
et des équipements accessoires pour La Compagnie de téléphone
Bell du Canada jusquà son décès soudain en
février 1881, à lâge de 31 ans. Au cours de
sa vie, il aura produit plus de 2 400 téléphones.
Le téléphone passe rapidement de curiosité
à objet du quotidien; en effet, de plus en plus dutilisateurs
désirent communiquer entre eux. Le premier central téléphonique
au Canada (neuvième au monde et premier à lextérieur
des États-Unis) entre en fonction en 1878 à Hamilton, en
Ontario. Le petit nombre dabonnés augmente sans cesse, et
bientôt, il devient possible de communiquer aux plus grandes villes
du pays.
À la fin des années 1870, on retrouve à
Montréal un petit nombre de ces lignes téléphoniques
qui vont dun point fixe à un autre. Exploité par un
individu ou une entreprise, ce type de système ne possède
pas les qualités dun réseau, car sa capacité
dinterconnexion est inexistante. Peu commun, ce système à
deux unités indique néanmoins les raisons qui motivent sa
mise en service : il sagit détablir un lien direct
et permanent entre deux unités dune même organisation,
que ce soit une résidence et une manufacture, une manufacture et
un entrepôt, ou encore, un cimetière et un presbytère.
Ce sont les cas de figures que nous révèlent les premiers
baux de location des appareils téléphoniques. Il semble
que le besoin de disposer dun lien sûr est alors assez fort
pour que les systèmes privés trouvent une clientèle.
Dans ces quelques exemples recensés, on constate aussi que le facteur
déloignement est déterminant. Par contre, une chose
est certaine : ce nest pas parce que la possibilité de disposer
dun téléphone existe que les entrepreneurs choisissent
forcément de localiser leurs activités en des lieux éloignés
les uns des autres. Il est dailleurs significatif de constater quavant
lintroduction du téléphone, les premiers abonnés
mènent déjà leurs activités sur une base territoriale
fragmentée.
Pendant encore deux ans, le père de Bell,
Alexander Melville promut la commercialisation du téléphone
au Canada et rechercha des agents pour les autres provinces.
Lorsque le tout premier annuaire téléphonique de Toronto
a été publié le 8 juin 1879, le téléphone
était encore un gadget dernier cri qui n'avait été
breveté que trois ans plus tôt.
Les 56 entreprises et résidences répertoriées à
l'époque tiennent sur un grand total de six pages. Bien sûr,
il n'y avait pas encore de numéros - un opérateur en direct
devait connecter chaque appel entre les abonnés au téléphone.
Il était facile de voir pourquoi passer un appel rapide était
un peu compliqué à comprendre pour les résidents
à l'époque - à tel point que des instructions claires
sur la façon de le faire étaient incluses dans le livre.
"Laissez le téléphone reposer contre la lèvre
inférieure. Tout en écoutant, appuyez fermement le téléphone
contre l'oreille », indique-t-il. "Parlez lentement et distinctement,
avec une certaine force, mais pas d'un ton élevé."
"Donnez toujours à vos auditeurs suffisamment de temps pour
transférer le téléphone à leur oreille avant
de parler, et assurez-vous qu'une phrase est terminée avant de
répondre."
La Toronto Telephone Despatch Co. n'a duré que deux ans avant d'être
rachetée par la Bell Telephone Company of Canada, qui deviendra
plus tard la bien connue Bell Canada.
En 1879 deux centres sont installés à Halifax
: la Western Union en novembre avec des téléphones Edison
et Dominion Telegraph un mois plus tard avec des téléphones
Bell. En 1880 en Nouvelle Ecosse la Bell telephone rachète les
installations de Dominion Telegraph puis de la Western Union un an plus
tard.
Démonstration du téléphone à des journalistes
de Montréal en 1879, au bureau de la Dominion Telegraph Company,
où sera situé plus tard le premier central téléphonique
de La Compagnie de Téléphone Bell. Le standard téléphonique
était courbé autour de la pièce car la compagnie
avait donné ses dimensions en pouces, mais le fabriquant les avait
fournies en pieds.
sommaire
Le 29 avril 1880
fondé par Hugh Cossart Baker à Montréal,
par une loi fédérale, la Compagnie
de Téléphone Bell du Canada (par la suite Bell
Canada) reçoit, en vertu de sa charte, le droit de construire
des lignes téléphoniques le long des droits de passage
publics du Canada, ce qui est un privilège des plus précieux.
En vertu d'un contrat de licence conclu avec la compagnie
de téléphone America Bell
située aux États-Unis, Bell fabrique également
des téléphones et de l'équipement téléphonique,
une activité qui sera transférée à la
compagnie manufacturière Northern Electric
en 1895, qui, à son tour, deviendra la Northern
Electric Ltée (puis Nortel Networks) à la suite
d'une fusion avec la Imperial Wire and Cable en 1914.
Au début la Bell Canada fabriquait
les "Hand Téléphones" modèles
1877 aux Usa par C.Williams et louait 40 dollars la paire
de téléphone, certains obtenaient même des réductions
... c'était de l'improvisation.
Mais la législation canadienne stipule que les objets
protégés par un brevet doivent être fabriqués
au Canada après un an. De plus les droits de douane doublent
le prix de revient des appareils.
La situation devint critique surtout que du côté fabrication,
Williams était dans l'incapaité de livrer les 1000
appareils dus en échange de sa part des droits canadiens.
Il n'en livrera que à peine la moitié.
Melville Bell et Thomas Henderson doivent réagir, alors il
envoient un jeune quincailler James H. Cowherd suivre un
stage chez Williams à Boston.
En décembre 1878 de retour, Cowherd construit un hangar derrière
la boutique familliale à Brandfrod et commence à "fabriquer"
les premiers téléphones canadiens.
En fait les téléphones étaient fabriquées
à Boston et envoyées à Brandford pour y être
assemblés.
Ce fut le moyen de contourner la législation canadienne,
nuance importante car elle servira de base à l'annulation
des brevets canadiens quelques années plus tard.
En tout 2398 téléphones sortent du hangar de
montage de Cowherd qui en janvier 1881 décéde
en mettant fin à cette drôle d'aventure.
Bell et Handerson continent de prospecter timidement l'Ontario en
faisant du porte à porte, mais la comptabilité de
l'entreprise demeurait défaillante, de plus les problèmes
de maintenance et réparations croisaient avec le nombre de
clients.
Du coup, la province du Québec fut négligée,
deux villes seulement y furent derservies : Montréal et Québec.
En juin 1881, les actionnaires de la compagnie elisent Erastus Wiman
comme president. Ce dernier a pour objectif de reunir en une seule
compagnie tous les intérets télégraphiques
canadiens, tel qu'il l'explique aux actionnaires de la Montréal
Telegraph dans un courrier adresse a la compagnie en 1881 . Apres
quelques semaines d'intenses négociations, Wiman réussit
à convaincre, par un savant mélange de pression et
de menaces, les dirigeants et actionnaires de la Montreal Telegraph.
En aout 1881, deux accords sont signés par la Great North
Western Telegraph, le premier avec la Montreal Telegraph, le second
avec la Dominion Telegraph, le tout avec la bénédiction
de la Western Union Telegraph. A partir de ce moment-la, la Great
North Western Telegraph, soutenue financierement par la Western
Union Telegraph, contrôle et opère les réseaux
télégraphiques de la Montreal Telegraph et de la Dominion
Telegraph, pour une duree de 99 ans. Un nouveau monopole s'installe
alors sur les lignes telegraphiques
canadiennes, aux mains de la Western Union cette fois, directement
dans les Provinces Maritimes, indirectement via la Great North Western
Telegraph dans le reste du pays. La télégraphie canadienne
est désormais dominée par les intérets financiers
états-uniens. En ce qui concerne le téléphone,
les réseaux des deux compagnies sont rachetés a bas
prix par la toute recente Bell Telephone Company of Canada
Seulement deux ou trois entreprise suivèrent le modèle
de Baker, obtinrent un permis d'exploitation de Bell dont la Toronto
Telephone Despatch et de la York Telephone
Despatch fondées par Hugh Neilson
A Winnipeg un agent vendit quelques téléphones
mais n'installa pas de central. Les autres entreprises ignoraient
tout simplement les droits .
Au total seulement quelques villes furent équipées
entre le Québec, l'ontario, la nouvelle Ecosse, le Nouveau
Brunswick, le Manitoba et la Colombie britanique.
Au début de lannée 1880,
on retrouve à Montréal environ 250 abonnés
au premier réseau téléphonique géré
par Dominion Telegraph, lentreprise
qui deviendra quelques mois plus tard la compagnie Bell. Parmi ces
premiers abonnés, on dénombre surtout des manufacturiers,
des entrepreneurs, des négociants, des financiers et quelques
membres de la classe daffaires. Selon ses promoteurs locaux,
les applications urbaines du nouveau service de communication sont
nombreuses et commodes.
Les communications daffaires occupent
une place prédominante. Dailleurs, lextension
de leurs usages constitue lune des raisons pour laquelle certaines
entreprises de téléphone sont mises sur pied (par
exemple, la Compagnie de Téléphone des Marchands de
Montréal, établie en 1892 grâce à linitiative
des membres de la Chambre de commerce du district de Montréal).
Les autres moyens déchanges reliés aux affaires
ne subissent toutefois pas de déclin parce que le téléphone
est introduit. Il faut plutôt parler de complémentarité,
voire de convergence, entre les divers instruments de communication
locale.
Il nen demeure pas moins que, face aux
transformations de lespace urbain et à lémergence
de la notion dagglomération, le téléphone
apporte des réponses appropriées aux nouvelles conditions
de la ville réticulée. Il sagit principalement
dun meilleur contrôle de la transmission des messages,
et dun accroissement de la rapidité. En effet, les
systèmes existants de communications intra-urbaines (la poste
et les services des messageries) noffrent pas ces avantages
avec autant de fiabilité et defficacité. En
outre, la portée de la téléphonie dépasse
les seules sphères de la vie économique (marchande,
industrielle et professionnelle) et illustre le caractère
nouveau des effets de léclatement de la ville traditionnelle
sur la sphère privée.
La réaction du gouvernement est en réalite une absence
de réaction. Le passage des compagnies canadiennes entre
les mains de la Western Union ne souleve pratiquement aucun debat.
Quelques voix s'elevent pour dénoncer la situation, principalement
au Sénat, mais sans aucun résultat. Ainsi, lors du
passage de l'acte d'incorporation de la Great North Western Telegraph,
le sénateur liberal Robert P.Haythorne s'inquiète
de la clause autorisant la compagnie à louer ou fusionner
ses lignes, sans que cela ne suscite de débat. La principale
réaction a lieu en 1882, lorsque la Montreal Telegraph demande
une refonte de sa charte pour valider la location de ses lignes
a la Great North Western. L'acte passe sans probleme a la Chambre
des
communes, mais se heurte à une vive opposition au Senat.
Le senateur liberal John C.Scott s'oppose au passage de Facte, s'insurgeant
contre le contrôle étranger sur les lignes canadiennes.
II recoit le soutien inattendu de Henry A. Kaulback, sénateur
conservateur, qui propose comme solution la nationalisation des
lignes de télégraphe. Le sénateur liberal Lawrence
G. Power présente la refonte de la charte comme étant
une mesure équitable puisque les nouveaux droits accordés
a la Montreal Telegraph ont déjà été
accordes a la Great North Western et la Dominion Telegraph. Le débat
est clos par un vote autorisant le projet de loi . A partir de ce
moment-la, la position dominante de la Great North Western Telegraph
n'est plus discutée par les parlementaires.
sommaire
Comme ailleurs dans le monde de nombreux électriciens simplement
avec les explications trouvées dans l'article consacré
au téléphone de Bell, qui explique comment
construire un appareil ( Voir
page 163 le premier modèle), se mirent à fabriquer
leurs propres appareils
Thomas Ahearn télégraphiste qui à lâge
de 22 ans, lit l'article de la revue Scientific American Débrouillard,
il décide de concevoir un système rudimentaire à
partir de deux boîtes de cigares, daimants et de fils,
ainsi que de lignes de télégraphe reliant Pembroke
à Ottawa. Ce fut le premier appel longue distance du pays
Ahearn a meme été
menacé de poursuites pour son utilisation non autorisée
de la technique brevetée de Bell, mais plus tardivement il
sera nommé directeur du premier bureau d'Ottawa de la société
Bell.
Cyrille Duquet joailler fit parler de lui
|
Cyrille Duquet, horloger,
joaillier, inventeur et homme politique, né le 31 mars
1841 à Québec, fils de Joseph Duquet, journalier,
et de Madeleine Therrien (Terrien) ; le 22 février 1865,
il épousa à Québec Adélaïde
Saint-Laurent, fille de Jean-Baptiste Saint-Laurent et dAdélaïde
Gazzo (Gazeau), et ils eurent 16 enfants ; décédé
le 1er décembre 1922 au même endroit.
À lâge de 13 ans, après
des études chez les Frères des écoles
chrétiennes, Cyrille Duquet entre comme apprenti chez
lorfèvre Joseph-Prudent Gendron de la rue Saint-Jean
à Québec. Lorsque ce dernier décide de
déménager en 1862, lapprentissage du jeune
Duquet sachève. Sans hésiter, Duquet propose
au propriétaire de sétablir à son
compte au même endroit. Laffaire conclue, il partage
pendant un certain temps ses locaux avec Simon Levy, vendeur
en horlogerie et bijouterie.
Non satisfait dassembler et dinstaller des horloges,
de fabriquer et de vendre des bijoux, il entreprend dattirer
lattention en installant dans la vitrine de son magasin
ses inventions et ses créations. Si Duquet aime surprendre,
éblouir, étonner, émerveiller, il a aussi
lesprit pratique. En 18681869, avec le professeur
François-Alexandre-Hubert La Rue, il conçoit
un séparateur magnétique.
|
Vu dans Le Canadien, le 6
décembre 1877 , LE TELEPHONE À QUÉBEC
Beaucoup de nos lecteurs ignorent probablement que la ville
de Québec possède un téléphone
érigé en permanence.
Tel cependant est le cas. M. C. Duquet, horloger, a
construit, pour son propre amusement, une ligne téléphonique
qui met en communication la Haute Ville avec St. Roch. Au
moyen de cet appareil, M. Duquet peut converser de son magasin
de la rue de la Fabrique avec son associé, M. Dallaire,
au magasin de la rue St. Joseph. Nous avons nous-mêmes
été témoins des merveilles du téléphone.
De St. Roch nous avons communiqué avec nos amis de
la Haute Ville et nous avons pu jouir dun concert donné
à un mille de distance.
Le téléphone dont M.
Duquet a lui-même construit toutes les parties,
diffère sensiblement des instruments américains
qui ont déjà été exhibés
en cette ville et il leur est incontestablement supérieur.
Il est beaucoup plus fort que le téléphone
Bell, et transmet les sons sans en changer le timbre, de sorte
que, dans une conversation, on peut reconnaître sans
difficulté la voix de la personne qui parle. Cette
qualité précieuse, qui distingue le téléphone
de M. Duquet, est due aux améliorations que notre concitoyen
à apportées dans la confection des aimants,
qui sont pour ainsi dire la force motrice du téléphone.
Car le courant électrique, qui transmet les sons, au
lieu dêtre produit par une pile, comme on le croit
généralement, provient de la seule action des
aimants sur la membrane, qui se trouve placée à
faible distance dun des pôles de laimant.
Voici en deux mots, comment fonctionne
le téléphone : la voix, frappant la membrane,
produit des vibrations qui sont conduites et reproduites exactement
par le courant électrique sur la membrane placée
à lautre extrémité du fil.
La ligne téléphonique
est un circuit ordinaire, à part les piles, partant
du sol à une extrémité, partant par les
instruments aux deux bouts et rejoignant le sol qui établir
le courant électrique.
Comme le fonctionnement du téléphone dépend
entièrement des aimants, il va de soi que plus les
aimants sont forts, plus les sons se transmettent clairement.
Au lieu dune seule barre aimantée, employée
dans la construction des téléphones ordinaires,
M. Duquet a confectionné des aimants en faisceau, qui
ont dautant plus de puissance quils contiennent
plus de barres.
Lorsque M. Duquet veut entamer une conversation
avec ses amis de St. Roch, il attire leur attention par un
timbre électrique placé aux deux extrémités
de la ligne. Car jusquà présent, on ne
peut pas entendre les sons transmis sans avoir linstrument
appliqué sur loreille. M. Duquet travaille en
ce moment à fabriquer un téléphone assez
puissant pour que tout lauditoire dans un appartement,
puisse entendre et nous sommes convaincus que si lénergie
peut vaincre les difficultés, il réussira.
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Cest toutefois avec son nouveau combiné
téléphonique (photo ci dessus) que Duquet acquiert
la notoriété.
Contemporain dAlexander Graham Bell, il aurait eu avec
ce dernier un échange de correspondance dont
il ne reste pas de traces connues pour linstant
sur lévolution de leurs expériences respectives.
Après quelques expériences entre son magasin
de la rue de la Fabrique (là où débute
la rue Saint-Jean) et un second magasin quil
possède avec Louis Dalaire dans le quartier
Saint-Roch, ou entre Ottawa et Montréal, il commence
à établir quelques lignes téléphoniques
régulières dont lune avec Spencer Wood,
où réside le lieutenant-gouverneur, et une autre
avec le couvent Jésus-Marie de Sillery, où étudie
une de ses filles.
Persuadé que Duquet utilise linvention de Bell,
Charles Fleetford Sise, vice-président de la
Canadian Telephone Company, le
met en demeure dans une lettre du 31 décembre 1880
« de cesser la fabrication de ces téléphones
». La fameuse législation canadienne.
Piqué au vif, Duquet lui répliquera dès
le 7 janvier 1881 que « le brevet pour lequel vous faites
tant de bruit est périmé et de nul effet ».
« Veuillez en finir avec vos menaces de poursuite qui
ne meffraye nullement, ajoute-t-il. Si vous désirez
avoir un brevet inataquable je vous conseille dacheter
le mien [...] le plus tot possible, conclut-il, car plus vous
retarderez plus il vous faudra payer cher. »
Le 11 mai 1882, la Cour supérieure
de la province de Québec tranchera en faveur
de la Canadian Telephone Company (intégrée
cette année-là à la Compagnie canadienne
de téléphone Bell).
Des 5 000 $ quelle réclamait le 1er avril 1881,
la compagnie a réduit « sa demande de dommages-intérêts
à la somme de dix dollars », « convaincue
que le défendeur [Duquet] agissait de bonne foi »,
explique le juge William Collis Meredith.
Ce qui est cependant bien établi, cest
le brevet que Duquet obtienu, le 1er février
1878, pour des modifications « facilitant la transmission
du son et améliorant les propriétés acoustiques
» et surtout pour la conception dun nouvel
appareil réunissant, sur une même planchette,
lémetteur et le récepteur.
Le premier combiné Duquet . (Bien
que au Portugal Bramão
revendiquera ce concept)
Fevrier 1878 Duquet incortpore la Québec
and Lévis Téléphone compagny et
commence à commercialiser son appareil à combiné.
En 1879 la ville de Québec lui
accorda l'autorisation d'installer des poteaux sur la grande
allée et installa une ligne entre son magasin du centre
ville et Sillery..
Voila pour la petite histoire Duquet.
|
sommaire
C'est la fin de l'amateurisme, avec l'entrée
des deux poids lours de la télégraphie au Canada :
Montréal Telegraph et Dominium
Telegraph dans le marché de la téléphonie.
- la Montréal Telegraph de
Québec qui était en bon rapport avec la Western Electric
concurent de Bell, vend du téléphone de Edison de
bonne qualité mais pas très pratique,
- la Dominium Telegraph de Toronto
qui a toujours été en affaire avec Bell, deviendra
en février 1879 le representant attitré de melville
Bell et commercialisera ses appareils dans tout le Canada sauf Hamilton,
Toronto et York ou Melville Bell avait déja cédé
ses droits.
- Restait dans le jeux Lewis McFarlane directeur du bureau de Toronto
qui sera nommé diecteur de la division téléphone
de la Dominium Telegraph.
Ces deux entreprises investiront 75 000 dolards la première
annèe d'exploitation pour des revenus insignifiants, 1878-1880
la concurence est rude et domine le développement de cette
industrie.
Un gros inconvénient pour les abonnés d'une entreprise
qui ne pouvaient pas communiquer avec les abonnés de l'autre
entreprise.
Les appareils téléphoniques des années
1880 étaient grands, lutilisateur devait tourner la
manivelle pour joindre la téléphoniste qui établissait
lappel selon le nom de demandeur. Les numéros individuels
feront leur apparition en 1884. Les appareils Edison n'étaient
pas très pratique ...
Si la personne à rejoindre ne possédait pas de téléphone,
Bell envoyait un messager à son domicile, linvitant
à venir prendre lappel dans les bureaux de la compagnie.
Chaque matin, les clients recevaient un appel
de lopératrice afin de sassurer que leur service
fonctionnait correctement.
En concertation avec C.Williams, Melville Bell fixe le prix des
droits au Canada à 100 000 Dollars (côte établie
par les brevets en téléommunications). melville Bell
propose à la Dominium Telegraph
qui trouve que c'est trop cher, McFarlane l'estimait entre
5000 et 12 dollars. Duquet aussi contacté n'a pas
plus réunr plus de 3000 dollars, personne ne peut acheter
ses droits.
Graham Bell deamnde à Baker de secourir son père;
Baker , il se tourne vers les états unis pour conlure
un contrat en novembre 1879 avec la Western Union.
En 1879, comme Melville Bell veut se départir de son entreprise
naissante et quaucune compagnie canadienne nest intéressée
par lentreprise, Melville Bell vend son entreprise et les
droits canadiens reliés au brevet d'invention du téléphone
au National Bell Telephone de Boston.
.
Puis en mars 1880 William Forbes le nouveau président
de la National Bell, accepte d'acheter
les droits canadiens pour des raisons statégiques, car
le principal adversaire la Western Union aux Usa et aussi partenaire
de la Montreal Telegraph.
Puis Melville Bell quitte le conseil d'administration en juin 1880
pour rejoindre son fils et s'installer à Washington et retourne
à ses études des sourds-muets.
Le grand gagnant semble être Baker qui était
déjà le président de la Bell au Canada qui
rédigea en hiver 1879-80 la charte d'une nouvelle entreprise
qui devrait s'appeler la Bell Telephone Compagney Of Canada et commencera
la procédure d'incorporation, la nouvelle entreprise s'appelera
la Bell Telephone pour éviter
la confusion avec la Bell Telephone Compagny
des états unis.
sommaire
Baker qui n'avait pas l'envergure nécessaire pour
une entreprise de si grande échelle, c'est le Colonel
Forbes qui finit par recruter Charles Fleetford Sise
pour représenter les intérêts de la National
Bell au Canada.
CHARLES FLEETFORD SISE
|
Sise est un homme daffaires,
né le 27 septembre 1834 à Portsmouth, New Hampshire,
sixième fils dEdward Fleetford Sise, marchand commissionnaire
et propriétaire de navires, et dAnn Mary Simes
; le 20 février 1860, il épousa à Mobile,
Alabama, Clara Bunker (décédée en 1872),
et ils eurent quatre filles, dont deux vécurent au delà
de la petite enfance, puis le 4 juin 1873, à Newburyport,
Massachusetts, Caroline Johnson Pettingell, et de ce second
mariage naquirent trois fils ; décédé le
9 avril 1918 à Montréal.
Charles Fleetford Sise fit des études
seulement jusquà lâge de 16 ans et
entreprit en 1850 une carrière de marin à bord
dun navire appartenant à sa famille. Six ans
plus tard, son père le nomma capitaine du navire marchand
Annie Sise. Cest alors quil commença à
tenir un journal de bord. Même une fois quil aurait
cessé de naviguer, il continuerait, jusquà
sa retraite en 1915, à noter de petits et grands événements
dans des carnets quil appelait journaux de bord. Après
avoir commandé durant plusieurs années des navires
marchands qui sillonnaient le Pacifique et lAtlantique
et se rendaient en Australie, il interrompit temporairement
sa vie nomade en 1860, lannée de son mariage,
et fut associé durant trois ans à une maison
de commerce et de courtage maritime à La Nouvelle-Orléans.
|
Né et élevé en Nouvelle-Angleterre,
Sise se rangea pourtant du côté des Sudistes lorsque
la guerre de Sécession éclata en 1861.
On dit quil les soutint en tant quagent de renseignements,
briseur de blocus et secrétaire particulier du président
des États confédérés du Sud, Jefferson
Davis, dont il était lami. Toujours discret sur
ses activités du temps de guerre, il saliéna
sa famille de la Nouvelle-Angleterre pendant un temps parce
quil avait épousé la cause des sudistes,
et la possibilité de mener une carrière stable
dhomme daffaires dans le nord-est des États-Unis
lui fut pour ainsi dire interdite. Ces raisons expliquent en
partie pourquoi il sinstallerait un jour à Montréal.
En 1863, Sise se rendit à Liverpool,
en Angleterre, pour acquérir un navire au nom de lentreprise
de son beau-père, lAlabama Steam Ship Company.
Lannée suivante, il fonda à Liverpool sa
propre maison de transport maritime, de commerce et daffrètement.
En 1867, il rentra aux États-Unis et, nommé à
nouveau capitaine de lAnnie Sise, se mit en route pour
lAustralie. À son retour aux États-Unis
lannée suivante, il trouva un emploi dans les assurances.
Il travaillerait 11 ans dans ce secteur, dont quelque temps
à titre de représentant américain de la
Compagnie dassurance royale canadienne de Montréal,
dont Andrew Robertsonétait président.
Toujours mal vu à cause de ses
liens passés avec les Sudistes, Sise démissionna
le 31 décembre 1879.
En mars 1880, William H. Forbes, président de
la National Bell Telephone Company de
Boston, une des entreprises dont serait issue
lAmerican Telephone and Telegraph Company (AT&T),
prit Charles Sise comme agent spécial et le chargea
de coordonner la prise de contrôle de la téléphonie
canadienne par la National Bell. |
L'empire Bell, aura pour unique mandat et le
seul pendant plusieurs décennies de commercialiser et de peaufiner
les services liés à la téléphonie fixe
(en élargissant notamment les réseaux de communications
téléphoniques locaux en réseaux régionaux,
nationaux, puis internationaux).
Le 29 avril 1880 la nouvelle entreprise reçoit une charte
qui permettra de faire à peu près tout ... pas de tarif,
pas de réglementation.
Le président William Roberson est désigné
le 1er Juin 1880 lors de la première assemblée à
Toronto. Roberson étranger aux télécommunication,
neutre (et manipulable). Size devient le vice président
et directeur général, il possède tous
les pouvoirs.
Le conseil d'administrations qui compte huit membres dont trois américains
: Forbes, Vail et Sise. Parmi les autres membres canadiens,
l'illustre Joseph Tibaudeau sénateur et directeur de la banque
national, qui devienfra aussi le président de la compagnie
d'éléctricité à Montréal.
Le deal avec Roberson est qu'il imposa Montréal comme siège
social de la socièté au détriment de Toronto.
Deux filiales canadiennes virent le jour
en 1880
la Canadian Telephone Company
selon le modèle américain, dont le président
n'est autre que N.Vail et possédait 69 % des
actions.
la Compagnie canadienne de téléphone
Bell
La première détiendrait les brevets et louerait
léquipement à la seconde, qui serait une
société exploitante.
De plus, Sise avait obtenu entre-temps le réseau téléphonique
de la Compagnie du télégraphe de Montréal
et de la Compagnie de télégraphe de la Puissance,
alors les principales sociétés exploitant des
téléphones au Canada.
Fin 1880, la Compagnie de téléphone
Bell du Canada offre des services au Nouveau-Brunswick,
en Nouvelle-Écosse, en Ontario, au Québec et
au Manitoba.
La Bell
Téléphone Company établit son
premier réseau à Québec, capitale
de la province de ce nom, en cette année 1880.
Mais le tâche ne fut pas simple, tout comme Melvile
Bell Charles Sise échoua à convaincre les milieux
d'affaires canadiens d'investir dans le téléphone.
Le goupe Bell de Boston avait conçu un plan selon lequel
Montréal Telegraph et Dominion Telegraph une sorte
de consortium qu'aurait chapeauté l'Américan
Bell gràce à ses droits sur les brevets canadiens
: 1/3 capital Bell Telephone devait être vendu aux deux
entreprises de télégraphe, 1/3 à Baker
et autres et 1/3 au public. Mais les deux grands du télégraphe
voulaient être payées en liquidités non
en actions Bell Telephone.(ils voulaient se retirer du marché
du téléphone en prenant exemple de ce qui s'est
passé aux Usa avec Western Union).
Size sut manoeuvrer en se raliant à la position de
ses interlocuteurs et par accepter d'acheter leurs réseaux
de téléphones.
Finalement ce fut l'American Bell qui acheta le réseu
téléphonique de Dominion Telegraph en en juillet
1880 pour 75 000 dollars. Ces installations furent aussitôt
cédées à la Bell Telephone contre des
actions.
Hugh Allan, président de la Montreal Telegraph exigea
150 000 dollars (pour un réseau moins important que
Dominion Telegraph) mais Sise fit baisser le prix à
75 000 dollars dont 25 000 en actions.
Le plus dur à convaincre fut Forbes qui exigeait que
la bell Telephone soit une entreprise à capitaux canadiens,
après de longue transactions, lettres ... pour qu'un
accord soit conclu en octobre 1880 avec la Montreal Telegraph
et finalisé le mois suivant.
Fin 1880 Il y avait alors 150 employés
et 2165 téléphones installés dont
:
Ville
|
Nbr Tel Edison
|
Nbr Tel Bell
|
Montréal
|
300
|
250
|
Toronto
|
50
|
200
|
Hamilton
|
50
|
300
|
Québec
|
40
|
75
|
Ottawa
|
50
|
50
|
Autres
|
200
|
600
|
Les villes n'étaient pas reliées
et les réseaux existants ne pouvaient pas communiquer
entre eux. De plus la prolifération
des fils dans les rues était mal vu par le public. La
réunification s'annoncait difficile.
Sise était compétent et assez dure en affaires,
les contrôles des coûts étaient permanents
et il arriva à offrir un service comparable à
ce qui se faisait aux Etas Unis mais 23 % moins cher.
Au Canada, ce sont des hommes d'affaires de la ville de Hamilton
qui sont les premiers abonnés canadiens du téléphone.
Rapidement, l'élite commerciale des grandes villes canadiennes
emboîte le pas.
En 1880, Montréal, avec ses 546 appareils téléphoniques,
est la plus « branchée » des villes au Canada.
Dès 1881, Size avait acquis,
au nom de son employeur, « tout le matériel téléphonique
restant au Canada » soit en tout 3 100 appareils.
En outre, à la fin de 1880, il avait négocié
avec une ancienne rivale, la Western Union Telegraph Company,
une entente en vertu de laquelle tous les brevets téléphoniques
canadiens de la Western Union passaient à la Canadian
Telephone Company, ce qui assurait la séparation de
lindustrie du téléphone de celle du télégraphe.
La dernière poche de résistance reste au Québec
ou Duquet avait menacé de poursuites judiciares, comme
nous l'avons lu un peu plus en avant,
Duquet triomphera en 1885 mais en 1882 il finit par vendre
son brevet à la Canadian Telephone pour 2100 dollars.
Annuaire 1881
Usine Northern
Printemps 1881 Size avait unifié tous les réseaux
téléphoniques canadiens sous la Bell
Telephone d'une valeur de 400 000 dollars.
La Colombie Britanique et terre Neuve restèrent toujours
une colonie britanique.
A cette époque, personne dans les milieux d'affaires
ou dans la classe politique n'a vu ou compris que le téléphone
allait devenir un service public et que Sise veanit de vérouiller
la marché.
|
sommaire
En colombie britannique, le développemnt fut plus rapide.
Cette région ne dépendait du domaine de Bell. Terre
Neuve isolée du Canada par son statut de colonie britannique
constitue un cas à part.
C'est grâce à Robert Burns McMicking que le
téléphone arrive à Victoria sur l'île
de Vancouvert en 1878.
McMicking était un aventurier,chercheur d'or, participé
à la construction du télégraphe entre l'Amérique
et l'Europe (projet Overland), il devint le directeur de la compagnie
de télégraphe de la colombie britanique qui passa
sous contôle fédéral en 1871 avec la Confédération.
