Le
Réseautage
Téléphonique , La Téléconvivialité
Une plongée nébuleuse dans la mémoire
de ce réseau oublié qui dans les années 1970
ouvrait à des inconnus un espace téléphonique
de dragues et de rencontres.
Bien avant le 36 15 du Minitel Rose, d'Internet, des sites de rencontres
Meetic, Tinder et autres, des réseaux sociaux, Facebook, Instagram,
Twitter, des chats et forums, du téléphone portable
avec ses SMS, « le réseau » ou "réso"
à été dans les années 70/80 un formidable
et unique moyen de drague et de rencontres. Les centres téléphoniques
électromécaniques à cette époque règnent
alors en maître, dans ce réseau de transmissions analogique,
une faille technique offrait la possibilité de dialoguer avec
des correspondants plus ou moins inconnus, en général
la nuit, où toute une faune "sortait alors du bois".
La faille :
Dans les années 1970, les personnes appelant un même
numéro (par exemple lHorloge Parlante INF 84 00 ou un
numéro non attribué) se retrouvaient fortuitement en
communication entre eux. Malgré le message répétitif
du disque PTT de non attribution du numéro, ils réussissaient
à sentendre dans les « blancs » des messages
PTT.
Les gens se téléphonaient aussi sur des numéros
non attribués (certains étant « distribués
» sous le manteau, dautres étant trouvés
par des chanceux qui téléphonaient au hazard). Au début,
ils tombaient sur les films des machines parlantes habituelles
avec leur message du type « Numéro non attribué
»
Mais les messages de ces disques, au bout dun
certain temps, étaient déconnectés et cest
à ce moment là que lon pouvait percevoir la présence
dautres correspondants plus ou moins près ou lointains
et tenter des contacts.
Techniquement, à lépoque de lélectromécanique
et de la communication analogique, il était impossible de parer
à cette faille.
sommaire
Les Machines parlantes destinées à diffuser les
différents messages sonores, enregistrés sur des films
optiques.
Les premières Machines Parlantes destinées
à fournir des explications aux usagers, en cas de fausse
manuvre ou d'encombrement étaient calquées
sur la première Horloge
Parlante (sauf qu'elles ne donnaient pas l'heure).
Les Messages Préenregistrés sont gravés
sur des films optiques, tels qu'au cinématographe, enroulés
autour d'un tambour rotatif afin de pouvoir être lus et
relus par cellule photoélectrique sans aucune usure lors
de la rotation dudit tambour.
Machine du Commutateur R6
de Toulouse, en service le 1er juillet 1933
|
|
Photo
d'une Machine Parlante équipant un Commutateur téléphonique
Crossbar CP400. |
Par la suite les films
sont enregistré sur des pistes magnétiques..
En 1946, Wolfgang ASSMANN crée La société
ASSMANN GMBH à Bad Homburg, en Allemagne.
Son principal marché : La Machine à dicter sur disque,
inventé par M. Assmann.Parallèlement
à cette technologie, il développe une ligne de fabrication
de matériels professionnels tels que la diffusion de messages
(comme l'Horloge Parlante)
et les enregistreurs de communications. ASSMANN
GMBH développe ainsi les premiers enregistreurs à
partir de leurs diffuseurs de messages durant les années
1960 et 1970.
En 1970, Assmann gmbh crée, pour le département
machine à dicter, une filiale Assmann en France
La maison du magnétophone qui distribue le matériel
non professionnel (cest à lépoque un
gros marché en Allemagne et en France).
Chaque Machine Parlante est capable de délivrer aux usagers
6 films sonores différents qui sont mémorisés
sur 2 tambours magnétiques de 3 pistes chacun.
Chaque film sonore étant lu par sa tête de lecture
dédiée, située au dessus de chaque tambour.
Au dessus des têtes magnétiques, les 6 amplificateurs
audio.
Les 2 films les plus courants sont :
"Le numéro que vous avez demandé n'est pas
en service actuellement. Veuillez consulter l'annuaire ou les
services de renseignements" (en cas de numéro de téléphone
demandé périmé).
"Par suite d'encombrement, votre demande ne peut aboutir.
Veuillez renouveler votre appel ultérieurement." (en
cas de saturation des capacités de transit du réseau
téléphonique régional). |
"Par suite d'encombrement votre demande ne peut aboutir. Veuillez
renouveler votre appel ultérieurement."
"Le numéro que vous avez composé n'est pas en service
actuellement. Veuillez consulter l'annuaire ou le service des renseignements."
sommaire
Certains réseaux fonctionnaient sans recourir à la faille.
Il sagissait de circuits téléphoniques "pirates"
crées par le bon vouloir de certains techniciens travaillant,
soit dans les centraux téléphoniques, soit chez les
équipementiers.
En effet, ces techniciens eux même pratiquant « le réseau
». Ils créaient en toute discrétion des raccordements
provisoires sur certains joncteurs et diffusaient aux initiés
les numéros dappels concernés. Ces personnages
faisaient la pluie et le beau temps du réseau en maitrisaient
le temps de parole, sa qualité, louverture et la fermeture
du numéro dappel. Noublions pas que les interminables
rangées de liaisons filaires des centraux téléphoniques
des années 70 représentaient des kilomètres.
Les branchements « bizarres » étaient difficilement
localisables. Ces sympathiques techniciens avaient du temps à
revendre, surtout durant les astreintes de nuit, pour bricoler et
« réseauter ».
Pour « utiliser le réseau », il fallait simplement
posséder un téléphone filaire et tout comme la
CIBI de l'époque, choisir un Pseudo. Ensuite, tout était
une question de persévérance pour trouver les bons
numéros. Outre lhorloge parlante (033-84-00 ou
Odéon 84-00), il sagissait souvent de numéros
non attribués dont la terminaison était répétée
(ex 20-20). A cette époque la numérotation en région
parisienne était à 7 chiffres et les 3 premiers chiffres
définissaient la localisation géographique du centrale
téléphonique (Odéon, Trudaine, Bolivar, Danton,
etc
).
Les numéros ouverts par les techniciens des PTT étaient
souvent des numéros mémo-techniques, voire des numéros
formant un nom à partir du cadran rotatif du téléphone,
par exemple JUSTINE (correspondant à JUSsieu (587) TI (84)
NE (63) ou 587-84-63). Ils étaient des centaines à entrer
en contact avec JUSTINE !!
Les modèles de téléphone de lépoque
étaient le U43 ou le S63, propriété de létat
et il nétait pas question de les bricoler. Le micro était
une pastille charbon dont la qualité audio et le rendement
étaient médiocre. Pour mieux se faire entendre, certaines
personnes investissaient dans une pastille micro « LEM »,
pastille de taille identique au micro charbon mais constituée
dun micro dynamique et dun petit préamplificateur
intégré. Dautres, plus astucieux utilisaient des
interphones, appareils vendus à lépoque pour communiquer
à distance à lintérieur dun bâtiment.
La modification consistait à raccorder en sortie de linterphone,
non pas le second interphone, mais un petit transformateur dimpédance
et de le raccorder avec des pinces croco sur le combiné à
la place du micro. Enfin, la meilleure des solutions était
dutiliser un amplificateur spécifique.
Une fois le matériel et le pseudo réunis, il ny
avait plus quà se lancer et à appeler parmi le
tintamarre général.
- Alexis appelle
.
- Super Nana cherche un super mec ....
- Le sorcier, raccroche, je tappelle....
- Allo, laméricain est sur le réseau
..
- Marianne appelle un garçon
..
- Prince Igor appelle Natacha
- Allo, le vampire tu mentends ? ....
- La souris ravageuse, répète, je nai pas compris
- Hé la souris ravageuse, ici Cobra Futé, quand est
ce que l'on se fait une bouffe ? ....
- Alors Cerise, tu as retrouvé ta queue ! ....
Généralement vous réussissiez à échanger
quelques mots malgré le brouhaha général mais
lobjectif final était de récupérer le numéro
dun correspondant (généralement du sexe opposé)
et de lappeler directement pour mieux faire connaissance.
Dans les années 70, période démancipation
sexuelle, et il faut reconnaître que la grande majorité
des utilisateurs du réseau étaient là pour la
drague, les rencontres et la relation d'un soir
. Dailleurs
la célèbre animatrice de RTL, Ménie Grégoire
n'hésitera pas à consacrer une émission entière
sur ces rencontres très insolites pour l'époque .
A Paris, cette communauté
était très «underground», lanonymat
y régnait mais cela nempêchait pas les habitués
à se retrouver afin de mettre un visage sur une voix. Les rencontres
avaient lieu à Paris le mardi midi dans une brasserie du 17eme,
"Le Courcelles" puis quelques années plus tard, le
jeudi en fin daprès-midi à "l'Interlude",
une brasserie prés de la Bourse...
Les témoignages du blog .
Nolwenn Fournier entend parler du "Réso" au travers
de vieux souvenirs évoqués par son père, elle
décide alors de partir à la recherche de ces ancien(nes)
utilisateurs(trices) et d'explorer ce premier réseau social.
Rencontre au Troisième Bip est une plongée nébuleuse
dans la mémoire de ce réseau oublié où
se superposent archives personnelles, témoignages de réseauteurs,
lectures et extraits de fiction. Ecoutez
le podcast original pour une Expérience signée Nolwenn
Fournier, réalisée par Véronique Lamendour.
sommaire
Le Réseautage de Business :
A cette époque, chaque ligne téléphonique
en service raccordée sur un central Pentaconta aboutit, si
lon décroche le combiné téléphonique
et que lon téléphone à un numéro
non attribué, sur un film (disque) de type numéro non
attribué au bout dun certain délai, le film sarrête
et labonné se retrouve alors dans le vide et le téléphone
de labonné demeure toutefois alimenté
En 1971, sur un système Pentaconta, chaque lecteur
de film de numéro non attribué peut débiter son
message jusquà 5 appelants qui appelleraient quasiment
en même temps le même numéro non attribué
Donc pour résumer, si 5 personnes, qui se connaissent
bien, téléphonent à une heure fixe convenue sur
un même numéro de téléphone non attribué,
ceux-ci se retrouvent alors aboutir sur le même lecteur de film,
qui après un certain délai sarrête
Mais à ce moment-là, ces 5 correspondants, qui ne se
sont pourtant jamais appelés, se retrouvent en conversation
tous ensemble, sans avoir à payer, et surtout sans pouvoir
être tracés
À Marseille, ce sont des malfrats et autres
membres de la pègre, qui ont découvert cette faille
de sécurité, et ainsi pendant paraît-il plusieurs
années, ils se contactaient par ce moyen très sophistiqué,
à partir de cabines téléphoniques ou de téléphones
ne leur appartenant pas (les leurs étant probablement placés
sur écoute) pour préparer leurs coups, tels que braquages,
hold-up, livraison de stupéfiants, recels etc
Ainsi, même écoutés sur
leurs lignes téléphoniques personnelles, la Police ny
voyait que du feu et les malfrats pouvaient planifier leurs affaires
tranquillement par le Réseautage Business avec ce système
dappels à heures fixes sur les mêmes numéros
non attribués, à partir de nimporte quelle ligne
téléphonique de Marseille
Tout en jouant aux petites
filles modèles sur le téléphone de chez eux
Il paraît que le pot aux roses fut découvert
par hasard à Marseille par des techniciens des PTT de maintenance
et quà ce moment-là, des écoutes officielles
furent ordonnées directement sur les répondeurs de films,
et quainsi, la Police enfin prévenue des prochains coups
de la pègre (lieux, heure, marchandise), fit tomber une grande
partie du banditisme marseillais dans les années 70 par ce
moyen
Lexistence du Réseautage Téléphonique
était donc connue des hautes sphères, cest ce
r éseau occulte qui a donné un jour lidée
à Jacques Dondoux de lancer les premiers Réseaux
de Convivialité (Cest ainsi que lon les
appelait à leur création), qui ont été
présentés à partir de 1978 comme des plateformes
du genre « sos solitude », qui avait tôt vite fait
de passer à « Jai besoin de compagnie » à
enfin finir en un gigantesque baisodrome téléphonique
Le téléphone rose tarifé
et lucratif était né, avec notamment les numéros
commençant par le 36.69, on aura compris lallusion
Et grâce à laide précieuse des commutateurs
téléphoniques électroniques qui permirent la
création de ces nouveaux services téléphoniques
puis télématiques des plus spéciaux
Pour ne pas laisser passer le train du réseautage,
train clandestin mais tout de même connu dans toutes les sphères
des Télécommunications, l'Administration décide
de réagir afin de récupérer la manne qu'il pourrait
rapporter en lançant une première expérimentation
de Réseautage de compagnie - officiel, celui-ci et naturellement
payant.
En 1978 Baptisée Téléconvivialité,
l'expérimentation débute en Décembre dans la
ville de Florac avec le numéro d'appel 07.11.11. L'expérimentation
sera étendue à Mende dès Janvier 1979. Mais l'expérience
ne réussit pas dans ces localités de Lozère.
Il appert que le vivier soit insuffisant pour "amorcer",
dans les zones à trop faible densité de population.
Dès le 15 mai 1979, l'expérimentation Téléconvivialité
est dorénavant étendue à Montpellier,
et dans cette zone urbaine à forte densité téléphonique,
le succès est immédiat (voir l'article ci dessous).
Au mois de Mai 1980, les résultats se montrent encourageants,
avec plus de 10.000 appels par jour vers ce service. Les numéros
ainsi créés à Montpellier permettent, pour chacun
d'eux, la connexion jusqu'à 10 abonnés simultanément,
qui peuvent ainsi converser pendant des heures entre inconnus, ou
entre habitués (avec une taxation à la durée,
bien sûr...) et sortir ainsi de leur "isolement"...
À Montpellier, les 6 numéros de ces groupes de Téléconvivialité
qui existent en Mai 1980 sont 07.11.11 ; 07.22.22 : 07.33.33 ; 07.44.44
; 07.55.55 ; 07.66.66...
Le 11 mai 1981, le service de Téléconvivialité
est officiellement créé par décret. La tarification
est fixée à 1 demi-franc toutes les 5 minutes.
La Téléconvivialité ouvre dès 1981
à Marseille et se poursuit par Nice, Digne et Toulon en 1982...
Nantes... puis Bordeaux en Janvier 1986 et fermera en Décembre
1987... la Téléconvivialité a definitivement
été fermée en 1988.
Avec l'arrivée de la numérisation du
réseau téléphonique (Électroniques Temporels)
ce système occulte ne pouvait techniquement plus fonctionner.
Ainsi, à Paris, la mise à la casse dune proportion
critique et suffisante de ROTARY 7A1, 7B1 et de PENTACONTA et autres
CP400 sonna le glas du Réseau occulte vers 1980-82
La Téléconvivialité débouchera indirectement
à partir de 1984 sur la création du Kiosque
Téléphonique, qui sera renommé Audiotel
en 1992...
La marque Audiotel a été créée par France
Télécom pour définir les services téléphoniques
surtaxés.
Depuis 2006, France Télécom n'a plus le monopole de
ce type de service qui est offert par de nombreux fournisseurs, comme
SFR, groupe Orange, Remmedia ou A6Telecom.
Il existe de nombreuses tarifications, selon les numéros. On
distingue principalement : les numéros dits « longs »,
commençant par 08
et les numéros à 4 chiffres, dits « courts »,
commençant par 3. Chaque numéro spécial est parfois
lié à un numéro géographique : la connaissance
de ce dernier permet de s'affranchir du paiement de la surtaxe Audiotel.
Le téléphone Rose
Un service de téléphone érotique,
ou familièrement de téléphone rose (en raison
de la connotation sexuelle de la couleur rose), est une plate-forme
téléphonique offrant aux appelants la possibilité
d'avoir des conversations à caractère érotique,
éventuellement pour se masturber, souvent par le biais d'un
serveur vocal interactif.
A compter du 1er janvier 2017, l'ensemble des services téléphoniques
surtaxés et destinés à un public adulte
doivent obligatoirement être proposés sur la tranche
de numérotation 08 95
La plupart de ces services sont payants. La transaction peut s'effectuer
de deux manières :
- par le biais d'un numéro surtaxé, dont le tarif est
prélevé directement sur la facture téléphonique
du client par l'opérateur, qui partage ensuite ces revenus
avec l'éditeur du service en lui en reversant une partie ;
- par le biais d'un numéro à tarif normal, mais le client
est invité à communiquer son numéro de carte
bancaire, le montant étant alors prélevé sur
son compte.
Une pratique courante quoique illégale
est de séparer l'accès des hommes et celui des femmes,
dans le but d'octroyer à ces dernières des tarifs plus
avantageux, voire la gratuité. En effet, les hommes étant
plus nombreux que les femmes, il s'agit de les inciter à participer
davantage.
Les clients peuvent être mis en relation avec : d'autres
clients, auquel cas l'objectif peut également être un
contact à l'extérieur du service ; des salariés
de l'entreprise éditant le service, le client n'étant
alors pas nécessairement informé du fait que son interlocuteur
n'est pas un autre client, mais qu'au contraire il est rémunéré
pour ces dialogues.
Les contacts peuvent se présenter sous
la forme : d'écoutes de récits
pré-enregistrés par des comédiens, de boîtes
aux lettres vocales, d'échanges de messages en temps réel,
de conversations en direct, éventuellement sur le mode de la
mise en relation aléatoire, s'apparentant alors au speed dating,
voire de conférences à plusieurs. Il
est parfois possible de procéder à une sélection
des interlocuteurs par critère (région géographique,
sexe, âge).
Certains services proposent d'assister, sur
le mode du voyeurisme, aux dialogues des autres clients sans participer
(ceux-ci étant bien entendu informés qu'ils peuvent
être écoutés).
Les employés peuvent soit travailler depuis leur domicile,
sur leur ligne personnelle, soit dans un centre d'appel.
Tout comme d'autres services téléphoniques
à bas coûts salariaux (voyance par téléphone),
le téléphone rose n'échappe pas à l'externalisation
des appels. C'est-à-dire qu'une hôtesse française
peut également prendre des appels passés par des clients
belges ou suisses romands.
Les employés assument parfois en parallèle
la fonction de surveiller les dialogues entre clients, afin de s'assurer
de leur légalité1 et ils sont considérés
comme des travailleurs du sexe. Sauf dans le cas de services à
caractère homosexuel, il s'agit généralement
de femmes : les clients étant essentiellement des hommes.
Les services sont parfois spécialisés
par orientation sexuelle (hétérosexualité, homosexualité
masculine ou féminine), ou par pratique (sado-masochisme, sexualité
de groupe, fétichisme).
La promotion de ces services se fait généralement par
le biais de petites annonces ou d'encarts publicitaires, dans la presse
masculine ou pornographique, à la télévision
ou la radio tard dans la soirée et la nuit, sur Internet, ou
encore par affichage.
En France, les entreprises éditrices de services télématiques
s'engagent à suivre les Recommandations déontologiques
émises par l'AFMM (Association Française du Multimédia
Mobile).
Le téléphone rose dans la culture
populaire
- En 1980, la chanteuse française Sheila, dans sa chanson L'amour
au téléphone, adaptation par son producteur Claude Carrère
et l'auteur Jean Schmitt de la chanson Love on the phone de Suzanne
Fellini, joue le rôle humoristique d'une femme choquée
par les personnes qui selon elle utilisent le téléphone
rose, tout en avouant pourtant s'y adonner elle-même.
- Sex over the phone, chanson des Village People (1985).
- En 1991, le clip de la chanson Sweet Emotion d'Aerosmith met en
scène une conversation de téléphone rose ; la
fin du clip révèle que l'hôtesse ne correspond
pas à l'image jeune et sexy que le personnage s'en faisait
dans ses rêves, puisqu'il s'agit en fait d'une vieille femme
obèse ayant un bébé.
- En 1993, dans le film américain Short Cuts de Robert Altman,
Jennifer Jason Leigh gagne sa vie à travers le téléphone
rose. Elle excite ses clients au téléphone en lisant
divers mini-scénarios.
- En 1994, dans le clip de sa chanson Confide in Me, la chanteuse
australienne Kylie Minogue incarne une hôtesse de téléphone
rose invitant le téléspectateur à l'appeler et
à se confier à elle.
- En 1996, dans le film américain Girl 6 de Spike Lee, Theresa
Randle incarne Judy alias Girl 6, une hôtesse de téléphone
rose.
- En 1997, dans le film japonais Eat the Schoolgirl, un jeune yakusa
noue une relation avec une hôtesse de téléphone
rose.
- L'agent spécial Larry B. Max de la série BD IR$ (1999),
noue une relation ambigu avec une Gloria Paradise hôtesse de
téléphone rose.
- En 2001, dans l'épisode 13 de la saison 7 de la série
télévisée américaine Friends, le personnage
de Phoebe avoue avoir travaillé pour un service de téléphone
rose.
- En 2002, dans le film américain Spun de Jonas Akerlung, Spider
Mike appelle un service de téléphone rose dont l'hôtesse
est Debbie Harry.
- En 2002, dans son sketch Le Téléphone rose, l'humoriste
français Jean-François Dérec interprète
le rôle de Gérard Bouchard, client d'un serveur vocal
de téléphone rose.
- En 2005, dans l'épisode 20 de la saison 6 de la série
télévisée américaine Malcolm, Hal découvre
une facture pour un téléphone rose, les appelle pour
se plaindre mais raccroche mal le combiné ce qui conduit à
un appel à huit cents dollars.
En 2006, dans le premier épisode de la quatrième saison
de la série télévisée américaine
Nip/Tuck, Kathleen Turner incarne le personnage d'une hôtesse
de téléphone rose de 50 ans qui souhaite une opération
de chirurgie esthétique pour rajeunir sa voix.
- En 2009, dans la saison 5 de la série télévisée
française Plus belle la vie, le personnage de Wanda Legendre
travaille comme hôtesse de service téléphonique
à caractère sado-masochiste pour survivre.
- En 2012, dans le film américain American Sexy Phone de Jamie
Travis, où deux colocataires décident de monter une
entreprise de téléphone rose.
- En 2022, la série américaine Dirty Lines [archive]
diffusée sur Netflix retrace le parcours de 2 frères
à l'origine de la société de téléphone
rose hollandaise Teleholding. On y voit Marly, une étudiante,
prendre un travail d'hôtesse en parallèle de ses études.
sommaire
La communication téléconviviale
Article de Alain
Briole
L'espace ouvert par la Téléconvivialité est un
espace public, un espace social. Malgré les apparences, il
n'est pas la somme des individus qui participent aux échanges,
mais le lieu d'un échange réglé, où tous
éprouvent l'existence du collectif : il est frappant, en particulier,
de repérer dans ce tourbillon de paroles la permanence de formes
anciennes de l'échange qu'on aurait cru aboli.
De troublantes correspondances s'établissent quand on rapproche
l'usage de la Téléconvivialité et l'image du
téléphone, que d'autres études ont pu mettre
à jour : ici et là, on retrouve le même partage
des sexes et des comportements, comme une continuité remarquable
des représentations les plus ancrées dans l'individu
à leur expression publique. Nous aurions pu alors, par une
démarche psychologique, rechercher des motivations chez les
individus ; plus intéressant nous paraît le repérage
des mécanismes à l'oeuvre, dès qu'ils se mettent
à jouer.
Ce qui permet en effet d'identifier la Téléconvivialité
comme un médium de la communication locale, c'est bien d'y
reconnaître une instance qui transcende les relations immédiates,
entre individus. Que des figures de discours apparaissent en filigrane
des messages apparemment incohérents de la Téléconvivialité
ne peut être le fait du hasard. Ce n'est donc pas la simple
simultanéité des appels de quelques individus qui peut
créer l'échange, inexprimée, latente, une règle
s'impose. Elle est la manifestation de l'organisation sociale. Elle
nous entraîne au-delà du niveau psychologique, indiquant
quel champ de la communication locale occupe la Téléconvivialité
: celui de la communication symbolique. Ainsi, accède à
l'espace public, ce qui jusqu'ici relevait d'un autre partage des
échanges sociaux.
Les conditions d'appel
Même confiée à l'invisibilité du réseau
téléphonique, aucune conversation ne peut être
détachée du contexte dans lequel elle se tient. La localisation
des intervenants sur le reseau présente à cet égard
un intérêt certain, puisqu'elle influe notablement sur
les comportements des téléconvives, à la difference
des cibistes qui peuvent utiliser leur matériel sans contrainte
spatiale. Les téléconvives sont en effet plus limités
par les conditions d'appel : ils ne peuvent accéder au réseau
téléconvivial que par un poste téléphonique.La
situation de celui-ci, à domicile, au travail où dans
les lieux publics, rend plus ou moins précaire la communication
que tient l'adepte du 07.
L'appel à domicile
Privilégié au démarrage
de la Téléconvivialité, car le dispositif a couvert
initialement une aire surtout résidentielle, ce type d'appel
bénéficie d'une latitude d'utilisation plus grande.
Les perturbations extérieures sont réduites et la durée
des communications n'est soumise qu'aux limitations d'ordre personnel.
Extrait de "La téiéconvivialité à
Montpellier" ( mai 1979 - juin 1981 ), de Alain BRIOLE, Irène
LE ROCH et Emmanuel de SAINT-LAURENT © ID ATE-MO NTPELLIER.-
Le téléconvive peut donc interrompre son appel quand
il le désire, si la conversation l'ennuie ou s'il estime que
sa note de téléphone risque de grever trop lourdement
son budget. L'appel à domicile réunit également
les conditions d'une meilleure écoute; à la possibilité
de s'asseoir ou d'adjoindre un amplificateur, s'ajoute parfois la
possibilité de mener de front d'autres activités : écouter
et commenter la télévision collectivement, préparer
un repas et se faire chauffer un café, bricoler, tricoter,
etc..
L'appel au travail
Q uand un téléconvive
décide d'appeler de son travail, il prend le risque d'être
surpris, interrompu ou requis pour l'exécution de sa véritable
tâche, mais il profite de la prise en charge de la taxation
par l'entreprise qui l'emploie. Cet avantage doit être décisif,
car les appels "professionnels" ont fait littéralement
exploser l'utilisation de la Téléconviviaiité,
au moment ou l'ensemble de l'agglomération montpelliéraine
a été connectée au réseau. Les utilisateurs
se relayaient alors au bout du fil, immobilisant en permanence une
ou plusieurs lignes de l'entreprise.Un certain
nombre de patrons ont alors protesté auprès de l'administration
ou demandé la mise en place d'un service restreint excluant
l'accès au 07.
Un certain nombre d'appels ayant lieu collectivement, il convient
de réviser l'opinion selon laquelle les téléconvives
sont des esseulés dans le monde anonyme de la ville. Dans le
cas qui nous occupe ici, il serait plutôt l'indice d'un intérêt
médiocre pour le travail qu'on exécute, travail administratif
essentiellement.
L'appel dans les lieux publics (cabines, etc.)
Les cafés et surtout les cabines
publiques sont parfois utilisés par les téléconvives
qui acceptent des conditions picis précaires d'appel; l'environnement
est souvent bruyant, et il faut éviter de gêner d'autres
utilisateurs du téléphone; dans les cabines, il faut
en outre se munir d'une provision de pièces permettant de poursuivre
la conversation pendant un certain temps.