En 1878 McMicking directeur de Dominion Government
Telegraph écrivit à Melville Bell et Thomas
Henderson pour proposer ses services et répondirent en le
désignant représentant de Bell Telephone et en lui
envoyant une paire de téléphones.
McMicking relia son bureau au quotidient "Colonist" et
invita les notables de Victoria à utiliser cet équipement.
L'article publié dans le "Colonist" du 26 mars
1878 montre que l'opération fut un succès, les
gens chantèrent et sifflèrent et s'étonnèrent
de reconnaître la voix de leurs amis.
McMicking commença à faire la promotion pour louer
des appareils à la paire, mais les gens allaient plûtot
en ville à San Francisco cherher des téléphones
à meilleurs marché alors que McMicking ne pouvait
que louer ... quand il en avait car les appareils en provenance
de Montréal devait faire le détour par les Etats Unis
pour arriver à Vancouver.
Le pasteur Henderson convainquit McMicking que la solution
était d'installer un central téléphonique.
McMicking était en contradiction avec ses
activités téléphoniques de la compagnie fédérale.
C'était du travail au noir. McMicking démissionna
de la compagnie d'état pour lancer sa compagnie de téléphone.
En fait il a été renvoyé de la Dominion pour
irrégularité dans les comptes car il avait acheté
les premiers téléphones avec l'argent de l'administration.
Pas grave se dit McMicking, il commanda immédiatement de
l'équipement Bell à Montréal.
S'ensuivit une serie de quiproquos, d'erreurs et de malchances qui
souligne l'incompétence du duo Bell-Henderson.
Les téléphones n'arrivaient pas ou incomplets ou non
dédouanés, le mode d'emploi arrivait sans téléphones
et en plus la passation des pouvoirs à Sise fut éfféctuées
sans les instructions nécessaires et ce dernier remettra
en question les prétentions de McMicking au titre de représentant
de Bell en Colombie britannique .
Malgré les difficultés la première compagnie
de téléphone en Colombie britannique reçut
la charte de l'Assemblée législative provinciale le
8 mai 1880 sous le nom de Victoria and
Esquimalt Telephone.
En juillet 1879 l'équipement arrive enfin
et Victoria sera dotée d'un central téléphonique,
un des premiers au Canada et le troisième sur la côte
Ouest après San Francisco et Portland.
1879 les premiers téléphones de Colombie britannique
continentale sont installés par un missionnaire anglican
dans un village de pêcheurs indiens au nom de Metlakatla.
La ligne était installée entre le magasin et la scierie
de ce missionnaire et raccordé aussi à quelques huttes
à son petit réseau.
Ce village devenu Prince Rupert était la seule ville de Colombie
britannique à posséder un service municipal (sous
le nom de CityWest).
Le lien Bell et Victoria and Esquimalt
Telephone cessa en 1889 quand l'entreprise insulaire acheta
à Bell les droits sur le téléphone.
Sur le continent avec l'arrivée du Canadian Pacific à
Port Moody, une ligne est est construite entre New Westminster et
Port Moody en 1883, an an après un central téléphonique
est installé à Westminster avec une nouvelle compagnie
la Westminster and Port Moody Telephone.
En 1885 la ligne sera étendue à Granville avec un
central le 6 avril 1886. Le nom de la compagnie change pour s'appeler
New Westminster and Burrard Inlet Telephone. Ce jour Granville s'appellera
Vancouvert. Malheureusemnt quelques semaines après, un incendie
détruit la ville, mais le central téléphonique
a pu être sauvé.
En 1891 . la New Westminster and Burrard Inlet Telephone avait créé
Vernon and Nelson Telephone pour desservir l'intérirur de
la province.
En juin 1898, la New Westminster and Burrard Inlet Telephone fut
vendu à des interêts britaniques à un immigrand
anglais William Farell.
La New Westminster and Burrard Inlet Telephone végétait
à Victoria et comme l'axe économique se déplaçait
vers le continent, en 1889 la population de Vancouvert dépassa
celle de Victoria, c'est cette année que la New Westminster
and Burrard Inlet Telephone acheta Victoria and Esquimalt Telephone.
McMicking resta directeur mais le pouvoir était passé
aux mains des hommes de Vancouvert.
Le docteur Lefevre qui était vice président de la
New Westminster and Burrard Inlet Telephone qui n'avait jamais accepté
la vente à des interêts britanique et encore moins
le pouvoir effetua un coup de force. En 1902 il se rendit en Grande
Bretagne il parvint à neutraliser les propiétaires
en les divisants et fi une offre d'achat qui lui permit d'obtenir
une majorité d'actions. En 1903 il amalgama toutes ses compagnies
de téléphones sous le non de Vernon and Nelson Telephone.
en 1904 elle s'appelera la British Columbia Telephone Compagny.
Presque tous les téphones de Columbia britannique sont désormais
regroupés, puis en 1904 un câble fut posé entre
Victoria et le continent à Bellingham.
Comme la loi de l'Etat de Washington interdisait à un étranger
de posséder un service public, Lefevre créa une compagnie
américaine détenue par un ami de Farell sous le nom
d'International Telephone Compagny, Lefevre en quelques années
avait créé un véritable réseau téléphonique
en Colombie britannique.
sommaire
À la fin du 19e siècle, Bell vendit ses activités
dans lAtlantique dans les trois provinces maritimes, où
de nombreuses petites sociétés indépendantes
exerçaient leurs activités et devenaient par la suite
la propriété de trois sociétés provinciales.
Terre-Neuve-et-Labrador s'est jointe au Canada avec plusieurs sociétés
privées et une opération gouvernementale transférée
sous le contrôle des Chemins de fer nationaux du Canada.
A Terre-Neuve : La situation est différente car Melville
Bell n'avait pas déposé de demande de brevets dans cette
colonie britanique.
En 1878, les touts premièrs téléphones
furent installés sur une ligne privée, entre Saint Jean
au poste de météorologie et le domicile du mître
du poste météo.
Bell tentera d'obtenir un permis exclusif d'exploitation du téléphone,
mais se heurta à l'Anglo-American Telegraph, entreprise fondée
par Frederic Gisborne et rebaptisée Cyrus Field dans les année
1850 qui avait reçu les aurorisations gouvernementales de l'exlusivité
de l'exploitation du télégraphe pour 50 ans. Son directeur
Graham MacKay pensait que le téléphone allait concurencer
le télégraphe dans les communications transatlantiques
et soutiendra que le monopole d'Anglo-American couvrait toutes les
communiations électriques et obtiendra gain de cause.
Bell dut alors composer avec Anglo-American, Sise convaincra MacKay
que le téléphone n'allait pas menacer le télégraphe
et cédera ses brevets contre une redevance.
En 1885 le premier central téléphonique fut ouvert
à Saint Jean par l' Anglo-American
Telegraph.
sommaire
En 1881, la Compagnie
de téléphone Bell du Canada procède
à son premier appel interurbain entre Toronto et Hamilton,
mais le coût des travaux faillit menacer la compagnie à
la faillite, l'expérience ne se renouvellera pas de sitôt.
A cet époque l'interurbain n'est pas rentable.
Vers la fin de 1882, cette compagnie comptait environ 4500
abonnés au téléphone des réseaux étaient
établis dans une centaine de villes.
La Chambre du Parlement du Dominion et les nouveaux bureaux départementaux
sont tous reliés par téléphone au bureau central
de Québec.
En 1882, la Canadian Telephone Company
sintégra à la Compagnie
canadienne de téléphone Bell en
achetant presque tous les brevets de la Canadian Telephone.
Cette dernière, dont Robertson était président
et Sise vice-président, semblait avoir le champ libre
en matière de téléphonie canadienne : une charte
fédérale lhabilitait à étendre
son réseau dans tout le pays, et elle avait acquis la quasi-totalité
des installations et brevets téléphoniques.
En plus, selon une entente avec la compagnie américaine,
lentreprise canadienne toucherait les droits canadiens de
tous les brevets que la compagnie américaine obtiendrait
au Canada.
La tutelle des Etats Unis sur Bell Telephone aura duré
deux ans. Il ne faut pas voir dans cette émancipation
rapide, l'aboutissement d'une vision politique. Size était
étranger à la problématique nationale canadienne,
par contre il voulait être le seul mâtre à bord
de son entreprise.
Le manque de matériel constituait un problème permanent
car à la mort de Cowherd début 1881 avait désorganisé
l'approvisionnement du marché et son remplaçant n'était
pas à la hauteur de la mission. Size attendit trop longtemps
pour prendre une décision
En juillet 1882, la compagnie met sur pied une équipe
de trois personnes chargées de la fabrication de téléphones;
nommé Mechanical Department, à Montréal
rue Craig, cette équipe deviendra "The
Northern Electric and Manufacturing Company" en 1895,
puis sera renommée Northern Electric, Northern Telecom, Nortel
Networks et finalement Nortel ; cette compagnie comptait
35 000 employés à la fin de 2005.
Au 1" janvier 1883, il y avait 866 abonnés à
Montréal; 525 à Toronto; 250 à Ottawa; 240
à Québec; etc., etc.
Modèles Blake Bell
En 1884 lÎle-du-Prince-Édouard , Bell repésenté
par Robert Angus réuni 30 abonnés nécessaires
pour justifier l'ouverture d'un petit cental téléphonique.
Les gens d'affaires décident de construire eux mêmes
un réseau rudimentaire sur l'île avec du fil nu suspendu
sans poteaux ...
sommaire
La crise couve, manque de capitaux, pénétration sélective
des marchés, les zones rurales sont délaissées,c'est
la contestation du monopole Bell.
Des villages s'équipent eux mêmes, des médecins
de campagnes les seuls à avoir les capacités scientifiques
firent installer leurs cabinets les pharmacies et leurs patients
et parfois créérent de petites compagnies.
Ailleurs ce sont les municipalités qui mirent en place un
service téléphonique public, tout comme le gaz ou
l'eau.
C'est ainsi qu'à Toronto une petite usine fut créée
par l'enreprise Toronto Telephone manufacturing
Compagny, afin de réponse aux besoins des laissés
pour contre.
Cette entreprise attaqua même la Bell Telephone se basant
sur deux principes :
- la fabrication des appareils doit être au Canada
- Bell refusait de vendre ses appareils et se bornait à les
louer, contrirement la loi au Canada
Le ministère de l'agriculture donna raison à la
Toronto Telephone manufacturing Compagny, les brevets de
Bell furent annulés en janvier 1885.
Première conséquence : repli de Bell Telephone au
Québec très peuplé, l'ouest Manitoba Alberta
Saskatchewan ...
Conscient que la perte de ce brevet menaçait le monopole
de Bell, Sise prépara la compagnie à soutenir
la concurrence.
Il concentra les opérations en vendant les installations
de lÎle-du-Prince-Édouard en 1885 (Affaire conclue
pour 1500 dollards et 40 actions de la nouvelle compagnie), puis
celles de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick en 18881889,
et en abandonnant en 1889 des liaisons avec des entreprises amies
mais indépendantes en Colombie-Britannique.
Renoncer à ces territoires semblait devoir permettre à
la compagnie daffronter ses rivales au cur du pays.
Nouvelle-Écosse sous la direction de Sise,
Bell sempressa de construire des lignes interurbaines afin davoir
lavantage sur la concurrence locale, inaugurant ainsi plus dun
siècle de controverse sur les interconnexions téléphoniques
Toujours sous la direction de Sise, Bell sengagea
dans dimpitoyables batailles tarifaires là où elle
avait des concurrents directs.
Par exemple, à Peterborough, à Port Arthur (Thunder Bay)
et à Dundas, en Ontario, elle offrit le service téléphonique
gratuitement jusquà ce quelle ait éliminé
ses concurrents.
À Winnipeg, Sise mit furtivement sur pied la Peoples Telephone
Company, qui pratiquait des prix inférieurs à ceux de Bell
et de sa vraie rivale. Quand cette rivale sécroula au début
de 1886, la Peoples Telephone disparut elle aussi ; Bell
se retrouva alors seule et put revenir à ses anciens prix. Dautres
batailles tarifaires eurent lieu à Montréal et à
Sherbrooke, dans la province de Québec.
En 1887 des hommes d'affaires de Halifax avec un capital autorisé
de 50 000 dollars, créent la Nova Scotia
Telephone Compagny pour relier rapidement Halifax à Truro
New Glasqow, Pictou et Amherst . Il fallait à tout prix éviter
que Bell ait le temps de réagir.
Puis de nouveaux entrepreneurs prospétèrent les quelques
300 abonnés de Bell pour leur offrir de nouveaux services. La Hants
and Halifax Telephone et la Parrsboro Telephones furent rachetées,
opération symbolique car ces deux entreprisent n'engendraient peu
d'activité.
Le capital autorisé passa à 100 000 dollars, tout était
prêt pour installer les centraux dans les principales ville de la
Nouvelle Ecosse et affronter la Bell Telephone.
Novembre 1887 une lettre de Sise retourne la situation :
Sise offrait de vendre les installations de Bell en Nouvelle Ecosse
et chose curieuse au Nouveau Brunswick pour 50 000 dollars, 65
000 dollars en actions et l'engagement d'acheter à prix égal,
de l'équipement à Bell plutôt que celui des concurents.
Pour sceller le tout, Bell aurait deux représentants de plein droit
au conseil d(administration de la nouvelle compagnie.
La proposition fut accéptée, la guerre du téléphone
n'eut pas lieu.
En février 1888 Nova Scotia Telephone prit possession des
installations Bell dans les deux provinces, on y comptait 539 abonnés
sur quatre centraux téléphoniques.
Nova Scotia Telephone augmente de plus en plus son capital,
réduisant la partiipation de Bell qui avait glissé de 14
% . Sise avait réussi en Nouvelle Ecosse une décolonisation
en douceur, la bonne entente entre parties était telle que le vérificateur
de Bell fit le voyage d'Halifax afin d'aider la nouvelle entreprise à
mettre au point des proédures comptables et salariales à
celles en vigueur à Montréal.
Bell Telephone et Nova Scotia Telephone coopérent harmonieusement
jusqu'en 1999 au sein d'Aliant, filiale de Bell Canada.
Au New Brunswick ce n'était pas le cas lors de la
prise en main par Nova Scotia Telephone, ils ne voulurent plus être
à la remorque de Halifax ou Montréal. Pouratnt en décembre
1879 Western Union ouvre à Saint Jeau le premier central téléphonique
de brevet Edison. Quelques jours plus tard Domion Telegraph ouvre aussi
un centre téléphonique de brevet Bell et comme à
Halifax, à Saint Jean les deux centres sont totalement incompatibles
... Ce n'est qu'en 1881 que Bell Telephone dépêcha Lewis
MacFarlane (futur président) qui reprit la succession pour
fusionner les deux entreprises. C'était la première assisgnation
à Bell Telephone . MacFarlane fut arrêté mis en prison
une nuit et rentra à Montréal.
Début 1888, même méthode à l'Ile du
Prince Edouard et en Nouvelle Ecosse , des hommes d'affaires créent
la New Brunswick Telephone Compagny, l'éxclusivité de l'exploitation
fut accordée par l'assemblée législative en mars
1888 .
LÎle-du-Prince-Édouard
a connu plus que sa part de premières en technologie des communications.
Il sagissait de progrès nés du fait que nous étions
une île isolée du continent nord-américain. Il
sagissait peut-être dune petite entreprise sur la
scène mondiale, mais elle était bel et bien innovatrice.
Tous les résidents de l'Île-du-Prince-Édouard
devraient être très fiers des réalisations passées
de notre compagnie de téléphone et se tourner vers l'avenir
avec Bell Aliant.
Les premiers câbles télégraphiques posés
à destination et en provenance de l'Île-du-Prince-Édouard,
ont servi de base aux câbles téléphoniques ultérieurs,
dont le premier a été posé en 1910. Plus tard,
les communications par micro-ondes sont devenues le premier choix
de l'Île.
Le 20 novembre 1852 Frederic Newton Gisborne, ingénieur
et électricien, né à Broughton, Lancashire,
Angleterre, posa le premier câble océanique de ce côté
de l'Atlantique, reliant Carleton Head, Île-du-Prince-Édouard,
avec Cape Tormentine, Nouveau-Brunswick, sur une distance de 14
milles par eau. Ce câble était utilisé pour
la télégraphie. Ce câble sous-marin fut le premier
câble sous-marin en Amérique du Nord et précéda
de quatre ans la ligne vers Terre-Neuve puis vers l'Angleterre.
Le câble de 1852 a été posé par le bateau
à vapeur à roues latérales « Ellen Gisborne
» (du nom de l'épouse de Gisborne) et a fonctionné
pendant une période relativement courte. La plus grande importance
de ce câble est qu'il a prouvé la viabilité
des connexions par câble et a jeté les bases des futurs
câbles télégraphiques et téléphoniques.
Les améliorations futures dans la conception des câbles
et les techniques de pose ont rendu le service plus fiable.
1856, 10 août - Le bateau à vapeur
Victoria se rend à l'Île-du-Prince-Édouard et
pose un nouveau câble télégraphique depuis Tormentine
pour la New York Newfoundland and London Telegraph Co.
1866, octobre - le vapeur Medway et le vapeur Terrible
posent un nouveau câble télégraphique de Carleton
Head au cap Tormentine sous l'observation de Cyrus Field. Un article
du New York Times publié le 30 septembre 1866 disait : «
M. Field est arrivé ici cet après-midi en provenance
de Shediac, après avoir rencontré le Medway et le
Terrible dans le détroit de Northumberland, occupé
à poser un nouveau câble entre le Nouveau-Brunswick
et l'Île-du-Prince-Édouard. » 2e article du New
York Times, 5 octobre 1866 : « Un autre câble sous-marin
- le câble posé à travers le détroit
de Northumberland - Charlottetown, Île-du-Prince-Édouard,
le jeudi 4 octobre. Le câble traversant le détroit
de Northumberland, reliant le Nouveau-Brunswick à l'Île-du-Prince-Édouard,
a été posé avec succès par le paquebot
Medway mardi dernier. Le Medway et le Terrible ont ensuite immédiatement
pris la direction de l'Angleterre.
En 1910, un câble téléphonique
expérimental privé à circuit unique a été
posé entre Wood Island et Pictou, en Nouvelle-Écosse,
pour desservir la FB McCurdy and Company, un courtier en valeurs
mobilières basé à Halifax. McCurdy a établi
la ligne expérimentale pour relier ses bureaux d'Halifax
et de l'Île-du-Prince-Édouard.
En 1910-1911, un câble téléphonique à
deux conducteurs a été posé entre Wood Islands
et Caribou, en Nouvelle-Écosse, sous la supervision de la
Maritime Telegraph & Telephone Company, le premier appel interprovincial
ayant eu lieu le 3 janvier 1911. L'emplacement de ce câble
est toujours apparaît aujourd'hui sur les cartes de navigation.
La pose de ce câble a été achevée le
jour de l'An, le 1er janvier 1911. Deux autres liaisons par câble
sous-marin pour le téléphone ont finalement été
construites vers le Nouveau-Brunswick, appartenant au gouvernement
fédéral.
En 1948, Island Tel a commandé un commutateur
Strowger
de 1 200 lignes à ATM de Liverpool. Il s'agirait du premier
système automatique de l'Île-du-Prince-Édouard.
Il est arrivé en 1949 et a été activé
en février 1950. Il a servi la communauté jusqu'en
1988, date à laquelle l'échange de longue durée
a été transféré vers un nouveau commutateur
DMS-100.
Lorsque l'interrupteur a été mis hors service, la majeure
partie a été mise au rebut sauf ce qui n'avait pas été
transporté à Terre-Neuve pour être utilisé
comme pièces de rechange pour des équipements similaires.
En 1948, le premier système commercial à
micro-ondes au monde a été installé entre Tea
Hill près de Charlottetown et Fraser's Mountain près
de New Glasgow en utilisant un équipement de modulation de
temps d'impulsion développé par la Federal Electric
Company du New Jersey donnant 23 canaux, pour remplacer le système
souvent peu fiable. liaisons sous-marines vers l'Île-du-Prince-Édouard.
Ce site se trouvait à proximité de
l'actuel 13 Upper Tea Hill Crescent à Stratford. La propriété
du site de la tour a été cédée à
la ville de Stratford pour être utilisée comme parc
vers 2000, et la ville a fait démolir le bâtiment quelques
années plus tard, car il devenait un lieu de rencontre pour
les adolescents et des problèmes de sécurité
ont conduit à son retrait. La tour H d'origine a été
supprimée il y a environ 20 ans pour la même raison.
Sur la propriété, à côté de son
emplacement d'origine, se trouve une tour/répéteur
de la GRC.
Une autre liaison micro-ondes a été installée
en 1951 entre la baie d'Egmont et Moncton [Lutz Mountain, Nouveau-Brunswick]
à l'aide d'un système de canaux Lenkurt 42-C à
450 mégacycles à 12 canaux.
En 1956, nous pouvons affirmer avec une certaine certitude que le
câble MT&T n'était plus en service, car des sources
d'Island Tel affirment qu'à la suite de la tempête
de verglas de 1956 , la liaison micro-ondes depuis Tea Hill assurait
la seule communication téléphonique hors service.
À cette époque, des poteaux tombés dans l'ouest
de l'Île-du-Prince-Édouard empêchaient l'utilisation
de la liaison Egmont.
À la suite de la tempête de verglas
de 1956, un système a été installé de
Fraser Mountain, en Nouvelle-Écosse, à Charlottetown,
à Hazel Grove, Summerside, Egmont, puis à Moncton,
au Nouveau-Brunswick. Ce système a permis d'enlever de nombreux
kilomètres de poteaux et de câbles à péage
endommagés par la tempête. et a assuré que la
liaison Egmont resterait active même si une autre tempête
de verglas comme celle de 1956 se reproduisait.
1958 - De New Glasgow, Nouvelle-Écosse à Summerside
Collins 6 GHz, 120 canaux.
Ce système comprenait sept stations ; une station terminale
à Egmont, un double répéteur à Hazel
Grove, un double terminal à Charlottetown, un répéteur
au mont. Buchanan, un terminal à diversité spatiale
à Fraser Mountain et une station principale d'alarme de panne
à New Glasgow.
Charlottetown à Summerside Système allant du mont
Fraser au mont Buchanan, 12 circuits à péage.
De Summerside à Moncton, Nouveau-Brunswick. en passant par
Hazel Grove, Charlottetown, Summerside 12 circuits à péage.
Charlottetown-Moncton, Nouveau-Brunswick. puis de la baie d'Egmont
à Moncton. 6 circuits à péage.
1968 - Le 18 août 1968, un système
Lenkurt 71F à 120 canaux a étendu le réseau
depuis la baie d'Egmont via O'Leary. Lenkurt était une filiale
de GTE spécialisée dans les micro-ondes. Photo de
Terry Biddlecombe.
1970 - Un nouveau système de circuits 960
est installé entre Nutby Mountain, en Nouvelle-Écosse,
et l'aérogare de Churchill, à l'Île-du-Prince-Édouard.
De là, le signal a été retransmis à
Charlottetown. C'était un Lenkurt 878 2 Ghz. Système
960 canaux.
1973 - La partie Charlottetown du système
Collins ci-dessus a été remplacée par un système
micro-ondes Lenkurt 878 960 canaux. La raison en était de
répondre à la demande suscitée par le déménagement
des opérations interurbaines de Summerside à Charlottetown.
1974 - La partie Summerside-Egmont est remplacée
par un système Lenkurt à 450 canaux.
1979 - Deux systèmes Lenkurt 878C3 sont
installés entre Nutby Mountain, en Nouvelle-Écosse.
à Tea Hill pour transmettre les signaux de télévision
à Island Cablevision.
1979 - Extension du réseau jusqu'à
Churchill, Île-du-Prince-Édouard, à partir de
Nutby Mountain, Nouvelle-Écosse. en utilisant un 2 GHz. Système
Lenkurt 878C3. De plus, en 1979, le site de la baie Egmont a été
mis hors service et remplacé par la nouvelle liaison à
130 canaux entre Murray River, à l'Île-du-Prince-Édouard,
et Fraser Mountain, en Nouvelle-Écosse. Cette nouvelle liaison
a ouvert deux ans avant la mise hors service d'Egmont et a été
inaugurée le 8 février 1977. Ce système était
alimenté par un système Lenkurt 71F à 120 canaux
fonctionnant à 2 Ghz. 24 canaux étaient réservés
aux besoins futurs et aux urgences. Photo de Terry Biddlecombe.
1986 - Une nouvelle route numérique est
construite avec 672 circuits de Charlottetown, à Seal River
jusqu'à Hardwood Hill, en Nouvelle-Écosse, puis à
Fraser's Mountain, et enfin à Halifax.
Le développement des micro-ondes s'est poursuivi
à l'Île-du-Prince-Édouard afin de fournir davantage
de liaisons avec le continent et, en fait, dans toute l'Île,
avec un nombre croissant de liaisons et des stations plus puissantes.
Le succès de la première installation de micro-ondes
de l'île à Tea Hill a été suivi de près
par les sociétés membres du Trans Canada Telephone
System et, finalement, elles ont adopté un lien de stations
de micro-ondes partout au Canada. En 1958, dix ans après
l'adoption des micro-ondes par l'île, le système micro-ondes
transcanadien a été achevé et a couvert les
3 900 milles d'Halifax à Vancouver avec plus de 139 installations
de répéteurs à travers le pays. Ces informations
sur les installations de micro-ondes sur l'île s'appuient
en grande partie sur le livre de Walter Auld, "Voices of the
Island".
1985 - Le câble à fibre optique fait
ses débuts à l'Île-du-Prince-Édouard
avec une longueur de 25,6 km. lien de Charlottetown à Seal
River offrant des parcours de parole pour 2016. Une deuxième
piste a été installée entre Seal River et Montague,
offrant 672 voies vocales.
2004 - Bragg Communications (Eastlink) installe
un câble sous-marin à fibre optique de 56 kilomètres
traversant le détroit de Northumberland, de Graham's Pond,
à l'Île-du-Prince-Édouard, à Port Hood,
en Nouvelle-Écosse. L'installation a été réalisée
par IT International Telecom et le navire Alcatel-Lucent «
Île de Batz ».
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Nova scotia Telephone réagira vite et adopte une
charte fédérale sous le nom de Nova Scotia and New Brunswick
Telephone. Les autorités faisant trainer les choses et finalement
la charte fédérale ne sera pas accordée. Entre temps
la New Brunswick Telephone avait ouvert des centres téléphoniques
dans les principales villes, déclanchant une guerre des prix ...
La situation devint vite incontrôlable.
Nova scotia Telephone fit appel à Sise qui vint sur place et exposa
la théorie de Vail sur l'occupation du territoire et suggère
de construire une ligne entre les provinces de Amherst et Moncton ...
Rien n'y fit , il fallut se résoudre à vendre.
Bell racheta les installations de la New Brunswick Telephone au New Brunswick
et les revenda à la New Brunswick Telephone en 1889 pour 50 000
dollars, moitié en argent moitié en actions soit une participation
de 31 % .
Tout comme en Nouvelle Ecosse, la nouvelle compagnie nommera deux représentants
de Bell au conseil d'administration.
Le réseau de Bell Nova Scotia Telephone au Nouveau Brunswick compta
quatre centres téléphoniques pour 520 abonnés.
Bilan : la perte de la Nouvelle Ecosse et du Nouveau Brunswick enleva
1200 abonnés à Bell
Le repli de bell Telephone sur le Québec l'Ontario et l'Ouset est
relatif, le gros de la population du Canada est concentrée sur
le Québec et l'Ontario.
Bell continera à fournir les équipements pour l'Ile Edouard
Nouvelle Ecosse et le Nouvea Brunswick. Mais la pénuerie de capitaux
continue de freiner la pénétration du téléphone
de façon discriminatoire.
Bell privilégia les grandes villes ou le taux de rendement est
intéressant, contrairement aux campagnes, Le mécontentement
dans la majeure partie du Canada menace l'existance du monopole de Bell
.
1889 La toute première facture du service téléphonique
de la chambre élective du Parlement provincial.
Celle-ci a été envoyée par la Bell Telephone
Company of Canada (aujourdhui Bell Canada) à lhonorable
Félix-Gabriel Marchand, alors quil siégeait
comme premier ministre du Québec.
En 1890 Size prend la présidence de la socièté
(jusqu'en 1915).
En 1892, une loi spéciale est adoptée au Parlement
canadien qui stipule que toute augmentation des tarifs téléphoniques
doit au préalable être approuvée par le gouverneur
en conseil; cet événement marque le début de
la réglementation de la téléphonie au Canada.
Durant les années 1880, 1890 et 1900, les
caractéristiques de la clientèle de Bell demeurent
à peu près les mêmes : manufacturiers, commerçants,
gens daffaires, familles fortunées, notables, institutions.
La progression comparée des abonnés daffaires
et résidentiels permet de souligner un rythme différentiel
dans les deux cas. Ainsi, on constate que le marché daffaires
est plus rapidement saturé. Cest pourquoi, à
partir de la fin des années 1910, Bell se tourne davantage
vers le milieu résidentiel et met en uvre une politique
commerciale active destinée spécifiquement à
cette clientèle. Au cours des années 1920, on peut
observer un changement dans la proportion des abonnés : le
pourcentage de la clientèle résidentielle gagne du
terrain pour atteindre 50 % des utilisateurs. Toutefois, pour accroître
ses revenus, Bell préfère augmenter la consommation
du service téléphonique auprès de ses abonnés
plutôt que de recruter de nouvelles clientèles, jusque-là
plus ou moins étrangères à la culture téléphonique.
Par exemple, lentreprise propose à ses clients résidentiels
la location dun deuxième appareil.
13 avril 1900
Un centre téléphonique à batteries centrales
est installé à Ottawa, en Ontario. Les batteries
sont retirées de chez le client
Au lieu de tourner la manivelle du téléphone pour
obtenir la téléphoniste, le client na quà
soulever le récepteur pour parler à l'opératrice.
En 1900 le
service de base résidentiel coutait 30-35 dollars pour Montreal
Toranto et de 50-55 dollars pour le marché d'affaires alors
qu'à New York il était de 240 dollars. Cela parce
que en 1885 le gouvernement annula les brevets de Bell ce qui créa
un début de conurrence et incita à la baisse des tarifs
pour le téléphone. Aux Etats Unis les brevets resterons
en vigueur jusqu'en 1893-94.
Sise privilégia le marché d'affaires : les entreprises
d'abord, les foyers ensuite. Démarche qui resta car c'est
au marché d'affaires qu'il appartient d'amortir les coûts.
De même les villes auront la priorité sur la campagne
jusqu'au tournat du siècle lors du déferlement d'émigrands
vers l'Ouest. Une masse d'agriulteurs sans fortune exigerons et
obtiendront le téléphone, ils briseront les barrières
géographique et sociale qui faisait obstacle à ladiffusion
de cette nouvelle tehnologie. Ils provoqueront même une grave
crise économique de la Bell Telephone.
Lachat de concessions exclusives des municipalités
était un autre moyen de détruire la concurrence :
en 1905, Bell en avait déjà acheté 30,
et elle en acquit 40 autres de 1905 à 1910.
En échange de la garantie dun monopole local, Bell
versait un droit de concession à chaque municipalité
et offrait souvent un certain nombre dappareils gratuitement.
Elle consentait à ne pas augmenter ses tarifs pendant une
période déterminée ; ce fut le seul contrôle
réel auquel ses tarifs furent soumis durant plusieurs années.
Sise imagina une autre tactique pour vaincre la concurrence
: signer, avec les sociétés ferroviaires, des contrats
donnant à Bell le droit exclusif de placer des appareils
téléphoniques dans les gares et de construire des
lignes téléphoniques le long des voies ferrées.
Pour les compagnies de téléphone concurrentes, être
exclues des gares leur infligeait un dur coup : par exemple, les
marchands ne pouvaient pas se servir de téléphones
indépendants pour se renseigner sur larrivée
des marchandises.
Parfois, les sociétés ferroviaires elles-mêmes
en souffraient. Ainsi, à Fort William (Thunder Bay, Ontario),
le conseil municipal, qui exploitait un service téléphonique
en concurrence avec Bell, riposta en interdisant à celle-ci
dinstaller des appareils au poste de police et au poste de
pompiers. Les employés du chemin de fer ne pouvaient pas
communiquer rapidement avec ces postes, même en cas durgence.