Conséquences de l'hétérogénéité
de lieux d'appel
La variété des modes
d'accès au 07-11-11 introduit une inégalité dans
la position des intervenants respectifs; les contraintes qui sont
liées à l'appel en cabine, notamment l'interruption
brutale de la communication mettent le téléconvive en
situation précaire et limitent ses possibilités de leadership
de la conversation. Ce trait agit aussi défavorablement dans
l'appel provenant de lieux de travail, bien que la gratuité
de la communication contribue à une utilisation prolongée.
Finalement, ce sont sans doute les appels à domicile qui qui
réunissent les conditions les plus favorables à l'affirmation
des animateurs des échanges téléconviviaux.
La position inégaie des intervenants influe sur la tenue et
le déroulement même des conversations; la rupture éventuelle
du dialogue, par le départ brutal d'un interlocuteur, a entraîné
une période de flottement, souvent génératrice
de l'apparition d'un nouveau sujet de conversation ou de la prise
de parole d'un intervenant jusqu'alors discret. Le rôle spécifique
du lieu d'appel est en fait assez difficile à préciser
par la seule écoute de la Téléconvivialité.
Les appels en provenance des lieux de travail sont vraisemblablement
nombreux : il faut accorder une place toute particulière aux
standardistes, de nuit ou de jour, qui de par leur profession sont
en contact constant avec le téléphone et qui servent
d'intermédiaires ou de messagers aux autres téléconvives.
Les conversations Caractéristiques formelles
L'analyse de la durée des échanges, de la taille
ou de la composition sexuelle des groupes qui se constituent et se
défont sur la Téléconvivialité contribue
à préciser les contours sociologiques de la parole téléconviviale.
L'observation fait apparaître une majorité d'échanges
courts, d'une durée approximative d'un quart d'heure. Les quelques
conversations qui se prolongent au-delà excèdent très
rarement quarante cinq minutes. Ce sont les groupes de deux ou trois
personnes qui privilégient les échanges courts, alors
que les groupes plus nombreux, (pour ménager à chacun
son temps de parole ?) occupent la ligne plus longtemps. Parmi les
groupes les plus nombreux, il faut remarquer une importante prédominance
masculine; Les hommes sont d'ailleurs les principaux intervenants
sur le 07 : les femmes sont rarement seules à occuper la ligne.
Elles n'interviennent qu'au sein des groupes qui comptent aussi des
hommes.
Les conversations : un style implosif
La forme des conversations téléconviviaies
ne suit pas un déroulement ordonné par l'intervention
de paralangages tels que regards, mimiques diverses, ponctuant un
échange plus ou moins structuré. Ici, le discours s'organise
principalement autour de questions et des réponses qui leur
sont faites. Ce mode interrogatif/affirmatif favorise la description,
l'expression des opinions, voire le discours égocentrique tenu
pour des oreilles invisibles. Cette forme de conversation s'accompagne
d'une redondance très forte des discours des uns et des autres;
les sujets de conversation, précairement maintenus pendant
quelques minutes, finissent par se perdre.
Les conversations : à la recherche d'un sujet
Identifiés grâce à l'analyse du contenu des conversations,
trois ensembles de thèmes constituent la matière essentielle
des échanges :
1) Les thèmes relatifs à la connaissance réciproque
des interlocuteurs. Dans ce groupe, se trouvent les sujets relatifs
à la découverte des interlocuteurs .présents
sur la Téléconvivialité.
a) Description physique des téléconvives
La nécessité de se représenter physiquement les
personnes avec lesquelles on engage une conversation est une des constance
des échanges sur la ligne; il en est de même pour le
rapport entre la voix entendue et le physique supposé et décrit.
Ce domaine est particulièrement propice à l'invention
de personnages imaginaires. L'appel à l'imagination ne comporte
qu'un risque, mais il est de taille ; c'est celui de décevoir
un jour les interlocuteurs à qui l'on pourrait donner un rendez-vous.Quelques
figures du réseau ont ainsi vu leur "représentation"
taillée en pièces par des téiéconvives
déçus par leur apparence physique. D'autres acceptent
le décalage entre le personnage du- réseau et celui
rencontré en face à face comme faisant partie du "jeu"
téléconvivial.
b) Description de la personnalité des téléconvives.
Cette rubrique comprend autant d'interrogations sur le travail des
téiéconvives que sur leur occupation au moment de l'appel.
Elle inclut ainsi la référence faite a l'utilisation
simultanée d'un autre médium, télévision,
radio, etc..
2) Thèmes relatifs à la communication sur le
support ou l'échange convivial
En l'absence des paralangages du face à face, les rituels d'identification
ou d'entrée en contact occupent les téiéconvives,
dès qu'un nouvel interlocuteur entre en ligne. Il en est de
même de l'évaluation du nombre d'intervenants, des commentaires
sur le fonctionnement du dispositif, d'une demande de discipline dans
les échanges, comme de tout ce qui perturbe la communication:
les interpellations, les provocations, les défis et les insultes.Il
faut aussi ranger dans cette rubrique toutes les références
aux conversations passées, où l'évocation d'un
ou plusieurs interlocuteurs absents permettent de classer les utilisateurs
en anciens, permanents, épisodiques ou nouveaux.
Enfin, dans cette rubrique sont également compris tous les
thèmes qui évoquent un rendez-vous sur la ligne. Le
passage du 07 à une communication à deux sur une ligne
privée, l'échange de ces numéros et les suggestions
que les intervenants proposent pour l'utilisation générale
de la Téléconvivialité.
3) Thèmes relatifs à la vie personnelle des
interlocuteurs
Les anecdotes concernant la vie familiale, professionnelle ou sociale
des individus, leur vie quotidienne, leur réflexion sur des
problèmes domestiques, la cuisine, le coût de la vie,
leur opinion positive ou négative sur les relations sociales
ont été rangées dans la rubrique "vie professionnelle".
Les allusions grivoises, l'évocation des relations amoureuses
(voire intimes) des interlocuteurs relèvent également
de cette rubrique, comme les propositions de rencontres, l'acceptation
ou le refus de ces rencontres et la référence à
des rencontres déjà réalisées. Il en est
de même des thèmes tels que la solitude, les loisirs,
la politique ou la religion, qui sont le plus souvent intégrés
à la palette des opinions déterminant les individus.
Ainsi les loisirs incluent-ils les vacances mais aussi les sorties,
les occupations de détente, la fréquentation des cinémas
ou la pratique d'un sport. Les deux premières catégories
rassemblent donc les thèmes les plus spécifiques à
une conversation téléconviviale qui est en grande partie
déterminée par la configuration de son support technique.
La dernière nous ramène par contre aux conversations
que l'on peut entendre en tous lieux publics.Rien d'étonnant
à ce que le support soit un thème privilégié
de la conversation; l'innovation a besoin d'un temps d'intégration.
11 est en revanche intéressant de relever cette induction par
la technique des thèmes liés à la vision, à
l'apparence, à la définition de soi : par sa forme même,
le médium suscite le jeu de prédilection des téléconvives,
celui de l'identité.
Les thèmes principaux de la conversation
En fréquence absolue, les thèmes les plus fréquents
sont ceux qui sont presentsrelatifs à l'échange téléconvivial,
contemporain ou passé, aux interlocuteurs ou communs, enfin
à l'utilisation de la Téléconvivialité
elle-même.
Cette communication est donc en fait une "métacommunication"
qui se rapporte autant au principe technique qu'aux intervenants en
présence et à la dynamique même de la conversation
téléconviviale. D'autres thèmes moins fréquents
y font également référence : ce sont les commentaires
provoqués par les perturbations, les interpellations, ou la
référence à l'"écoute" du réseau.
Venant en deuxième position dans l'échelle des fréquences,
les thèmes plus personnalisés concernent les loisirs,
la vie quotidienne, la vie professionnelle ou familiale.Dans ce groupe,
certains sujets de conversations ont contribué à l'image
du "téléphone rose" ou du "réseau
drague". Ils évoquent directement les relations amoureuses
que les intervenants vivent ou souhaitent établir avec d'autres
téléconvives; ce sont également les rencontres
que les hommes proposent aux femmes. Il faut remarquer ici que les
thèmes les moins chargés sont ceux qui font une allusion
precise à la vie sociale des interlocuteurs, à leurs
opinions politiques, ainsi qu'à leurs positions sur la vie
en général. C'est donc comme si tout ce qui identifie
sociologiquement le téléconvive était proscrit
sur le réseau, à l'exception de la vie professionnelle.
Au départ, un statut et un seul suffit. Au delà, la
définition de l'individu relève d'une transaction :
il s'agit, par échange, d'accéder à une image
satisfaisante de soi. Non plus à cette identité lourde
qui vient du dehors et détermine tous les instants de la vie,
mais une identité mobile, malléable, qu'on a contribué
soi-même à forger et toujours susceptible d'être
modifiée. D'une certaine^ façon, la fugacité
des échanges téiéconviviaux pourrait être
la compensation nécessaire au caractère irrémédiable
des biographies personnelles.
La conversation et la durée
L'émergence ou la répétition de certain
thèmes sont notablement liés à la durée
de l'échange. Les conversations courtes révèlent
un besoin de connaître la personnalité extérieure
des intervenants, ou sont relatives aux thèmes qu'induit l'utilisation
du support, ainsi qu'à tout ce qui fait référence
à la durée de la Téléconvivialité
elle-même. Dans les conversations longues (associées
aux groupes plus nombreux) le rituel d'identification des intervenants
occupe une place importante au démarrage des conversations.
Les plaisanteries plus ou moins grivoises et l'évocation de
sujets ou d'anecdotes sur la vie personnelle des intervenants viennent
ensuite. Cette thématique, présente au début
d'une conversation, n'est peut- être pas étrangère
à sa durée et à l'intérêt plus ou
moins soutenu que manifestent les participants...
La conversation et le groupe
Dans les groupes de deux ou trois personnes, le nombre restreint
de participants élimine tous les thèmes qui renvoient
à la perturbation de la communication, à la discipline
des échanges, aux demandes de détails sur la vie des
interlocuteurs ou à la description spontanée que ceux-ci
peuvent en faire. Les propositions de rencontres, surtout entre deux
femmes, ne semblent pas favorisées par la tenue d'une communication
en groupe restreint. L'évocation de rencontres hors réseau,
l'échange de numéros privés, les sujets où
se révèlent les opinions, se prêtent également
peu à l'échange confidentiel. Les thèmes les
plus prisés semblent ceux d'une conversation générale,
peu implicante pour les différents interlocuteurs. Dans les
groupes de plus de quatre personnes, les thèmes qui révèlent
une implication personnelle sont plus souvent évoqués;
les confidences apparaissent d'autant plus fournies que le nombre
de confidents est élevé; c'est ainsi que les allusions
aux relations intimes, l'évocation plus directe de ces questions
se font surtout dans les groupes de six personnes et plus. Il en est
de même pour les propositions de rencontre entre hommes et femmes.
Discours féminin, discours masculin
Les hommes, plus nombreux sur le réseau, sont aussi
les plus "bavards"; leurs sujets de conversation varient
toutefois selon la présence des femmes.tion des rencontres
réalisées hors réseau. Ils n'hésitent
pas non plus à évoquer directement les relations sexuelles.
Quand les femmes sont plus nombreuses, les sujets de conversations
tournent autour des goûts ou des activités des individus
en présence. Les propositions de rencontres, les propos galants
dominent, avec une forte correlation avec les ponctuations que constituent
les interpellations, les provocations ou les perturbations. Dans les
groupes mixtes où les hommes sont les plus nombreux, ce phénomène
se manifeste plus fortement, traduction de la compétition et
des rivalités qui éclatent sur le réseau quand
des voix de femmes interviennent. Enfin, les groupes où les
femmes dominent connaissent peu de perturbations et un intérêt
dominant dans la conversation pour des thèmes comme les loisirs
ou la vie professionnelle; également, les groupes à
dominante femmes parlent également des rencontres réalisées
sur le réseau.
Pour le thème "relations intimes", le sujet n'est
pas abordé directement; les groupes procèdent plutôt
par allusion.
La dynamique des conversations Dynamique thématique
La dynamique thématique se révèle à l'examen
de l'articulation chronologique et structurelle des thèmes
entre eux.
Les cycles de conversations
En début de conversation, les thèmes qui sont associés
à l'utilisation même de la Téléconviviaiité
dominent largement; il est en effet attendu que l'identification ou
l'évaluation du nombre d'intervenants figurent au premier rang
des préoccupations de ceux qui appellent. De même, les
thèmes "Activité pendant l'appel" ou "référence
à une conversation passée" situent les interlocuteurs
dans leur cadre personnel ou les désignent comme téléconvives
périodiques. La prise de contact opérée, la conversation
se poursuit avec un passage à des thèmes d'ordre général
"loisirs", "vie quotidienne et familiale". L'ébauche
des propositions de rencontre se dessine, suivie de très près
par les pauses provoquées par les interpellations ou la référence
aux relations intimes. Cette phase se termine semble-t-il, par un
retour aux thèmes qui font référence au support
ou à l'échange lui-même. Ce retour, motivé
par les arrivées de nouveaux interlocuteurs, remplit également
une fonction de pause, un peu différente de celle associée
aux perturbations, dans la mesure où elle contribue plus à
une réorientation du contenu des conversations que celles dues
aux perturbations des échanges. Les arrivées, en effet,
provoquent plutôt un renforcement, une répétition
du thème ou des propos dont les participants souhaitent maîtriser
l'apparition et l'interruption. Plus la conversation s'avance et plus
les thèmes se diversifient. Dans la même période,
apparaissent les propositions de rencontres hors réseau (sur
les lignes privées ou en face à face). Ce n'est que
dans la phase terminale de certaines conversations ou dans la transition
médiane des conversations longues que l'évocation des
relations galantes occupe une place prépondérante. C'est
également dans les queues de conversation qu'apparaissent les
opinions des interlocuteurs sur la vie en général, la
solitude, la référence à l'écoute ou aux
différentes utilisations possibles de la Téléconvivialité.