Au début du xxe siècle, Bell inspirait une insatisfaction
si générale et une animosité telle que le Parlement
recevait par centaines des pétitions dans lesquelles des
municipalités, des comtés et des particuliers réclamaient
un resserrement du contrôle gouvernemental.
Sous la direction de William Douw Lighthall, lUnion des municipalités
canadiennes recommandait létatisation des systèmes
téléphoniques.
En mars 1905, comme le mécontentement ne cessait de
croître, le premier ministre, sir Wilfrid Laurier, confia
à un comité spécial des Communes présidé
par le maître général des Postes, sir William
Mulock, le mandat denquêter et de faire rapport sur
la situation.
Devant cette tournure imprévue des événements,
Sise, alors âgé de 70 ans, écourta des vacances
en Europe pour accourir à la défense de Bell.
sommaire
Non seulement Sise engagea-t-il une équipe
davocats et de témoins experts prestigieux et politiquement
influents, mais il soutint Bell dautres manières
en présentant lui-même un témoignage long et
passionné devant le comité et en exerçant des
pressions en coulisse.
Les renseignements recueillis par le comité prouvaient que
lentreprise exigeait des tarifs élevés dans
les territoires où elle détenait un monopole, quelle
se livrait à des pratiques impitoyables là où
elle avait des concurrents et que, dune façon générale,
il ny avait pas de service dans les régions rurales.
Malgré tout, Sise parvint à convaincre le comité
de ne pas faire de recommandations et de se contenter de publier
intégralement la transcription de ses travaux, ce qui eut
pour effet de rendre tout lexercice quasi inutile.
Laurier mit fin à lenquête sur le téléphone
à la veille de la fin de la session parlementaire en juillet.
Les pouvoirs de réglementer Bell furent délégués
au Conseil des commissaires des chemins de fer en 1906.
La solution de Laurier à la controverse du
téléphone ne plut pas dans les Prairies : en 19081909,
les trois gouvernements provinciaux achetèrent les installations
de Bell.
Pendant un temps, dans lespoir dapaiser le ressentiment
des gens de lOuest, Sise avait envisagé de confier
ces installations à une filiale, la North American Telegraph
Company, mais il finit par se résigner à la provincialisation.
Lachat des installations par les gouvernements
provinciaux améliora sans nul doute la rentabilité
de Bell, car il lui permit de se concentrer sur les marchés
les plus populeux et les plus potentiellement lucratifs.
En plus, une fois confiné à lOntario et au Québec,
Sise put se consacrer au développement des activités
manufacturières. Bell avait commencé à
fabriquer de léquipement en 1881, mais pas
suffisamment pour conjurer la décision du commissaire des
brevets en 1885.
Puis, en 1895, Sise avait convaincu Bell de fonder la Northern
Electric and Manufacturing Company. Cette société
sétait mise à produire des articles fabriqués
auparavant par Bell avec lautorisation de lAmerican
Telephone and Telegraph. Quatre ans plus tard, Sise vendit à
Bell, pour la somme de 500 000 $, une entreprise montréalaise
qui avait aussi fourni de léquipement à Bell
et dans laquelle il avait des intérêts majoritaires,
la Wire and Cable Company.
Ces manipulations organisationnelles ennuyaient la
direction de la Western Electric, la filiale de lAmerican
Telephone and Telegraph qui fournissait léquipement
à Bell. En 1901, Bell sapprêtait à réduire
ses commandes à la Western Electric, qui était exclue
dautres marchés canadiens à cause dune
entente antérieure selon laquelle elle ne devait pas faire
directement concurrence à Bell. La Western Electric avait
de linfluence sur Sise, car sa société mère
était en même temps le plus gros actionnaire de Bell.
En plus, en vertu de lentente de 1880, la Western Electric
fournissait à Bell tous les brevets obtenus au Canada. Cest
dans ce contexte que, pour apaiser les tensions, Sise accepta que
la Western Electric acquière au cours des années suivantes
des intérêts minoritaires mais substantiels dans la
Northern Electric and Manufacturing Company et dans la Wire and
Cable Company. En 1914, quand Bell fusionna ces deux filiales manufacturières
pour former une nouvelle entreprise nommée Northern Electric
Company, la Western Electric acquit 43,6 % des actions ; Bell et
ses dirigeants canadiens souscrirent le reste, soit 56,4 %. Ce schéma
de propriété persista jusquà la fin des
années 1950. Il permit à la Northern Electric de se
servir des brevets et maquettes de la Western Electric, mais retarda
ses progrès dans linnovation.
Par ailleurs, Sise mit au point les arrangements
par lesquels Bell fit des interconnexions avec des compagnies indépendantes
après lentrée en vigueur de la réglementation
en 1906. En vertu des modifications apportées cette année-là
à lActe des chemins de fer, le Conseil des commissaires
des chemins de fer pouvait ordonner des raccordements entre ces
compagnies locales et les lignes interurbaines de Bell « à
telle condition rétributive que la Commission juge[ait] juste
et à propos ». Bell accepta que certaines compagnies
indépendantes se raccordent à ses lignes interurbaines
sans recourir au conseil. Cependant, les soi-disant « compagnies
concurrentes » se virent refuser de faire des interconnexions
et durent présenter leur cause au conseil. Par une série
de décisions, les commissaires déclarèrent
que les compagnies qui se présentaient devant eux pour demander
des raccordements devraient dédommager Bell pour la perte
de clientèle locale et pour les frais des raccordements.
Ces décisions étaient si désavantageuses
que, au début des années 1920, il ne restait plus
de compagnies « concurrentes ».
Sise était tout dune pièce,
mais il avait une personnalité incomplète, et cétait
peut-être un solitaire. Autocrate énergique et méticuleux,
il se tenait à lécart des employés, à
qui il inspirait généralement la plus grande loyauté
et le plus grand respect. Envers les concurrents, il était
froid et calculateur, voire impitoyable. Envers les gouvernements,
il pouvait être irritant et, à loccasion, sournois.
Bien quil ait appartenu au Club St James et au Club Mont-Royal
de Montréal, cet homme tranquille et austère trouvait
repos et détente surtout chez lui. Il y faisait régner
lordre et la discipline et nétait pas très
proche de ses enfants ; dailleurs, il avait de 40 à
45 ans de plus que ses fils issus de son second mariage. Il lisait
beaucoup mais navait pas dautres passe-temps, tant il
était absorbé par la défense et lavancement
de la compagnie quil avait formée.
Sise dirigea personnellement les activités
de la Compagnie canadienne de téléphone Bell durant
35 ans, dabord à titre dagent spécial
en 1880, puis, de 1880 à 1890, de vice-président et
directeur administratif, puis finalement, de 1890 à 1915,
de président et directeur administratif.
Sise de 1915 à son décès en 1918, il fut président
du conseil dadministration de Bell.
Toutefois, son influence persista au delà de sa retraite
et de sa mort, car, comme la dit un historien du xxe siècle,
il « colonisa la compagnie avec ses protégés
». Lewis Brown McFarlane, que Sise était allé
chercher à la Compagnie de télégraphe de la
Puissance en 1880, lui succéda à la présidence
en 1915, détint ce poste jusquen 1925 et fut président
du conseil dadministration de 1925 à 1930.
Le fils aîné de Sise, nommé aussi Charles Fleetford,
entra au conseil dadministration de la compagnie en 1913.
Nommé président de lentreprise en 1925 à
la suite de McFarlane, il exerça cette fonction jusquen
1944 et occupa aussi, entre autres, un poste dadministrateur
à la Northern Electric Company.
Les autres fils de Sise, Edward Fleetford et Paul Fleetford, furent
placés au conseil dadministration de la Northern Electric
en 1911 ; Edward Fleetford fut nommé président de
cette entreprise en 1914 et Paul Fleetford lui succéda en
1924.
La famille Sise domina donc la Compagnie canadienne de téléphone
Bell durant deux générations, de 1880 à 1944.
sommaire
Montréal, La Ville contre les poteaux
et les fils
Édifice Bell de la rue Saint-Jean en 1908,
En même temps que Bell élabore
sa propre vision du réseau et du service téléphoniques
faisant appel à une rationalité limitée
et à une conception étanche de la nouvelle technologie
et de ses applications , diverses formes dopposition
sont mises de lavant par des acteurs locaux concernés
par laménagement urbain, principalement les gestionnaires
et les élus municipaux ainsi que les membres des mouvements
associatifs. Réclamant une plus grande part dautonomie
dans le champ sociopolitique eu égard au développement
et à la gestion des services publics, ils tentent de
faire valoir la légitimité de leur point de
vue et de leurs intérêts. Voulant élargir
la marge de manoeuvre de ladministration municipale
par rapport à ces services, les gestionnaires publics
suggèrent une vision de laménagement urbain
qui se démarque de celle des opérateurs privés.
Des arrangements institutionnels plus conformes à leurs
attentes sont négociés avec les exploitants
du service téléphonique. Au fil des ans, les
diverses interventions des pouvoirs publics montréalais
principalement ladministration municipale
sont parvenues à infléchir les pratiques de
Bell. Malgré leur portée limitée, ces
tentatives nont pas moins contribué à
redéfinir le cadre de laction collective.
Au cours de la période étudiée,
la nature des rapports entre les gestionnaires publics de
lespace urbain et les opérateurs privés
du téléphone sest modifiée. Dans
un premier temps, cest-à-dire à partir
de lintroduction du service de Bell en 1880, et ce,
jusquen 1906, on peut considérer quil sagit
là dune sous-période dexpérimentations.
Sur les plans juridique et institutionnel, les gestionnaires
municipaux sont alors confrontés à de nouveaux
enjeux : présence physique des infrastructures, modalités
de tarification du service, projet de municipalisation du
téléphone.
Les mouvements de protestation dirigés
par la municipalité aboutissent, en 1906, à
lobtention dune réglementation fédérale
plus étroite des activités commerciales de Bell.
En 1908, lentreprise obtient néanmoins le monopole
du service sur le territoire montréalais.
À qui appartient la rue ?
Le poids croissant du politique (1880-1906)
Dentrée
de jeu, on peut dire que les équipements du réseau
téléphonique ne font pas seuls lobjet
de critiques sévères de la part des collectivités
locales. En effet, à partir de la seconde moitié
du XIXe siècle, la diffusion de lensemble des
nouveaux services de transport et de communication donne lieu
à des oppositions animées entre, dune
part, les administrations municipales et, dautre part,
les distributeurs privés de services. On est ici loin
des représentations de la ville moderne et efficace
telles que véhiculées par le discours et liconographie
publicitaires. En fait, on observe un décalage considérable
entre les images idéalisées de la ville mises
de lavant par les opérateurs privés de
réseaux et la réalité urbaine telle que
vécue par les habitants des quartiers centraux et que
reflète en bonne partie la position des gestionnaires
publics locaux.
Même si à première
vue il semble que la matérialité des infrastructures
soit en grande partie responsable de la montée des
mouvements locaux de protestation, il reste quavant
tout, ce sont des enjeux sociopolitiques qui les alimentent.
Ces enjeux concernent dabord la place de plus en plus
importante occupée par les grandes entreprises privées
dans lespace urbain. Ensuite, cest la situation
dinégalité prévalant dans la distribution
des services sur les plans géographique et tarifaire
qui est contestée. Enfin, les avantages commerciaux
dont bénéficient les entreprises monopolistiques
les gouvernements fédéral et provincial
font dailleurs preuve de complaisance à légard
de cette situation incommodent beaucoup les élus
locaux et leurs alliés. Ceux-ci ont limpression
de perdre le contrôle de laménagement du
territoire. Cest pourquoi ils vont tenter de se réapproprier
certains pouvoirs, notamment par le biais de la réglementation.
Une réglementation municipale inopérante
Au cours des années
1880, certaines associations qui représentent des groupes
de citoyens préoccupés par les problèmes
daménagement, de transport et de communication
sinquiètent de ce que la municipalité
nait aucun pouvoir juridique pour contrôler le
développement du réseau téléphonique.
Elles réclament notamment une réglementation
plus stricte de linsertion physique des équipements
téléphoniques. Cest le cas de la Chambre
de commerce qui affirme, en 1889, que les poteaux et les fils
« gênent le commerce et la circulation publique».
Ainsi, les représentants de cette association demandent-ils
aux membres du Comité des chemins et au Département
en Loi de la Cité de Montréal de prévoir,
dans la charte de la Ville, de nouvelles dispositions obligeant
les entreprises de services publics à enfouir leurs
équipements. Lannée suivante, un amendement
à la Charte de la Cité de Montréal autorise,
du moins théoriquement, ladministration municipale
à intervenir et à encadrer laction des
opérateurs privés .
Angle des rues Gosford et Craig (Saint-Antoine),
Montréal, 1913. Et équipe de Bell installant
les câbles de téléphone dans les conduits
souterrains de l'entreprise, à l'angle des rues Sherbrooke
et Redpath dans le quartier Saint-Antoine, Montréal,
1903.
Un projet de construction dun
réseau municipal de conduits souterrains est associé
à cet amendement. Selon la nouvelle loi, le Conseil
municipal peut, par règlement, forcer toutes les compagnies
de télégraphe, de téléphone ou
déclairage « à placer sous terre
leurs fils posés dans les rues ou ruelles où
les dits conduits souterrains auront été complétés,
et faire enlever les poteaux ; le tout dans les six mois qui
suivront lavis à être donné par
la corporation».
Par contre, le même règlement
permet aux entreprises de construire leurs propres canaux
sous la surveillance des inspecteurs municipaux. Les concepteurs
des réseaux, notamment les dirigeants de Bell, vont
dailleurs rapidement profiter de cette possibilité
qui leur est offerte.
En 1890, lannée où la
Ville se voit dotée de nouveaux pouvoirs juridiques
lui permettant dobliger les compagnies à enfouir
leurs équipements, Bell obtient la permission dinstaller
un conduit souterrain rue Sainte-Catherine, entre les rues
de la Montagne et Saint-Christophe4. Les années suivantes,
une bonne partie des équipements de Bell localisés
dans le quartier des affaires et dans le quartier Saint-Antoine
(nommé aussi secteur Uptown) sont enterrés grâce
à cette disposition.
Cest surtout pour des raisons techniques que la compagnie
montréalaise effectue ces travaux. En effet, lélectrification
des tramways et lintroduction de léclairage
électrique dans les milieux urbains denses accroissent
la quantité de fils et de poteaux, et provoque de ce
fait des problèmes de transmission des communications.
Dès lors, on envisage vite lenfouissement des
infrastructures comme la seule solution à ce problème.
Cest du moins lexplication présentée
dans le rapport annuel de Bell en 1891 :
The introduction of electricity for Street Railways, Motors,
etc., as well as Electric Lighting, has made it necessary
to provide for a great deal of reconstruction, of which in
the larger Cities, a large percentage must be underground.
This work is being carried on as rapidly as its nature will
permit.
En 1891, le premier
tronçon des travaux denfouissement de Bell est
terminé6. Toutefois, les nouvelles dispositions normatives
municipales autorisant la construction du réseau téléphonique
ne sont guère plus restrictives quauparavant.
Dans plusieurs quartiers centraux, les innombrables poteaux
plantés sur le trottoir et lenchevêtrement
de fils qui obstruent lespace aérien offrent
un aspect aussi chaotique.
En 1903, une Commission spéciale
du Conseil municipal au sujet des conduits souterrains est
mise sur pied. Elle devra proposer une solution définitive
à la multiplication des infrastructures requises pour
la distribution des services qui utilisent lélectricité
comme force motrice. Au cours dune réunion tenue
pendant lété 1903, les membres de la Commission
invitent différents représentants des entreprises
de services publics, notamment C. F. Sise et L. B. Macfarlane7,
à venir les rencontrer. On sollicite en fait leur présence
pour élaborer un plan commun denfouissement des
fils.
Dans un premier temps, les membres de
la Commission des conduits souterrains procèdent à
lembauche dun expert qui doit préparer
les plans et les spécifications et estimer les coûts
de leur réalisation. Les commissaires font appel à
un expert étatsunien, Charles E. Phelps, lingénieur
en chef de la Subway Commission de Baltimore. Son plan, présenté
aux membres de la Commission spéciale en janvier 1904,
favorise lenterrement des fils au centre-ville et linstallation
des équipements le long des ruelles dans les autres
quartiers. Par la suite, il est résolu de soumettre
ce plan au Conseil municipal. Celui-ci devra sadresser
à la Législature de Québec « pour
obtenir les pouvoirs nécessaires pour forcer les Compagnies
électriques établies dans la Cité de
Montréal à mettre leurs fils dans un conduit
commun appartenant à la Cité et sous son contrôle
absolu [...]».
Lopinion rendue par les avocats de la
Ville à la suite du rapport préparé par
lexpert étatsunien illustre létat
dimpuissance dans lequel se trouve ladministration
municipale. Afin dy pallier, on suggère dintroduire
un nouveau règlement municipal qui ferait en sorte
que la Ville puisse exercer elle-même
les prérogatives qui lui sont garanties par sa Charte,
à savoir : le droit de forcer toutes personnes, compagnies
ou corporations possédant des franchises ou ayant des
droits acquis dans les rues de Montréal, de placer
sous terre Leurs tuyaux, conduits et fils conducteurs.
Quelques mois après le dépôt
au Conseil de ce plan et du rapport juridique qui laccompagne,
les membres de la Commission échevinale spéciale
invitent à nouveau les représentants des principales
entreprises à discuter des modalités de mise
en oeuvre du projet et des dispositions techniques, administratives
et financières quil implique. Manifestant leur
intention dobtenir de nouveaux pouvoirs auprès
du gouvernement provincial pour construire un réseau
de conduits souterrains, les membres de la Commission spéciale
se trouvent confrontés à de vives objections
de la part des directeurs des principales compagnies concernées,
à savoir Montreal Light, Heat and Power Company (qui
exploite les réseaux dénergie électrique
et de gaz), Montreal Street Railway Company et la Compagnie
de Téléphone Bell du Canada. Les principales
critiques ont trait aux droits acquis des entreprises, à
ladministration effective du réseau souterrain
et aux pertes financières qui seraient encourues par
la construction de nouveaux conduits.
Au-delà des nombreuses considérations
techniques et financières mentionnées, on constate
que les dirigeants de Bell sopposent à la vision
limitée et à court terme mise de lavant
par la Ville. En bref, ils considèrent que cette dernière
est incapable de planifier et de gérer un système
de conduits souterrains qui soit conforme aux besoins croissants
dune métropole en pleine expansion. Pour démontrer
que le projet dun réseau municipal de conduits
souterrains extensif nest pas souhaitable, les opérateurs
privés font prévaloir leur expertise dans le
domaine de la distribution des services
Malgré les objections des entreprises
privées, le Conseil municipal adopte en octobre 1905
le règlement no 343 « relatif à lenlèvement
des poteaux et à lenfouissement des fils ».
Selon ce règlement, il est désormais interdit
de poser des poteaux et de suspendre
des fils conducteurs le long ou à travers aucune rue,
allée et place publique dans la Cité de Montréal.
Tous les poteaux déjà érigés et
les fils conducteurs déjà suspendus devront
être enlevés, et lesdits fils conducteurs devront
être placés dans des conduites souterraines.
Le caractère radical des clauses
de ce règlement peut étonner, car il limite
les activités des entreprises de services publics au
point même de nuire à la distribution des services.
De plus, il confère une grande responsabilité
à la municipalité. Toutefois, en pratique, ce
règlement na pas eu limpact escompté.
En effet, une fois le règlement adopté, les
rues de la métropole restent encombrées de poteaux
et de fils. Il faut rappeler que, même si la Ville de
Montréal est mandatée, grâce au nouveau
règlement, pour encadrer la pose des équipements,
les sociétés de téléphone, et
en particulier Bell, détiennent aussi des pouvoirs
accordés par le gouvernement fédéral
qui leur permettent doutrepasser la réglementation
municipale. Dès lors, même si, en principe, les
compagnies doivent recevoir lassentiment de la municipalité
pour implanter leurs infrastructures, on aménage encore
lespace public de la rue en fonction des équipements.
En fait, ce sont les intérêts privés qui
continuent à orienter le développement urbain.
Cest ainsi que, quelques années
plus tard, le règlement adopté en 1905 est qualifié,
de manière cynique, par un journaliste du Nationaliste
« dinutile, mais long». Le sous-titre de
larticle insiste sur linefficacité des
dispositions juridiques municipales en ce qui a trait à
lenfouissement des équipements : « Le 18
octobre 1905 la Ville de Montréal interdisait à
toutes les compagnies de planter des poteaux dans les rues.
Cest depuis ce moment-là quon en
a posé le plus. La défense de la Ville ne frappe
quelle seule. »
Le caractère inintelligible du
règlement serait responsable dun accroissement
des procédures bureaucratiques qui rendent, ainsi,
inopérant le règlement en question. Il en découle,
de toute évidence, une absence de mesures concrètes
et efficaces. Selon lauteur de larticle, contrairement
à ce quils prétendent, en dernière
analyse, les « maîtres des rues de Montréal
» ne sont pas les commissaires et les échevins.
La Commission Mulock de 1905
Évoquée
dès la toute fin des années 1870 lors de lintroduction
du téléphone, la question du contrôle
des rues en rapport avec les infrastructures est à
nouveau soulevée en 1905. Cela survient lors dune
Commission parlementaire spéciale mise sur pied pour
examiner lindustrie du téléphone au Canada,
la Commission Mulock. Le sentiment dinsatisfaction face
au service exprimé par les municipalités locales
atteint alors un point culminant, et ce, à léchelle
du pays. Ce mouvement dopposition incite le gouvernement
canadien à considérer de plus près la
question. Au cours de cette même année, le Parlement
canadien reçoit une pétition de 195 municipalités
et comtés dans laquelle les signataires demandent que
les compagnies de téléphone soient soumises
à la juridiction municipale afin que les administrations
locales puissent contrôler linstallation des poteaux
et des câbles. LUnion des municipalités
canadiennes, récemment constituée, envoie une
pétition exigeant que le service téléphonique
soit distribué par lÉtat puisque, selon
ses représentants, le service téléphonique
est devenu un élément indispensable au bien-être
socioéconomique des citoyens.
Formée sous
le gouvernement Laurier et dirigée par Sir William
Mulock, alors en charge des services postaux canadiens, cette
Commission parlementaire a pour mandat de formuler des recommandations
relatives à la tarification et à la réglementation
du service téléphonique. Dans les transcriptions
des audiences tenues devant les commissaires, les enjeux que
représente le téléphone pour les municipalités
ressortent clairement.
Lorsque la Commission Mulock est mise
sur pied, les représentants des mouvements de réforme
urbaine sont engagés de manière ouverte dans
un affrontement qui oppose les municipalités aux exploitants
privés des services urbains, y compris le service téléphonique.
Un de ces représentants tente de transformer les principaux
éléments de litige en enjeu politique. Il sagit
de lun des chefs de file du réformisme urbain
au Canada, W. D. Lighthall qui, quelques années auparavant,
avait participé à la formation de lUnion
des municipalités canadiennes. Ce poète, romancier,
historien, avocat et maire de Westmount nen est pas
à sa première expérience : il a déjà
dirigé des mouvements dopposition aux monopoles.
Comme le suggère le titre dun de ses articles
écrits en 1905, lautonomie municipale (municipal
freedom) devrait permettre une meilleure planification du
développement urbain. Cest ce que les réformistes
espèrent pour pouvoir reprendre la maîtrise du
développement des villes. Puisque plusieurs grandes
entreprises privées, notamment Bell, court-circuitent
la juridiction municipale en allant chercher leurs pouvoirs
auprès des gouvernements fédéral et provincial,
il est impératif, selon les réformistes, que
les municipalités soient munies de nouvelles compétences.
Cest à cette seule condition quelles seront
en mesure de lutter contre linfluence considérable
des monopoles dans le domaine des services publics.
Comme les représentants des municipalités
mettent de lavant limage négative dun
service dont les équipements nuisent au bon déroulement
des activités urbaines, il nest pas étonnant
de constater que leurs critiques à lendroit de
Bell portent avant tout sur la présence physique du
service téléphonique dans la ville. Il est certain
aussi que ces acteurs tentent daccroître leur
indépendance, qui semble passer par la maîtrise
de ce qui relève du domaine public. Cest pourquoi
lUnion des municipalités canadiennes reproche
à Bell denvahir la voie publique et dempiéter
sur la juridiction municipale.
Lenfouissement des câbles
détruit les pavés et, par le fait même,
nuit au fonctionnement des activités urbaines. Il en
résulte de nombreux inconvénients à la
circulation des marchandises et des personnes. La présence
des poteaux et des câbles dans les villes crée
aussi des problèmes au service de sûreté
publique. Les pouvoirs publics craignent en effet les accidents
et, surtout, les incendies. À ce propos, on soutient
que les infrastructures gênent le travail des pompiers.
De plus, la concentration des équipements téléphoniques
dans le quartier des affaires tend à provoquer une
hausse des primes dassurance. On reproche toujours aux
poteaux et aux câbles doccuper trop despace
sur la voie publique et, par conséquent, de nuire aux
autres infrastructures de services publics, par exemple aux
fils électriques nécessaires aux tramways et
à léclairage public. Certains commentateurs
abordent même le problème sous un angle esthétique.
La prolifération des câbles et des poteaux constituerait
une entrave à lembellissement des rues. Selon
les détracteurs des monopoles privés, cest
ce non-respect des principes dembellissement urbain
dont les citoyens se plaindraient le plus.
Les retombées
de la Commission parlementaire ne jouent pas en faveur des
municipalités. Sa seule décision majeure concerne
la surveillance de la tarification du service téléphonique.
Désormais, cest la Commission des chemins de
fer qui assumera cette tâche. À partir de 1906,
les tarifs du service commencent à être soumis
à lapprobation de cette Commission qui doit veiller
à réduire les écarts entre les tarifs
à léchelle canadienne. Cest dire
quà chaque fois que Bell voudra réviser
ses tarifs, ses dirigeants devront dorénavant se présenter
devant la Commission des chemins de fer pour justifier leur
hausse. Lentreprise devra alors fournir des rapports
détaillés de ses activités financières
et prouver que ses demandes sont raisonnables. En dautres
termes, la compagnie devra démontrer que les demandes
de hausse tarifaire nont pas pour seul but de favoriser
les actionnaires. Les nouvelles dispositions adoptées
obligent aussi Bell à se soumettre à la réglementation
municipale, à condition toutefois que les responsables
locaux ne retardent pas intentionnellement la pose de nouvelles
lignes.
Bien que soumises à une réglementation
fédérale plus serrée, les pratiques de
Bell continuent dincommoder les élus municipaux
et les représentants des associations corporatives.
Aux lendemains de la Commission Mulock, la tarification constitue
sans doute lun des enjeux majeurs des services publics
de communication, et ce, jusquau début des années
1920. Cest que la surveillance des tarifs effectuée
par la Commission des chemins de fer nentraîne
pas de baisses tarifaires substantielles pour les clientèles
commerciale et résidentielle montréalaises.
Et le problème de lencombrement de lespace
public occasionné par les poteaux et les fils reste
encore au coeur des conflits qui opposent la municipalité
aux opérateurs privés du réseau.
Des plans municipaux d'enfouissement des infrastructures
En 1908, au retour
dun voyage en Europe où il a été
très impressionné par les rues dégagées
de la capitale française, le maire Louis Payette (en
poste de 1908 à 1910) met sur pied une nouvelle Commission
spéciale qui se penche sur les conduits souterrains.
Cest quau cours de lannée précédente,
un rapport présenté en juin par la Canadian
Fire Underwriters Association a démontré la
nécessité denfouir les équipements
électriques compte tenu des dangers dincendie
quils représentent. Selon ce rapport, Montréal
serait lun des pires exemples dencombrement dû
à la trop grande quantité de fils et de poteaux,
ce qui augmenterait dautant les risques dincendie
provoqués par les courts-circuits.
À linstar de la Commission municipale
des conduits souterrains de 1903 dont la retombée est,
comme on la vu, une réglementation locale non
respectée, la nouvelle Commission a pour mandat de
mettre en place les moyens nécessaires pour procéder
à lélimination des poteaux et des fils
qui défigurent le paysage urbain. Lidée
est similaire à celle du projet précédent
: à laide dun prêt 5 millions de
dollars amorti sur une période de 40 ans et consenti
par le gouvernement provincial, la Ville veut construire un
réseau de conduits destiné à accueillir
tous les fils électriques, télégraphiques
et téléphoniques de la métropole. Les
entreprises seraient obligées dy installer leurs
équipements et de verser des redevances à la
Ville.
Dans lesprit de ladministration
municipale, ce plan densemble denfouissement doit
être mis en oeuvre par des ingénieurs municipaux.
Néanmoins, la réussite dune telle opération
implique une collaboration étroite entre les ingénieurs
municipaux et les ingénieurs des entreprises privées
de services publics, ce qui est sous-entendu. Doù
limportance dinstaurer une médiation, dune
part, entre les intérêts publics et les intérêts
privés et, dautre part, entre les dispositifs
institutionnels et les systèmes techniques. Cest
du moins en ces termes quun journaliste dun quotidien
anglophone de la métropole saisit les défis
inhérents au projet municipal: « It is very important
that the engineers should have diplomacy as well as engineering
skills, so that they might show the companies interested that
it is in their best interests to work in harmony with the
city. »
Même si, grâce à
sa Charte, la Ville détient les pouvoirs requis pour
réaliser un tel plan, sa conception et sa mise en uvre
ne vont pas de soi. Les difficultés rencontrées
en cours de planification sont multiples : elles sont reliées
à des questions économiques (le financement),
à des enjeux politico-institutionnels (la délimitation
des pouvoirs propres aux sphères publique et privée,
voire linstauration dun partenariat qui requiert
laccord de toutes les entreprises engagées dans
le projet), à des aspects techniques (la conception
dun réseau de conduits adapté aux besoins
futurs) et à des problèmes juridiques (droits
de passage et dusage). Citant les exemples de New York
et de Boston où lon a enfoui avec succès
les fils, un échevin déclare quil ne voit
pas pourquoi les pouvoirs publics montréalais ne réussiraient
pas à concrétiser ce projet. Par ailleurs, un
autre échevin exprime ses réserves à
lendroit de cette tendance à vouloir transposer,
au cas montréalais, le modèle propre à
dautres villes : The mere question
of building the conduit is not the most important phase of
this matter. Other cities have built conduits and we have
their experience to go upon. But what is important in this
connection is the appointing of men who know all our local
conditions so that they will be able to deal with the companies
in an intelligent manner.
On le voit bien, cest par rapport à
lenjeu général de la domanialité
et à lenjeu spécifique de la construction
de mécanismes de conciliation des intérêts
publics et des intérêts privés que les
acteurs locaux abordent la question du service téléphonique.
Sappuyant, dune part, sur une certaine conception
du pouvoir local et faisant appel, dautre part, à
une vision volontariste de la gestion de la ville, ladministration
municipale propose plusieurs projets dont lobjectif
premier est dencadrer les formes du développement
urbain.
À plusieurs reprises, différents
acteurs politiques locaux vont mettre de lavant le principe
dun contrôle de lespace public de la rue.
Cest le cas du maire Payette qui déclare en 1909
que « la Ville doit demeurer maître de ses rues».
Cette idée du contrôle des rues signifie, entre
autres, que la Ville revendique une forme dautonomie
par rapport aux gouvernements fédéral et provincial
qui légifèrent en matière de services
publics. Cest que, selon le maire Payette, le Conseil
municipal demeure la seule instance administrative apte à
orienter les destinées de la métropole dans
ce domaine. Voilà pourquoi, dans sa représentation
du service téléphonique et des infrastructures,
la municipalité fait appel, avant tout, à la
primauté du pouvoir local.
En dépit de nombreuses tentatives
de ladministration municipale pour surveiller limplantation
du téléphone, on constate que ce ne sont pas,
en premier lieu, des considérations dordre sociopolitique
qui sont parvenues à déterminer la forme et
lexpansion du réseau. En fait, la réussite
du projet de Bell en termes de construction dun
monopole révèle plutôt la place
prédominante des aspects financiers et économiques.
Somme toute, les obstacles politicoinstitutionnels imposés
par ladministration municipale aux opérateurs
privés du réseau nont pas été
efficaces.
En 1911, la Ville veut
à nouveau régler une fois pour toutes la question
des poteaux et des fils. James John Edmund Guerin, un réformiste
anglophone, occupe alors le poste de maire. Le Bureau des
commissaires demande au Conseil municipal de voter en faveur
des dépenses encourues par la mise sur pied dune
nouvelle Commission celle des services électriques
de la Ville de Montréal chargée de préparer
un autre plan denfouissement des fils. Dans le quotidien
La Presse, on peut lire ce commentaire quant aux espoirs que
suscite lannonce de la création de cette Commission
: « Nous pouvons enfin espérer que Montréal
verra disparaître les nombreux fils électriques
qui forment un dangereux réseau au-dessus de la tête
des citoyens dans presque toutes les rues de la ville. »
Au même moment, dautres titres darticles
de journaux annoncent la disparition des fils, tout au moins
le long de certaines artères du centre-ville. Ce projet
de 1911 aura pourtant un succès mitigé puisque
certaines entreprises concernées, notamment Bell, ne
jugent pas bon dy installer leurs équipements.
En fait, à Montréal, on
ne réglera jamais véritablement la question
de la matérialité des équipements téléphoniques.
Ainsi, de manière périodique, on annonce un
plan densemble auquel les compagnies de services publics
doivent collaborer. Si les nombreux plans et projets denfouissement
semblent réalistes et cohérents, leur exécution
est toujours retardée, sinon carrément paralysée,
pour différentes raisons, notamment des raisons financières.
Outre des limites matérielles, les exigences administratives
et les compromis nécessaires à la réalisation
dun réseau municipal de conduits souterrains
semblent hors de portée des pouvoirs publics montréalais.
Bien avant que la Ville
de Montréal élabore des plans en vue dexercer
un certain contrôle sur la prolifération des
poteaux et des fils téléphoniques, dautres
municipalités de lîle sont parvenues assez
tôt à mettre en oeuvre des plans denfouissement.
Ainsi, des municipalités de la proche banlieue, comme
Outremont et Westmount, ont « pris linitiative
» ; elles ont été « les premières
villes à donner lexemple». Le succès
de ces opérations de construction de conduits souterrains
qui accueillent les fils de téléphone, délectricité
et de transport en commun trahit manifestement la présence
dune communauté plus homogène quant à
sa composition sociale et à ses intérêts.
Ses membres sont certes plus favorables aux activités
des entreprises privées puisquils sont non seulement
des abonnés aux services, mais surtout des actionnaires
des compagnies qui les distribuent. En somme, dans ce contexte,
lexistence dintérêts communs représente
des conditions favorables pour lextension des réseaux
(droits de passage sur les propriétés privées
plus aisément obtenus, collaboration des entreprises
privées, marge de manoeuvre financière plus
grande de la part des administrations municipales, etc.).
De plus, les opérateurs des réseaux partagent
la même vision de la ville que celle à laquelle
adhèrent les citoyens et les élus : un espace
où le confort moderne est diffusé dune
manière sûre, efficace, discrète et invisible.
Sur le territoire de la Ville de Montréal,
la situation est différente. Devant lincapacité
de ladministration municipale à prendre en charge
le projet denfouissement de tous les câbles, Bell
construit ses propres conduits souterrains. Poursuivant depuis
plusieurs années une politique denfouissement
de ses équipements, la compagnie propose en 1913 un
plan densemble qui vise à mettre sous terre les
fils téléphoniques sur lensemble du territoire
urbain. Ladministration municipale lui accorde la permission
de réaliser ce plan à condition quelle
assume les frais de réparation des rues affectées,
quelle permette à la Ville dinstaller ses
fils pour son réseau de télégraphe dalarme
et de service de patrouille et enfin, que les poteaux soient
enlevés dès la fin des travaux denfouissement.
Avec son plan densemble, Bell peut ainsi prétendre
participer à l« amélioration locale
». En fait, cest dans le quartier des affaires
et dans certains quartiers résidentiels où habite
une population plus fortunée que ce plan sera réalisé.
Au tournant du XXe
siècle, le service téléphonique semble
envahir littéralement le paysage urbain. Mais avec
les années, ces équipements sintègrent
peu à peu à la réalité quotidienne
des citadins. On sy habitue. Les poteaux et les fils
demeurent omniprésents, mais on ne les perçoit
plus comme des éléments gênants. Il nen
reste pas moins que lintroduction de nouveaux équipements
suscite encore des réactions négatives de la
part des autorités municipales.
1910 les fils envahissent les rues
|
Poste Northern 317AH
Table à 165 lignes
293A à batterie centrale
sommaire
En 1910, labonnement au téléphone est un peu
plus répandu, bien que toujours lié à la richesse
et au statut professionnel. Quelques années plus tard, les
mêmes tendances persistent. Cest ce que démontre
une étude intitulée Zanesville and 39 other American
Communities (A Study of Markets and of the Telephone as a Market
Index), commanditée en 1927 par le périodique The
Literary Digest9. Portant sur les pratiques de consommation téléphonique
dans les familles étatsuniennes, cet ouvrage vise à
distinguer les différentes catégories dabonnés
ainsi que leur pouvoir dachat. Les auteurs de létude
concluent que lindividu le plus susceptible davoir un
téléphone chez lui a atteint un certain niveau de
revenus et appartient aux groupes suivants : dirigeants dentreprise,
professionnels, négociants, cadres.
La capacité dassimiler la technologie du téléphone
dépend donc du statut social élevé des ménages
qui leur permet dacquérir plus rapidement les nouveaux
services. En fait, il ny a là rien détonnant.
Dautant plus que lon peut ramener ces constats à
des questions de revenus : les plus nantis consomment dabord
les services et les produits les plus récents. Bref, le taux
de pénétration du téléphone dépend
des goûts et des caractéristiques des consommateurs
et non pas seulement de loffre.
Dans une étude sur la diffusion sociale du téléphone
au centre du Canada et plus particulièrement à Kingston
en Ontario, Robert Pike10 estime que les consommateurs optent pour
le service car ils apprécient les avantages de la communication
bidirectionnelle et instantanée. De plus, selon lui, il faut
aussi tenir compte des motivations moins tangibles comme le prestige
et lattrait que représente lutilisation dun
instrument moderne et novateur. Ainsi, le choix davoir recours
au nouveau service est-il aussi commandé par le désir
de se distinguer.
En ce qui a trait à la clientèle daffaires à
Montréal, au début du siècle, ce sont surtout
les commerçants, les manufacturiers et les institutions financières
qui profitent du service. Lors des premières années
de la diffusion du service, ses principaux clients sont les manufactures
et les commerces, les entreprises qui uvrent dans les transports
et les communications (compagnies ferroviaires et maritimes, taxis,
journaux), les services financiers, (banques, bourse, maisons de
courtage) et les services professionnels (architectes, notaires,
avocats). Même si le téléphone peut être
à loccasion un objet de consommation ostentatoire,
on peut faire lhypothèse quà linstar
des abonnés à Kingston, cest surtout pour des
raisons instrumentales que la plupart des abonnés daffaires
montréalais retiennent le service offert par les entreprises
de téléphone.
Avant 1900, labonnement au téléphone demeure
un phénomène marginal dans les ménages. Cependant,
il représente un atout certain pour les gens daffaires,
puisquil leur permet de communiquer depuis leur domicile avec
leur lieu de travail ou encore avec des clients. Cette situation
est relativement fréquente en 1880.
Lors de son introduction et jusquà
la fin des années 1900, le téléphone est donc
utilisé par une clientèle commerciale et daffaires
de la ville-centre. En fait, au tout début, les clients les
plus importants sont ceux du service télégraphique.
À Montréal, la localisation centrale est aussi une
variable déterminante. En effet, les avantages intra-urbains
des communications téléphoniques demeurent nombreux
(tarifs fixes, possibilité de joindre un grand nombre dabonnés,
rapidité du service, etc.)
Les premières années de lhistoire de lusage
du téléphone sont marquées par la prédominance
des industriels, des commerçants et des professionnels. La
communauté des financiers et des banquiers est aussi très
intéressée par le nouvel outil de communication à
distance. De manière générale, de 1900 à
1910, la consommation du téléphone dans lagglomération
montréalaise donne une certaine image de lattrait pour
cette nouvelle technologie. Un des traits les plus frappants est
limportante progression du service.
La décennie suivante entre 1910 et
1920 présente des conditions différentes. Par
rapport au dynamisme de lurbanisation, on constate que la
consommation du téléphone évolue moins vite.
Cest que les années de guerre ont eu des effets sur
loffre du service. De plus, aux lendemains de la Première
Guerre mondiale, lessor du téléphone urbain
atteint une ampleur que les dirigeants et les ingénieurs
de Bell navaient pas prévue correctement. On est ici
en présence dune situation particulière : Bell
narrive pas à combler la demande. Elle est en quelque
sorte victime de la popularité du service quelle offre.
Et dans certains secteurs de lagglomération qui ont
connu une croissance démographique forte, la demande pour
les connexions surpasse la capacité de commutation
tâche effectuée par les standardistes. Compte tenu
du nombre impressionnant de lignes quelles contrôlent,
il leur devient de plus en plus difficile dacheminer tous
les appels. Ce qui nuit à la qualité du service.
Le 14 fevrier 1916, le Canada celebre en grande pompe la premiere
communication telephonique transcontinentale entre Montreal et Vancouver.
La voix a vaincu la distance et le telephone, des lors, a definitivement
relegue le telegraphe au second plan dans les telecommunications
modernes. Entre ces deux bornes, notre these couvrira done pres
de sept decennies d'histoire institutionnelle et technologique.
Lautomatisation savère un moyen efficace
pour surmonter ces problèmes.
Ainsi, dans la seconde moitié des années 1920, la
mise en place des commutateurs automatiques se traduit-elle par
une hausse importante des abonnés résidentiels dans
certains quartiers suburbains. En même temps, le service est
de plus en plus répandu auprès de la classe moyenne.
La dernière décennie (1920-1930) est
marquée par la poursuite de la progression des abonnements.
Toutefois, au cours de la dernière année recensée,
un certain ralentissement commence à se manifester. Cette
baisse est due à la crise économique de 1929. Bien
que la période retenue ne nous permette pas de mesurer avec
précision limportance du phénomène, des
études postérieures démontrent que le taux
de pénétration du service téléphonique
atteint seulement après la Seconde Guerre mondiale un niveau
comparable au plus fort taux, celui de la fin des années
1920.
sommaire
La commutation automatique et l'introduction
des postes téléphoniques à cadran
La technologie de commutation automatique
est introduite aux États-Unis et en Europe dès les
années 1900.
- Dans les années 1890, le tout premier système
de commutation téléphonique automatique d'Almon
Strowger devenait de plus en plus connu, et il devenait
évident que la commutation automatique allait être
indispensable pour répondre au volume d'appels en évolution
dans le monde entier.
Dans un contexte de succès précoce aux États-Unis
du ststème Strowger, il était inévitable que
les administrations d'exploitation téléphonique d'autres
pays s'intéressent aux avantages de l'équipement Strowger
Automatic. Le système a fait sa première apparition
à l'étranger à Londres en 1898 - un standard
d'exposition d'une capacité de 200 lignes. Un an plus tard,
la poste allemande a acheté un système de 400 lignes
qu'elle a installé pour le service public à Berlin.
Ces deux installations ont été les premiers précurseurs
de la pénétration mondiale qui allait bientôt
se produire.
Le Canada, Cuba et l'Australie ont été parmi les premiers
pays à reconnaître les multiples avantages du système
Strowger et à l'adopter à grande échelle.
Au Canada, une tentative fut faite de fabriquer à Montréal
des commutateurs Strowger.
Une compagnie au nom de Automatic Telephone
and Electric Cie of Canada émit en 1893 des prospectus
financiers à l'intention de ses futurs actionnaires qui portaient
le sous titre ambitieux "Survival of the first".
Les aprentis darwainistes instalérent la même année
quelques commutateurs à Terrebonne au Québec ainsi
qu'à London, Seaforth, Mitchel et Arnprior en Ontario, puis
à Woodstock au Nouveau-Brunswick.
Ces experiences furent de courte durée à cause de
l'amateurisme des compagnies exploitatntes. En 1908, àTerrebonne
par exemple le système Strowger fonctionna jusqy'à
la première pluie, la mauvaise isolation des fils aériens
provoqua un court circuit qui endommagea les batteries du central
!!!
Système
Strowger
La photo montre l'utilisation de l'appareil dans un bureau ; les
appareils de commutation sont placés sur des étagères
où ils sont accessibles de tous les côtés. L'aménagement
prend ainsi peu de place, même pour les grands bureaux.
Le premier central automatique à fonctionner de façon
permanente fut celui de Whitehouse dans le Yukon, la ruée
vers l'or avait attiré dans le grand nord John Wyley, un
ancien employé de Stowger à Chicago. Il fonda la Yukon
Electric Compagny en 1901, puis il fit de même
à Saskatoon.
- D'autres inventeurs se mettent au travail avec
plus ou moins de succès comme Romaine
Callender, qui appartient à l'entourage de
Bell et qui a breveté divers commutateurs automatiques entre
1892 et 1896 avec 3 series de brevets. les premières expériences
réussies se passe à New-York en 1895 avec des modèles
en bois désignés : Brandford Exchange ou de
Callender Exchange.
Callender l'inventeur de Brandford
Callender quite le Canada en 1896 pour en Angleterre
fonder la Callender Rapid Telephone Compagny
Son système a finalement échoué, mais il a
inspiré deux de ses jeunes employés, George
et James Lorimer, à poursuivre les expériences.
Après des difficultés financières, lls fondent
leur propre entreprise, la Canadian Machine
Telephone, en 1897 à Peterborough,
en Ontario.
Leur premier essai était le développement
du système Callender Exchange . Il a été
installé à Troy, Ohio en 1897.
Les faiblesses du système Callender étaient évidentes,
les trois frères l'ont revisé au point qu'il ressemblait
vaguement au concept original.
En avril 1900, ils font breveter le système et se
sentent prêts à le commercialiser. Ils transformèrent
leur petit atelier dans la ville voisine de Piqua en un atelier
de production sous le nom de American Machine Telephone.
Brevets des frères Lorimer 1020211
et 1294285
Système Lorimer
Un commutateur de plusieurs centaines de lignes fut exposé
à Ottawa pendant deux mois,F.Dagger rédigea un rapport
à l'intention de l'hotel de ville de Torronto recommandant
un essai dans l'espoir de recevoir un contrat municipal. Hélas
la ville abandona le projet.
Des commutateurs furent installés à Peterborough ou
était installée l'usine de fabrication et à
Bratford ou se trouvait l'ancien établissement Callender.
En 1908 ils intallèrent d'autres systèmes à
Burford, Saint-George et Lindsay, toujours en Ontario mais ne firent
aucune vente aux Etats+-Unis.
En 1906, Edmonton Telephones avait passé une commande Lorimer,
mais elle ne parvint pas à en prendre livraison, l'entreprise
étant incapable de livrer un modèle adapté
aux besoins du client. Après deux ans d'attente, la municipalité
se rallia à l solution Strowgze , Automatic Electric obtint
le contrat et installa le central en deux mois. Devant le professionalismede
Strowger les frères Lorimer faisaient figure d'amateurs.
Désormais, les téléphonistes ne
sont plus indispensables pour acheminer les communications locales.
Dans les journaux de l'époque on annonce : " L'abonné
pourra se dispenser des opératrices ".
Il faudra attendre la nationalisationd= du téléphone
dans les les trois provinces des Prairies, soit 1908-09 pour que la
commutation automatique arrive à maturité au Canada.
1901 Nous devons garder en mémoire, que
lémission damateur a débuté au Canada
dès lorigine de la T.S.F., faisant suite aux essais de
Guglielmo MARCONI entre la station de Poldhu, en Angleterre, et celle
de Signal Hill à Terre-Neuve..
« Cest à Signal Hill, que le 12 décembre
1901, Guglielmo MARCONI reçut le premier signal transatlantique
sans fil. Il sagissait simplement des trois points de la lettre
« S » en morse, envoyés depuis Poldhu, en Angleterre,
à 3 500 km de distance. Lexploit de MARCONI montra les
possibilités inouïes de son système de communication
sans fil et inaugura lère des télécommunications
modernes à travers le monde
»
En 1913 la première pelletée
de terre a été soulevée pour la construction
de l'édifice voué à devenir le plus grand de
sa catégorie dans tout l'Empire britannique. L'Usine
de la rue Shearer 1920 -1940 Montréal
Il a ouvert ses portes
en 1915 pour accueillir l'usine de fabrication de la Imperial
Wire and Cable suivant sa fusion avec la Northern Electric.
Au fil des ans les ateliers situés à l'usine de
Guy et Notre-Dame y ont été déménagés.
Sa superficie a atteint près d'un million de pieds carrés
après les agrandissements en 1926, 1929 et 1930.
Il
est constitué de six ailes de huit étages et dix
d'un ou deux étages. Il a été construit
pour durer, il repose sur 5 151 piliers et possède 11
millions de briques. Il n'y a que le revêtement en bois
franc des planchers qui soit combustible. Les portes coupe-feu
pour accéder aux escaliers sont composées d'une
plaque d'acier d'un quart de pouce renforcé de cornières
de deux pouces sur son périmètre et de trois diagonales.
|
Pendant la Deuxième Guerre mondiale lorsque l'on croyait
en un bombardement aérien nazi, les exercices d'évacuation
étaient de rigueur, toutefois, seulement les septième
et huitième étages l'étaient car on jugeait
improbable qu'une bombe puisse pénétrer plus
de deux étages.
Des turbines actionnées à la
vapeur à haute pression généraient l'électricité
du complexe jusqu'en 1930, la vapeur à la sortie des
turbines servait au chauffage. L'entretien de l'édifice
était hors pair, l'auteur se rappelle pendant une panne
électrique le lancement de la génératrice
d'urgence en moins de 20 secondes pour fournir le courant
d'urgence.
L'immeuble abritait une grande variété
de machinerie utilisée pour fabriquer pratiquement
tous les composants nécessaires pour produire le matériel
et les équipements téléphoniques. On
y fabriquait des fils petits comme de cheveux jusqu'à
de gros câbles électriques de six pouces de diamètre.
Toutes les variétés de vis étaient usinés,
les pièces de métal y étaient formées
par des presses pour être ensuite usinées et
plaquées, son atelier de placage était le plus
important de Montréal. Une énorme quantité
de munitions et du matériel de communication ont été
fabriqués pendant les Première et Deuxième
Guerres mondiales. Plus de 9 000 employés y travaillaient
pendant les années 1940 pour répondre à
l'effort de la guerre.
L'usine de la rue Shearer était connue
comme la maison-mère parce que c'est d'elle qu'essaima
le personnel qui a démarré les autres établissements
de la compagnie au Canada et ailleurs dans le monde. Northern
Electric, Northern Telecom et enfin Nortel a occupé
plus de 50 immeubles uniquement dans la région de Montréal.
|
sommaire
Entre 1880 et les années
1920, les standardistes remplissent un rôle indispensable
dans les communications téléphoniques locales.
En 1907, 400 téléphonistes font la grève à
Toronto pour obtenir de meilleures conditions de travail.
Annonce publicitaire L'empressement à Satisfaire
La technologie des communications a continué
de progresser rapidement dans les années 1920, et les publicités
de Bell sont restées axées sur l'éducation
du public sur les dernières innovations, y compris les services
interurbains et commutés. M. Neill, du service commercial
de Bell, a déclaré: «Nous devons informer les
gens sur notre entreprise et leur faire savoir le rôle clé
que nous jouons dans la vie de la communauté. Nous devons
continuer à faire de la publicité pour enseigner la
valeur du service téléphonique ». Une nouvelle
campagne avec le slogan : « Plus vous en savez sur le téléphone,
mieux il vous servira » visait à éclairer les
gens sur la complexité du système téléphonique
et à demander également la coopération du public
pour assurer un service de qualité. En plus des journaux,
Bell a commencé à faire de la publicité dans
d'autres formats, y compris des affichages dans des magasins importants.
Bell a également ouvert nos bureaux au public dans le cadre
de la « Semaine du téléphone », organisant
des événements spéciaux dans plusieurs villes.
Au cours des années 1920, la popularité croissante
du service interurbain a conduit à plusieurs nouvelles opportunités
publicitaires. C.E. Fortier, le directeur de la publicité
de Bell à l'époque, a écrit : « L'entreprise
envisage de tirer parti de tous les moyens disponibles pour faire
de la publicité pour le téléphone en tant que
serviteur du public, et le service interurbain est un domaine qui
n'a pas encore fait ses preuves. D'importantes campagnes publicitaires
ont été lancées pour mettre en valeur le service
interurbain de Bell. Bien que la première campagne d'envergure
s'adressait au grand public, l'entreprise a par la suite adopté
une approche spécifique s'adressant aux gens d'affaires de
diverses industries.
Les publicités de l'époque posaient la question :
pourquoi n'avoir qu'un seul téléphone chez soi quand
on peut en avoir un autre dans la cuisine ou dans la chambre à
un prix abordable ? avec le message que monter et descendre
les escaliers en courant peut être "épuisant et
chronophage". À Noël 1921, Bell a lancé
sa première campagne axée sur la commodité
des postes téléphoniques supplémentaires -
des téléphones supplémentaires câblés
sur la même ligne téléphonique.
La décennie a également marqué
un tournant majeur dans l'histoire technologique de Bell avec l'introduction
du service commuté, officiellement lancé le 19 juillet
1924 au bureau de Bell Grover à Toronto. Passer d'un système
manuel à un système de numérotation était
un changement radical pour le public à l'époque, nécessitant
de vastes campagnes de publicité et de relations publiques
pour faire passer le mot, y compris des didacticiels publics et
des publicités imprimées. À la fin de 1926,
Bell avait 6 centraux téléphoniques en service, desservant
60 000 clients.
Au début des années 1920, les téléphonistes
de Bell du Québec et de l'Ontario recevaient environ 140
000 appels « à l'heure de la journée »
- tous les jours ! À partir de février 1923, des publicités
sont nécessaires pour informer les abonnés qu'ils
ne peuvent plus appeler un central de Bell pour demander l'heure,
car c'est « encombrant pour nos opérateurs et préjudiciable
au service » des autres clients. Quelques années plus
tard, pour accélérer les appels locaux, il a également
été décidé que les opérateurs
ne devaient plus répéter le numéro que leur
avait fourni l'abonné, mais plutôt accuser réception
de l'information par un court « merci ».
Pour les abonnés, les téléphonistes
ou standardistes personnifient à la fois les entreprises
de téléphone et le service. Tandis que le service
télégraphique nécessitant certaines connaissances
techniques est assuré par de jeunes hommes, le service téléphonique
est défini comme un emploi féminin. Pourquoi les entreprises
préfèrent-elles engager des femmes comme téléphonistes
? À cette époque, différentes raisons sont
avancées : " clarté de la voix ", "
politesse ", " patience ", " acuité visuelle
". En bref, des qualités et des aptitudes considérées
par les dirigeants des entreprises téléphoniques comme
propres aux femmes. Plusieurs jeunes femmes issues de la classe
ouvrière sont engagées comme téléphonistes,
ce qui constitue pour elles un avancement social.
Les entreprises de téléphone préfèrent
engager des jeunes filles célibataires. En 1907, à
Toronto, leur salaire est de 25 dollars par mois pour des semaines
de travail de 48 heures (les téléphonistes travaillent
six jours par semaine)
Le métier de téléphoniste
est très exigeant. Obligée de preuve d'une concentration
et d'une politesse à toute épreuve, la téléphoniste
doit en outre porter un lourd casque d'écoute, accomplir
des gestes répétitifs et redire des phrases apprises
par coeur durant sa journée de travail marquée par
une cadence effrénée aux heures de pointe.
sommaire
Au lendemain de la Première Guerre mondiale, la forte demande
pour le téléphone force les entreprises à adopter
cette nouvelle technologie.
Dans les années 1920, les changements technologiques touchant
la téléphonie locale transforment les procédures
à suivre.
Avec les nouveaux centraux automatiques, l'abonné utilise
un appareil à cadran qui effectue le travail de recherche
de l'interlocuteur qu'il désire joindre.
modèle 51AL
modèle 20B
À l'été de 1924, les premiers commutateurs
automatiques Strowger
sur le territoire desservi par Bell sont mis en service au central
Grover à Toronto.
Les premiers centraux téléphoniques manuels de Toronto
étaient reconnus par un nom de central et un bloc de numéros
de ligne à quatre chiffres. Le « GRover exchange »
à Kingston Road et Main Street à East Toronto est
devenu le premier central téléphonique automatique
canadien en 1924.
L'avènement de cette nouvelle technologie fait l'objet d'une
campagne d'éducation car les utilisateurs doivent apprendre
à se familiariser avec la composition et le téléphone
à cadran. Les numéros étaient composés
de deux lettres et quatre chiffres (2L+4N). Grover 1234 a été
composé GR-1234 (ou 47-1234).
23, rue Main, juste au nord de Kingston Road. Le Bell Telephone
of Canada Grover Exchange Building, site du premier central téléphonique
automatique du Canada. juillet 1924
19 juillet 1924 Le service Dial est inauguré à
Toronto, en Ontario. Les représentants de Bell Canada appellent
les clients pour les aviser du changement; d'autres rencontrent
des membres de la communauté pour leur enseigner le bon usage
du cadran. Les opérateurs sont également formés
à l'utilisation de la nouvelle technologie.
A Bell representative demonstrates dial service to Toronto
firemen, ON, 1924
Avec lautomatisation, on assiste à
un mouvement de centralisation : il apparaît avantageux sur
le plan économique de regrouper plusieurs unités de
commutation, soit environ 10 000 lignes. Inauguré en
1925, le central automatique Strowger
de Montréal qui respecte ces nouveaux critères
daménagement est le Lancaster. Suivront les villes
de Vancouver, Toronto et Winnipeg ...
Plis tard, pour faciliter la demande mondiale importante et croissante
d'équipements téléphoniques Strowger Automatic,
il a été créé sous la direction de l'organisation
mère Automatic Electric à Chicago, un groupe d'entreprises
de fabrication affiliées avec des usines au Canada, en Belgique
et en Italie.
sommaire
L'Association du téléphone du Canada
est créée en 1920. Elle est remplacée par le
Réseau téléphonique transcanadien en 1931,
puis par l'Alliance Stantor en 1992.
1927 Création de Québec-Téléphone,
ses clients sont parmi les tout premiers au Canada à avoir
accès au service téléphonique via des lignes
individuelles uniquement.
3 octobre 1927 Inauguration du service téléphonique
commercial transatlantique par les premiers ministres W.L. Mackenzie
King (Canada) et Stanley Baldwin (Grande-Bretagne).
1928 Premier appel interurbain entre l'Alberta et l'outre-mer.
Années 1920 et 1930 SaskTel a continué d'améliorer
ses services tout au long des années 1920 et 1930, devenant
l'un des membres fondateurs du réseau téléphonique
national TransCanada (TCTS), qui a ensuite changé son nom
pour Telecom Canada et est maintenant connu sous le nom de Stentor.
31 juillet 1932 Le gouverneur général du Canada,
le comte de Bessborough, inaugure le réseau téléphonique
transcanadien (TCTS), offrant un service téléphonique
d'un océan à l'autre sur toutes les lignes canadiennes.
26 avril 1945 Bell Canada installe son millionième
téléphone, soixante-cinq ans après sa constitution
en société. .
sommaire
Après la guerre 39 45, à cause
des restrictions imposées par celle-ci, les demandes de service
téléphonique étaient énormes.
Northern Electric répondit à la demande en produisant
de plus en plus de câbles. Le volume était tellement
grand que la capacité de fabrication ne suffisait plus, alors
une nouvelle usine a été construite à Lachine
dans la banlieue de Montréal.
Cette usine fabriqua des millions de pieds de câble pour remplir
toutes les commandes.
L'isolateur au papier enroulait lâchement
l'isolant sur les fils avant qu'ils soient torsadés en paires.
Les paires devaient être torsadées pour empêcher
la diaphonie, c'est-à-dire l'induction d'une conversation
téléphonique d'une paire à une autre.
Le papier a servi comme isolant depuis le début de la fabrication
des câbles, malgré qu'il ait été essentiellement
déplacé par la pulpe de papier et le plastique il
sert encore pour les câbles sous-marins.
Aux lendemains de la Première Guerre mondiale,
le taux de croissance des abonnements au téléphone
atteint de nouveaux sommets.
Daprès les statistiques internationales compilées
chaque année par AT&T, le marché montréalais
de la téléphonie se classe en 1929 au 12e rang à
léchelle mondiale. Le taux de pénétration
y est toutefois moindre que dans lautre grande ville canadienne,
Toronto. Alors quon retrouve à Toronto 27,5 téléphones
pour 100 habitants, Montréal nen compte que 18,9. Cet
écart est sans doute le reflet des différences de
niveaux de richesse prévalant dans les deux agglomérations.
Il témoigne également de la différence dans
la taille des ménages, les familles montréalaises
étant composées de plus dindividus.
Malgré cet écart, il nen demeure
pas moins quà léchelle internationale,
Montréal nest pas en retard par rapport à un
échantillon de grandes villes. En 1929, les villes étatsuniennes
ont pris une avance très importante sur les principales métropoles
européennes. Stockholm constitue toutefois une exception.
On peut noter que Montréal évolue plus ou moins en
parallèle avec des villes de pays nordiques, comme Copenhague
et Oslo. Quant aux métropoles européennes, comme Paris,
Berlin, Londres, Amsterdam et Glasgow, la diffusion du téléphone
y est beaucoup plus faible. Cette progression différentielle
du taux dabonnement selon les pays fait appel à divers
facteurs. Aux États-Unis, les dirigeants dAT&T
insistent sur la corrélation forte entre le niveau dabonnement
et la gestion privée du service téléphonique.
On peut aussi mentionner comme éléments-clés
de la rapide progression du service en Amérique du Nord,
la capacité des entreprises à combler rapidement la
demande croissante, de même que létablissement,
dès le départ, du principe du nombre illimité
dappels locaux à tarifs fixes, même si ce coût
est resté relativement élevé.
En réalité, il est difficile de sen remettre
à un seul facteur pour expliquer limplantation et le
développement du service téléphonique dans
certains milieux urbains. Outre des obstacles de nature institutionnelle
et juridique mis en évidence par plusieurs chercheurs
en particulier dans le cas français, des conditions
sociales et économiques permettent de comprendre le retard
de lEurope sur les États-Unis. À cet égard,
certains ont souligné le caractère particulier de
lurbanisation et de lindustrialisation. Ces processus
sont perçus de manière différente des deux
côtés de lAtlantique. Ils sont aussi fortement
marqués par des différences nationales.
Compte tenu de sa position privilégiée
à lintérieur de lorganisation industrielle
nord-américaine, la ville de Montréal en particulier
son cur financier et industriel , illustre la réussite
dun programme dimplantation dinfrastructures téléphoniques.
Si la vitalité économique a stimulé la demande
sociale et le marché de la téléphonie, le cadre
politico-institutionnel a aussi joué un rôle important.
En effet, pour un opérateur de réseau, il est indispensable
davoir laccord de la municipalité pour obtenir
des droits de passage et utiliser les voies publiques. Cest
dire que des conditions favorables aux projets déquipement
doivent être en place pour limplantation du réseau.
Létude des marchés et de ladoption
progressive du service dans la sphère privée et dans
les sphères professionnelles et marchandes éclaire
peu sur les conceptions, les images et les modes dappréhension
de la réalité que suscite la téléphonie
urbaine entre 1880 et 1930.
Afin de comprendre la culture téléphonique véhiculée
et diffusée au cours de cette période, il importe
de considérer de plus près les thèmes consacrés
à lun des principaux domaines où la téléphonie
est parvenue à simposer et qui retenait déjà
lattention par son caractère inédit et prometteur
: la ville réticulée.
28 juin 1947 Bell Canada lance le premier
service de téléphonie mobile commercial au Canada.
Le Toronto Globe & Mail est le premier abonné à
profiter de l'offre de service pour une couverture rapide sur place
des événements d'actualité.
19 janvier 1953 Bell Canada fournit la première liaison
télévisuelle permanente entre deux pays pour acheminer
des programmes américains de Buffalo, New York, à
la Canadian Broadcasting Corporation à Toronto. Le 14 mai
de la même année, les téléspectateurs
de Toronto (CBLT) et de Montréal (CBFT) peuvent visionner
simultanément pour la première fois la même
émission en direct.