Il faut donc un certain temps pour que l'échange se discipline
et permette l'apparition de thèmes dont le contenu se rapproche
d'une conversation en face à face entre des interlocuteurs
ayant fait connaissance préalablement.Les fins de conversations
longues voient en effet beaucoup moins de perturbations ou d'interpellations,
à l'exception de celles provoquées par les arrivées
nouvelles sur le réseau.
Structure de la conversation
La mise en évidence des structures latentes des communications
repose sur la coprésence de certains thèmes et leur
distance avec d'autres. Deux groupes de thèmes apparaissent
avec une co-occurence très forte. Ce sont les thèmes
relatifs à la communication sur le support ou l'échange
téléconvivial et les thèmes relatifs aux rencontres
(proposition, acceptation, refus, localisation, évocation d'une
ou plusieurs rencontres réalisées). Ils présentent
non seulement une forte connexité interne, mais apparaissent
en relations étroites l'un avec l'autre.Autour de ces deux
noyaux se disposent des groupes de thèmes plus restreints,
et diversement liés aux deux premiers :
- les thèmes évoquant ou faisant allusion aux relations
intimes,
- les thèmes relatifs à la vie quotidienne professionnelle,
sociale ou familiale.
- les protestations, les commentaires aux perturbations, les interpellations,
- les thèmes descriptifs du physique, du rapport voix/personne,
etc.
Agencements thématiques
Les deux noyaux décrits précédemment sont fortement
coprésents toutefois, chacun a des liens privilégiés
avec les autres groupes. Par exemple l'ensemble des thèmes
relatifs au support ou à la communication téléconviviaie
est également liée aux groupes de thèmes "vécu
quotidien", aux ponctuations, aux loisirs et aux descriptifs
des caractéristiques des interlocuteurs.
L'ensemble "rencontres" apparaît, quant à
lui, en corrélation étroite avec tous les thèmes
évoquant de près ou de loin les relations "courtoises"
(dans l'orbite desquelles nous trouvons une liaison assez forte avec
la "demande d'une discipline dans les échanges")
et les thèmes évoquant le passage de la Téléconvivialité
à l'usage traditionnel du téléphone (vraisemblablement
pour mettre au point ou confirmer un rendez-vous à l'abri des
gêneurs et des oreilles indiscrètes.
D'autres liens apparaissent très nettement. C'est ainsi que
l'évocation des relations intimes est fortement rattachée
à l'identification ou à l'évaluation préalable
des intervenants, les demandes de descriptions physiques aux rencontres
proposées par les hommes aux femmes. L'identification des intervenants
est également évoquée par ceux qui refusent ou
acceptent les rencontres; le thème "échange de
numéros privés" se trouve souvent présent
dans le voisinage de ces thèmes.
Deux discours principaux se dégagent donc :
- l'un fait d'une forte métacommunication, lié à
une banalisation des propos,
- l'autre plus "activiste", orienté vers un but,
la rencontre en face à. face,On peut en discerner un troisième,
plus impersonnel et plus anonyme, où l'évocation des
loisirs, de la vie quotidienne et de la solitude vient confirmer le
besoin de parler qui s'exprime dans l'utilisation du 07.
La faible implication personnelle que révèlent ces thèmes
est également indicatrice d'une des utilisations de la Téléconvivialité,
celle qui préfère l'échange de propos anodins
aux rencontres hors réseau.
Peut-on, de ces trois tendances, déduire des usages sociaux
de la Téléconvivialité et leur appliquer une
fonction ?
On serait tenté de voir dans le second type de discours dominant
une simple substitution à des conduites sociales repérables
en d'autres lieux. Le premier type et le dernier seraient en revanche
l'esquisse d'une nouvelle sociabilité, à distance, épurée
de toute rencontre, une disjonction radicale de l'être physique
et de son discours.Cette première partition n'est qu'une hypothèse
: rien n'indique en effet que les choses en resteront la.
L'échange social qui s'élabore sur la Téléconvivialité
ne permet qu'à titre provisoire d'isoler les rencontres physiques
de celles du réseau : et si, par reversion, ia rencontre s'absorbait
d'abord dans l'échange Téiéconvivialité
?
Il y a en effet des signes évidents de l'émergence d'une
nouvelle relation interindividueile qui fonctionnerait "au collectif",
"au social", déterritorialisée. La dynamique
des échanges en témoigne. Un nouveau rapport à
l'espace pourrait bien naître de ce nouvel échange.
Dynamique du groupe
On ne peut distinguer le discours de son auteur qu'arbitrairement.
La dynamique de la conversation, c'est donc la dynamique du groupe
qui ia fait. Or, le groupe téléconvivial se définit
par plusieurs critères : c'est un groupe lié par la
parole et un groupe à distance par définition ; il est
éphémère dans la durée et se recompose
au hasard des rencontres ou à la faveur d'un rendez- vous en
face à face. Les mécanismes qui président à
son élaboration et à son maintien empruntent des traits
aux sociétés orales, aux sociétés secrètes
ou à la société des média.
L'identification des téléconvives Les
surnoms et le tutoiement
Dès les premiers jours, les utilisateurs de la Téléconvivialité
se sont désignés par des surnoms. Ces désignations
ont été surtout le fait des téléconvives
eux-mêmes; d'une manière générale, elles
sont choisies en fonction de l'humeur du moment, de l'actualité,
d'un prénom passe-partout ou d'une trouvaille linguistique.
Cette pratique renvoie à deux processus sociologiques : l'identification
dans les sociétés orales traditionnelles, et celle en
vigueur dans les sociétés secrètes. Dans le premier
cas, le surnom est attribué à un individu pour le particulariser
au sein de son groupe d'appartenance; tout y est connu par tous puisque
les sociétés traditionnelles sont regies par une interconnaissance
très forte. Le surnom a un rôle de différenciateur
discret : il est ce qui marque la position individuelle dans un groupe
où les liens sont forts. Dans l'autre cas, le surnom est attribué
à un membre d'un groupe de référence, élu
par un sujet pour l'idéal ou l'action qu'il poursuit.
Dans ces groupes, l'individu tend à se séparer de son
personnage social, à abandonner parfois sa personnalité
au profit d'une symbiose avec les autres membres du groupe. Dans ce
cas, le surnom a un rôle fusionnel. La différence réside
dans la possibilité plus grande de changer de personnage et
de surnom, donc de masques, gratuitement dans le cas de la Téléconvivialité,
dans la mesure où il n'y a engagement que dans une parole et
non dans des actes ou des intérêts communs. Ces fluctuations
sont cependant plus ou moins tolérées, puisque les autres
interlocuteurs exercent un contrôle sur l'identité de
l'appelant, en faisant référence à une conversation
où le surnom a déjà été employé.
L'identification sur la Téiéconvivialité joue
sur une opposition : échanger /garder son nom, être mobile
ou se fixer.
Le tutoiement L'attribution des surnoms va de pair
avec un tutoiement égalitariste, qui s'est également
imposé dès le début. Il y a pourtant un pas à
franchir avantd'affirmer que par ces deux procédés,
les relations sur le réseau deviennent égaiitaires.
L'anonymat et l'égalité Sur le réseau,
les inégalités sociales n'ont plus que le seul registre
linguistique pour s'exprimer. En outre, il est difficile d'attribuer
un âge précis a chaque interlocuteur, à l'exception
des enfants. Le seul élément différenciateur,
pertinent à l'audition, c'est le sexe. Cette différenciation
sexuelle apparaît comme un point de cristallisation, et réintroduit
en force la relation sociale traditionnelle entre les hommes et les
femmes. Elle utilise tous les effets en vigueur dans la société
pour exacerber les images ou les rôles attribués à
l'un et à l'autre sexe. Les hommes dominent, draguent, insultent;
les femmes sont moins nombreuses, recherchées et temporisent.
Cette forte polarisation n'est pas sans rapport avec les pratiques
d'inversion sociale qui apparaissent dans les "Bals des Veuves".
On peut considérer que dans ce type de rencontre, les femmes
prennent à l'occasion leur revanche, en reproduisant la même
logique de domination.
L'intégration des téléconvives Les
permanents
La fréquentation de la Téléconvivialité
différencie les utilisateurs : les habitués occupent
les lignes plusieurs heures par jour et plusieurs jours par semaine,
malgré l'importance de leur facture téléphonique.
Parmi les habitués, se recrutent les "leaders", qui
jouent un rôle polyvalent : mémoires du réseau,
ils connaissent de nombreux teléconvives, informent et accueillent
les autres, animent ou focalisent les conversations. Le rôle
de ces leaders est essentiel : en l'absence d'animateurs mis en place
par l'administration des Télécommunications, leur affirmation
plus ou moins rapide dépend de leur personnalité, cette
fois-ci plus réelle qu'inventée, car ils continuent
souvent hors réseau à être le ferment des rencontres.
L'on constate alors que plus un téléconvive s'affirme
comme leader, moins il peut assumer des personnages variés.Intégration
ou exclusion des téléconvivesLes leaders et les téléconvives
réguliers respectent généralement les rituels
en vigueur sur le réseau, rituels d'identification, de référenciation,
de répétition. Les nouveaux arrivants semblent devoir
se plier à cette phase d'intégration qui se présente
un peu comme une initiation : qui sont-ils, comment se nom ment- ils
? Il faut remarquer que l'intégration des femmes se réalise
rapidement et de façon totale, alors que celle des hommes prend
plus de temps et n'est souvent "que partielle : les voix masculines
se trouvent confrontées la plupart du temps à d'autres
voix masculines, "hégémoniques" sur la ligne
elles recherchent une participation plus active à la conversation,
surtout quand une présence féminine se manifeste.
Une compétition s'instaure et accroît l'intensité
de l'échange. Une gradation existe dans l'intégration
des nouveaux arrivants : l'arrivée d'un nouvel interlocuteur,
toujours signalé par un signal sonore, favorise à tout
le moins, un moment de flottement (propice, comme nous l'avons vu
plus haut, à l'infléchissement de la conversation en
cours) , cette arrivée peut rompre l'échange, car elle
est généralement accompagnée d'une forte perturbation
sonore, allant jusqu'aux injures. De la part du groupe dans lequel
tente de s'introduire le perturbateur émanent des tentatives
d'exclusion très nettes qui traduisent une véritable
solidarité : "quand il y en a qui insultent, on se met
à deux ou trois, on l'écoute, on se le renvoie de l'un
à l'autre ou alors on raccroche tous ensemble et il se retrouve
tout seul; ça lui sert plus à rien de nous insulter.
On rappelle un peu après et souvent il n'y est plus".
L'égalité semble loin d'être le souci majeur des
téléconvives, plus occupés à multiplier
les partages, à marquer les différences.
La Téléconvivialité : une société
occulte conformiste
La micro-société qui se développe dans
la logique de l'identification des téléconvives ou de
leur intégration ressemble à une société
cachée. Techniquement, le dispositif instaure un cloisonnement
qui reproduit l'étanchéité existant souvent entre
les cellules de base d'une organisation secrète. Les groupes
qui animent la Téléconvivialité vont donc déployer
sur le réseau et hors du reseau un discours et un comportement
en rupture avec les propos ou les conduites socialement acceptables.
Comme pour les autres groupements de même nature, on avoue avec
réticence qu'on en fait partie, et l'on prétend généralement
à une participation restreinte. C'est dans les conséquences
de l'anonymat téléconvivial que se trouvent les traits
les plus intéressants de cette occultation sociale : en effet,
les masques qui dissimulent les individus favorisent une rupture avec
l'identité sociale de chacun et permettent l'expression des
individualités.Cette expression du "moi" gomme au
maximum les différences sociales l'évitement induit
par la configuration technique du médium, empêche les
conflits et sert une tolérance réciproque entre téléconvives.
La communication fusionnelle de telles associations s'accompagne d'une
volonté de nier les rivalités; à cet égard,
les téiéconvives qui acceptent les autres téléconvives
du réseau admettent plus leur imaginaire que leurs personnes
réelles; cela diminue bien sûr les risques de heurt et
fait partie du jeu téléconvivial. Cette absence de conflit
se retrouve d'ailleurs dans l'atopie de la société téléconviviaie.
Dans le rêve des utopistes, la cité idéale est
souvent une île qui ne connaît pas de tensions entre groupes
sociaux. Le fonctionnement même de la Téléconvivialité,
abolissant distances et clivages sociaux, s'approche remarquablement
de cet idéal. Les duels verbaux qui se produisent sont par
contre une exaltation de la virilité, qui prend appui sur la
seule différence pertinente, la différence entre hommes
et femmes. Le langage viril qui domine est un discours en marge d'une
société moins prégnante que de coutume. Il fait
une large place au désir et a la sexualité refoules
habituellement dans le face à face. Ce discours à la
marge est pourtant hyperconformiste puisque l'exaltation du rôle
masculin s'y déploie au travers de tous les modes de discours
ouverts aux hommes, de la plaisanterie obscène aux calembours
grossiers.
Comme dans les sociétés secrètes, le discours
sur la Téléconvivialité est marginal; en dehors
du réseau également, les occasions de rencontres relèvent
d'une autre marginalité : celle de la fête et du loisir.
Hors de la vie en société, donc apparemment loin des
contraintes, l'individu se détend; des rendez-vous au bistrot
aux randonnées pédestres et aux Bais des Veuves, la
téléconvive n'investit de l'espace public que les aires
où peut se poursuivre une communication informelle, qui souvent
reste dans l'anonymat, comme dans les boîtes de nuit ou les
cafétérias de supermarchés. Les sorties "dans
la nature" prolongent cette rupture d'avec une société
aux rythmes et aux cadres insupportables.
Cette marginalité même n'est pourtant pas une contestation
fondamentale de la société : tournés vers les
jeux et les loisirs, les téléconvives ne s'investissent
pas dans une action contestataire organisée, sanctionnée
par la participation à une vie associative. Ils se limitent,
au contraire, dans des conduites que l'on peut qualifier "d'alternance
sociale à fonction intégrative". La microsociété
téléconviviale est donc un groupe occulte qui, sous
une marginalité du discours ou des conduites, sert en fait
une profonde "normalité" sociale. Les discours des
adeptes de cette forme de communication vont même jusqu'à
exalter le service de la collectivité et l'aide aux individus
en détresse morale, physique ou financière dynamique
de l'échange.
Plusieurs caractéristique techniques du support influent sur
la forme autant que sur le contenu de l'échange : Tout d'abord,
la Téléconvivialité est un dispositif ouvert
: tout mont-pelliérain peut faire le numéro, prendre
l'écoute et la parole, dans la limite des lignes disponibles,
autant de temps qu'il le désire. Ensuite, la Téléconvivialité
est un dispositif interactif : l'échange dépend des
utilisateurs eux-mêmes; aucun animateur officiel ou officieux
ne règle les thèmes de conversation ou les tours de
parole. La communication relève plus au départ d'un
ajustement réciproque d'expressions individuelles, provisoirement
ou durablement anonymes. En outre, la Téléconvivialité
est un dispositif opaque; l'absence de visualisation autorise le maintien
de l'anonymat et facilite l'effacement des caractéristiques
physiques ou sociales, en exacerbant les différences sexuelles.
Enfin, la Téléconvivialité est un dispositif
sonore : le support téléphonique favorise la pleine
utilisation de toutes les ressources phoniques de la communication.
Toute la panoplie des variations d'intensité dans l'échange
est utilisée, des chuchotements qui accompagnent les confidences
aux cris qui renforcent les insultes. Ce jeu sonore semble d'ailleurs
indispensable à une communication où l'appui des paralangages
visuels fait défaut. Ces renforts du discours en face à
face sont ici contenus dans l'échange entendu comme dans les
langues tonales où la modulation donne une signification différente
au son; certaines cérémonies dans les sociétés
africaines, où l'usage extrêmement complexe du tambour
permet la reconstitution de phrases entières, présentent
à ce niveau formel quelques lointaines ressemblances, avec
l'expression des individus sur la Téléconvivialité.
Corollaire du précédent trait, la Téléconvivialité
est un médium de parole. L'oralité s'y développe
à loisir, avec ses nécessités de redondance,
de répétition, accentuées par le renouvellement
incessant des interlocuteurs : toutes les formes de l'échange
parlé s'y retrouvent, du soliloque à la conversation
précieuse, de la plaisanterie à l'appel pathétique,
du brouillage total hégémonique et solitaire aux duels
verbaux. Les allées et venues provoquent une rupture de conversation
favorable à un nouveau tour de parole; l'identification des
interlocuteurs et tous les thèmes relatifs à l'utilisation
même du support semblent liés à un rituel profond
de réfection périodique du groupe social particulièrement
instable des téléconvives. Les thèmes de conversation
ont manifestement un contenu qui leur donne cette hétérogénéité,
cette mobilité propre aux échanges superficiels. De
manière latente, ils s'ordonnent pourtant sur les deux versants
d'une opposition qui souligne bien l'enjeu véritable de cette
communication médiatée. La vérification
du lien social
Les thèmes d'un certain nombre de conversations semblent
ressortir du besoin de vérifier le lien social. Nous avons
vu que le contenu fait largement place à deux champs de communication
qui s'interpénétrent fortement, récits de la
vie quotidienne assimilables aux conversation informelles du bistrot,
au travail, entre amis : discours de la banalité mais revalorisant
la palabre, le besoin de parler pour raconter, pour dire ce qui se
passe, ce qui était présent dans la communication de
la société d'interconnaissance mais aussi pour se raconter,
pour dire ce qu'on pense, ce qu'on sent, pratique qui caractérise
plutôt la société de masse. Discours conformiste
dans sa marginalité car discours de lieux communs et d'anecdotes
ne méritant même pas le statut de fait divers au regard
de la communication organisée, discours de classes moyennes
à travers le consensus constamment recherché en dépit
de perturbations de tous ordres ?
Les confidences publiques
L'opacité du contact téléphonique paraît
catalyser le dévoilement des pensées secrètes,
à l'égal de la confession ou même de la cure psychanalytique.
La difference réside ici dans le fait que les téléconvives
semblent d'autant plus portés aux confidences sur leur vie
personnelle que l'auditoire est important. La notion de. secret est
ainsi partiellement compensée par l'anonymat du même
auditoire; cependant, l'exposé de la vie privée s'apparente
aux dialogues que les auteurs nouent avec le public, niant la situation
théâtrale par le fait même de l'exploiter.La raison
de cette attitude réside sans doute dans le fait que certains
téléconvives manquent de confidents amicaux ou intimes,
comme le souligne cet adepte du réseau : "on ne peut parler
de tous ses problèmes en famille, si on le faisait, cela exploserait".
Cette attitude relève également du travestissement ou
des champs obscènes, répandus dans certaines sociétés
où les conflits s'expriment de cette manière en vue
d'obtenir une catharsis. Dans la mesure où les téléconvives
ne sont plus accrochés à un groupe social où
les tensions interpersonneiles et personnelles se résolvent
en étant jetées sur la place publique dans des formes
ritualisées, ils recourent sur le réseau aux langages
de l'affect, c'est-à-dire à celui du corps, le plus
expressif de la vie des individus. Parlant ainsi aux autres en parlant
de leur propre personne, leur utilisation de la parole leur sert tout
autant de liaison sociale que d'action sur eux-mêmes par la
magie des mots.
La négation du lien social
Ce ne sont pas les thèmes de conversation qui traduisent cette
attitude, mais plutôt les perturbations plus ou moins importantes
qui accompagnent la grande majorité des échanges : à
côté des interpellations qui ponctuent la communication
plutôt que de viser à la rompre, les injures et les insuites
méritent un examen particulier.
Les injures anonymes L'injure est avant tout l'expression
d'une tension individuelle : c'est l'extériorisation, l'expulsion
d'une émotion sans attente de retour; c'est souvent un substitut
à une action manquée, un exutoire à l'impossibilité
d'agir. Dans le cas de la Téléconvivialité, cette
violence est facilitée, d'autant plus que l'anonymat va de
pair avec l'absence de tout contact physique; cette situation libère
l'envie d'injurier de la crainte d'une répression. Niant le
principe de politesse qui régie les modalités des rapports
sociaux, le téléconvive qui injurie coupe la parole
des autres et, tou en réalisant son désir d'action par
la magie de la parole, avoue ainsi son impuissance à agir dans
la société.Le mode d'extériorisation des tensions
individuelles ne se retrouve pas, loin s'en faut, seulement sur la
Téléconvivialité, et les expressions diverses
qu'il prend selon les sociétés éclairent plus
précisément sa fonction. En effet, qu'il s'agisse du
Lobola africain ou de la Passatella italienne, les joutes oratoires
sont souvent une façon d'atteindre un état paroxystique
proche de la rupture provoquée pour faciliter l'intervention
de procédures de reprise sociale. Ces duels verbaux interviennent
également dans un état d'exception pour assumer une
transition difficile vers l'inconnu : la longueur des palabres traduit
une profonde volonté de parvenir à un consensus, sinon
à une conciliation. La comparaison avec d'autres sociétés
permet de poursuivre plus avant cette réinsertion sociologique
d'une parole éclatée dans ces sociétés
: les provocations ou les défis se produisent entre individus
reliés socialement par ce qu'on appelle la parenté à
libre parler ou à plaisanterie. La caractéristique de
ce type de relations est de ne pas s'inscrire dans le système
hiérarchique de la société, mais de se produire
entre individus indépendants socialement et de ce fait dans
la même position; la parenté à plaisanterie existe
également entre pairs de la même classe d'âge.A
certains égards, les téléconvives vivent un peu
la même situation: leur désir de parier s'exerce en dehors
des cadres contraignants de la société. Les injures
soulignent cependant une réalité : celle de la sexualité.
Il est à remarquer en effet, que les insultes fusent le plus
dans les groupes nombreux à dominante masculine et comptant
une présence féminine; or, les injures utilisent, comme
les confidences, le registre affectif, qui relève du "langage
du corps". Un tel langage est donc particulièrement propre
à marquer la seule différence reconnue sur le réseau,
celle qui existe entre hommes et femmes. Entre ces deux formes de
conversations téléconviviales, l'une affirmant la relation
sociale, l'autre la niant, les injures et les confidences présentent
un certain nombre de points communs. En premier lieu, elles alimentent
les images négatives de la Téléconvivialité,
en raison de la forte utilisation qu'elles font du langage du corps,
fortement censuré par ailleurs; or, ce soni ces images qui
rendent présents ces corps, absents de la communication téléphonique.
En second lieu, dans un cas comme dans l'autre, la parole se substitut
à l'action, mais par là-même devient active et
compense l'impossibilité d'agir sur la réalité
extérieure au réseau.
En conclusion, nous pouvons dire des conversations qui se tiennent
sur le réseau qu'elles sont l'expression d'une parole singulière.
Parole masculine, investissant le banal, le quotidien, plutôt
accolé traditionnellement à la parole féminine.
Parole affective, car 1'oralité est liée à l'apprentissage
du langage dans la socialisation; alors que la civilisation de l'écrit
repose sur une mémoire froide, autonome, permettant d'agir
à distance et à échéance, la civilisation
de la parole est liée à l'affectivité, à
l'instantané et repose sur une mémoire vivante, incessamment
reformulée. La différence qu'introduit la Téléconviviaiité,
réside dans le fait que cette parole affective est individuelle.
Parole populaire, car elle utilise un code restreint et nivelant afin
de trouver par le langage des références communes qui
permettent d'assurer un consensus minimum.
Parole triviale, mais le langage distingué n'est-il pas tenu
par les groupes ou les individus qui tiennent à la distinction
et la maintiennent par le vocabulaire, la syntaxe ou le ton ?
Parole libre, car elle ne subit que les contraintes de la technique,
et ne connaît que la censure d'un groupe éphémère
à la recherche d'un accomodement langagier.
Parole égalitaire puisque les distances sociales sont apparemment
absentes. Cependant, il faudrait s'interroger sur ce que signifie
l'instauration d'une parole égalitaire, libre et triviale.
En effet, la parole dans les sociétés orales est très
souvent liée au pouvoir politique : le verbe est l'apanage
des chefs, qui affirment ainsi leur prééminence et usent
de porte-paroles destinés à répercuter les règles
de l'autorité. On peut, alors s'interroger sur le statut et
le destin de cette libre paroie qui scandalise la presse, inquiète
l'Administration des PTT, soucieuse de ne pas fournir de support à
l'immoralité publique, et reste méprisée des
professionnels de la communication savante et organisée...
Les utilisateurs de la téléconvivialité
Le discours de la Téléconvivialité fascine
parce qu'il semble n'avoir ni lieu, ni auteurs, et qu'il est à
la fois insolite et familier. Il faut pourtant savoir de qui ce discours
procède. En effet le développement d'une nouvelle pratique
sociale ne relève pas du hasard; la rencontre d'un médium
et d'acteurs sociaux est rarement une coincidence. On peut, en s'attachant
à la diffusion de l'information sur cet événement
que constitue l'apparition d'un nouveau service, dégager les
forces sociales qui vont déterminer les formes de ce mode de
communication locale.Les éléments d'information qui
vont construire l'image de la Téiéconviviaiité
et les canaux de diffusion qu'ils empruntent permettent d'identifier
l'espace social qui produit les téléconvives actifs.
Les téléconvives potentiels
Bien que la pratique de la Téiéconvivialité
montpelliéraine soit, au départ au moins, résolument
individualiste, il est possible de définir les utilisateurs
par des traits communs; l'appartenance de ces téléconvives
potentiels à un groupe plus large, qui se montre globalement
réceptif,, apparaît nettement dès l'annonce de
l'ouverture d'un service de la Téiéconviviaiité.
Deux approches nous ont permis de définir les contours du groupe
des téléconvives potentiels :
- la réceptivité à l'information sur le 07, en
s'attachant plus particulièrement à l'influence qu'ont
joué les canaux par lesquels cette information a été
diffusée ;
- la représentation du service, qui s'est formé dans
le public, attirant ou repoussant certaines catégories de population.
Les canaux d'information sur la Téiéconvivialité
Durant la phase de démarrage, l'information sur la
Téléconvivialité a emprunté des canaux
très diversifiés. La Direction des Télécommunications
de Montpellier avait adopté le parti d'informer les abonnés
en joignant à leur facture téléphonique un dépliant
publicitaire, et l'ensemble du public par le canal d'une conférence
de presse consacrée aux produits nouveaux de Télécommunications,
largement retransmise par les média locaux.
Enfin, une information non médiatisée a circulé
de bouche à oreille, via les réseaux relationnels montpelliérains
et les informateurs privilégiés : agents des Télécommunications,
personnes aux pratiques relationnelles particulières, sans-filistes,
etc.. .
Ces deux types d'information, l'une institutionnelle émanant
de l'Administration ou de la Presse, l'autre informelle, ont été
diversement efficaces.
Le public, touché par l'information qui émanait de l'Administration,
a touché les catégories où les femmes et les
gens mariés sont fortement représentés, âgés
le plus souvent de 30 à 40 ans. Les membres de ces catégories
sont généralement inactifs ou employés. Leur
arrivée dans le quartier est assez récente et leur habitat
se situe en immeuble collectif de type HLM. La pratique téléphonique
de ces groupes est moyenne à domicile, mais forte au travail.