1953 AUTOMATIC
ELECTRIC (Canada) Limited est la filiale canadienne de
fabrication d'Automatic Electric Company.
Son usine moderne de Brockville, en Ontario, produit une grande
variété de téléphones, de cadrans téléphoniques,
de relais et une gamme complète de tableaux de distribution
automatiques Strowger et d'équipements accessoires.
Les opérations de fabrication du groupe Automatic Electric
au Canada ont commencé en 1930 avec l'acquisition de Phillips
Electrical Works, Limited, Brockville, Ontario, qui à l'époque
se consacrait exclusivement à la fabrication d'une gamme
complète de conducteurs et de câbles en cuivre pour
les communications, l'alimentation, et les domaines des transports.
En 1935, un ajout a été fait à l'usine de Phillips
pour assurer la fabrication de téléphones, d'équipements
de commutation automatique et manuel et d'autres appareils de communication.
Au cours des années qui ont suivi, cette opération
a été progressivement élargie pour répondre
aux besoins en croissance rapide des compagnies de téléphone
et des administrations canadiennes.
L'usine de Brockville, Ontario, d'Automatic Electric (Canada) 1953
Limited, illustrée ici, occupe 125 000 pieds carrés
de surface au sol et est conçue de telle sorte que le bâtiment
peut être agrandi jusqu'à 500 000 pieds carrés.
Le bâtiment est situé dans le quartier de Schofield
Hill, à l'ouest du boulevard Strowger. Le bâtiment
entièrement moderne de Toronto, illustré ici, abrite
le siège social, le bureau des ventes de Toronto et l'entrepôt
central d'Automatic Electric Sales (Canada) Limited.
Une des unités centrales de la British Columbia Telephone
Company installée à Vancouver, en Colombie-Britannique.
En mai 1953, la filiale canadienne d'Automatic vend ses installations
de fabrication de fils et de câbles dans le but de se concentrer
uniquement sur la production d'équipements de communication
et de commande électrique. Cela a été suivi
par l'organisation de l'actuelle entreprise de fabrication canadienne
et la construction d'une nouvelle usine de fabrication.
Après un examen attentif de plusieurs emplacements possibles,
un site de 33 acres à Brockville a été sélectionné.
L'usine d'un million et demi de dollars a démarré
le 5 août 1953 et a été officiellement inaugurée
le 22 septembre 1954. Elle est de conception très moderne
et combine les dernières techniques architecturales et de
production.
Située au cur de la plus grande section industrielle
du Canada, Automatic Electric (Canada) 1953 Limited est toutefois
devenue la première nouvelle industrie à ouvrir ses
portes dans la vallée du Saint-Laurent après la finalisation
des plans de la Voie maritime du Saint-Laurent.
Un point d'intérêt dans le développement de
l'usine automatique dans ce domaine était la dénomination
du boulevard Strowger, un geste de l'esprit de coopération
entre les responsables de l'entreprise et de la société,
en l'honneur de la mémoire d'Almon B. Strowger.
Automatic Electric a toujours été étroitement
liée à l'industrie du téléphone du Canada,
qui comprend plus de 2800 entreprises indépendantes et systèmes
gouvernementaux provinciaux ainsi que la Compagnie de téléphone
Bell du Canada. L'équipement de commutation automatique Strowger
est utilisé principalement par les trois groupes. Les ventes
et la distribution des produits Automatic Electric au Canada sont
assurées par une société associée, Automatic
Electric Sales (Canada) Limited, dont le siège social et
l'entrepôt principal sont à Toronto, ainsi que des
succursales, des entrepôts et des agents à d'autres
endroits pour offrir un service complet à sa liste croissante
de clients dans le Dominion.
sommaire
1954 le Système Crossbar
Ericsson
LM Ericsson a vendu au Canada des commutateurs crossbar
ruraux, urbains, et de transit.
1962 Contrat signé avec COTC, Teleglobe Canada,
pour la fourniture et l'installation à Montréal, Vancouver
et Hawaï, de centraux tête de ligne automatiques de type ARM
Crossbar, utilisés pour les échanges téléphoniques
et de télex internationaux. À la suite de cette installation,
tous les télex et les communications téléphoniques
canadiens passent par les centraux Ericsson.
Le 1er décembre 1977, LM Ericsson employait 54 personnes
au Canada. A des fins de comparaison, on a indiqué que 1es ventes
de LM Ericsson aux Etats-Unis se sont é1evées en 1976 a
12,1 millions de dollars.
LM Ericsson ne fabrique pas de materiel de telecommunication au Canada
bien qu'elle y fasse Ie montage de certains produits et l'adaptation de
certaines pieces d'equipement. Elle dispose d'installations pour enseigner
aux clients Ie fonctionnement et l'entretien du materiel.
Dans Ie domaine du matériel de télcommunication,
LM Ericsson offre au Canada des postes téléphoniques, des
PBX et des interphones. Les PBX incorporent des techniques de commutation
crossbar, et les divers produits peuvent servir dans des installations
de 50 a 9 000 lignes. Le plus gros des PBX offre aussi Ie centrex. La
compagnie prevoyait produire un PBX éléctronique en 1979,
d'une capacité maximum de 100 lignes. Les interphones de LM Ericsson
peuvent être raccordés à jusqu'a 5 000 stations..
sommaire
8 juillet 1956 Bell Canada inaugure la composition directe
à distance, permettant aux clients de composer certains de
leurs propres appels interurbains sans l'aide d'un téléphoniste.
1957 SaskTel achève sa partie du premier système
de relais radio micro-ondes transcanadien. Avec ce système,
les programmes de télévision en direct sur le réseau
pourraient être transmis d'un océan à l'autre.
Cela a contribué à créer la tradition derrière
des émissions nationales comme "Hockey Night in Canada".
18 juin 1958 Le rêve du président de Bell Canada,
Thomas Eadie, d'un réseau hertzien entièrement canadien
se réalise à cette date. Le réseau de liaisons
hertziennes de 6 400 kilomètres, le plus long au monde, transporte
des conversations téléphoniques, des messages téléimprimeurs
et des signaux de télévision.
1958 L'Alberta Government Telephones Commission est créée,
mettant fin à la gestion gouvernementale directe du système
provincial.
1er mai 1960 La fonction All Number Calling (numéros
de téléphone à 7 chiffres) est introduite sur
le territoire de Bell Canada. Les premiers à bénéficier
de ces nouveaux numéros sont les abonnés d'Ormstown
et de Franklin-Centre, Québec.
15 mars 1962 La Compagnie de téléphone Bell
du Canada est la première compagnie de téléphone
au monde à offrir un service de télécopie commercial
sommaire
Montréal "Le réseau dans la
ville"
Pour de nombreux citadins, cest dabord
comme élément du paysage urbain que le téléphone
est entré dans leur vie.
Au tout début des années 1880, lusage
de lélectricité pour la transmission de
la voix, léclairage public et la traction des
tramways est en plein essor et contribue à rendre omniprésents
les poteaux et les fils aériens. La mise en place de
moyens de production à une grande échelle entraîne
aussi la construction de véritables réseaux
de distribution. En fait, les initiatives destinées
à fournir les nouveaux services sont nombreuses dans
les années 1880 et 1890 : dans un contexte de vive
concurrence, les entreprises exploitantes établissent
chacune leurs installations de distribution. Ce qui a pour
effet de multiplier les équipements.
On ne peut pas dire que les acteurs locaux se soient préoccupés
de cette multiplication des infrastructures physiques du réseau
(poteaux, fils et câbles, centraux, immeubles administratifs
et cabines téléphoniques). La présence
croissante des poteaux et des fils dans le paysage urbain
ne fait cependant pas lunanimité.
Des éléments significatifs du système
: les poteaux et les fils
Les poteaux et les fils, quand ils ne sont
pas enfouis, constituent les éléments les plus
visibles du système transmission des messages. Jugés
inesthétiques par plusieurs, ils font lobjet
des tout premiers commentaires relatifs à linsertion
physique des équipements du système téléphonique
à Montréal et en banlieue.
Les exploitants privés du réseau tentent de
valoriser ces infrastructures en leur attribuant une signification
qui va bien au-delà de leur simple utilité technique.
Ainsi Bell a-t-elle utilisé, au début des années
1880, les poteaux et les fils marques physiques du
réseau comme symboles de ses activités.
Elle en reproduisait alors une image stylisée sur les
plaques didentification portées par ses employés.
Quelques années plus tard (en 1895, AT&T accorde
la permission dutiliser la Blue Bell), la célèbre
cloche du Bell System remplace cet emblème peu apprécié
par les citadins.
Les fils et les poteaux sont définis comme des artères
de circulation qui véhiculent les communications entre
les abonnés. Alors que pour les entreprises téléphoniques
ils représentent une marque de modernité incontestable,
pour les citadins et les banlieusards, ils sont perçus
comme des nuisances visuelles et des sources de danger public
à éliminer.
Pour mieux comprendre la nature des protestations provenant
notamment de ladministration municipale que ces
équipements de distribution ont soulevées, il
importe de se pencher sur le champ daction des acteurs
institutionnels locaux. Lhistoire technique passe à
cet égard par le biais de lhistoire politico-institutionnelle.
Nous y reviendrons au chapitre .
Les centraux téléphoniques
Les centraux une autre composante fonctionnelle du
système téléphonique ont été
intégrés dans lespace urbain sans susciter
le même type de critiques virulentes formulées
à lendroit des câbles et des poteaux. Moins
visible, le central téléphonique est demeuré
largement méconnu des abonnés et des citadins.
Il représente pourtant le cur du réseau.
En termes de mobilisation des ressources financières
quil exige, son importance est aussi considérable
: à la fin de la période étudiée,
léquipement de commutation excluant les
bâtiments accapare à lui seul 35,3 % des
investissements de Bell.
Cest au central quaboutissent les lignes dun
secteur donné. Celles-ci permettent dappeler
un abonné dans ce même secteur ou dans une autre
zone desservie par le réseau. Avant les développements
de la téléphonie, le perfectionnement du réseau
de télégraphie électrique avait contribué
à mettre en forme le concept du central. Diverses lignes
reliant les postes télégraphiques aboutissaient
en un même endroit, cest-à-dire au standard
manié par un opérateur.
Tous les abonnés peuvent être joints grâce
aux équipements de connexion le commutateur
quon retrouve à lintérieur
des centraux téléphoniques. Autrement dit, ces
centraux permettent le fonctionnement en réseau. De
plus, ils effectuent le travail de recherche et de connexion
du correspondant. Ces qualités incitent même
des promoteurs de la téléphonie à considérer
le central comme le cerveau (ou encore le plexus solaire)
du système sans lequel les villes seraient dysfonctionnelles
: This is the solar plexus of the telephone body. It is
the vital spot. It is the home of the switchboard. It is not
any ones invention, as the telephone was. It is a growing
mechanism that is not yet finished, and may never be; but
it has already evolved far enough to be one of the wonders
of the electrical world. There is probably no other part of
an American citys equipement that is as sensitive and
efficient as a telephone exchange.
Comment interpréter le peu dintérêt
public porté à lendroit de ces équipements
et des bâtiments qui les abritent ?
On peut avancer lhypothèse que cette indifférence
est due au soin tout particulier que Bell porte à la
conception architecturale et à lintégration
urbanistique de ces bâtiments au cours des années
1910, soit au moment où elle construit elle-même
lensemble des édifices qui servent à la
fourniture du service.
Selon un des architectes de lentreprise montréalaise,
F. J. Macnab, deux principes président à la
construction des bâtiments qui abritent les activités
commerciales et de production de Bell :
1) ladaptation des normes daménagement
aux changements technologiques ;
2) le développement dune nouvelle approche en
matière de relations publiques.
Assez tôt dans lhistoire de lentreprise,
les dirigeants élaborent un programme rigoureux
néanmoins adaptable aux nouveautés technologiques
de planification architecturale des centraux. À
la toute fin du XIXe siècle, on met sur pied un service
de travaux dingénierie. Larchitecte W.
J. Carmichael est alors nommé commis aux travaux (Clerk
of works). En 1897, il devient directeur des immeubles (Superintendent
of Buildings) au sein du service de génie. Au cours
de sa carrière chez Bell, Carmichael a dirigé
la construction du premier siège social érigé
entre 1895 et 1897 rue Notre-Dame et dont les plans avaient
été dessinés par Edward Maxwell (1867-1923).
Carmichael a aussi dessiné les plans de limposante
manufacture où sont fabriqués les fils et les
câbles téléphoniques, Northern Electric,
inaugurée en 1916 dans le quartier ouvrier de Pointe-Saint-Charles.
Enfin, cest lui qui a dirigé la conception de
plusieurs centraux montréalais, notamment le Plateau
et le Lancaster.
Premier
siège social de Bell, rue Notre-Dame, 1895
Pour sa part, F. J. Macnab sest joint à la compagnie
en 1906 à titre de commis aux travaux. À partir
de 1908, cest à Toronto quil poursuit sa
carrière chez Bell où il devient, en 1922, architecte
auxiliaire. En plus davoir conçu les plans de
quelques centraux téléphoniques de lagglomération
montréalaise, il a contribué à la planification
de centraux téléphoniques en Ontario, notamment
à Ottawa et à Toronto.
La présence de ces professionnels assure
le succès de la stratégie que Bell a déployée
pour faire reconnaître la valeur de son service et limportance
de ses activités. Sans doute ses dirigeants considèrent-ils
indispensable de porter une attention toute particulière
aux équipements installés au cur des quartiers
où habitent leurs clients. Dès lors, les bâtiments
qui abritent les centraux téléphoniques sont
conçus, assez rapidement, selon des normes précises,
qui respectent le cadre bâti environnant.
De plus, dès la fin du XIXe siècle, les avantages
de concevoir et de bâtir ses propres édifices
sont clairs. Il apparaît de plus en plus profitable
dêtre propriétaire et de construire les
centraux et les bureaux daffaires puisquils constituent
des valeurs immobilières très importantes. En
1922, la compagnie évalue à plus de cinq millions
de dollars lensemble de ses biens immobiliers au Canada.
En 1926, ce chiffre a grimpé à 16,75 millions
de dollars.
Entre le début des années 1880
et les années 1910, les bâtiments qui accueillent
les équipements de commutation ont beaucoup changé.
Au départ, les constructeurs des réseaux se
contentaient de simples locaux loués aux étages
supérieurs dimmeubles commerciaux et dimmeubles
de bureaux.
Ainsi, dans un premier temps, on installe les équipements
de commutation manuelle dans des bâtiments existants,
situés dans le quartier des affaires à proximité
de la majorité des abonnés. Le central occupe
souvent le dernier étage dun bâtiment sur
lequel aboutissent les câbles accrochés à
des structures fixées aux toits des immeubles. Cest
quavant dobtenir des autorités municipales
la permission dutiliser la voie publique, les compagnies
de téléphone ont dû suspendre les câbles
à des structures existantes, notamment les toits et
les cheminées.
Dans plusieurs pays européens où il était
interdit de planter des poteaux sur la voie publique, on a
vu apparaître dans le paysage urbain dimportantes
structures faites de bois et de métal qui coiffaient
les centraux, où aboutissaient les lignes téléphoniques
dun quartier.
À Montréal, le premier central
de Bell est situé dans des locaux loués au dernier
étage dun édifice bancaire de la rue Saint-Jacques,
dans le quartier des affaires. Ce central, alors nommé
le central Main, sera installé quelques années
plus tard dans un local plus vaste, dans lédifice
British Empire, situé à lintersection
des rues Notre-Dame et Saint-François-Xavier. Les bureaux
administratifs de lentreprise sy trouvaient déjà.
Toutefois, cette solution savère rapidement non
viable étant donné laugmentation du nombre
de lignes et lencombrement qui sensuit. Dès
lors, en raison de la longueur des lignes et de leur multiplication,
il devient impératif détablir de nouveaux
centraux téléphoniques. Les centraux manuels
doivent être localisés tout au plus à
3 ou 5 kilomètres lun de lautre. Cest
dailleurs ce qui explique pourquoi le territoire est
divisé en circonscriptions téléphoniques
ayant chacune leur propre central.
Après 1905, à la suite de lintroduction
de la batterie commune, il devient nécessaire de monter
plusieurs tableaux de commutation et dinstaller les
systèmes de batterie commune à lintérieur
des centraux téléphoniques. Ce qui conduit les
ingénieurs de Bell à concevoir de vastes salles
capables daccueillir des dizaines de standardistes.
Mais contrairement à ce que lon constate avec
les équipements associés aux technologies nouvelles
(on peut penser aux centrales hydroélectriques), les
centraux téléphoniques naffichent pas
demblée leurs fonctions technologiques. Le décor
et la volumétrie extérieurs, entre autres, ne
cherchent pas à témoigner des vertus du nouveau
service de communication à distance.
Bâtiment ayant abrité le premier central téléphonique
de Bell à Montréal, rue Saint-Jacques dans le
quartier centre
Les premiers centraux sont donc plus ou moins
déguisés en immeubles de bureaux. En fait, à
partir du moment où elle érige ses propres bâtiments,
Bell cherche plutôt à dissimuler les tâches
fonctionnelles des centraux et met en place une véritable
politique architecturale. Là encore, cest sa
conception particulière du service public qui lincite
à adopter cette approche. Par ailleurs, lorsquils
sont enfouis, les câbles entrent dans le bâtiment
par voie souterraine ; ce qui permet déliminer
les structures aériennes installées sur le toit
des édifices. Ainsi, la présence du central
se fait-elle encore plus discrète.
Cela dit, quels éléments permettent
de définir le modèle de central téléphonique
élaboré par Bell à léchelle
nord-américaine ?
Le premier élément découle dune
adaptation du bâtiment aux fonctions. Les bâtiments
qui abritent des équipements de commutation sont assujettis
à des impératifs techniques stricts.
Chaque pièce remplit des fonctions précises.
Par exemple, la salle où aboutissent les lignes téléphoniques
dun secteur constitue comme tel le central de distribution
des appels. Le « standard », ou léquipement
de commutation, est installé au niveau supérieur
du bâtiment, lequel, en général, possède
deux étages. Les génératrices qui fournissent
lénergie nécessaire au fonctionnement
des équipements de commutation sont localisées,
la plupart du temps, au rez-de-chaussée de lédifice,
là où se trouvent aussi les services dappoint.
Dans les années 1910, laccroissement
du nombre de standardistes et la rationalisation de leurs
tâches imposent une organisation du milieu de travail
qui doit tenir compte de normes de contrôle précises.
On met alors en place des services destinés au bien-être
des employées : salle de repos, cantine, vestiaire.
Des espaces de bureau, accueillant notamment le service à
la clientèle, sajoutent aux espaces conçus
spécifiquement pour les standardistes. Il faut une
planification interne particulière pour faire face
à toutes les exigences de la distribution des appels
téléphoniques. Une fois les diverses contraintes
techniques et organisationnelles surmontées, il apparaît
avantageux de reproduire un type de bâtiment.
Lexpérience en construction déquipements
vécue par diverses entreprises affiliées au
système Bell aux États-Unis est partagée
par leur homologue canadien.
Certains principes sont retenus et standardisés. On
transmet ces connaissances par diverses filières, notamment
par des périodiques spécialisés, comme
le Bell Telephone Quarterly, ou par des conférences
auxquelles sont conviés les architectes et les ingénieurs
qui assument la planification des immeubles.
Par exemple, en 1913, larchitecte responsable des immeubles
de Bell à Montréal, W. J. Carmichael, participe
à une conférence organisée par AT&T
sur la standardisation des bâtiments. À la suite
de cette rencontre, on va établir des normes daménagement
et de planification pour lensemble des villes.
Ainsi peut-on parler dune uniformisation qui répond
aux fonctions technologiques et qui tient compte de certains
principes organisationnels. Par contre, parce quil sinsère
dans un milieu spécifique, chaque bâtiment doit
être unique.
La qualité de service public doit transparaître
dans lapproche architecturale de lentreprise.
Soucieuse de son image publique, Bell veille à lintégration
harmonieuse des bâtiments dans les quartiers urbains
et suburbains. Contrairement aux poteaux qui traversent lensemble
du territoire, y compris les secteurs où lon
retrouve peu dabonnés, les centraux sont surtout
situés à lintérieur des zones résidentielles
et commerciales, près des abonnés. De plus,
leur localisation révèle le sens de lextension
du réseau préconisé par la compagnie
: elle construit des centraux là où elle envisage
de desservir une clientèle potentielle.
Lidée dintégrer les centraux à
leur environnement urbain et suburbain participe de la politique
de relations publiques destinée à parfaire limage
de lentreprise auprès des habitants. Consciente
du respect quelle doit démontrer à lendroit
de sa clientèle nantie et qui se considère protagoniste
du bon goût, Bell accorde une attention particulière
à laménagement lorsquil sagit
dériger un nouveau central dans un secteur résidentiel.
Il faut rappeler que les constructeurs de ces équipements
technologiques nouveaux sont les tenants de lembellissement
urbain en vogue en Amérique du Nord au tournant du
XXe siècle.
Implantée à la fin des années 1900, cette
politique dintégration harmonieuse de Bell est
toujours appliquée au début des années
1950. Encore une fois, Bell met de lavant la nature
du service public pour légitimer la réalisation
de son programme architectural. Cest du moins dans cette
perspective que larchitecte Macnab fait valoir les responsabilités
de la compagnie en matière daménagement
: A public utility is dependent for its success on the
goodwill of the people it serves. Like schools and churches,
telephone exchanges have to be where the people are. In purely
residential areas zoning regulation or other restrictions
must be taken into account and it is essential that the telephone
building be acceptable to the community [...]. The architects
problem is then to design a building which will meet all technical
requirements and be compatible with its surroundings.
En dautres mots, pour les ingénieurs
et les architectes, les bâtiments de la compagnie de
téléphone sont des bâtiments publics.
Ils permettent en effet à Bell de remplir ses obligations
fondamentales envers sa clientèle, soit acheminer des
centaines de milliers de messages et offrir un service adapté
aux besoins modernes dune société progressiste
: Telephone central offices are public buildings in the
true sense in that millions of calls from citizens in all
walks of life are handled either by the operators or the equipment
housed within their walls [
].
Due to the important part that telephone service plays in
the present day business and social life of a city it is indeed
fitting that a building erected for such a service should
be designed and constructed along principles based on stability
and efficiency. It should also adorn the neighborhood and
symbolize the service to which it is dedicated.
Tout en respectant les exigences du service
public (lefficacité, la qualité, laccessibilité,
la continuité), les principes architecturaux et urbanistiques
auxquels se réfèrent les constructeurs de Bell
reflètent des qualités architecturales modernes
qui sont connexes : la permanence, la simplicité, la
beauté et lintégration au milieu environnant.
Parce quils considèrent le système
téléphonique comme un organisme en croissance,
les ingénieurs et les architectes conçoivent
des bâtiments sur lesquels on doit pouvoir ajouter des
étages au besoin. Ils prévoient aussi agrandir
les bâtiments sur un plan latéral pour y loger
des unités de commutation additionnelles. Ces exigences
ont un impact sur la composition architecturale. Dentrée
de jeu, les dessinateurs résolvent cette contrainte
en faisant des esquisses du bâtiment initial et du bâtiment
éventuellement modifié afin den assurer
la croissance harmonieuse.
Le choix des sites doit aussi tenir compte de certaines contraintes.
La plupart du temps, on érige les centraux montréalais
sur des artères secondaires. Une logique économique
peut expliquer ce choix : le coût des terrains y est
moindre. Mais il importe quil y ait des conduits principaux
à proximité. Le lot doit également offrir
des possibilités dexpansion. Il faut aussi prendre
en considération la pollution sonore et atmosphérique
causée par la circulation sur les grandes artères.
On doit également évaluer les
risques dincendie. Les ingénieurs de Bell préfèrent
donc construire sur un site dégagé. Enfin, selon
un architecte de la compagnie, les clients doivent avoir facilement
accès aux bâtiments qui les accueillent et ne
pas subir la congestion des voies principales. On peut prendre
lexemple du central Saint-Louis, construit en plein
cur dun quartier résidentiel en expansion
. Au lieu de localiser lentrée principale sur
le boulevard Saint-Joseph, les ingénieurs choisissent
de la placer sur une artère secondaire. Par ailleurs,
on sait que la proximité dune voie principale
est essentielle car celle-ci peut être desservie par
des conduits souterrains qui amènent les câbles
à lintérieur du bâtiment.
Lorsquon introduit la composition automatique
en 1925, des modifications majeures sont apportées
à la planification intérieure des centraux.
Dabord, la grande salle accueillant larmée
de standardistes nest plus nécessaire. Il en
va de même des pièces où se trouvaient
les services offerts aux standardistes. Ensuite, à
cause des charges accrues que doivent supporter les planchers,
les structures doivent avoir plus de résistance. Enfin,
un dégagement en hauteur est requis et les colonnes
doivent être davantage espacées pour faciliter
linstallation de léquipement de commutation.
Avec lautomatisation, on assiste à un mouvement
de centralisation : il apparaît avantageux sur le plan
économique de regrouper plusieurs unités de
commutation, soit environ 10 000 lignes. Inauguré en
1925, le premier central entièrement automatique de
Montréal qui respecte ces nouveaux critères
daménagement est le Lancaster.
Publié dans le
quotidien La Presse, le 24 janvier 1925 :
Une fois terminée la construction
du superbe immeuble Lancaster à langle
des rues Ontario et Saint-Urbain, le premier poste central
de téléphone automatique à être
installé à Montréal, sera sur le
point de fonctionner. Il y a certes encore beaucoup
à faire pour terminer la canalisation des câbles
souterrains et aériens, et le montage au poste
central des appareils daiguillage nest pas
encore complété. Mais on sattend
à ce que dici trois mois tous les abonnés
desservis par le poste central Lancaster soient pourvus
dun appareil automatique.
Le nouvel annuaire du téléphone contient
un grand nombre dabonnés du poste Lancaster
et la Compagnie y ajoutera, de temps en temps dautres
abonnés. On est à installer dans les demeures
et les places daffaires de ces abonnés
des appareils téléphoniques munis de cadrans,
en temps et lieu, on leur donnera des instructions personnelles
indiquant la manière exacte de se servir de ce
nouvel appareil. Daprès les prévisions
actuelles, la Compagnie sera en mesure, en avril prochain,
deffectuer le changement au service automatique
du territoire Lancaster.
« Mais comment ceci fonctionne-t-il? »,
demandait-on à M. Frank C. Webber, gérant
de la Compagnie de téléphone Bell, comment
appellera-t-on par exemple Lancaster 0456 ? «
Bien, dit M. Webber, en posant devant nous, sur le bureau,
un appareil automatique, voyons quelles sont les opérations
requises pour appeler le numéro que vous mentionnez
Lancaster 0456 et dans quel ordre elles
se présentent. « Dabord nous décrochons
le récepteur et écoutons pour percevoir
ce quon est convenu dappeler le «
ton du cadran » un bourdonnement continue
qui indique que le mécanisme est prêt à
transmettre nos signaux.
Après avoir perçu le bourdonnement et
en tenant toujours le récepteur décroché,
nous signalons la lettre L du numéro LAncaster
0456.
Plaçant lindex dans le
trou où apparaît la lettre L, M. Webber tourne
le cadran jusquau point darrêt. Puis
il dégage le cadran qui retourne à sa position
normale. Ensuite, nous signalons de même la lettre
A. Encore une fois, il tourne avec lindex le cadran
jusquau point darrêt, puis le laisse
revenir à sa position initiale.
Maintenant que nous avons signalé les deux premières
lettres du nom du poste central, nous commençons
à signaler les chiffres 0-4-5-6.
Ici M. Webber localisa à tour de rôle chacun
des chiffres et, après avoir tourné le cadran
jusquau point darrêt, le laissa revenir
au repos.
Maintenant, si ce téléphone était
réellement raccordé, je devrais entendre
le ronron qui mindiquerait que la sonnerie du poste
appelé tinte. Nous avons complété
toutes les opérations nécessaires à
un appel dun poste automatique à un autre
: dabord les deux premières lettres du nom
du poste central, lesquelles sont indiquées en
majuscules dans lannuaire, et ensuite les quatre
chiffres du numéro sans omettre le zéro
initial...
« Les points suivants sont à noter pour signaler,
continue M. Webber. Vous navez pu constater que
jai eu soin de ne pas toucher au cadran pendant
quil retournait à sa position de repos. Jobtiendrais
probablement une fausse communication si jessayais
den hâter ou den ralentir le retour.
Remarquez aussi que les lettres sont noires et les chiffres
sont rouges. Ceci permet de différencier facilement
la lettre O (noire) du chiffre qui est rouge. Les confondre
donnerait lieu à une fasse communication, doù
limportance de les distinguer.Supposons que nous
éprouvons quelque difficulté? Lui demanda-t-on.
Jimagine que beaucoup auront besoin daide.
Remarquez le mot Operator au bas du cadran, dit le gérant.
Un tour au cadran vous mettra en communication avec une
téléphoniste qui aura pour fonction daider
les abonnés qui éprouveront des difficultés
à signaler. Vous voyez que les abonnés desservis
par le téléphone automatique ne doivent
pas avoir limpression quils nont à
leur disposition en cas durgence quune machine
inerte. De fait, nous avons choisi certains numéros
spéciaux servant à des appels déterminés
par exemple : Information 113 (trois tours au cadran);
Commis des réparations 114 (trois tours au cadran);
Longue distance 110 (trois tours au cadran) ». «
Comment signaler un numéro de ligne double ? »
« Signalez le numéro de la même façon,
dit M. Webber, en y ajoutant la lettre W ou J tel
quindiqué dans lannuaire ».
« Maintenant, si la ligne est occupée? »
« Si le poste que vous appelez nest pas libre,
vous entendrez un buzz buzz rapide au récepteur,
similaire à ce que vous entendez actuellement avec
la téléphone manuelle. Raccrochez le récepteur
et rappelez un peu plus tard.
Supposons que vous désirez appeler Lancaster 0456
: Décrocher le récepteur écouter
pour percevoir le ton du cadran trouver la lettre
L sur le cadran tourner le cadran jusquau
point darrêt retirez le doit et laissez
le cadran retourner à la position normale
procédez de même pour la lettre A et ensuite
pour les chiffres 0,4,5 et 6, dans lordre indiqué
vous percevrez alors le signal dappel.
La lettre O est noire! Le chiffre 0 est rouge (au moins,
sur les premiers téléphones à cadran).
Le cadran a été installé sur chaque
téléphone automatique.
Le poste central Lancaster, installé au coin des
rues Ontario et Saint-Urbain. |
Vers 1925, le nombre d'abonnés atteint
10 000. On uniformise donc les numéros de téléphone
qui auront tous désormais cinq chiffres.
Les années suivantes correspondent aux années
de relocalisation des centraux.
Le choix des noms des centraux nest pas non plus fortuit.
Ces noms peuvent avoir une connotation significative reliée
au lieu : nom du quartier ou de la rue où ils sont
localisés.
Cest le cas notamment de la première génération
de centraux établis avant la Première Guerre
mondiale. Ils sont encore peu nombreux et une appellation
toponymique ou géographique suffit à préciser
leur localisation et le secteur quils desservent : Main
(1886, 1890, 1897), Uptown (1887, 1890, 1907), East (1888,
1905), South (1890), Mount/Westmount (1898, 1908). Il nen
demeure pas moins que le choix dun nom pour un central
est primordial puisquil permet de relier un abonné
à son district téléphonique.
Central téléphonique Saint-Louis, Montréal,
construit en 1909 à l'angle de la rue de Bullion et
du boulevard Saint-Joseph
Pour desservir une clientèle de « salariés
prospères », Bell ouvre un bureau central à
Ville Saint-Louis, rue Cadieux (actuelle rue De Bullion),
à lintersection du boulevard Saint-Joseph. Inauguré
le 15 août 1909, le central Saint-Louis dessert le Plateau
au nord de lavenue Duluth, Outremont, et Saint-Édouard
(aujourdhui la Petite-Patrie). Cest un territoire
denviron 30 000 habitants où 2 500 personnes
sont abonnées au téléphone, un taux de
pénétration légèrement supérieur
à la moyenne montréalaise.
Avant 1884, vu le nombre restreint dabonnés
au service, les clients demandaient aux téléphonistes
de les connecter à leur interlocuteur simplement en
mentionnant leur nom. Ce système personnalisé
est remplacé en 1884 par les numéros de téléphone.