Par contre, la sensibilité à des informations plus personnalisées
qui transitent par des conversations entre amis ou dans le milieu
professionnel, procède de groupes différents. Comptant
plus d'hommes, plus de célibataires, et des actifs dont les
professions se situent essentiellement dans les catégories
de cadres moyens supérieurs, ou personnel de service, ces groupes
de teléconvives potentiels habitent de longue date dans leur
quartier et utilisent beaucoup le téléphone. A l'intérieur
de ces groupes, de légères différences séparent
les montpelliérains qui puisent leurs informations dans un
réseau amical, qui sont assez jeunes (20 - 29 ans), et vivent
plutôt en habitat individuel, alors que le milieu professionnel
est une formé d'information plus importante pour les 30 - 39
ans ou ceux qui résident dans des immeubles collectifs. Il
va de soi qu'entre le contenu informatif d'un article de journal,
celui d'un dépliant administratif et une nouvelle glissée
en aparté, ou assortie de commentaires divers, la même
réalité passe très différemment. Ainsi,
la référence aux relais institutionnels de l'information
semble plutôt le fait d'un groupe qui se situe un peu en retrait
de la communication locale (tout en y participant peut-être
d'une manière différente) ; par contre, les canaux personnalisés
relèvent davantage de la communication qui se propage entre
individus plus impliqués dans la vie sociale et professionnelle.
Au fil des mois, le succès du service a largement modifié
la diffusion de l'information : la multiplication des articles de
journaux colportant une image plus que contrastée de la Téléconvivialité,
ou l'accroissement du nombre d'utilisateurs du service, ont assuré
au 07 une publicité qui a largement compensé l'absence
de relance de la part de l'Administration. Par consequent, il est
aujourd'hui devenu difficile de cerner, dans l'information du public,
la part respective de chaque canal.
La représentation de la Téléconvivialité
chez les montpelliérains
Selon le canal qu'emprunte l'information sur la Téléconvivialité,
l'image qui se forme dans le public peut être fort différente.
Entre les images choisies par les relais institutionnels ou celles
transmises par des réseaux informels, la présentation
de la Téléconvivialité s'avère chargée
de connotations variées. L'image proposée par le dépliant
envoyé par l'Administration des PTT, qui représente
un Robinson barbu sur son île isolée, ne semble pas avoir
été très déterminante pour les utilisateurs.
Par contre, celles, variées, subjectives, assorties de commentaires
et de témoignages divers, qui se trouvaient dans les conversations,
ont été parmi les plus incitatrices.
Les images du service et leur public
La première image est celle d'un service destiné
aux personnes isolées ou seules, comme un "SOS Amitié"
collectif; la deuxième correspond à un service destiné
à faciliter les rencontres entre amis; la troisième,
à un service de distraction et de loisirs. Une quatrième
se rencontre parfois : la tarification spécifique de la Téléconvivialité
induit dans l'esprit des enquêtes des soupçons à
l'égard de l'Administration, sur les bénéfices
qu'elle compte tirer de l'envie bien humaine de bavarder. Peu fréquente
au début, cette image sera très présente dans
les revendications ultérieures des téléconvives.Un
service anti-solitude Favorisée par l'Administration dans le
choix même du nom (et suggérée par le dépliant
de présentation qui, rappelons-le, représente un naufragé)
reprise par la presse, justifiée à posteriori par certains
utilisateurs qui souhaitent obtenir une étiquette de "bons
samaritains", l'image d'une Téiéconviviaiité
antidote à la solitude a diversement impressionné le
public. Parmi ceux chez qui elle est la plus répandue, nous
trouvons les mont-peliérains qui sont hostiles à la
Téléconvivialité ou qu'elle ne concerne pas.
Cette population, fortement intégrée à Montpellier,
se situe dans des catégories sociales assez diversifiées
: les uns sont de classe moyenne, ayant une faible consommation à
domicile et une pratique téléphonique assez restreinte;
l'usage qu'ils font du téléphone est surtout utilitaire
et le téléphone est rarement pour eux un moyen de relation
sociale. Les autres se recrutent plutôt parmi les cadres supérieurs
ayant au contraire une forte consommation et une pratique téléphonique
très variée. Pour eux, le téléphone n'est
qu'un outil mineur des relations sociales, toujours décrites
comme pleines de densité et de qualité. C'est d'ailleurs
dans cette catégorie de population que nous trouvons le plus
de critiques à l'égard du contenu des conversations.
Un service-distraction
Le côté distraction et passe-temps de l'utilisation de
la Téiéconviviaiité est fréquemment évoqué
par des individus que nous retrouverons peu comme utilisateurs : les
femmes, les commerçants, les personnes âgées...
Cet aspect ludique attire surtout les motpelliérains de fraîche
date, ceux qui ont changé récemment de quartier, plutôt
que ceux qui sont installés depuis longtemps. La consommation
et la pratique téléphoniques n'apparaissent pas discriminante
pour cette image; nous la trouvons présente aussi bien chez
les faibles que chez les forts utilisateurs.
Un service-outil de rencontre et de relation
Cette image relationnelle de la Téiéconviviaiité
attire ceux des montpelliérains parmi lesquels nous rencontrons
le plus de téléconvives : ce sont des hommes jeunes,
célibataires, cadres moyens ou employés, cécemment
arrivés dans un quartier ou un logement résidentiel.
Leur pratique téléphonique extrêmement importante
et diversifiée fait du téléphone un intermédiaire
indispensable de leur vie en société. Avec l'amplification
apportée par la presse, c'est la connotation "drague"
de l'outil de rencontre qui s'est nettement imposée, associée
parfois à l'image anti-solitude au détriment surtout
des aspects ludiques du service.
Les utilisateurs Parmi les personnes qui ont été
rencontrées lors de l'enquête sur la Téléconvivialité,
5% approximativement se sont déclarées utilisatrices
du 07; c'est cette population réduite que nous allons maintenant
décrire en précisant la façon dont elle pratique
le service et les motivations de ses appels. L'identification des
téléconvives Insertion sociale : des hommes jeunes de
la classe moyenne.
Comme il a été dit plus haut, les utilisateurs du réseau
se recrutent massivement parmi les personnes de 20 à 39 ans,
avec une forte hégémonie de la catégorie de 30
à 39 ans. La majorité absolue de cette classe d'âge
sur le réseau est d'autant plus remarquable qu'elle ne représente
qu'un quart de la population de l'agglomération de Montpellier.
Les téléconvives présentent un fort taux de célibat,
par rapport aux non-utilisateurs. Toutefois, parmi les téléconvives,
nous trouvons surtout des gens mariés. Les hommes représentent
70% des réseauteurs, alors que chez les montpelliérains,
la population féminine est nettement plus importante ( 52%
). Enfin, c'est parmi les classes moyennes et les personnels de service
que nous trouvons en majorité les téléconvives;
toutefois, de nombreux inactifs se déclarent également
utilisateurs. Les indicateurs que nous avons retenus suggèrent
donc que la Téiéconvivialité attire plus la part
jeune et masculine de la population montpelliéraine, celle
pour qui la mobilité professionnelle n'est pas toujours possible
et qui se situe provisoirement ou durablement en marge des groupes
sociaux traditionnels. Les téléconvives sont ainsi des
marginaux (ou des novateurs) en matière de communications sociales.Insertion
urbaine : une intégration locale difficile ?
Nous retrouvons les utilisateurs essentiellement dans des secteurs
urbains qui comprennent des immeubles collectifs de type résidentiel;
ce paramètre semble correspondre à des couches sociales
aux revenus plus modestes et dont l'équipement et la pratique
téléphonique sont souvent moins important par foyer.
Il s'agit peut-être également de groupes moins "installés"
dans leur habitat.
Les enquêtes font apparaître entre les téléconvives
et le reste de la population un paradoxe dans l'insertion sociale
: les utilisateurs de la Téléconvivialité semblent,
en effet, proportionnellement plus anciennement montpelliérains
et bien implantés dans leur quartier que les non-utilisateurs;
c'est au niveau de leur permanence dans leur logement que la tendance
s'inverse; une proportion plus importante que parmi les non-utilisateurs
a tendance à changer d'appartement. Au seul regard des indicateurs
d'intégration urbaine retenus dans l'enquête, on peut
faire l'hypothèse que les téléconvives apparaissent
plus implantés à Montpellier, connaissant mieux la ville
et leur quartier, mais que leurs changements plus fréquents
de domicile a eu pour conséquence de réduire leurs relations
de voisinage en modifiant l'espace immédiat au sein duquel
ils vivent et sont connus.Chez les non-utilisateurs, nous trouvons
deux populations :
- ceux qui semblent intégrés fortement dans un espace
de voisinage, et habitent depuis longtemps le même appartement;
- ceux qui sont étrangers à l'espace local : leur arrivée
dans leur quartier ou à Montpellier est récente.
Les recherches sur la mobilité urbaine ont, par ailleurs, mis
en évidence qu'un changement fréquent de domicile est
le propre des couches sociales moyennes, souvent bloquées dans
leur mobilité sociale et professionnelle, qui cherchent par
la modification de leur univers privé ou relationnel une compensation
à l'impossibilité d'agir sur leur devenir social.
Pratique téléphonique des téléconvives
Une majorité d'utilisateurs du 07 sont des abonnés
dont la proportion est de 75%. Au niveau de notre enquête, ils
se caractérisent par une consommation téléphonique
élevée, puisque 83,3% ont un montant de taxes bimestriel
supérieur au coût de l'abonnement (contre 70% chez les
non-utilisateurs). Bien que le lieu de prédilection pour passer
des appels soit le lieu de travail, le domicile vient immédiatement
après.Pour les deux populations, cependant, les motivations
d'appel diffèrent sensiblement : les non-utilisateurs téléphonent
principalement à ieur famille, alors que ce sont les amis qui
sont majoritairement les destinataires des appels des téléconvives,
qui doivent utiliser aussi beaucoup le téléphone à
titre professionnel. Cette pratique téléphonique relativement
importante se confirme comme un comportement permanent, puisque le
nombre d'appels téléphoniques passés la semaine
ou la journée précédant l'enquête est toujours
plus élevé chez les téiéconvives que chez
les autres enquêtes.
La pratique de la Téléconvivialité
Lors des enquêtes effectuées à Montpellier,
les montpeiliérains qui ont avoué appeler le 07 ont
donné un certain nombre de précisions sur leur comportement
téléconvivial : toutefois, les précisions apportées
ont souvent été bien en -deçà de la pratique
du réseau telle que nous avons pu la mesurer grâce aux
factures téléphoniques ou au régime des appels
aux numéros de Téléconvivialité. Il faut
, semble- t-il, attribuer cette différence à l'effet
de réserve que nous soulignions plus haut. Cet effet joue encore
plus pour les femmes que pour les hommes; il correspond certes à
une pratique moins importante, mais il peut signifier que les femmes
avouent plus difficilement leur participation au réseau. Est-ce
en raison de toutes les connotations que celle-ci implique ?
Usage avoué de la Téléconvivialité
Le premier appel . Le premier appel a pratiquement toujours
lieu au moment d'une conversation, ce qui a favorisé l'utilisation
faite du 07. L'intérêt et la curiosité du néophyte
se sont éveillés à la faveur de cette première
écoute, et l'incitent à renouveler son appel.Vers un
usage habituel. Le nombre d'appels que les utilisateurs signalent
est assez faible; la majorité se situe à moins d'un
appel par semaine, autant pour les 20 - 39 ans que pour la majorité
des hommes et des femmes qui font le 07. Les téiéconvives
masculins avouent toutefois une plus grande fréquence d'appels
que les femmes. La régularité de leurs appels n'est
reconnue que par une moitié des téléconvives
enquêtes; là encore, les femmes se situent dans la frange
la moins pratiquante.
Les heurs préférentielles d'appel se situent de 18 à
22 heures. Cette préférence est plus notable pour les
femmes qui évoquent aussi l'après-midi ( 14 - 18 h )
comme moment privilégié. Les hommes appellent surtout
à partir de 14 heurs et parfois jusqu'à fort tard dans
la nuit; ce sont eux également qui appellent le matin.
L'écoute de la Téléconvivialité
Malgré une utilisation parfois importante, révélée
par la connaissance d'un certain nombre d'habitués, la plupart
des téiéconvives trouvent les conversations peu variées.
C'est une opinion plus répandue chez les femmes que chez les
hommes qui, en raison de leur plus grande pratique, semblent avoir
l'occasion d'assister à des échanges plus diversifiés.
Les conversations qu'ils citent de préférence sont courtes;
le nombre de participants oscille entre 4 et 6. La plupart des téléconvives
déclarent y participer très activement.
La mesure de la pratique des téléconvives
Elle est approchée par la consommation téléphonique
des utilisateurs: la plupart des téléconvives ont vu
augmenter leur facture téléphonique dans des proportions
allant de 20 à 200%; de nombreuses anecdotes ont fait le tour
de Montpellier sur les rapports qui se sont noués à
cette occasion avec l'Administration des Télécommunications;
celle-ci s'est parfois laissée fléchir jusqu'à
rétablir les lignes quand les cas étaient considérés
comme sociaux. Dans le même registre, les difficultés
de Daniel de la Paillade, nommé "Coquelicot" sur
le réseau, ont ému les montpelliérains; une quête
parmi les téléconvives a permis de payer ses communications.
La plupart du temps cependant, l'Administration est restée
sourde aux doléances des utilisateurs qui, pour continuer à
téléphoner au 07, ont déplacé leur lieu
d'appel de leur domicile à leur travail. Il en résulte
que la consommation téléphonique individuelle ne reflète
que partiellement la fréquentation du réseau; ce sont
les mesures de trafic sur celui-ci qui permettent l'appréciation
quantitative de l'utilisation.
Les acteurs de la communication téléconviviale
Les groupes les plus nombreux, les participants les plus actifs consacrent
la prédominance de l'élément masculin. Bien que
les femmes soient présentes et qu'elles soient particulièrement
bien intégrées aux conversations, voire invitées
à les prolonger hors réseau, il faut reconnaître
l'importance de l'utilisation masculine.
Les utilisateurs permanents La plupart des téléconvives
interviewés citent volontiers les sujets de conversation qui
les intéressent le plus. Ils reconnaissent en majorité
avoir abordé les sujets les plus intimes, y compris leur vie
sexuelle personnelle. Ils citent également volontiers les plaisanteries
entendues ou dites par eux, font très souvent référence
à des conversations sérieuses où ils sont intervenus
pour donner leur opinion, apporter leur aide ou conseiller un interlocuteur.
Les leaders se recrutent parmi ceux qui ont une relative facilité
d'appel à domicile ou au travail; leur rôle se confond
souvent avec celui d'un animateur de conversation, réglant
les tours de parole, incitant à la confidence.
Nous pouvons définir quelques autres types d'utilisateurs.
A côté des "exhibitionnistes" qui abordent
sans pudeur les sujets les plus intimes, "pourquoi pas après
tout, on peut pas connaître tous nos interlocuteurs", nous
trouvons la catégorie des "philanthropes" qui téléphonent
au 07 pour prodiguer des conseils et venir en aide à l'humanité
souffrante. Il n'est pas exclu que la présence de l'enquêteur
entraîne une telle justification. Il n'en demeure pas moins
que cette ambivalence est présente à des degrés
variés chez les utilisateurs que nous avons rencontrés.
Le développement des rencontres en face à face n'est
pas non plus indifférent au développement de ce rôle
de guide et de conseiller.
Les motivations d'appel
Sur la ligne, les téléconvives donnent généralement
le motif de leur appel : la plupart avancent des appels de curiosité,
mais nombreux sont ceux qui avouent faire le 07 pour parler ou pour
retrouver un interlocuteur connu mais dont on n'a pas la certitude
qu'il appelle au moment attendu. Plus rares sont les téléconvives
qui avouent appeler par habitude, par ennui, ou pour s'informer. A
l'exception de ceux qui se reconnaissent, continuent une conversation
déjà engagée, évoquent des interlocuteurs
absents, trahissant une grande pratique du réseau, les motifs
clairement exprimés font référence à une
pratique plus occasionnelle. Les dénégations des autres
participants du style :' "non, on t'a reconnu, tu a appelé
tout à l'heure". ..se heurtent à l'obscurité
téléphonique et à la liberté pour les
téléconvives d'endosser une identité nouvelle
à la faveur de la rencontre d'un groupe nouveau. Nous avons
vu que seuls les "animateurs", dont la voix est repérée
par les participants, ne peuvent pas varier les personnages que leur
voix permet de représenter.
Nous pouvons résumer les motivations d'appel aux traits suivants
:
* battrait pour la palabre, pour le simple fait de parler, pour se
raconter; cette métacommunication, fortement liée à
l'utilisation du support technique, coïncide avec une population
essentiellement masculine.
Le bavardage étant socialement plutôt associé
à la société féminine, on est en droit
de penser que cette attribution pèse à de nombreux hommes
qui voient dans la Téléconvivialité la possibilité
de satisfaire ce besoin.
* le développement d'une hyperrelationnalité : les téléconvives
rencontrés sont des individus qui ont essayé de nombreux
moyens d'entrer en communication avec leurs semblables. Leur travail
les pousse souvent à exercer une mise en relation (c'est le
cas des standardistes) ; s'autres avouent une grande pratique des
radio-amateurs, la fréquentation de clubs de rencontres, la
recherche de groupuscules "dans le vent" ou occultes. La
quête continue de ces formes de sociabilité les a tout
naturellement attirés vers la Téléconvivialité.
* la difficulté de trouver des confidents dans l'environnement
proche: liée assez fortement à la précédente
motivation, la recherche de confidents, de personnes à qui
parler de soi, met en évidence les carences du cercle intime;
de nombreux téléconvives font allusion à une
situation de solitude plus personnelle que sociale puisque certains
sont mariés et ont des enfants.
L'intérêt de la Téléconvivialité
réside en un acceuil qui comporte peu de jugements ou de rejets
moraux. Par ailleurs, la diversité des personnages que jouent
de nombreux téléconvives leur permet de développer
au maximum cet appétit de relations, ce jeu de rapports sociaux
où rien n'est rigide, où le rôle que l'on endosse
varie considérablement selon le public.
Les téléconvives hors téléconvivialité
: les rencontres en face a face
Certains téléconvives ne se rencontrent pas : ils souffrent
d'inhibitions physiques et n'ont pas envie de jouer le jeu du 07 plus
avant; ou bien ils souhaitent plutôt préserver leur espace
de liberté individuelle en maintenant à distance leur
convivialité téléphonique; toutefois, beaucoup
d'utilisateurs ont franchi le pas, en sélectionnant les gens
à la voix, au vocabulaire et à la tenue de la conversation,
ou plus simplement pour "voir".Les rencontresAu préalable,
un rituel est souvent respecté. Il va de l'échange des
numéros individuels aux renseignements obtenus directement
sur les interlocuteurs qui permettent d'anticiper le contact et sa
suite. Ce rituel passe par le respect de questions concernant autant
les intéressés eux-mêmes que les adeptes du réseau
qu'ils connaissent ou dont ils sont connus. Le face à face
rend indispensable l'ajustement entre une voix et un physique; l'une
des premières rencontres de Jackie, figure du réseau,
et de Napoléon, illustre assez bien cet ajustement : ils découvrent
qu'ils habitent la même résidence. Après plusieurs
conversations téléconviviales, décision est prise
de se rencontrer:
- Jackie : "Ah : c'est vous ?"
- Napoléon : "Tu ne me tutoies plus ?"
Dans le temps de ce dialogue, arrivent trois voitures dont sortent
des téléconvives; les questions fusent :
- "C'est vous, Jackie ?"
- "C'est vous, Napoléon ?"(Eclats de rire) et on
assiste alors à une oscillation entre personnages du réseau
et du réel, entre le vous et le tu, entre se connaître
et se découvrir, pendant tout le temps que prend le processus
d'identification d'un téiéconvive à travers la
réalité d'un individu.
Précédant et complétant les rencontres,
les carnets d'adresses se remplissent rapidement de numéros
de téléphones identifiés qui permettent de s'appeler
"entre soi" pour payer moins cher et surtout s'abriter des
"oreilles" qui traînent sur la ligne.
Les points de rencontre
La plupart du temps, les points de rencontre sont extérieurs
à la sphère privée et identifiable, comme si
dans la rencontre, le téléconvive consentait a faire
rejoindre la voix et le physique sans pour autant consentir à
révéler son personnage social .La plupart des rencontres
se font dans les bistrots qui deviennent points de ralliement, comme
le Lafayette, proche du central où est installé le dispositif
de Téléconvivialité. Les cafétérias
de supermarchés ou de centres commerciaux servent également
de points de ralliement; mais, d'une façon générale,
les groupes se déplacent de lieux en lieux, marquant de leur
sociabilité le territoire montpelliérain du loisir informel.
Les rencontres organisées : les "Bals des Veuves"
II s'est agit au départ de "pots", puis de repas
ayant lieu souvent dans des cafétérias de centres commerciaux,
où le bruit, le mouvement et la foule recréent l'atmosphère
du réseau. Des randonnées, des pique-niques ont suivi,
mais la plus spectaculaire des rencontres demeure le "Bal des
Veuves". Venant de Lorraine. Un groupe de téléconvives
a loué, au début de 1980, une salle du casino de la
Grande-Motte et a organisé à plusieurs reprises des
bals, où les femmes se devaient d'inviter les hommes, les danseurs
étant masqués : ce sont les "Bals des Veuves",
restés fameux à Montpellier. Cette pratique, malgré
quelques résurgences à la fin de 1980, semble avoir
fait la place à des soirées organisées par des
groupes éclatés.
L'Amicale du Réseau
Plusieurs téléconvives ont décidé de choisir
le Lafayette comme point de départ d'une revendication à
l'égard des Télécommunications, celle d'une baisse
du tarif des communications. D'autres revendications, comme l'extension
du service à la région ou la connaissance des rapports
de l' IDA TE, ont fait l'objet de pétitions recueillant un
certain nombre de signatures.Toutefois, la plupart de ces initiatives
sont tombées assez rapidement et ne se poursuivent qu'épisodiquement
par des rencontres ou l'organisation de soirées. Les téléconvives,
malgré les efforts désespérés de la présidente
de l'Amicale, Eve, ne se décident pas encore à devenir
des revendicatifs. Leurs motivations d'appels et leur pratique du
07 ne semblent pas compatibles avec une attitude de protestation sociale.
Même si certains souhaitent fermement des modifications, ils
n'ont pas encore franchi le pas de la lutte organisée.
Pour conclure ce chapitre, nous pouvons donc dire que les téléconvives
se recrutent de façon préférentielle chez les
hommes d'âge moyen, vivant dans un milieu qui a assuré
souvent l'information sur le service. C'est l'image "outil de
relation" de celui-ci qui attire le plus le public : comme dès
le départ, une réputation de réseau de rencontres
a été affectée au 07, les groupes les plus [marqués
par l'image de "SOS Amitiés" collectif ont été
écartés; parmi ceux-ci ífigurent les femmes,
déjà peu enclines socialement à tenir des propos
de corps fde garde, ou moins utilisatrices du téléphone.
Ainsi, loin de dénicher le solitaire et l'isolé, vivant
en HLM comme sur son île déserte, la Téléconviviaiité
a plutôt contribué à accroître le réseau
relationnel d'individus déjà très mobiles, mais
qui n'investissent pas particulièrement leur espace de voisinage.
Le principe du dispositif est de se prêter justement à
des possibilités assez grandes en matière de communication;
il convient tout de même mieux à des individus qui ont
l'habitude de nouer des relations par téléphone; à
Montpellier, tout cela provoque; une utilisation dominée par
la population masculine, qui aime parler, avec l'idée d'accroître
ainsi non seulement son réseau de relations, mais aussi ses
propres capacités de représentation sociale.
Après quelques mois, l'existence du réseau est donc
sortie de ses prémices techniques, et a donné lieu à
la constitution de groupes sociaux. Les ;rencontres se sont d'abord
effectuées dans le cadre de l'activité de distraction
et de loisir. Par la suite, l'organisation de randonnées, de
sorties, de pique-niques, puis d'une série de soirées,
les "Bals des Veuves", a contribué définitivement
à installer à côté des groupes téléconviviaux
des embryons de groupes sociaux.
sommaire
Témoignages lus sur le site Le
Blog du Réseauteur http://le-reseauteur.overblog.com
Publié le 17 Novembre 2012 par Le Réseauteur
Jai découvert le « réseau
» en 1972 grâce à un ami de la Citizen Band
qui, un jour, avait appelé lhorloge parlante et
entendait une multitude de personnes échanger leur numéro
de téléphone! Je me suis donc connecté
au réseau et je l'ai pratiqué des années
72 jusquaux années 80. Durant cette période,
j'ai employé différents pseudos, "Tokyo Univers"
puis "Le Mal Aimé" (en référence
à la chanson de Claude François, n° 1 au hit
parade de l'époque) et enfin "Mouche à Boeuf"
allusion à la chanson "La Mouche" de Michel
Polnareff.
Comme je l'ai indiqué précédemment, pour
être mieux entendu par ses correspondants, certains "réseauteurs"
remplaçaient la pastille charbon du combiné téléphonique
d'origine par une pastille optionnelle LEM DU43. Cette pastille
avait la particularité d'être composée d'un
micro dynamique suivit d'un petit préamplificateur. Cela
permettait d'avoir une voix amplifié, moins nasillarde
et dominante par rapport aux autres voix. Pour ma part, dés
le départ, jai fait la différence envers
les autres utilisateurs en construisant un amplificateur spécifique.
Bricolant lélectronique et passionné, à
l'époque, par la sonorisation et la hifi, jai raccordé
sur ma ligne téléphonique un amplificateur d'une
puissance de 10 W avec transformateur dimpédance
600 ohms.
Le poste téléphonique servait uniquement à
composer le numéro. Ma réception était
également amplifiée et filtrée par un filtre
audio de ma fabrication, destiné à limiter les
divers craquements et à renforcer les voix. Pour me différencier
des autres utilisateurs, javais aussi raccordé
à lampli, un micro cardioïde ainsi quune
chambre de réverbération et une chambre déchos.
Pour éviter leffet Larsen, je fonctionnais, comme
avec un talkie-walkie en semi-duplex, lampli étant
commandé par un relayage permettant le « Push to
Talk ».
Certains passionnés du réseau, trouvant ce système
très efficace, me demandèrent de leur fabriquer
ce type amplificateur. Jai ainsi vendu plusieurs dizaines
damplis, en version simplifiée, 2W, alimenté
avec 3 piles de 4,5V, le tout dans un petit boitier. Un bon
moyen pour un jeune étudiant, passionné d'électronique,
de se faire de largent de poche !
Jai pratiqué le "réso", de façon
épisodique pendant quelques années et jy
ai rencontré des personnes de tous milieux sociaux et
de toutes professions : Étudiantes, professions libérales,
employées, commerçantes, artistes, etc.... Toutes
les couches de la société y étaient représentées
et je garde, outre les nombreuses conquêtes féminines,
un très bon souvenir des quelques personnalités
atypiques et marginales que j'ai eu le plaisir de fréquenter.
Une excellente expérience pour un jeune parisien profitant
de la grande liberté des années 70 !
sommaire
-----------------------------------------------------------------------------------------------------------
Dans Rencontre au troisième
bip, Nolwenn Fournier raconte lhistoire de ces lignes
de lamour héritées de la Résistance,
utilisées dans les années 1970. Documenté
et habité.
À la fin des années 1970, Roland a 27 ans. Il
sort dun divorce difficile et cherche à faire des
rencontres. Un soir, alors quil compose le numéro
dun ami sur le cadran de son téléphone,
il se trompe dun chiffre. Entre chaque tonalité,
il entend de drôles de voix. Des gens séchangent
des numéros codés, dautres bavardent
À son tour il se met à parler, et on lui répond.