À partir de 1898, on requiert une information supplémentaire
: les demandeurs doivent préciser le nom du central
pour joindre les demandés (par exemple Main 427).
Au cours des années 1910 et 1920, lors de la période
de forte croissance du service téléphonique,
la dénomination des nouveaux centraux ne vise pas forcément
à identifier leur emplacement.
En fait, on choisit les noms parce que, sur le plan phonétique,
ils sont très distincts. On veut éviter les
malentendus qui risqueraient de nuire à la qualité
du service. Toutefois, on constate que le caractère
linguistique francophone ou anglophone dun
secteur est quand même souligné par la désignation
des centraux.
Par exemple : les noms Saint-Louis/Belair (1909) le
premier nom est retenu précisément en référence
au district, LaSalle/Clairval (1912), Calumet (1920),
Cherrier (1926), Marquette (1929), Frontenac (1928) et Dupont
(1929) sont sélectionnés pour les quartiers
de lest. Les noms Victoria/York (1913), Rockland/Atlantic
(1914), Melrose/Walnut (1920), Bywater (1927), Harbour (1928),
Wilbank (1928) et Elwood (1930) sont choisis pour les centraux
de louest de lîle. Certains centraux sont
nommés en fonction de la rue où ils sont localisés.
Avec lintroduction de la composition
automatique dans les années 1920, il apparaît
nécessaire davoir des noms de centraux très
variés, car les premiers chiffres du numéro
de téléphone correspondent aux deux premières
lettres contenues dans le nom du central. Par exemple, Arbour
(42) et Wilbank (94) nont pas du tout le même
code numérique. Au besoin, pour éviter toute
confusion entre les codes numériques, on change le
nom des centraux. Néanmoins, avant de modifier le nom
dun central, sa notoriété est évaluée.
Cest que, dans certains cas notamment pour le
quartier des affaires , introduire un nouveau nom pourrait
provoquer une certaine confusion chez les utilisateurs, donc
nuire à la qualité du service.
Les abonnés branchés sur un nouveau central
automatique devaient composer eux-mêmes, au moyen du
cadran, les deux premières lettres du nom du central
suivies du numéro désiré. Le nom de Saint-Louis
aurait prêté à confusion : aurait-il fallu
composer SA, ST ou même SL ? Le central Saint-Louis,
qui demeure manuel, est donc renommé Bélair
en janvier 1924 pour mieux sintégrer au nouveau
système.
À mesure que le service automatique sétend,
les abonnés de Bélair sont transférés
à de nouveaux centraux modernes dans des édifices
costauds remplis déquipement électrique,
sans téléphonistes pour les appels locaux. Lédifice
Bélair dans le Mile End ferme en mars 1932. Depuis
ce temps, limmeuble est occupé par les Forces
armées canadiennes.
À la fin des années 1920, suite
à la hausse rapide de la demande et à lautomatisation
de la commutation, on apporte des modifications à lorganisation
des activités administratives, commerciales et productrices
du service téléphonique. De manière générale,
on peut parler dun double mouvement, à la fois
centralisateur et décentralisateur. Dun côté,
le service à la clientèle fait lobjet
dune réorganisation pour rapprocher certaines
fonctions des consommateurs. Ainsi les bureaux daffaires
de Bell poursuivent-ils leur mission qui consiste à
mieux prendre en compte les besoins du consommateur. De lautre,
les activités de direction sont progressivement regroupées
afin dassurer un meilleur contrôle bureaucratique
sur lensemble du système. Lévolution
des bâtiments administratifs reflète ces transformations.
Les bâtiments administratifs
Au début du développement du
réseau téléphonique, les premiers bâtiments
construits par Bell ont des fonctions mixtes.
Cest le cas notamment du premier siège social
inauguré en 1897. Bien que destiné à
lorigine aux activités administratives de lentreprise,
son dernier étage va abriter les équipements
de commutation du central Main. De plus, contrairement aux
installations des centraux mis en activité dans les
années 1880, cest par le sous-sol quentrent
les câbles téléphoniques ; ce qui permet
déliminer les structures aériennes encombrantes
et dangereuses.
En quelques décennies, les fonctions
des bâtiments se transforment, et leur spécialisation
saccroît. Létape ultime de cette
évolution est sans doute la construction du nouveau
siège social de lentreprise montréalaise
: le Beaver Hall Building. Inauguré quelques mois avant
la crise de 1929, ce bâtiment de vingt étages,
à lintérieur duquel sont concentrées
les fonctions de direction, permet de centraliser les activités
denviron 2000 employés.
Au cours de la seconde moitié des années 1920,
on note un certain revirement sur le plan de larchitecture.
Le thème du gigantisme architectural commence à
prendre une place centrale dans les entreprises du système
Bell en Amérique du Nord. Les traits essentiels de
la culture de ces entreprises sont alors clairement tracés.
Comme il a déjà été mentionné
pour la planification des centraux téléphoniques,
larchitecture est utilisée comme signe de représentation
et de valorisation du service public.
Au cours des années de forte croissance du service,
aux lendemains de la Première Guerre mondiale, les
valeurs qui fondent lidentité des compagnies
Bell récupèrent certains thèmes de la
modernité technologique. De manière spécifique,
les qualités exprimées par cette politique architecturale
sont lutilité, la beauté, le fonctionnalisme,
la solidité et la prévoyance. En outre, le style
architectural (qualifié alors dAmerican perpendicular)
retenu pour plusieurs sièges sociaux des entreprises
affiliées au système Bell vise à refléter
lesprit étatsunien, particularisé par
le pragmatisme et lutilitarisme.
Beaver Hall Building, nouveau siège social de Bell
à Montréal inauguré en 1929
Bien que le Beaver Hall Building soit classé
parmi les nouveaux édifices administratifs téléphoniques,
il conserve des caractéristiques architecturales qui
le distinguent de plusieurs de ses équivalents nord-américains.
Son architecte, E. I. Barott (1884-1966), effectue une composition
architecturale très classique, tant par son aspect
externe que par sa planification interne.
Pour lornementation, larchitecte fait appel à
des éléments stylistiques typiques de la seconde
moitié du XVe siècle, période qui correspond
à la naissance de limprimerie.
Lorganisation du plan repose sur les principes propres
aux Beaux-Arts et relatifs à la disposition du bâtiment
(il faut en faciliter laccès), à lutilisation
maximale du site (dans le cas du Beaver Hall Building, Barott
intègre, de manière très réussie,
le bâtiment à son emplacement en pente), et à
la distribution des pièces (elles sont bien proportionnées
et dune manière qui répond logiquement
à leur utilisation).
Ce conservatisme est sans doute imposé par la haute
direction de lentreprise, peu audacieuse en matière
socioculturelle. Il faut rappeler que le premier siège
social avait été conçu par larchitecte
Edward Maxwell, formé au sein dune grande agence
darchitectes des États-Unis. Respectueuse de
la tradition des Beaux-Arts, elle préconisait lusage
dun répertoire ancien en hommage au passé.
Pourtant, dans le cas du Beaver Hall Building, si le classicisme
prédomine, ce nest ni parce que Barott ne peut
concevoir un bâtiment plus contemporain doù
serait exclue par exemple toute référence historique
, ni parce que les entreprises affiliées au système
Bell se limitent à ce type de compositions architecturales.
Dailleurs, le fait que Barott ait privilégié
les références historiques et les formes traditionnelles
de présentation constitue en quelque sorte une exception
par rapport à lensemble des bâtiments administratifs
des compagnies Bell construits au cours des années
1920, tant aux États-Unis quen Ontario où
lentreprise montréalaise est active.
Par contre, ce bâtiment est lun des plus modernes
et fonctionnels. Dans cet environnement de travail en grande
partie occupé par des femmes, lentreprise a mis
à la disposition des travailleuses divers services
: salles de repos, infirmerie, service de médecine
préventive qui mise sur lenseignement des bonnes
habitudes de vie, etc. Les espaces publics de lédifice
où se trouvent les services destinés aux consommateurs
(une salle dexposition, le service à la clientèle,
les téléphones publics) sont situés au
rez-de-chaussée. Ils sont facilement accessibles grâce
au plan de Barott qui sépare de manière très
claire les éléments relevant de la sphère
publique et ceux relevant de la sphère privée.
Dans le discours des opérateurs de
réseaux téléphoniques, il est certain
que les nouveaux gratte-ciel reflètent une image de
puissance et contribuent à ancrer le service dans la
vie des citadins, même sil na pas encore
entièrement franchi le seuil des demeures. Pour les
dirigeants de Bell, létendue et la croissance
spectaculaire de leurs activités sont ainsi représentées
de manière ostensible par le caractère colossal
du nouveau bâtiment. Convaincue de son caractère
spécifique, lentreprise montréalaise fait
ériger son nouveau siège social à son
image. En outre, lidée dafficher lenvergure
de lentreprise par le biais dun gratte-ciel sinspire
de la politique architecturale adoptée par les sociétés
téléphoniques affiliées au système
Bell. La nature publique du service les incite à mettre
de lavant une vision monumentale eu égard à
leur fonction sociale. Toutefois, il reste que la décision
de construire en hauteur demeure aussi conditionnée
par des impératifs fonciers : Where a many-storied
building is necessary in order to utilize to the best advantage
valuable land, it has been found in this country that such
a building can be made so architecturally fine that it becomes
an object of pride to the community as a whole. Such buildings
not only are attractive in themselves, but they also exemplify
the high ideals of the Bell System.
Le site choisi pour le gratte-ciel de Bell
à Montréal est en périphérie immédiate
du centre des affaires traditionnel, dont les activités
se regroupent autour de la rue Saint-Jacques. Il est localisé
à mi-chemin entre le district financier (doumtown)
et le centre commercial (uptown), à proximité
des grands magasins de la rue Sainte-Catherine. Le choix de
la Côte-du-Beaver-Hall à langle de la rue
Belmont crée, en quelque sorte, un précédent.
Après la Seconde Guerre mondiale, lorsque le développement
immobilier reprendra, les promoteurs délaisseront lancien
centre des affaires. Ils construiront alors leurs projets
aux abords du siège social de Bell.
Le départ de Bell du district financier
de la ville historique démontre que ses dirigeants
recherchent en priorité un environnement urbain adapté
aux exigences modernes de lère de lautomobile
et des transports en commun rapides et efficaces. Depuis plusieurs
années, les rues de ce district font lobjet dune
congestion persistante due à laccroissement et
à la diversification des véhicules qui y circulent.
Les administrateurs de Bell optent donc pour un endroit bien
desservi en transport en commun et plus facile daccès
pour les automobilistes. De plus, cet emplacement répond
mieux aux besoins de lentreprise en termes despace.
Par ailleurs, pour construire le gratte-ciel, la vocation
du lieu est considérablement modifiée. On démolit
léglise St. Andrew installée là
depuis les années 1880. Le choix des dirigeants de
lentreprise se justifie dun point de vue fonctionnel.
Il est aussi motivé par le désir de manifester
haut et fort la présence de Bell à lhorizon
de Montréal : compte tenu de sa localisation privilégiée,
le bâtiment est visible de très loin et domine
le nouveau centre des affaires.
Les cabines téléphoniques et les téléphones
publics
Les derniers éléments du réseau
téléphonique insérés dans lespace
public de la ville relèvent davantage du mobilier urbain.
Il sagit des cabines et des téléphones
publics. Toutefois, jusque dans les années 1940, à
Montréal, les cabines qui permettent lusage public
du service sont localisées à lintérieur
des édifices. Autrement dit, ces équipements
ne se retrouvent pas véritablement dans le domaine
public ; ils nont pas encore gagné les rues de
Montréal.
Dans les années 1880, lorsquil
importe de trouver un endroit pour implanter les nouveaux
appareils téléphoniques, les responsables de
Bell choisissent des lieux où leur utilisation adéquate
cest-à-dire en cas durgence ou à
des fins de communications professionnelles est envisageable.
De plus, le nouveau service est destiné spécifiquement
aux abonnés du téléphone.
Les modalités de fourniture des téléphones
publics sont également représentatives de la
manière dont les exploitants du service envisagent
délargir leur clientèle. Dans certains
pays, notamment en France et en Grande-Bretagne, bien que
ce soient des entreprises privées qui offrent dabord
le téléphone, ce sont les pouvoirs publics qui
sont responsables de linstallation, dans les années
1880, des premières cabines. Elles sont localisées
dans les bureaux de poste et de télégraphe.
Malgré cette prise en charge par lÉtat
de loffre du service, dans la plupart des cas et à
linstar de lexemple montréalais, les cabines
téléphoniques publiques sont dabord destinées
aux abonnés.
La présence accrue de ces installations favorise néanmoins
la diffusion du service puisquelles le rendent plus
accessible, et ce, malgré les conditions dusage
limitatives prescrites par les fournisseurs. À Montréal,
dans les années 1880 et 1890, il est assez usuel de
trouver chez certains commerçants, notamment les pharmaciens,
un téléphone à la disposition de la clientèle.
Le système de tarifs fixes alors en vigueur encourage
les commerçants à inviter leurs clients à
se servir des appareils : la fourniture gratuite du téléphone
peut inciter à faire ses achats dans ce commerce. En
outre, on veut permettre aux clients de faire des appels en
cas durgence, par exemple pour communiquer avec un médecin.
Cette pratique contrarie les opérateurs du réseau.
Selon eux, seuls les individus qui paient un abonnement ont
le droit dutiliser le service. Et les appels des non-abonnés
contribuent à lencombrement des lignes. Les commerçants
sont eux aussi excédés par la faveur populaire
dont fait lobjet le nouveau service : on entre dans
leur commerce non pour y faire des achats mais plutôt
pour profiter de la disponibilité du téléphone.
À la toute fin des années 1890, pour limiter
ces pratiques jugées abusives, Bell remplace les téléphones
publics par les premiers appareils payants. Il en coûte
alors 5 C pour faire un appel local de trois minutes. Ce service
est implanté afin denrayer lusage libre
du téléphone qui tend à encourager les
conversations interpersonnelles au détriment des usages
professionnels.
Dabord interdit aux non-abonnés,
lusage du téléphone public payant va représenter
une source importante de revenus pour Bell. Ce qui lencourage
à faire la promotion des nouveaux équipements
à partir des années 1920. Lobjectif est
de convertir les usagers occasionnels, qui habitent souvent
à proximité du lieu où se trouve le téléphone
public, en abonnés permanents. Néanmoins, compte
tenu de son coût élevé, ce service nest
pas destiné à tous les consommateurs.
Dailleurs, le soin apporté à laménagement
des cabines révèle que le téléphone
est conçu en priorité pour les représentants
de la classe daffaires et de la classe moyenne. Ce que
lon a appelé dans les pays anglophones les silence
cabinets permettent aux utilisateurs de faire des appels interurbains
dans un environnement silencieux. Lintérêt
marqué pour la conception des cabines, y compris le
choix des matériaux et la recherche du confort, est
également visible dans certains pays européens,
notamment en Angleterre et en France où les modèles
de cabines téléphoniques sont fort nombreux
et élaborés. Ils suivent les goûts de
lépoque tout en respectant des normes élevées
dinsonorisation. Manifestement, utiliser un téléphone
public et faire un appel interurbain ne sont pas des gestes
ordinaires. Les dispositions spécifiques qui encadrent
lutilisation des premières cabines téléphoniques
sont là pour rappeler aux individus le caractère
distinct du service.
Après la Seconde Guerre mondiale seulement,
on installe à Montréal les premières
cabines téléphoniques extérieures, ce
qui permet un accès au téléphone public
en tout temps.
La proximité de certains commerces semble, dans une
large mesure, déterminer la présence de ces
nouveaux équipements. Ainsi, à linstar
des premiers appareils mis à la disposition du public
à lintérieur des commerces, le premier
abri servant aux communications téléphoniques
placé sur la voie publique se trouve devant une pharmacie
du quartier Côte-des-Neiges.
Avant les années 1940, les téléphones
publics payants sont localisés dans des édifices
publics où lon circule beaucoup : les gares,
les hôtels, les grands magasins, etc.
À la fin du XIXe siècle, la planification du
réseau est faite de manière plus ou moins formelle.
En effet, les opérateurs ne savent pas qui seront leurs
clients. Dans les années 1910, cette approche commence
à changer. Le modèle rationnel adopté
permet de mieux prédire les comportements de la clientèle.
Il est en effet assez surprenant de constater que, dès
1920, les opérateurs du réseau téléphonique
ont une vision assez nette de ses possibilités dexpansion.
Ainsi, entre 1910 et 1920, les planificateurs de Bell sont-ils
parvenus à réaliser un programme intensif de
construction des infrastructures et des équipements
téléphoniques. Leur ampleur est impressionnante
: acquisition de terrains (21 propriétés) et
de bâtiments (19 structures), mise en service de 6 centraux
automatiques et de 7 centraux manuels, enfouissement de plusieurs
milliers de kilomètres de fils et de câbles.
Le rôle joué à léchelle du
pays par lentreprise et par sa filiale qui fabrique
des équipements, Northern Electric, lui permet également
doccuper une place importante dans le paysage urbain
montréalais. De ce point de vue, linauguration
de son nouveau siège social en 1930 vient clore une
longue phase de développement du réseau téléphonique.
Ce sont là les principaux signes manifestes de lenracinement
des activités de Bell dans la société
montréalaise.
Encore aujourdhui, le Plateau est desservi
par les trois centraux ouverts pendant les années 1920
: Lancaster (rues Ontario et Saint-Urbain), Amherst (avenue
Papineau au sud de la rue Sherbrooke) et Crescent (rue Saint-Dominique
près de la rue de Bellechasse). Chaque « échange
» (commutateur) dans un central pouvait desservir jusquà
10 000 abonnés (les quatre derniers chiffres du numéro
de téléphone). On les a multipliés au
sein du même central, au rythme de laccroissement
du nombre dabonnés. Lédifice Lancaster
a hébergé les échanges Harbour, Marquette,
Plateau, et Belair (dès 1932); Amherst a été
rejoint par Cherrier, Frontenac, Falkirk, Hochelaga, et Giffard;
Crescent a accueilli Dollard, Calumet, Talon, Victoria, et
Gravelle. Jusquau début des années 1950,
donc, tous ces noms pouvaient se trouver au début dun
numéro de téléphone du Plateau Mont-Royal
et des secteurs avoisinants.
La conversion au format à sept chiffres
a commencé en 1951 et s'est poursuivie jusqu'à
l'introduction de la numérotation directe à
distance (DDD à 8 chiffres) en 1958.
À Québec, jusqu'en 1958, le
nombre de centraux passera d'un à huit. Les noms des
centraux (ou exchanges en anglais) raviveront certainement
en vous des souvenirs :
1951 : Lafontaine - LA ou 52 (Québec)
1952 : Montcalm - MO ou 66 (Giffard et Beauport)
1953 : Marquette - MA ou 62 (Charlesbourg)
1953 : Murray - MU ou 68 (haute-ville)
1953 : Terminus - TE ou 83 (Lévis)
1956 : Victoria - VI ou 84 (Loretteville)
1958 : Olympia - OL ou 65 (Sainte-Foy)
19?? : Trinité - TR ou 87 (Ancienne-Lorette)
Entre 1952 et 1958, les anciens numéros
de téléphone à 6 chiffres (ou plutôt
2 lettres et 4 chiffres) ont été remplacés
par ceux à 7 chiffres quon connaît aujourdhui.
La plupart du temps, les quatre derniers chiffres sont restés
inchangés, et les deux lettres au début ont
été remplacées par deux nouvelles lettres
et un chiffre de plus. Au sud, lancien central Lancaster
a reçu les noms AVenue (28) et VIctor (84); à
lest, Amherst est devenu LAfontaine (52); au nord, CRescent
(27) était le nom retenu pour lensemble des lignes
de ce central. Cest ainsi que la plupart des numéros
de téléphone anciens du Plateau commencent par
ces quatre combinaisons de chiffres
dans la mesure où
il existe encore des vieux numéros encore raccordés
à une ligne fixe à son adresse dorigine!
De nos jours, les centraux servent surtout au service Internet
de Bell et aux raccordements entre les différents réseaux
de télécommunications.
|
sommaire
La constitution du monopole de Bell
À la fin du XIXe siècle, Montréal
passe pour une ville bien pourvue en réseaux de communication
locale. Dès les années 1840, les gens daffaires
et les gestionnaires urbains ont eu loccasion dutiliser
différents systèmes électriques de transmission
à distance des communications. Malgré ces innovations
technologiques, il nen reste pas moins que plusieurs
acteurs socio-économiques réclament une amélioration
des services. En 1879, lintroduction du téléphone
marque un essor qualitatif important. Ses avantages sont évidents,
quoique plusieurs observateurs de la scène urbaine
en doutent. En outre, comme il a été mentionné
précédemment, dautres formes de communication
coexistent pendant plusieurs décennies.
Sur le plan technique, une série
dobstacles restent à surmonter. On peut penser
en particulier à la qualité de la transmission
de la voix. Il nen demeure pas moins que le téléphone
enthousiasme les promoteurs des services publics. Cest
pourquoi différentes compagnies spécialisées
en téléphonie commencent à se disputer
le marché montréalais. Constitué en véritable
entreprise commerciale, le nouveau service bénéficie
des savoir-faire que possèdent les grandes entreprises
pour concevoir des systèmes de production et de distribution
intégrés. Celles-ci sont en mesure de contrôler
toutes les étapes requises à la mise en place
dun réseau : fabrication des appareils, installation
des infrastructures, mise en marché du service, répartition
des flux des appels, service à la clientèle,
etc.
Les concepts et les instruments nécessaires
à cette organisation proviennent en grande partie de
lexpérience. Aussi, ne pourront-ils être
développés que quelques années après
lintroduction du service. Aux lendemains de la Première
Guerre mondiale, les efforts de normalisation et de rationalisation
du système mis en uvre par les producteurs privés
donnent des résultats évidents : la capacité
découlement des flux téléphoniques
sintensifie, la diversité des marchés
est mieux prise en considération et le nombre dabonnés
franchit de nouveaux seuils. Bref, la maîtrise de la
gestion de loffre et de la demande donne un nouvel élan
au service téléphonique.
Lorganisation des réseaux locaux : de la concurrence
au monopole
Dans les études qui traitent
de lindustrie du téléphone au Canada et
à Montréal en particulier, on insiste beaucoup
sur les caractéristiques communes aux réseaux
(énergie, transport, communication, eau et assainissement).
De fait, celles-ci tendent à refléter des traits
propres à leur histoire. En effet les similitudes sont
nombreuses entre les différents réseaux, que
ce soit sur les plans de la distribution, de la gestion ou
de la réglementation. Selon Gabriel Dupuy, il est possible
de dégager cinq traits généraux dans
lhistoire de lapparition des réseaux techniques
dans les villes :
1) la rapidité avec laquelle sont insérés
des nouveaux services ;
2) le rôle de linnovation technique ;
3) la présence manifeste dintérêts
privés ;
4) la concurrence marquant les premières années
de développement du réseau et qui fera place
à une situation de monopole ;
5) la prédominance dune logique économique,
que lon peut mettre en parallèle avec une logique
de type social. Il faut aussi relever la densité du
cadre bâti. Cest une variable clé : le
taux de pénétration des réseaux est,
en général, proportionnel à la densité
du cadre bâti.
Si le développement du réseau
téléphonique montréalais présente
plusieurs de ces caractéristiques, il ne comporte pas
moins une certaine originalité.
Lhistoire du téléphone à Montréal
est surtout marquée par la construction dun monopole,
celui de la Compagnie de Téléphone Bell du Canada.
Dès les premières années dexploitation
du nouveau service, ses dirigeants mettent en uvre des
stratégies visant à éliminer les concurrents.
À linstar dautres services publics gérés
par des compagnies privées, cette situation provoque
de vives réactions au sein des collectivités
locales.
Ainsi, contrairement à dautres
villes nord-américaines et européennes4, la
fourniture du téléphone à Montréal
a-t-elle toujours été contrôlée
par des entreprises privées, surtout par la Compagnie
de Téléphone Bell du Canada constituée
en 1880.
Les privilèges octroyés à cette dernière
par les gouvernements fédéral et provincial
sont alors imposants :
1) fabrication de léquipement nécessaire
à la fourniture du service ;
2) construction, acquisition, entretien et exploitation du
système ;
3) connexion à dautres réseaux téléphoniques
et télégraphiques ;
4) construction de lignes le long de toutes les artères
publiques, à condition de respecter certaines restrictions
relatives à lentretien et à la dimension
des poteaux ;
5) fusion avec dautres compagnies de téléphone.
En acquérant ainsi directement ses pouvoirs des gouvernements
fédéral et provincial, Bell se prémunit
contre une éventuelle réglementation municipale.
En effet, au même moment, les municipalités obtiennent
du gouvernement provincial de nouveaux pouvoirs dencadrement
réglementaire des activités des entreprises
de service public.
À partir de 1892, lentreprise
commence cependant à être soumise à des
contrôles plus stricts. Elle doit ainsi, pour hausser
ses tarifs, obtenir laccord du gouvernement fédéral,
linstance politique responsable du secteur des communications.
De plus, en 1902, le service téléphonique est
désigné officiellement service public par un
amendement à la charte de Bell. De manière concrète,
cela signifie que la compagnie doit raccorder à son
réseau quiconque en fait la demande, à condition
toutefois que le requérant soit situé sur le
territoire desservi. Par contre, en échange du branchement
et du service, labonné doit payer les tarifs
exigés par Bell et approuvés par le gouvernement
fédéral.
Cependant, même si lopinion publique
soppose à la constitution de monopoles, dans
le cas du service téléphonique, les avantages
procurés par cette situation sont manifestes. Afin
de bénéficier des qualités réticulaires
du service, cest-à-dire dune desserte qui
offre une capacité dinterconnexion, les abonnés
peuvent tirer profit de la présence dune seule
entreprise centralisatrice. Le fait quil y ait un réseau
unique peut aussi leur permettre de joindre un plus grand
nombre dinterlocuteurs. En revanche, la multiplication
des compagnies signifie, la plupart du temps, le dédoublement
des réseaux et des équipements. De plus, laugmentation
du nombre de compagnies qui offrent le service de téléphone
a pour effet daccroître les problèmes causés
par la prolifération des poteaux et des fils dans lespace
urbain. Pour autant, un contexte monopolistique
nest pas exempt de difficultés. Compte tenu de
leur position captive, les consommateurs sont ainsi susceptibles
décoper de tarifs élevés et dun
service dont la qualité est parfois discutable.
Malgré les inconvénients
dune distribution et dune gestion monopolistiques,
pour différentes raisons, cest ce modèle
qui va prévaloir à Montréal dès
1908. Toutefois, les monopoles ne sont pas des situations
naturelles. Ils sont construits dune manière
stratégique par des entrepreneurs qui reçoivent
lappui dacteurs politiques et économiques
présents sur la scène locale ou à léchelle
du pays. Ainsi, à Montréal, même si on
peut déceler une opposition aux monopoles dans certains
milieux notamment dans le milieu daffaires francophone
, on constate que les autres compagnies de téléphone
en mesure de limiter les interventions monopolisantes de Bell
ont été, paradoxalement, peu protégées
par la classe politique locale.
Par exemple, la Compagnie de Téléphone des Marchands,
fondée en 1892, crée une rivalité commerciale
en cherchant à conquérir le marché des
détaillants. En 1908, la Commission échevinale
spéciale du Conseil municipal, qui étudie la
question des conduits souterrains, met en doute lutilité
de cette compagnie, et veut faire annuler sa charte. Cette
compagnie, qui « nexiste pratiquement pas »,
détient un grand nombre de poteaux qui encombrent les
rues de la ville. À la fin du XIXe siècle, deux
municipalités suburbaines (Saint-Henri et Sainte-Cunégonde)
lui avaient déjà interdit dinstaller ses
poteaux sur leur territoire.
Malgré leurs luttes parfois acharnées
contre les activités de Bell, les municipalités
soutiennent peu la consolidation dun réseau alternatif
disponible à un moindre coût. Ainsi, en 1921,
lorsquune entreprise délectricité,
Quebec Union Electric, manifeste son intention dexploiter
un service téléphonique à Montréal,
ladministration municipale sy oppose pour les
raisons suivantes : les abonnés, pour être en
mesure de joindre tous les appareils branchés aux deux
réseaux, sont obligés de payer le service en
double ; toutes les infrastructures nécessaires à
loffre du service sont déjà en place ;
les abonnés sont protégés des hausses
tarifaires par le gouvernement fédéral9. Les
commissaires municipaux décident alors dinterdire
les activités de cette entreprise reliées au
domaine de la téléphonie sur le territoire montréalais.
Cette position contraste avec celle des années précédentes
qui préconisait la concurrence.
De plus, les premières entreprises
à distribuer le service téléphonique
lors de la période pionnière des années
1880 semblent plus ou moins intéressées par
ce nouveau marché. Dans plusieurs cas, notamment ceux
de Montreal Telegraph et Dominion Telegraph, elles consacrent
leurs activités à un service de télécommunication
assez populaire, à savoir le télégraphe.
Bien quil ait existé une situation momentanée
de concurrence, Bell a pu mener ses activités sans
se soumettre aux exigences municipales, notamment celle dencadrer
la pose des poteaux et la construction des conduits souterrains.
Le modèle étatsunien et le contexte montréalais
La téléphonie montréalaise
subit directement les influences de lemprise exercée
dans les grandes villes du nord-est des États-Unis
par la compagnie American Bell Telephone. Ainsi, les compagnies
régionales Bell ont-elles été regroupées
en 1885 pour former American Telephone and Telegraph (AT&T)
qui détient le monopole du service interurbain. Les
expériences de construction des réseaux urbains
et interurbains font lobjet déchanges,
sur les plans technologique et organisationnel. Cette influence
laisse de nombreuses traces : dabord, du point de vue
de lapproche manageriale ; ensuite, en matière
dinnovations technologiques et de génie électrique
; enfin, du point de vue des techniques de prévision
de la demande et des méthodes de mise en marché.
Peut-être plus important encore, le transfert didées
relatives à la notion de service public conçu
comme un service conforme aux ambitions économiques
dune société moderne simpose
sous leffet de laction des échanges et
des contacts.
À certaines occasions, les liens
entre la compagnie montréalaise et American Bell sont
manifestes. Ils reposent sur la présence dans la métropole
canadienne dindividus originaires des États-Unis.
Sinspirant de lexpérience étatsunienne,
les gestionnaires et les ingénieurs montréalais
mettent de lavant une vision unidimensionnelle des problèmes
posés par la construction des infrastructures téléphoniques
qui découlent de sa fonction doutil de promotion
économique. Ainsi nest-il pas rare de voir, surtout
au XIXe siècle, des gens daffaires étatsuniens
envoyés au Canada et à Montréal pour
établir des compagnies exploitantes dans le domaine
des télécommunications. Cela sest déjà
produit lors de limplantation des réseaux télégraphiques.
Dans ces circonstances, les entreprises et leurs représentants
apportent leurs pratiques, leurs considérations pragmatiques,
leur savoir théorique, en plus de leurs valeurs et
de leur idéologie.
Un survol des cheminements professionnels
des présidents et de quelques hauts dirigeants de Bell
met en lumière le rôle considérable que
jouent les réseaux personnels et familiaux à
lintérieur du milieu des affaires. Il fournit
également des éléments dinformation
sur les structures administratives des entreprises qui, dans
une large mesure, du moins jusque dans les années 1930,
étaient contrôlées par un nombre limité
dindividus.
Prenons le cas du directeur général
et président de Bell entre 1890 et 1915 : Charles Fleetford
Sise (1834-1918). Sise arrive à Montréal en
1880 après avoir travaillé en Grande-Bretagne
et aux États-Unis dans le domaine du transport maritime
et celui des assurances. Parmi ses relations dans le milieu
financier étatsunien, on retrouve des hommes daffaires
de Boston. À la toute fin des années 1870, ces
derniers sont intéressés par le brevet dappareil
téléphonique dAlexander Graham Bell ;
ils pensent mettre sur pied une entreprise, National Bell
Telephone, pour fournir le service, entre autres, à
Boston.
Pour élargir le rayonnement de leurs
activités commerciales, notamment dans les milieux
urbains en pleine expansion, ils chargent Sise dorganiser
une entreprise téléphonique au Canada. Ce quil
réalise très rapidement, grâce à
une stratégie commerciale visant à racheter
et à intégrer tous les réseaux existants
ou en voie de formation. En une vingtaine dannées,
Sise parvient à former une grande société
de téléphonie qui dessert les villes principales
de lOntario et du Québec, Toronto et Montréal
compris.
À Montréal, le pouvoir dentreprendre
et de gérer la construction des infrastructures téléphoniques
se trouve dans les mains de Sise. Son influence provient des
liens daffaires et politiques quil a créés.
Outre ses contacts avec les dirigeants de National Bell, qui
devient American Bell en 1880 puis AT&T en 1885
quelques membres siègeant au conseil dadministration
de la compagnie canadienne sont directement associés
à American Bell , il faut mentionner ses alliances
avec des organismes financiers susceptibles davancer
et de trouver des fonds. On peut penser à ses relations
avec des ingénieurs électriques étatsuniens.
On peut penser aussi aux liens quil entretient avec
la classe politique fédérale, lesquels lui assurent
une certaine autonomie par rapport aux enjeux strictement
locaux.
Daprès les chercheurs qui ont
examiné ses pratiques de gestion, Sise était
particulièrement doué, sachant utiliser des
méthodes de direction qui combinaient à la fois
les intérêts financiers, techniques et politiques
de lentreprise. Il semble sêtre engagé
avec conviction dans lindustrie du téléphone.
Si Andrew Robertson (1827-1890) occupe officiellement le poste
de président de Bell de 1880 à 1890, cest
Sise qui, dès son arrivée à Montréal
en 1880, oriente les stratégies commerciales de lentreprise.
La présence de Robertson à
la présidence nest dailleurs pas sans conséquences
sur les succès de la compagnie. Cest un homme
daffaires montréalais estimé, importateur,
commissaire à la Commission du Havre et administrateur
dune compagnie dassurances. Selon Sise qui le
choisit, ses contacts politiques et financiers sont impressionnants
et font de lui un dirigeant dentreprise tout à
fait approprié.
Les historiens Christopher Armstrong
et H. V. Nelles mentionnent que les nominations effectuées
par Sise au conseil dadministration de Bell visent à
refléter les diverses tendances politiques et les deux
principales communautés linguistiques de Montréal.
Toutefois, hormis le sénateur libéral Rosaire
Thibaudeau, qui est aussi administrateur de la Banque Nationale
et dune importante entreprise délectricité
montréalaise, aucun membre de la communauté
francophone montréalaise nest inscrit sur la
liste des hauts dirigeants. Il en sera ainsi pendant plusieurs
décennies.
Cette absence quasi totale de représentants
du milieu francophone au sein de lentreprise occasionne
une adéquation difficile entre le réseau téléphonique
et les réalités socioculturelles locales. Comme
on le verra plus loin, léquipement du territoire
montréalais sest effectué sur plusieurs
années selon une logique qui ne prenait en compte ni
les besoins linguistiques des francophones, ni les échanges
entre les différentes communautés intégrées
à lagglomération.
En 1915, Lewis B. McFarlane (1851-1943)
considéré comme le protégé
de Sise remplace ce dernier à la présidence.
Sise demeure cependant président du conseil dadministration
de Bell. Né à Montréal en 1851, McFarlane
occupe dès lâge de 16 ans un poste de messager
télégraphique chez Montreal Telegraph. Bien
quil ait toujours travaillé dans le domaine des
télécommunications, sa carrière démontre
une grande mobilité tant géographique que sociale.
Dabord au service de Montreal Telegraph en Ontario et
au Québec (entre 1865 et 1870), il travaille ensuite
un an à Western Union Telegraph au Michigan et en Louisiane.
Peu après, il revient au Canada à titre de représentant
commercial et de directeur de Dominion Telegraph. Il met alors
sur pied les premiers réseaux téléphoniques
dans lest du Canada. Dès la formation de Bell
en 1880, il est recruté par Sise qui le nomme directeur
général. Finalement, il devient président
de la compagnie Bell en 1915.
Lemprise de Charles F. Sise sur la compagnie
est prépondérante en ce qui a trait aux choix
de ses dirigeants. En plus dêtre lanimateur
principal de lindustrie du téléphone jusquen
1918, Sise investit les nouvelles entreprises de production
déquipements en y nommant trois de ses fils à
des postes de direction18. Le premier, Charles fils (1874-1960),
accède rapidement au conseil dadministration
de Bell après avoir supervisé différents
services de la même compagnie à Montréal.
En 1925, il prend la relève de McFarlane à la
présidence. Il reste à ce poste jusquen
1944.
Les deux autres fils de Sise, Edward et Paul,
sont nommés dans les années 1910 au conseil
dadministration de Northern Electric, entreprise responsable
de la fabrication des équipements téléphoniques,
dont Bell détient la majorité des actions19.
Une autre filiale de Bell qui produit les câbles téléphoniques,
Imperial Wire and Cable, est également placée
sous la direction dEdward. Au moment de la fusion de
ces deux entreprises manufacturières en 1914
on retient alors le nom Northern Electric , Edward accède
au poste de président. Il est remplacé par son
frère Paul en 1919.
La trajectoire professionnelle de Paul
reflète aussi létendue de lautorité
de son père sur la compagnie montréalaise. Au
cours des années 1890, Paul complète des études
à lUniversité McGill et débute
sa carrière aux États-Unis lors de stages effectués
à lusine de Westinghouse à Pittsburgh
et à New York ainsi quau département de
génie dAT&T. À son retour à
Montréal en 1899, son père lui confie la gestion
du réseau interurbain de Bell20. Rapidement, il gravit
les échelons de la compagnie. Lors de la création
de Northern Electric en 1914, il est nommé vice-président
et directeur général21. De 1919 à 1948,
il occupe le poste de président à la place de
son frère Edward.
Ces quelques éléments
dinformation sur les dirigeants de Bell permettent de
comprendre linfluence de Charles F. Sise père
sur la téléphonie montréalaise. Elle
sexerce sur plusieurs plans, à commencer par
le choix des hauts dirigeants. On peut aussi mieux comprendre
le principe dintégration hiérarchisée
qui sous-tend le fonctionnement de lentreprise.
Le succès professionnel de ces hommes
daffaires est assuré par leur position hiérarchique
dans la structure organisationnelle de lentreprise.
Leur statut social contribue aussi à bonifier leurs
contacts daffaires. Les milieux quils côtoient
constituent un cercle étroit formé des membres
anglophones de la classe daffaires montréalaise.
Les clubs privés quils fréquentent appartiennent
ainsi au milieu anglo-protestant de Montréal. Leur
vie sociale les isole de la réalité montréalaise.
Elle les dissocie culturellement de la majorité des
citadins susceptibles de vouloir souscrire au nouveau service
de communication à distance. Très tôt
des clivages sinstallent entre le groupe des dirigeants
de lentreprise et la masse des consommateurs. En fait,
on peut parler dun véritable décalage
entre les visions du service téléphonique élaborées
par les exploitants privés et les représentations
mises de lavant par la société montréalaise.
Tout au long de la période étudiée,
les différentes formes de relations sur le plan
des affaires, des échanges dinformations techniques
et administratives, ou des rapports interpersonnels
au sein de la classe daffaires révèlent
donc que le pouvoir économique est rattaché
de près au pouvoir technique. De plus, le rapprochement
hâtif avec les promoteurs des États-Unis, le
dynamisme manifesté par les entrepreneurs locaux, limportance
des capitaux auxquels ils ont accès, la complaisance
des milieux politiques, lautonomie des opérateurs
du réseau dans la production des équipements
constituent autant déléments qui contribuent
à promouvoir une vision homogène et des représentations
conséquentes du côté des initiateurs du
téléphone. Une fois bien établis dans
leur milieu daccueil, ils sont en mesure dimplanter
leur propre conception du réseau. Cela inclut les modalités
de desserte et les caractéristiques des clientèles
visées. Plus loin, on verra aussi que la culture organisationnelle
ainsi quune certaine vision des relations publiques
constituent des enjeux importants.
Laffiliation de Bell aux grandes
compagnies de téléphone des États-Unis
est manifeste en ce qui a trait à la culture dentreprise.
Assez tôt dans lhistoire du réseau téléphonique
montréalais, des gestionnaires et des ingénieurs
dAT&T imposent leur modèle de développement.
Le discours énoncé par Bell sinspire ainsi
largement des représentations mises de lavant
par les entreprises membres du système Bell aux États-Unis,
dont limpact est considérable compte tenu de
lampleur du marché. À cet égard,
la notion de service public, telle que proposée par
les dirigeants dAT&T, comporte des caractéristiques
analogues à celles observées à Montréal.
Le modèle de service public
Bien quadmise couramment aujourdhui
en Amérique du Nord, la nature sociale du service public
relève dune conception assez récente.
Cest seulement à la fin des années 1940,
avec le déploiement de lÉtat-providence,
que le branchement universel aux services en réseaux
apparaît comme un élément essentiel de
lintégration sociale et territoriale des milieux
locaux.
À la fin du XIXe siècle,
les services publics les public utilities sont
dabord définis comme des services marchands tarifés
en fonction de lusage. Cela signifie quils tiennent
compte en priorité des besoins commerciaux.
Dans un premier temps, plusieurs de ces services, notamment
le téléphone et lélectricité,
sont considérés comme des biens destinés
à des citoyens privilégiés. Néanmoins,
la promotion du bien-être collectif demeure un principe
de première importance, sous-jacent à lidée
de service public. De plus, le rôle stratégique
des réseaux de communication dans léconomie
du pays exige que les pouvoirs publics interviennent dans
leur développement. Au tournant du XXe siècle,
lextension des réseaux à léchelle
du pays marque une étape décisive dans la mise
en forme dun modèle de service public.
Dans une étude sur les télécommunications
aux États-Unis jusquen 1934, Alan Stone démontre
comment cette industrie est exemplaire du modèle de
service public élaboré à la fin du XIXe
siècle. Selon lauteur, le modèle de service
public libéral public service liberalism
est parvenu à refléter un système complexe
de valeurs qui ne se résume pas à la représentation
dominante du libéralisme économique, laquelle
met laccent sur lefficacité économique.
Ce modèle constitue, selon Stone, un exemple de politique
publique qui sarticule à lidée de
progrès technologique comme composante essentielle
du développement économique et de lamélioration
des conditions de vie. Il révèle lintroduction
graduelle dune norme sociale. Celle-ci confirme que
le nouveau service est adapté au degré de civilisation
dune communauté et quil est indispensable
à la vie économique, tout en ayant des impacts
immédiats ou à long terme sur ce milieu de vie.
Il faut souligner que la notion de service
public telle quévoquée par les entreprises
téléphoniques privées nord-américaines
et que cautionnent les pratiques réglementaires
étatiques a beaucoup évolué entre
la fin des années 1870 et le début des années
1930. Par ailleurs, le passage à la conception du service
téléphonique comme service public (en opposition
au principe dun objet strictement privé et commercial)
sest effectué très tôt dans lhistoire
de la téléphonie.
Cette transition hâtive sexplique
par lexistence de liens entre le rôle attribué
à la technologie du téléphone et celui
qui était conféré aux chemins de fer
et aux réseaux télégraphiques, deux services
primordiaux dans le développement des marchés.
Le téléphone étant perçu comme
le prolongement du télégraphe, il nest
pas surprenant de constater que les formes dencadrement
réglementaire appliquées aux réseaux
ferroviaires et télégraphiques sont reprises
pour le service téléphonique. Lidée
quil doit être considéré comme un
service public sintègre rapidement dans les mentalités
et les pratiques des institutions réglementaires.
Aux États-Unis, la mission de
service public aussitôt revendiquée par les pouvoirs
publics force les opérateurs privés de réseaux
à respecter les règles de fonctionnement établies
par lÉtat fédéral. Celui-ci intervient
en premier lieu pour surveiller les tarifs afin de limiter
les profits abusifs des opérateurs. Il en va de même
dans le cas canadien. Par ailleurs, en échange du contrôle
public qui leur est imposé, les opérateurs privés,
y compris les entreprises affiliées au système
Bell, requièrent un encadrement réglementaire
qui limite la concurrence et leur fournit, pour les segments
de marché les plus profitables, un statut de quasi-monopole.
En outre, cette fonction de service
public implique que les entreprises privées doivent
respecter une série dobligations. Ce qui a des
conséquences importantes en termes de politique publique.
Ainsi, les fournisseurs de services de télécommunication
sont-ils soumis à trois obligations. La première
en est une de desserte. Elle implique la fourniture du service
à ceux qui en font la demande et qui acceptent de payer
les tarifs exigés dans la mesure où ceux-ci
sont raisonnables. La deuxième obligation est définie
en termes de continuité du service, et ce, tant dun
point de vue quantitatif que qualitatif. Cette responsabilité
permet, entre autres, de légitimer la modernisation
du service par le biais des améliorations techniques.
La continuité consiste également à répondre
de façon permanente aux besoins des abonnés.
La troisième obligation concerne légalité
de traitement qui sert à éliminer les pratiques
discriminatoires.
À lintérieur de
ce modèle particulier de service public régi
par les règles du libéralisme économique,
le rôle de lÉtat se limite à arbitrer
les conflits dintérêts qui surviennent,
dun côté, entre les entreprises concurrentes
et, de lautre, entre les acteurs des milieux locaux
et les entreprises privées. Les pratiques dencadrement
réglementaire consistent également à
faire respecter les obligations des entreprises privées
à légard de la mission de service public,
cest-à-dire à garantir des tarifs raisonnables
et une desserte équitable entre les zones urbaines
et les zones périphériques moins denses.
Le type de service développé
à Montréal est le produit de linfluence
technologique et culturelle en provenance des États-Unis,
et celui des particularités de la société,
de léconomie et de la culture canadiennes et
montréalaises. Fortement marqué par son homologue
étatsunien, il témoigne aussi dune certaine
incapacité à saisir demblée les
traits socioculturels de la métropole canadienne. On
peut dire que plusieurs dirigeants de Bell sont passablement
déconnectés de la société avec
laquelle ils doivent transiger. Entrepreneurs empreints de
libéralisme, ils ont pour principal leitmotiv de construire
une entreprise monopolistique dont les profits seront conformes
aux attentes des actionnaires. Toutefois, cette conception
du service téléphonique est remise en question
par le rôle de service public que lui confèrent
les instances étatiques.
On constate que les représentations
des exploitants du téléphone se heurtent à
une réalité urbaine avec laquelle ils ne sont
guère familiers. À linstar de celle des
autres grandes villes nord-américaines, la société
montréalaise na rien de monolithique. Il reste
que le rapprochement entre les deux contextes (les grandes
villes des États-Unis et la métropole canadienne)
suppose certaines précautions. En effet, les conditions
socioculturelles locales sont très différentes
dans les deux cas. On ne peut pas en conclure que le système
mis en place par Bell ait été entièrement
caractérisé par son inadaptation à la
demande sociale. En revanche, il est clair que certaines des
spécificités socioculturelles montréalaises
ont été peu prises en considération.
|
Comme principal fournisseur de service public, Bell
a occupé une place prépondérante dans le développement
urbain de la métropole. Son rôle renvoie dentrée
de jeu à son statut de fournisseur de service public. Dès
les années 1900, les dirigeants de Bell ont procédé
à lintégration des réseaux locaux afin
détablir un seul système. En approvisionnant
le lucratif marché de la téléphonie urbaine,
lentreprise est parvenue, après quelques années
de concurrence, à maintenir sa position prépondérante
dans lévolution du service montréalais, voire
canadien. À partir du moment où sa position hégémonique
était assurée, elle a construit et exploité
le réseau de téléphone local et interurbain.
Elle a fixé les modalités de sa distribution. Elle
a élaboré une conception de la rentabilité
appropriée à son développement. Enfin, elle
a participé à la définition de la notion même
de service public et de son caractère indispensable.
La place occupée par le téléphone
et ses opérateurs privés dans lhistoire des
communications à Montréal mérite aussi dêtre
soulignée. À cet égard, Bell est un acteur
incontournable. Il participe à lexpansion de lagglomération,
tant par son action concrète ses projets dextension,
par exemple que par ses activités promotionnelles
relatives à la mise en forme dune vision idéalisée
de lenvironnement urbain et suburbain.
Jusquà la fin de la décennie
des années 1900, le personnage principal de lindustrie
du téléphone demeure le dirigeant. Pour atteindre
ses visées expansionnistes, il combine habilement des tactiques
et des stratégies à la fois techniques, financières
et politiques. À partir du moment où le monopole du
service est assuré, protéger limage de marque
de lentreprise et rejoindre de nouvelles clientèles
devient lapanage des entrepreneurs. Ainsi, après le
dirigeant, cest la figure de lagent qui émerge.
Cest lui, désormais, qui occupe une fonction de premier
plan, jouant un rôle dinterface entre les techniciens
et les clients. Par conséquent, cest le vendeur/représentant,
placé au centre de la relation, qui effectue le rattachement
de la sphère technique à la sphère sociale.
En dautres termes, même si les
stratégies de Bell ont été contestées
à certaines occasions par les acteurs locaux, elles se sont
avérées une véritable réussite. Au cours
de la période étudiée, un compromis sociopolitique
a pu être construit autour de lidée que le service
téléphonique local était indispensable. Dès
lors, il apparaît que le modèle du service public dans
le domaine de la téléphonie modèle cependant
remis en question depuis le début des années 19902
a pris forme avant 1930.
Une indication de ce caractère essentiel
on peut même parler de dépendance de la vie
urbaine à lendroit du réseau téléphonique
vient de la croissance fulgurante des abonnements au service
résidentiel et daffaires aux lendemains de la Seconde
Guerre mondiale. Il faut rappeler à ce propos quentre
1945 et 1961, le nombre dappareils en service dans les résidences
de lagglomération montréalaise est passé
de 148 479 à 606 507, soit une augmentation de lordre
de 309 %, ce qui représente en moyenne, pour lîle
de Montréal, 35 appareils pour 100 habitants.
En ce qui a trait au service daffaires,
le nombre dappareils connectés au réseau a presque
triplé au cours de cette même période, passant
de 94 351 à 271 453 appareils3. À partir de la seconde
moitié des années 1940, après une période
de croissance lente entre 1930 et 1944, Bell a profité, dune
part, des investissements effectués dans la seconde moitié
des années 1920 pour moderniser son réseau et, dautre
part, de ses efforts promotionnels visant à stimuler la vente
du service. Ainsi, il apparaît que le succès de lentreprise
provient de la qualité de son réseau et de lefficacité
de ses campagnes de relations publiques et de promotion.
sommaire
La planification chez Bell
Avant les années 1910, on a du mal
à saisir avec précision les intentions de Bell.
Son orientation, ses choix, sa stratégie par rapport
au développement du réseau téléphonique
sont difficiles à cerner. Toutefois, après la
Première Guerre mondiale, lentreprise présente,
au moins sur le plan technique, une image plus claire de son
système de production et de distribution. Ses méthodes
de mise en marché sont aussi plus élaborées
et mieux adaptées aux diverses clientèles, voire
aux divers modes de consommation. Les secteurs de la ville
qui offrent une clientèle daffaires et une clientèle
résidentielle fortunée constituent sans conteste
des cibles privilégiées. Peu portés à
tenter des expériences sur des marchés indéterminés,
les dirigeants de Bell sen tiennent aux secteurs demblée
profitables. Cela contribue à renforcer les choix sociaux
de lentreprise, ce qui se répercute sur loffre
du service.
Un élément important du développement
du réseau téléphonique renvoie à
lapproche générale qui se dégage
des projets dextension aux lendemains de la Première
Guerre mondiale. Il sagit dune nouvelle approche
planificatrice mise en uvre pour, dune part, moderniser
loffre du service et, dautre part, déterminer
avec plus de certitude les besoins futurs.
Le modèle rationnel
À partir du début des années
1920, à la suite de lexpérience acquise
lors de la première phase de développement,
les exploitants privés font appel de manière
explicite au modèle rationnel pour encadrer lensemble
des activités rattachées à loffre
du service. Il en résulte la mise en place dune
bureaucratie gestionnaire qui va de pair avec un renforcement
de lidéologie techniciste.
En effet, les gestionnaires et les ingénieurs
associés aux grandes compagnies nord-américaines
de téléphone partagent la conviction quil
est possible daméliorer la qualité et
lefficacité du service, de même que sa
gestion, en ayant recours au savoir scientifique. Instaurant
à lintérieur de son organisation le pouvoir
managerial et technique, Bell a tendance à prêter
au service téléphonique un caractère
unidimensionnel : celui dun système standardisé,
efficace et contrôlé par une instance centrale.
Au nombre des documents cartographiques conservés
au Service historique de la compagnie montréalaise,
on retrouve différents plans usuels de la ville et
de lîle. Ceux-ci font sans doute partie des outils
de planification auxquels avaient recours les opérateurs
du réseau. De manière générale,
ces plans aident à saisir les grands axes de développement
urbain. Ils permettent aussi de repérer les rythmes
de construction, les projets de lotissement et louverture
des nouvelles rues, la qualité des constructions
les matériaux étant parfois spécifiés
et, de fait, la valeur des bâtiments. Ainsi,
ces documents sont-ils utiles pour identifier les zones potentielles
à aménager en termes dinfrastructures
et déquipements.
Lidée de planifier le réseau
à long terme (sur une période de 20 à
30 ans) se trouve énoncée dès le début
des années 1910 dans les discours des ingénieurs
dAT&T. Sans doute inspirés par les valeurs
et les préoccupations propres à la planification
urbaine, ils insistent sur la nécessité dappréhender
le système téléphonique dans sa totalité,
tout en tenant compte dune multiplicité de facteurs
externes qui sont à même den influencer
lorganisation. Lapproche planificatrice qui en
découle doit nécessairement être englobante
(comprehensive)
Parmi les principaux problèmes alors reliés
à la planification du réseau téléphonique
local, celui de la prévision de loffre et de
la demande intéresse en priorité les dirigeants
de Bell. Comment améliorer les processus décisionnels
et comment résoudre les problèmes qui découlent
dune planification à moyen et à long termes
? Les ingénieurs et les managers de lentreprise
abordent la planification en mettant au point une démarche
rigoureuse en trois étapes. Premièrement, pour
organiser la distribution du service téléphonique
de façon commerciale et rentable, il faut inventorier
les usagers potentiels et prédire les comportements
sociaux grâce aux études de marché. Deuxièmement,
il faut prévoir la demande en tenant compte des tendances
précédentes et estimer le volume de service
qui sera consommé dans les territoires étudiés
sur une longue période (20 ans). Troisièmement,
il faut effectuer une étude de la faisabilité
de lextension du système à partir de lévaluation
comparative des coûts encourus par le programme de développement
et de perfectionnement, y compris les coûts dentretien
des équipements. Ces trois étapes permettent
déclairer les choix à faire en termes
dinvestissements.
De fait, la modernisation et la rationalisation
du réseau prennent lallure dun processus
de planification continue par opposition à un plan
figé ou définitif. Afin de faire face aux ajustements
fréquents exigés par la conjoncture et par des
changements circonstanciels lintroduction de
nouvelles technologies ou encore une demande accrue ,
les dirigeants de Bell utilisent des méthodes de prévision
de plus en plus précises.
Pour appliquer avec rigueur ses méthodes de prévision
des conditions du marché, Bell fait appel à
une approche planificatrice globale qui, selon les ingénieurs
dAT&T, est analogue au modèle dominant de
la planification urbaine, à lépoque
au moins dans le discours des planificateurs urbains ,
celui de la planification rationnelle (comprehensive planning),
dont loutil usuel est le plan directeur (general plan).
Toutefois, contrairement au plan directeur qui fixe au préalable
limage du milieu à aménager, les opérateurs
du réseau téléphonique introduisent,
dans leur approche, une dimension stratégique3. Cela
leur permet dadapter le plan directeur en fonction de
nouvelles conditions (par exemple, des variations démographiques
imprévues). Ce sont précisément les avantages
de cette dimension stratégique que le vice-président
dAT&T présente à un groupe de planificateurs
urbains réunis à New York en 1925. Le modèle
mis de lavant par les planificateurs des réseaux5
vise à aider les décideurs (les investisseurs,
les managers et les ingénieurs) à répondre
le plus efficacement possible à la demande de service
téléphonique. Ici, la planification remplit
une fonction instrumentale destinée à réduire
les incertitudes. Cette approche remplit aussi certaines fonctions
normatives de rationalisation de la gestion de loffre.
La comparaison entre la planification urbaine et celle du
réseau téléphonique peut être faite
en tenant compte de plusieurs aspects. Dans les deux cas,
on retrouve les étapes habituelles qui découlent
dune démarche rationnelle et déductive.
Cela inclut des mesures dajustement à un processus
de changement dont les principaux paramètres, comme
les tendances démographiques ou encore les axes de
croissance urbaine, restent difficiles à prévoir
et à contrôler.
De manière plus concrète, le plan directeur
vise à prendre en compte toutes les dimensions du développement
urbain. Cela comprend aussi bien les réseaux de communication
locaux et régionaux, les équipements collectifs
que leur interaction :
As we must provide adequate pathways for the circulation
of telephone traffic within the city, the city plan must provide
adequate circulation routes for traffic on foot, in vehicules
on the streets, and in transportation Systems of one kind
or another. As we must provide buildings suitably located
with reference to the wire centre, the city must provide facilities,
such as schools, centrally located with reference to the population
which they too are to serve. As we must provide routes adequate
in both number and capacity from the suburban areas and from
distant points to accomodate the toll telephone traffic, highways
and transportation Systems to more distant points must be
comprehended in the city plan.
De plus, une agglomération urbaine
conçue en fonction des principes du modèle rationnel
correspond à limage dune ville efficace
et prospère, tout en reprenant à son compte
les valeurs modernistes de salubrité, de beauté
et de confort :
[...] our cities should develop in such manner that they
will in the highest degree be healthful, beautiful and comfortable
places in which to live. That they will be effectively laid
out to permit the free movement of traffic. That they will
permit the efficient business operation of the community with
resulting economic gain to all.
À linverse de lapproche
ponctuelle ou par bribes (piecemeal approach) qui a caractérisé
les premières décennies du développement
du réseau téléphonique de même
que les précédentes pratiques planificatrices
dans le champ urbain , le modèle rationnel intègre
la prévision de loffre et de la demande. Les
planificateurs rassemblent, de manière systématique,
le plus dinformations possible sur un milieu donné.
Ils tiennent aussi compte des implications des solutions envisagées.
Dans ce contexte, les connaissances ont pour but daider
la prise de décision.
Afin de composer avec la complexité
de la réalité, toutes les instances (cest-à-dire
les différents services de Bell) sont soumises aux
exigences de la démarche de la planification rationnelle
et tenues de coordonner leurs activités. Sur un plan
opérationnel, cette démarche a pour effet de
réduire à quelques règles technico-économiques
le fonctionnement du marché.
Pour autant, les valeurs qui sous-tendent
les choix en termes déquipement sont-elles rationnelles
et objectives ? Sur quelles bases reposent-elles ? Dans le
cas du téléphone, il ressort clairement que
la valeur primordiale est celle de la rentabilité.
Cela dit, la qualité du service offert nen préoccupe
pas moins ses exploitants. Enfin, même si elles sont
très peu perceptibles dans ses pratiques et ne se concrétisent
pas au cours de la période étudiée, léquité
et laccessibilité ont elles aussi influencé
lidéologie de Bell. Il faut dire que les planificateurs
privés, même sils doivent assumer les conséquences
de leurs choix technico-économiques, sont rarement
contestés puisque lentreprise bénéficie
dune position monopolistique.
Le réseau téléphonique
étant considéré, par ses concepteurs,
comme un organisme en évolution, le plan directeur
guidant son développement est davantage vu comme un
processus que comme un idéal à atteindre. Lutilité
de la planification se résume dans la réduction
des incertitudes relatives aux variables suivantes : croissance
démographique, distribution spatiale des ménages,
tendances durbanisation, nature des activités
urbaines. À cet égard, le zonage représente,
pour les planificateurs, un outil approprié puisquil
permet de déterminer à lavance la localisation
des activités. On peut comprendre pourquoi les exploitants
privés des réseaux techniques urbains ont sur-le-champ
été favorables à une ségrégation
des activités dans lespace.
Il reste quen dernière analyse,
cest la nature des liens unissant les groupes dintérêt
(community of interest) qui constitue le fondement de la planification
du réseau téléphonique. Dès lors,
par des démarches analytiques et prospectives, les
planificateurs examinent les besoins de communication des
diverses communautés et les rapports quelles
sont susceptibles dentretenir avec des groupes plus
ou moins lointains :
[...] what will be the extent of the community of interest
between the different sections of the community, and between
the community as a whole, the surrounding communities, and
the more distant communities within the country and without
?
Les planificateurs font certes appel au discours
scientifique, mais leur objectivité est demblée
biaisée par la manière dont ils appréhendent
les relations entre les groupes quils souhaitent brancher
au réseau. La connexion des ménages, des entreprises
et des institutions situés en territoire montréalais
seffectue en fonction des affinités économiques
et socioculturelles quils partagent : langue, appartenance
sociale (déterminée en fonction de leur revenu
moyen), quartiers, activités. On peut parler ici dune
recomposition sélective des communautés eu égard
aux habitudes de communication.
Les modèles danalyse élaborés
par les planificateurs sont ainsi fondés sur des rapports
économiques et sociocommunautaires reconstruits en
fonction de leur compréhension des milieux. À
ce sujet, une série déléments sont
soumis au contrôle technique et homogénéisant
des exploitants privés : habitudes de communication
interpersonnelle et daffaires, significations sociales
du téléphone, accessibilité, etc. Cela
les conduit à imposer des normes déchanges
et de communication qui peuvent aller à lencontre
des valeurs culturelles, voire des traditions locales.
De plus, la primauté accordée
aux rapports qui se tissent entre les groupes dintérêt
se répercute sur la configuration même des réseaux
locaux. En ce sens, les planificateurs de Bell et dAT&T
utilisent les informations quils détiennent sur
un milieu pour défendre leurs propres intérêts.
Cela na rien détonnant. À lintérieur
de ce système uniformisant, les points de vue et les
valeurs dissemblables nont pas, sinon très peu,
de place.
Les études de marché
Le contenu technique du projet déquipement du
territoire montréalais nécessite des solutions
que seuls des experts savent appliquer. Ce qui explique les
visites périodiques dingénieurs en téléphonie
en provenance des États-Unis. Ainsi, lune des
influences les plus importantes renvoie à la validité
des études menées durant les années 1920.
À ce sujet, on peut prendre lexemple de la vaste
enquête sur le marché montréalais, le
Commercial Survey, réalisée en 1924. Les visions
de Bell sy expriment clairement.
Si les élus municipaux et les planificateurs
urbains contrôlent peu les forces à luvre
dans le processus de développement urbain, en revanche,
les exploitants des réseaux techniques sont, eux, habilités
à prédire les besoins, compte tenu des données
fournies par les études de marché sur lesquelles
ils appuient leurs projets dextension. Lempirisme
de ces études sinscrit dans le cadre dune
vision globale qui propose une interprétation de la
croissance urbaine :
Recently, a gentleman in introducing a speaker who was
giving a talk over the radio on town planning, opened his
remarks by stating that Montreal for the past three hundred
years has been growing like « Topsy ». We in the
telephone business for at least the past thirty years have
been attempting to find out if there is any System behind
« Topsy » growth and to develop some means by
which we might measure results and anticipate conditions in
advance of actual facts.
Au début des années 1920, le service de
génie de Bell élabore un premier plan densemble
du réseau montréalais.
Le Fundamental Plan, quon peut définir comme
une vue générale du développement du
réseau, établit les besoins de lignes téléphoniques
jusquen 1928. On prévoit ajouter environ 27 000
lignes et construire trois centraux. Les axes de développement
favorisent toujours louest de lîle ainsi
que le centre-ville. Les quartiers résidentiels situés
au nord font aussi lobjet dun programme dextension.
Enfin, on propose la construction dun nouveau central
desservant les quartiers à lest de lancienne
municipalité de Maisonneuve. En fait, ce plan reflète
plus une volonté de consolidation du réseau
quune stratégie de diversification géographique
et sociale.
La première étude de
marché effectuée à Montréal par
les ingénieurs nord-américains provenant des
compagnies AT&T et Bell le Commercial Survey de
1924 se situe dans un contexte dautomatisation
de la technologie de commutation. Les questions initiales
soulevées par ces spécialistes sont les suivantes
: quelle sera la croissance de la compagnie entre 1925 et
1945 ? En tenant compte des caractéristiques socio-économiques
des ménages, quelle sera la nature de la demande de
service téléphonique ? Enfin, quelle sera lampleur
de lurbanisation ?
Cette enquête extensive des potentialités
téléphoniques couvre une grande partie du territoire
de lîle, soit plus de 250 kilomètres carrés.
Elle tient compte des villes suivantes : Montréal,
Westmount, Outremont, Verdun, LaSalle, Saint-Pierre, Montréal-Ouest,
Hampstead, Mont-Royal, Saint-Laurent, Saint-Michel, Saint-Léonard,
Montréal-Nord, Montréal-Est, Pointe-aux-Trembles,
Laval-de-Montréal ; du village de Côte-Saint-Luc,
des paroisses de Saint-Laurent, de Saint-Léonard, de
Rivière-des-Prairies, et de la municipalité
de Saint-Jean-de-Dieu.
Lintérêt de cette
étude tient au fait quelle est effectuée
à partir dune lecture diachronique de la situation
des ménages montréalais. Chaque îlot est
étudié en fonction du nombre de familles qui
y résident et en tenant compte de leurs caractéristiques
socio-économiques. Les variables qui visent à
déterminer le pouvoir dachat des ménages
sont le type dhabitation (maison unifamiliale, immeuble
dappartements, maison à logements multiples (flats),
maison dhébergement), le mode de tenure (propriété,
location) et la valeur locative moyenne mensuelle (tableau
ci dessous).
Cette enquête propose une vision future
des pratiques de consommation téléphonique.
Une telle anticipation de lévolution des besoins
implique que Bell fasse des hypothèses par rapport
aux investissements quexigent la construction de nouveaux
équipements, les coûts dexploitation et
les modalités de tarification. À cet égard,
on pense en termes de tarification puisquelle fixe le
degré daccessibilité sociale au réseau.
Si on considère les données du tableau, on constate
que 80,5 % des familles montréalaises recensées
par Bell logent dans les maisons à logements multiples,
« duplex » et « triplex » (flats
cest-à-dire des petits immeubles de deux ou trois
étages comportant de deux à cinq appartements),
dont la valeur locative moyenne se situe entre 10 $ et 65
$ par mois. Il faut souligner que les écarts importants
de loyer se reflètent dans la qualité des logements.
Autrement dit, à Montréal, le parc résidentiel
de ce type de maison na rien dun ensemble homogène.
Pour leur part, les maisons unifamiliales et les immeubles
dappartements abritent des familles plus nanties qui
consacrent en moyenne plus de 65 $ par mois pour se loger.
Lorsque les enquêteurs comparent les
données sur les types dhabitation et les taux
dabonnement au téléphone, le lien entre
le niveau de richesse des ménages et la souscription
au service est flagrant. Parmi les plus grands consommateurs
du service, on retrouve les familles qui dépensent
le plus pour se loger. Les chiffres vont en décroissant
lorsquil sagit des groupes les moins fortunés.
Les catégories de commerçants
et de gens daffaires font aussi lobjet dun
classement. Toutefois, à linverse du marché
domestique où seul le pouvoir dachat des familles
détermine la catégorie des services (nombre
dappareils, ligne privée ou partagée)
quelles sont à même dutiliser, le
marché daffaires se différencie en fonction
du type dactivité : marchand grossiste, marchand
de détail, manufacturier, bureaux, etc
En déterminant le développement
ultérieur des activités de Bell, létude
de marché précise les orientations que la compagnie
devra adopter en matière dinvestissements : achat
de terrains, construction de bâtiments, reconfiguration
des zones de distribution du service, consolidation des activités,
embauche dingénieurs et de personnel spécialisé
afin de mener à terme le projet de conversion des centraux
manuels en centraux automatisés, etc. Néanmoins,
Bell reste relativement prudente dans la planification de
ses équipements. En outre, ce vaste programme de perfectionnement
et de rationalisation du service doit séchelonner
sur une période de vingt ans. À chaque étape,
on réalise une étude spécifique. Un comité
de coordination la supervise et doit évaluer les coûts
du projet ainsi que les économies réalisées
grâce à lamélioration du réseau.
Le passage dun type de central à un autre implique
en effet une coordination sans faille. Lors de ces étapes
cruciales, les relations publiques jouent un rôle primordial.
Elles veillent à la satisfaction dune clientèle
qui doit subir les inconvénients de la réorganisation.
Lévolution démographique constitue la
trame de fond de létude de marché. Mises
en rapport avec le nombre dappareils téléphoniques
en usage, les données fournies par les recensements
canadiens et effectués à un intervalle de dix
ans (1901-1911-1921) sont utilisées par les analystes
de Bell. Ils doivent cerner avec précision les comportements
démographiques passés pour faire des projections
jusquen 1945 : hausse du taux de natalité, baisse
du taux de mortalité, mouvements migratoires internes
et externes, etc. En 1924, la population de Montréal
est de 805 140 habitants. Bell estime quelle atteindra
1 476 700 en 1945.
Demblée, les ingénieurs responsables de
lenquête soulignent la diversité sociale
qui caractérise lagglomération. Pour dégager
des sous-catégories de marché relativement homogènes,
on regroupe les consommateurs montréalais en fonction
de leur pouvoir dachat, lequel est déterminé
à partir de la valeur du loyer. Selon Bell, le loyer
que paie un individu constitue un très bon indicateur
de son revenu. Cest là lélément
le plus déterminant pour prévoir les besoins
futurs en matière de téléphonie.
Ainsi le territoire est-il découpé
en fonction du niveau de fortune des citadins et des banlieusards.
Les ingénieurs sefforcent aussi de discerner
les stratégies résidentielles des ménages
à la lumière de la conjoncture socio-économique
tout en tenant compte des liens qui unissent les municipalités
suburbaines à la ville-centre :
There are numerous suburban villages scattered over Montreals
Island, all of which are in Montreals immediate sphere
and inhabited by workers who depend on the City for their
living. The 1921 Census gave the Montreal Island population
as 724 205 of which 439 653 were French, 197 912 British and
86 640 foreign, Both French and English portions of the market
have high buying power.
En comparaison avec lattitude de la
compagnie qui prévalait au début des années
1900 à lendroit de la clientèle francophone
de la métropole, on peut parler ici dun revirement
de point de vue. Cest que le niveau de vie des francophones
sest accru de manière significative entre 1901
et 1921, notamment en raison du recul de la mortalité.
La part des groupes qui ne sont pas dorigine française
ou britannique a aussi beaucoup progressé au cours
de cette même période : en 1921, elle atteint
12,9 % dans la ville de Montréal. Néanmoins,
son pouvoir dachat est limité. Bell en tient
donc peu compte.
Cette étude de marché
révèle dimportantes variations en ce qui
a trait aux pratiques dabonnement des habitants de lîle.
Bien quappréhendée comme une seule communauté,
lagglomération montréalaise présente
de multiples particularités que les ingénieurs
de Bell tentent dintégrer à leurs analyses.
Pour en dégager les caractéristiques communes,
ils découpent le territoire en petites entités
homogènes, regroupant des places daffaires et
des ménages susceptibles dentretenir des liens
communautaires et économiques étroits.
La réalité sociospatiale est
un des thèmes essentiels des enquêtes effectuées
par Bell. On évalue les tendances et les processus
particuliers que revêt le développement urbain
: déconcentration des activités de production,
nouvelles stratégies résidentielles, concentration
des activités de direction, etc. En décortiquant
ainsi la réalité montréalaise, Bell compose
un système de relations entre les secteurs plus ou
moins hiérarchisés aux points de vue social
et fonctionnel. Suivant les secteurs dactivités
et les catégories sociales qui animent les zones inventoriées,
on fixe la personnalité des clientèles et le
potentiel téléphonique. On prend aussi en considération
une variable technique, à savoir la capacité
accrue découlement des flux téléphoniques
fournie par les équipements de commutation.
La description de deux zones urbaines
très distinctes sur le plan socio-économique
démontre comment Bell anticipe les besoins futurs de
ses clientèles potentielles. Par exemple, le secteur
du marché « B », formé des quartiers
Saint-Henri, Petite-Bourgogne et Pointe-Saint-Charles, et
dont 27,6 % des familles et 96,8 % des entreprises sont abonnées
au téléphone, est présenté ainsi
:
Situated along both sides of the Lachine Canal and including
all of Point St. Charles. This area contains many large manufacturing
establishments, the Canadian National Railway Station, freight
sheds, yards and shops.
The residence development is of poor to medium type, being
practically altogether flats and tenements. Population mixed
English and French, with a few negroes and foreigners.
Considerable increase in industry is expected in this area,
principally along the Lachine Canal and Canadian National
Railway line, together with a slight improvement in residential
character.
Community of interest will be principally with Market Area
A18.
Compte tenu de la croissance démographique
et des particularités de la population du secteur,
Bell estime pouvoir augmenter denviron 10 % le nombre
de familles abonnées dans les vingt années à
venir ; ce qui est relativement modeste. Dans ce cas, cest
plutôt le dynamisme des activités industrielles
qui détermine les investissements en équipements
téléphoniques. Les liaisons à prévoir
sont dabord établies avec le marché du
centre des affaires (le marché « A »).
Le marché « H », incluant
le quartier Saint-Antoine situé près du mont
Royal connu aussi sous le nom de Golden Square Mile
, présente des caractéristiques et des
possibilités de développement bien différentes
de celles de la zone précédente puisque 87,9
% des familles sont abonnées au téléphone
:
High-class residential area of one family homes, appartments
and flats. This area contains McGill University, the Art Gallery
and a number of other educational institutions, and the Royal
Victoria Hospital.
Population almost entirely English speaking.
Considerable development of first class apartment houses is
looked for, together with an increased number of one family
homes and community groups.
Principal community of interest with Market Areas A &
AA19 [cest-à-dire le quartier des affaires et
Westmount].
Bell a pour stratégie de continuer
à fournir un service de qualité, conforme aux
exigences des clients du quartier, notamment le maintien des
lignes téléphoniques individuelles par opposition
aux lignes partagées.
On constate que, dans les quartiers résidentiels à
prédominance francophone, le taux de pénétration
du téléphone est faible. Chez les ménages
ouvriers habitant les quartiers pauvres du sud-ouest et du
centre-sud, il varie de 13,3 % à 19 %. Dailleurs,
Bell estime quen 1945, le nombre dabonnés
habitant ces quartiers aura considérablement augmenté
mais natteindra guère plus de 35 % de la population
totale. Dans certains quartiers résidentiels en pleine
expansion, Rosemont par exemple, le taux de croissance anticipé
est un peu plus élevé, quoique Bell demeure
prudente dans ses prévisions.
En fait, le maintien des acquis se dégage
de cette étude de marché. Encore une fois, il
est clair que le réalisme de lentreprise lemporte
sur une vision idéalisée de la croissance du réseau.
Ses dirigeants et ses ingénieurs sont conscients des
limites propres au marché montréalais. Et ils
misent en priorité sur ses aspects les plus sûrs.
Comme le montre le tableau ci desous, les pourcentages dabonnés
que Bell prévoit pour 1945 à léchelle
du territoire étudié, bien que supérieurs
par rapport à 1924, demeurent conservateurs dans le cas
des ménages et des commerces de quartier.
Pourcentage d'abonnés en fonction du type de service
Pour 1924 SERVICE RÉEL et pour
1945 SERVICE ESTIMÉ :
Résidentiel 43,56 % et 60,15 %
Commerces de quartier 63,31 % et 74,10 %
Commerces et services centraux 86,28 % et 92,54 %
total commerces 72,72 % et 81,90 % |
À partir de ces chiffres, Bell considère
quelle pourrait accroître son offre pour le marché
résidentiel.
De manière plus précise, elle estime que le marché
situé à lintérieur des limites de
la ville de Montréal va passer de 41,5 % en 1924 à
57,3 % en 1945. Quant aux villes de banlieue comprises dans
lenquête (Westmount, Outremont, Verdun, LaSalle,
Saint-Pierre, Montréal-Ouest, Côte-Saint-Luc, Hampstead,
Mont-Royal, Saint-Laurent, Montréal-Nord, Saint-Michel-de-Laval,
Saint-Léonard-de-Port-Maurice, Rivière-des-Prairies,
Pointe-aux-Trembles, Laval-de-Montréal), elles présentent
des possibilités dextension un peu plus importantes
: alors quen 1924, 58 % des ménages qui habitent
ces localités ont le service téléphonique,
Bell prévoit quen 1945 plus de 75 % des familles
suburbaines seront abonnées.
Bien entendu, ces chiffres représentent
une moyenne qui tend à masquer les écarts considérables
entre le taux dabonnement des familles de Westmount
(atteignant 93,3 % en 1924) et celui des quelque 611 familles
qui habitent Montréal-Nord (on y retrouve 7,2 % dabonnés
en 1924). Il nen demeure pas moins que les familles
de la banlieue sont les plus prometteuses quant aux possibilités
dextension du réseau. Dailleurs, les efforts
de promotion visant le marché résidentiel suburbain
sexpriment clairement dans les documents produits par
la suite. Dans les faits, par contre, la consommation suburbaine
du téléphone ne va pas de soi. Souvent, il faut
attendre que les familles soient établies en banlieue
et que les réseaux de transport y soient en service
pour que le niveau dabonnement augmente. Le téléphone
devient alors, à linstar des autres services
offerts par les réseaux techniques urbains, un élément
indispensable de communication et de désenclavement.
Pour mieux comprendre les stratégies
résidentielles, Bell a recours à des informations
cartographiques qui lui permettent dobtenir instantanément
une vision densemble du marché. Il faut rappeler
que le territoire à létude inclut les
portions urbanisées de lîle et les zones
résidentielles des noyaux villageois. Certaines portions
de ce territoire sont occupées par des terres agricoles.
Une série de points durbanisation sont toutefois
visibles et renseignent les planificateurs du réseau
montréalais sur les axes probables de développement.
Dans cette perspective, la densité
doccupation résidentielle et commerciale constitue
une indication sur les zones potentielles de consommation
du service téléphonique :
[...] it is felt that the sale of our residence telephones
depends on the number of families there are in a given place
to whom to sell, and the number of business firms naturally
also depends on the number of families for the same reason.
Then the sale of our business service will depend on the number
of firms, which in turn depends on the number of families.
Cependant, à Montréal, les districts
les plus densément peuplés sont occupés
par des familles ouvrières, lesquelles ne disposent
pas des revenus nécessaires pour sabonner au
service. Parmi les endroits où sont établies
le plus grand nombre de familles, on retrouve les secteurs
industriels, notamment Hochelaga et Maisonneuve. Le centre
des affaires qui correspond au secteur du Vieux-Montréal
est quasi inhabité.
Lune des difficultés de
gestion de la croissance du réseau téléphonique
résulte de la faible densité des nouveaux districts
à desservir. Certes, quelques ménages et commerces
sont agglutinés au nord, sur les rives de la rivière
des Prairies, regroupés à proximité des
anciens noyaux villageois, ou bien installés le long
des principaux axes de circulation. Mais il est clair que
lensemble du territoire peut encore faire lobjet
dune intense activité de développement
urbain. De plus, dans plusieurs municipalités de la
banlieue est, comme les villes de Saint-Léonard-de-Port-Maurice,
Saint-Michel-de-Laval et Montréal-Nord, même
si le tracé des rues est déterminé, lurbanisation
na toujours pas démarré. Les terres agricoles
occupent de grandes portions du territoire du nord-ouest et
du nord-est de l'île. Cette discontinuité avec
laire urbaine pose un problème de rentabilité
pour les infrastructures téléphoniques.
Outre les secteurs largement sous-urbanisés
de lîle, Bell doit aussi tenir compte de la présence
de plusieurs zones peu rentables puisquelles ne sont
pas disponibles pour la desserte du service résidentiel.
Elles sont occupées par des parcs et des cimetières
(les parcs du Mont-Royal, Lafontaine, Maisonneuve, les cimetières
Notre-Dame-des-Neiges et Mount Royal), par des activités
industrielles (les zones limitrophes au canal Lachine et aux
voies ferrées), par des fonctions institutionnelles
(le domaine de lhôpital Saint-Jean-de-Dieu, la
prison de Bordeaux) et des emprises ferroviaires (les cours
de triage) ou portuaires.
Avec le recul, on peut dire que, tout en appréhendant
les obstacles physicospatiaux propres au territoire montréalais
ainsi que les contraintes matérielles des ménages,
les ingénieurs de la compagnie sont parvenus à
prédire les comportements de la clientèle. Toutefois,
les difficultés économiques des années
1930 remettent en question la validité des informations
recueillies, car le pouvoir dachat des ménages
a été réduit de manière significative.
On observe alors un déclin le premier dans lhistoire
de Bell des abonnements au téléphone.
Dès lors, Bell doit sajuster
aux conditions économiques et, par le fait même,
réviser à la baisse ses estimations. En 1937,
il apparaît impératif de refaire une nouvelle
étude du marché montréalais. La faible
croissance du service, la lente urbanisation des territoires
suburbains, la difficulté de capitalisation et dinvestissement
en matière déquipements forcent la compagnie
à reconsidérer ses projets de prolongement et
de modernisation du réseau.
Il reste que les prévisions de
Bell, quant à laugmentation du nombre dappareils
branchés au réseau téléphonique,
se sont avérées fiables dans lensemble.
En fait, on peut parler dune différence denviron
8 % de moins de postes en service en 1945 par rapport à
ce qui était prévu en 1924. La crise des années
1930 et la période de guerre sont des facteurs qui
retardent lessor anticipé, voire qui contribuent
à la diminution du nombre dabonnés. Si
les estimations de Bell se révèlent relativement
justes, cest sans doute parce que ses ingénieurs
maîtrisent bien les techniques nouvelles comme les études
de marché, les méthodes dévaluation
des coûts de construction des installations et des coûts
damortissement ; sans parler des campagnes de publicité
conçues comme des méthodes de relations publiques.
Tous ces éléments sinscrivent dans un
cadre planificateur rationnel désormais légitime.
Au fil des années, la connaissance
poussée du territoire montréalais, de ses potentiels
et de ses restrictions en termes dextension du réseau
téléphonique a joué un rôle important.
Les pratiques denquête et de collecte de données
avaient en effet une dimension utilitaire indéniable.
La capacité de prédire les besoins téléphoniques
de la métropole, en faisant confiance à la planification
rationnelle, est ainsi devenue un élément stratégique
pour le développement du réseau.
|
sommaire
L'accès aux designs des Bell Labs américains
prit fin au début des années 1960.
Northern Electric établit ses propres laboratoires de recherche
pour concevoir des produits qui satisfirent les besoins du marché
canadien plutôt que d'y adapter les produits américains.
En 1968, La Compagnie
de Téléphone Bell du Canada est renommée
Bell Canada.
Canada atlantique
Au début des années 1960,
Bell acquit des participations dans toutes les compagnies
de lAtlantique. Elle se développa le 24 juillet
1962 avec Newfoundland Telephones (qui devint plus tard NewTel
Communications). Bell acquit une participation majoritaire
dans la Maritime Telephone and Telegraph Company, plus tard
connue sous le nom de Island Telephone, basée à
l'Île-du-Prince-Édouard, et dans Bruncorp, la
société mère de NBTel, en 1966. L'achat
de MT & T a été effectué malgré
les efforts déployés par la législature
de la Nouvelle-Écosse le 10 septembre 1966 pour limiter
le pouvoir de vote de tout actionnaire à 1 000 voix.
La société MT & T appartenant à Bell
a absorbé environ 120 entreprises indépendantes,
la plupart desservant chacune moins de 50 clients. NewTel,
appartenant à Bell, a acheté le Terra Nova Tel,
appartenant au CN, en 1988.
Newtel, Bruncorp, MT & T et Island
Tel ont par la suite fusionné avec Aliant (maintenant
Bell Aliant, qui détient également une grande
partie des services fournis par Bell Canada dans des zones
plus rurales en Ontario et au Québec), dont Bell Canada
est maintenant propriétaire.
Le 1er janvier 2011, Bell a finalisé
l'acquisition de la société de services de technologie
de l'information xwave, qui offre des ventes et des services
de technologie de l'information dans la région du Canada
atlantique, à Bell Aliant.
Quebec et Ontario
Des compagnies indépendantes sont apparues dans plusieurs
régions de l'Ontario, du Québec et des provinces
maritimes sans un service adéquat de Bell Canada. Au
cours du XXe siècle, Bell acquit la plupart des sociétés
indépendantes en Ontario et au Québec, notamment
lacquisition de Nexxlink Technologies, un fournisseur
de solutions informatiques et de télécommunications
intégré basé à Montréal
et fondé par Karol Brassard . Parallèlement
à l'acquisition de Charon Systems, Nexxlink est aujourd'hui
une entreprise de Bell Business Solutions, une division de
Bell Canada. Cependant, le Québec a encore de grandes
étendues de zones relativement rurales desservies par
Telus Québec (anciennement Québec Telephone,
acquise ultérieurement par Telus) et Télébec
(désormais détenue par Bell Canada via Bell
Aliant) et par une vingtaine de petites sociétés
indépendantes. En 1980, lOntario comptait encore
une trentaine de sociétés indépendantes
et Bell nen avait pas encore acquis; les plus petites
ont été vendues à des gros indépendants
disposant de plus grandes ressources en capital. Cellcom Communications
est le plus important franchisé de Bell Canada et exploite
actuellement 25 magasins Bell au Québec et en Ontario.
Alberta, Manitoba et Saskatchewan
Les trois provinces des Prairies, à
des moments différents, ont acquis les activités
de Bell Canada et créé des services publics
provinciaux, investissant dans le développement de
services téléphoniques appropriés dans
toutes ces provinces; Linvestissement de Bell Canada
dans les Prairies était insuffisant ou insuffisant
par rapport à la croissance, et les trois sociétés
disposaient de diverses compagnies de téléphone
locales. La Commission des téléphones du gouvernement
de l'Alberta du gouvernement de l'Alberta et les téléphones
du gouvernement du Manitoba ont acheté les opérations
de Bell de leur province en 1908. Le ministère des
Chemins de fer, Télégraphes et Téléphones
de la Saskatchewan, créé en juin 1908, a racheté
les activités de Bell le 1er octobre 1909; Les activités
gouvernementales des trois provinces ont finalement acquis
les sociétés indépendantes.
Ayant atteint un niveau de développement
élevé, le Manitoba a décidé de
privatiser son service téléphonique et l'Alberta
a privatisé les téléphones du gouvernement
de l'Alberta pour créer Telus dans les années
1990. La Saskatchewan continue de posséder SaskTel
en tant que société d'État. Edmonton
était desservie par un service public appartenant à
la ville, Edmonton Telephones Corporation, qui avait été
vendue à Telus en 1995. BCE a repris possession du
réseau manitobain, maintenant connu sous le nom de
Bell MTS, le 17 mars 2017
Colombie britannique
La Colombie-Britannique, desservie aujourdhui par Telus,
était desservie par de nombreuses petites entreprises
fusionnées pour former British Columbia Telephone,
connue plus tard sous le nom de BC Tel (la dernière
acquisition connue était la Okanagan Telephone Company
à la fin des années 1970), qui desservait la
province depuis le début Des années 1960 jusqu'à
sa fusion avec Telus. (Les fusions ont produit une anomalie:
Atlin est entourée par le territoire de Norouestel,
ce qui implique que l'entreprise qui a établi le service
a été acquise par une entreprise desservant
des territoires plus au sud.)
Le nord du canada
Bien que Bell Canada soit entrée
dans les Territoires du Nord-Ouest (TN-O.) Avec un échange
à Iqaluit (à l'époque connue sous le
nom de Frobisher Bay, sur le territoire du Nunavut), en 1958,
le Canadien National Telecommunications, une filiale du Canadien
National, a fourni la plupart des le service téléphonique
dans les territoires du nord du Canada (plus précisément
le Yukon, le nord de la Colombie-Britannique et l'ouest des
TN-O.). Le CN a créé Norouestel en 1979 et Bell
Canada Entreprises a acquis la société en 1988
en tant que filiale à part entière. Bell Canada
a vendu ses 22 circonscriptions situées dans lest
des TN-O. À Norouestel en 1992 et BCE en a transféré
la propriété à Bell Canada en 1999. En
2001, la zone dexploitation de Norouestel a été
ouverte à la concurrence dans les communications interurbaines
(ce qui ne sest matérialisé daffaires
de cartes prépayées et de services aux grands
clients nationaux ayant quelques sites dexploitation
dans le nord) et en 2007 à la revente du service téléphonique
local (ce qui na pas encore eu lieu).
Des sociétés indépendantes
desservaient le nord de la Colombie-Britannique, le nord-est
de l'Ontario et la région de la Baie-James, mais Bell
Canada finit par desservir des régions plus éloignées
de l'Ontario et du Québec. Elle acquit une participation
dans des sociétés desservant de vastes étendues
du nord-ouest du Québec et du nord-est. Ontario et
à Norouestel
|
Le
réseau de Bell comptait deux sociétés principales
dans lindustrie téléphonique au Canada: Bell
Canada en tant que société dexploitation
régionale (affiliée à AT & T, avec une
participation denviron 39%) et Northern
Electric en tant que fabricant déquipement (affiliée
à Western Electric , avec une participation d'environ 44%).
La compagnie de téléphone Bell du Canada et Northern
Electric étaient structurées de la même façon
au Canada que les parties analogues du réseau de Bell aux
États-Unis;
Dans le cadre du décret
de consentement signé en 1956 pour résoudre le litige
antitrust intenté en 1949 par le ministère de la Justice
des États-Unis, AT & T et le système Bell se sont
dessaisis de Northern Electric en 1956.
Durant les années 1970 et 1980, le partenariat étroit
entre Bell Canada et Northern
Telecom a permis aux deux compagnies de devenir des chefs de file
mondiaux dans leur domaine respectif. Ainsi, Bell Canada a été
la première compagnie au monde à implanter un réseau
commercial de communications numériques et la première
compagnie à implanter un réseau commercial de communication
par paquets, Datapac, basé sur le Datagramme. De son côté,
Northern Telecom est devenu le chef de file dans le développement
et la fabrication déquipement de commutation et de
transmission numérique.
Par contre, durant la
même période, les tentatives de Bell Canada de se diversifier
dans les domaines de lénergie, de limmobilier
et de linformatique ont échoué.
En 1974, le concept des magasins «
Téléboutique » est lancé avec l'ouverture
des magasins de Longueuil (Québec), de Sherbrooke (Québec)
et de Guelph (Ontario).
Logo de Bell de 1977 au 7 décembre 1994.
En 1980, le Conseil de la radiodiffusion
et des télécommunications canadiennes (CRTC) ouvre
la concurrence dans le marché des appareils téléphoniques.
En 1983, par une transaction complexe, Bell
Canada crée le groupe d'exploitation BCE, devient membre
de ce groupe et place certaines de ses filiales dont Northern Telecom
dans le groupe; tous les actionnaires de Bell Canada deviennent
des actionnaires de BCE.
Un important mouvement de grève est
déclenché au matin du 27 juin 1988 à
Bell Canada. 20 000 employés affiliés au Syndicat
des travailleurs en communication cessent le travail pour protester
contre la politique de salaire, le régime de retraite et
la politique de sous-traitance de l'entreprise, alors que la précédente
convention collective avait expiré en novembre 1987.
La grève fut la plus longue de l'histoire de Bell Canada
(16 semaines) et ne s'acheva que le 21 octobre 1988
avec la signature d'un accord de trois ans qui porte sur des augmentations
de salaire et des améliorations au régime de retraite.
Ce mouvement de grève est également marqué
par de nombreux sabotages à l'été 1988. Des
bris de câbles sont commis à partir du début
du mois de juillet touchant de nombreuses régions comme Saint-Jérôme,
Lanaudière, Joliette, l'Outaouais au Québec mais aussi
Toronto, Barrie et Pembroke en Ontario. Les cadres non grévistes
de Bell Canada sont mis à contribution pour restaurer le
service.
Au début des années 1990, fortes de plus de
7 millions dabonnés du téléphone
en Ontario, au Québec et dans les Territoires du Nord-Ouest,
Bell Canada et la société mère créée
par elle en 1983, les Entreprises Bell Canada Inc. (EBC), contrôleraient
près dune centaine de filiales et emploieraient presque
120 000 personnes.
Par ses recettes et ses bénéfices, les Entreprises
Bell Canada Inc. se rangerait régulièrement parmi
les trois plus importantes sociétés canadiennes.
Durant les années 1990, BCE sest aventuré sur
le terrain de la convergence en acquérant des journaux, des
chaînes de télévision, des compagnies de services
informatiques et des compagnies de télécommunications
hors de son territoire traditionnel.
En 1992, le CRTC ouvre la concurrence dans
l'interurbain.
En 1997, le CRTC ouvre la concurrence dans le service local.
En 1998, le CRTC ouvre la concurrence
dans les téléphones publics; depuis cette date, toutes
les activités de Bell Canada sont soumises à la concurrence.
BCE se départ de sa participation dans Nortel. BCE investit
massivement dans une stratégie de convergence numérique
en faisant les acquisitions de Téléglobe, CTV, TQS
et du Globe and Mail.
En 2000-2001, certains de ces investissements se sont avérés
néfastes. Depuis 2001, BCE se recentre avec succès
sur ses activités de télécommunications.
En 2001, avec l'effondrement de la
bulle des technologies de l'information, plusieurs des investissements
récents de BCE perdent une très grande partie de leur
valeur. BCE se départ alors de Téléglobe et
entreprend un recentrage sur ses activités traditionnelles
de télécommunications.
Cette nouvelle stratégie amènera le consortium à
se départir de ses avoirs dans CGI, CTV, TQS et le Globe
and Mail au cours des années suivantes.
En 2005, BCE fonde Bell Solution d'affaire
et fait son entrée dans les TI avec l'aqusition de plusieurs
entreprises en TI dont Nexxlink et Charron Système au Québec.
BCE devient une des plus grandes compagnie de TIC au Canada.
En 2006, BCE annonce son intention
de faire comme plusieurs autres compagnies et de se transformer
en fiducie de revenus, mais le gouvernement fédéral
bloque ce plan en changeant la loi sur les fiducies de revenus.
En 2006, BCE employait 60 000 personnes et a généré
des revenus de 20 milliards de dollars.
En 2007, l'entreprise comptait 55 000 employés dont 17 000
au Québec, pour un chiffre d'affaires de 17,7 milliards de
dollars. BCE investissait pour 1,4 milliard de dollars et employait
426 ingénieurs, ce qui en faisait le 10e plus grand employeur
d'ingénieurs au Québec
En 2007, les services professionnels de Bell
Solution d'affaire sont intégrés à l'intérieur
de Bell le reste est vendu.
En 2008, BCE déménage son siège
social au 1, Carrefour Alexander-Graham-Bell. île des surs.
Le Campus Bell est certifier LEED.8 BCE annonce q'elle serait vendu
à Teachers. George Cope arrive au pouvoir et lance un plan
d'exécution de 100 jours. L'offre d'achat par Teachers est
retirée.
Le 2 mars 2009, Bell achète la chaîne
de magasins La Source.
Le 22 juin 2009, BCE participe à
l'achat du Canadien de Montréal à la hauteur de 18%.
En 2010, BCE devient l'unique propriétaire
de CTV.
En 2011, implantation de la fibre optique
FTTH et IPTV dans la ville de Québec.
Le 9 décembre 2011, Bell Canada et
Rogers achètent les Maple Leaf Sports & Entertainement
(MLSE), le consortium sportif qui détient notamment les Maple
Leafs de Toronto (LNH), les Raptors de Toronto (NBA), le Toronto
FC (soccer) et le Air Canada Centre. Les deux compagnies, Bell et
Rogers, investissent plus de 533 millions chacune11.
Le 16 mars 2012, Astral a annoncé
la vente de lentreprise à BCE, une transaction denviron
3,38 milliar ds $.
Le 18 octobre 2012, La demande a été
refusée par le CRTC. Un mois plus tard une nouvelle demande
est déposé par Bell.
Le 27 juin 2013, Le CRTC autorise la vente
à BCE mais sous certaine condition.
En juillet 2014, BCE annonce l'acquisition
des participations dans Bell Aliant qu'il ne détenait pas,
soit 47 % des parts de l'entreprise, pour 3,95 milliards de dollars
canadiens.
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