Par la magie du hasard, il vient de découvrir le Réso.
Un mystérieux réseau social téléphonique
souterrain, principalement utilisé pour draguer par combiné
interposé dans les années 1970 et 1980, quand
Tinder, Grindr et les téléphones portables nexistaient
pas encore. Cette histoire, passionnante, il la raconte au micro
de sa fille journaliste Nolwenn Fournier dans Rencontre au troisième
bip, un formidable podcast de Lexpérience, sur
France Culture.
À mi-chemin entre le documentaire et la fiction, cette
création sonore léchée nous entraîne
dans un univers étrange, joliment désuet. Ça
sonne. Ça grésille. On entend les voix de Cléopâtre,
Cerise ou encore du Mal-Aimé (« en référence
à cette chanson de Claude François quon
entendait en 1975 »). « Cétait la découverte
dune terra incognita pour moi, alors jai utilisé
des prénoms comme Ulysse », se souvient Roland,
avant de détailler le fonctionnement du Réso.
Dans les années 1939-1945, pendant lOccupation,
les résistants des PTT (Postes, télégraphes
et téléphones) avaient trafiqué des lignes
téléphoniques pour communiquer hors de portée
des radars.
Ces fameuses lignes non attribuées ont perduré
et les gens se refilaient leur numéro en douce, pour
converser gratuitement, à deux comme à cinq. «
Le but était de se rencontrer, alors cétait
assez tourné vers le sexe. Les murs étaient
moins libres quaujourdhui donc cétait
très marginal », explique Jean-Marc, fidèle
du Réso de 1972 à 1981. Pour que subsiste le souvenir
de cette époque disparue, il la consignée
dans un blog qui a été dune aide précieuse
à Nolwenn Fournier. « Il ny a aucune archive
», déplore celle qui a cherché des «
résoteurs » jusque dans des Ehpad parisiens, en
vain. Aux récits des deux hommes sajoutent des
lectures de billets de blog qui laissent imaginer sans mal laspect
fascinant, onirique et même addictif du pionnier des réseaux
sociaux français.
Source de larticle : https://www.telerama.fr/radio/podcast-rencontre-au-troisieme-bip,-la-ligne-de-lamour,n6515807.php
sommaire
-----------------------------------------------------------------------------------------------------------
Témoignage version PTT Publié le 15 Novembre 2012
par Le Réseauteur
Bravo pour votre blog. Je vais vous raconter
les 2 témoignages de deux confrères de France
Telecom qui sétaient confiés un jour à
moi sur le fameux Réseautage.....
Tout dabord, pour fixer le cadre, techniquement parlant,
le Réseautage tel quil a été pratiqué
vers 1970 et 80 (et même avant) nétait effectivement
possible quà lépoque des commutateurs
téléphoniques de type rotatif et de type crossbar,
véhiculant les conversations téléphoniques
sous forme de courants électriques analogique au travers
de réseaux de connexion de commutateurs entièrement
électromécaniques, et propices effectivement à
tous les couplages possibles.
Avec la numérisation complète du réseau
téléphonique (Electroniques Temporels) ce système
occulte ne pouvait techniquement plus fonctionner. Ainsi, à
Paris, la mise à la casse dune proportion critique
et suffisante de Rotary 7A1, 7B1 et de Pentaconta et autres
CP400 sonna le glas du Réseau occulte vers 1980-82
Appelé moi-même à lactivité
en 1995 à Paris, cest en 1996 que ce cadre que
lon surnommait JAx, Chef dun commutateur Télex
de Paris (depuis à la retraite), me conta cette histoire,
me décrivant effectivement ces gens qui téléphonaient
sur des numéros non attribués (certains étant
« distribués » sous le manteau, dautres
étant trouvés par des chanceux qui téléphonaient
au pif). Au début, ils tombaient sur les disques habituels
avec leur message du type « Numéro non attribué
»
Mais que ces disques, au bout dun certain
temps, étaient déconnectés, et cest
à ce moment là que lon pouvait percevoir
la présence dautres correspondants plus ou moins
près ou lointains et tenter des contacts
Il me
décrivit ces rencontres fortuites, entre hommes et femmes,
ou damitiés un peu plus particulières, ou
pour de simples déconnades téléphoniques
jusquau bout de la nuit au bout du fil à refaire
le monde
En fait, tout pouvait arriver et éventuellement
tout et nimporte quoi pouvait se concrétiser.
Vous avez bien résumé et illustré cette
ambiance ainsi que les témoignages précédents
Je dois avouer que le récit qui men avait été
fait par JAx me faisait tordre de rire en 1996. Il mavait
aussi parlé effectivement quil fallait, pour mieux
entendre, se bricoler des amplificateurs ! Cest la découverte
de votre blog qui ma tout fait revenir en mémoire
!
En 2016, suite à mes recherches que jeffectue à
mes heures sur lhistoire des télécommunications,
https://telecommunications.monsite-orange.fr , je suis tombé,
via leboncoin, sur un retraité de FT depuis 2001, chez
qui je suis allé à Montpellier pour lui racheter
la quasi intégralité de la Revue Française
des Télécommunications (1971-1993).
Personnage très truculent, celui ci me raconta quelques
anecdotes de sa carrière, notamment de sa « rencontre
» avec Albert Delbouys, Ingénieur Général,
qui lui fit ressentir quelques sueurs froides
Puis très
vite, étant affecté alors à Voltaire au
Rotary 7B1 puis au Pentaconta, il me parla aussi du Réseau
occulte
Il connaissait lexistence de ce Réseau
depuis environ 1967-1968 et son entrée dans ladministration.
Il ma confirmé ce style de «
rencontres » de tous ordres qui sy déroulaient,
les histoires damplis etc
Il était intarissable
à ce sujet.
Mais il ma parlé aussi de deux autres choses.
La première information est que finalement, le Réseau
Occulte a rapidement fini par être connu des très
hauts fonctionnaires, et plus seulement des techniciens de commutation
Cétait logique que cela arrivât
En effet, à cette époque, lesprit de corps
existe, il y a des formations, des troncs communs, et les gens
de tous milieux de notre administration se rencontrent, parlent
de tout, et de technique
Et même les hauts fonctionnaires
ont été aussi à lécole, à
lENST et ont donc été aussi des étudiants,
des jeunes....
Lexistence du réseautage était donc connue
des hautes sphères, mais techniquement parlant, il était,
à lépoque de lélectromécanique,
strictement impossible de len empêcher
Ce
retraité qui avait au cours de sa carrière croisé
plusieurs très hauts fonctionnaires de la maison, tels
Albert Delbouys ainsi que François Schoeller qui deviendra
après laffaire de la grue de Latché le nouveau
Président de TDF, ma confié que cest
ce Réseau occulte qui a donné un jour lidée
à un certain Jacques Dondoux de lancer les premiers Réseaux
de Convivialité (Cest ainsi que lon les appelait
à leur création), qui ont été présentés
au début des années 1980 comme des plateformes
du genre « sos solitude », qui avait tôt vite
fait de passer à « Jai besoin de compagnie
» à enfin finir en un gigantesque baisodrome téléphonique
Bref, le téléphone rose tarifé et lucratif
était né, avec notamment les numéros commençant
par le 36.69, on aura compris lallusion
Et grâce
à laide précieuse des commutateurs téléphoniques
électroniques qui permirent la création de ces
nouveaux services téléphoniques puis télématiques
des plus spéciaux
Ce brave retraité, originaire du midi, réussit
à obtenir sa mutation à Marseille, en fin 1971,
pour se rapprocher de son Montpellier
Ainsi, il quitte
donc Paris et se retrouve à Marseille, en tant que technicien
affecté sur la maintenance des Pentaconta.
Deuxième information : celui-ci ma confié
quà Marseille aussi, le Réseautage allait
bon train
Alors, comme à Paris, il existait le
réseautage « de compagnie », mais il ma
confié quil existait un second réseautage
: le réseautage de business !!!
En effet, le brave retraité mexplique alors, quà
cette époque, chaque ligne téléphonique
en service raccordée sur un central Pentaconta aboutit,
si lon décroche le combiné téléphonique
et que lon téléphone à un numéro
non attribué, sur un film de type numéro non attribué
Il me confirme quil se passe ce qui existe toujours à
lheure actuelle : au bout dun certain délai,
le film sarrête et labonné se retrouve
alors dans le vide, et le téléphone de labonné
demeure toutefois alimenté
Tout comme à
lheure actuelle
En revanche, il mindique quen 1971, sur les Pentaconta,
chaque lecteur de film de numéro non attribué
peut débiter son message jusquà 5 appelants
qui appelleraient quasiment en même temps le même
numéro non attribué.
Donc pour résumer, si 5 personnes, qui se connaissent
bien, téléphonent à une heure fixe convenue
sur un même numéro de téléphone non
attribué, ceux-ci se retrouvent alors aboutir sur le
même lecteur de film, qui après un certain délai
sarrête
Mais à ce moment là,
ces 5 correspondants, qui ne se sont pourtant jamais appelés,
se retrouvent en conversation tous ensemble, sans avoir à
payer, et surtout sans pouvoir être tracés
A Marseille, ce sont des malfrats et autres membres de la pègre,
qui ont découvert cette faille de sécurité,
et ainsi pendant paraît-il plusieurs années, ils
se contactaient par ce moyen très sophistiqué,
à partir de cabines téléphoniques ou de
téléphones ne leur appartenant pas (les leurs
étant probablement sur écoute) pour préparer
leurs coups, tels que braquages, hold-up, livraison de stupéfiants,
recels etc.....
Ainsi, même écoutés sur
leurs lignes téléphoniques personnelles, la Police
ny voyait que du feu, et les malfrats pouvaient planifier
leurs affaires tranquillement par le Réseautage Business
avec ce système dappels à heures fixes sur
les mêmes numéros non attribués, à
partir de nimporte quelle ligne téléphonique
de Marseille
Tout en jouant aux petites filles modèles
sur le téléphone de chez eux....
Il paraît que le pot aux roses fut découvert par
hasard à Marseille par des techniciens des PTT de maintenance,
et quà ce moment-là, des écoutes
officielles furent ordonnées directement sur les répondeurs
de films, et quainsi, la Police enfin prévenue
des prochains coups de la pègre (lieux, heure, marchandise),
fit tomber une grande partie du banditisme marseillais dans
les années 70 par ce moyen
Voici donc résumés les 2 témoignages oraux
sur le réseautage en vigueur dans les années septante
que jai pris le temps de retranscrire, car jai aimé
votre initiative de parler de ce sujet plutôt méconnu.
Claude Rizzo-Vignaud, .
sommaire
-----------------------------------------------------------------------------------------------------------
Au début il n'y avait pas de lecteur magnétique
(machine ASSMANN) dans chaque central téléphonique.
Ceux-ci venait du central Anjou et étaient dispatchés
par ligne inter central. Puis est venu les lecteurs magnétique
et les joncteurs vers NNU (numéros non utilisés).
Pour lutter contre ce type de réseau chaque message (film)
était amplifié et alimentait 5 joncteurs qui étaient
équipés d'un transfo différentiel : passage
de circuit de conversation de 2 fils en 4 fils avec séparation
des sens de dialogue. Il y avait aussi sur la table de denvoyeurs
d'appel dite pondeuse : un amplificateur que l'on savait utiliser
pour écouter les réseaux !! ou un interphone
Voila quelques souvenirs.
Envoyé par Gele
-----------------------------------------------------------------------------------------------------------
SOUVENIRS..., SOUVENIRS ! Merci monsieur, de votre site qui
me fait me remémorer cette époque disparue. J'avais
une 20eme d'années, je débarquais à Paris
où vivaient déjà mon frère et mon
cousin. Ce dernier pouvait enfin vivre "au grand jour"
son homosexualité et c'est lui qui, un soir, dans le
grand appartement paternel, m'a fait découvrir "le
réseau". Quelle émotion au moment de composer
sur le cadran le dernier chiffre de ce numéro "magique"...
Je tenais l'écouteur de l'appareil, mon cousin, plus
hardi, le combiné. Cela tombait bien car ce qui m'a tout
de suite emballée, c'est l'atmosphère sonore du
réseau. Les paroles, bien sûr, mais surtout cette
manière qu'avaient les 'appels' de se croiser comme des
trains dans la nuit. Initiée, plus tard, j'ai recommencé.
Il fallait attendre que mon parent soit couché (et surtout
qu'il ne se réveille pas!!! Mon adorable père
est hélas insomniaque... Que de frissons je lui dois...
Je tirais donc le fil du téléphone jusqu'à
la chambre de mon frère, quand il était absent,
parti, lui, courir la gueuse, et je composais le numéro.
Il y avait une Dominia qui me foutait la trouille et des hommes,
peu téméraires (ou fous), qui laissaient leur
adresse. Une me revient, dans le IVe. Allais-je jamais oser
m'y rendre ? Que trouverais-je dans cet appartement où
me conviait une voix happée dans le brouillard du réseau
? J'ai vite compris que l'essentiel n'était pas dans
le fait "d'y aller" ou pas, mais dans l'initiation
que m'offrait le réseau : reconnaître mes désirs
dans ce foisonnement de propositions, saisir aux intonations
des voix de quels désirs "l'autre" parlait...
Je ne sais plus combien de temps a duré le réseau,
(pouvez-vous me le dire si vous le savez ? Idem, je cherche
vainement à retrouver les numéros, il y en avait
de courts, comme 3133). Je me suis rendue une fois à
un rendez-vous, dans la rue, (cela me semblait plus sûr...),
et le souvenir que je garde de cette nuit est assez doux...
mais n'atteindra jamais la force de ces soirées passées
à 'apprendre" (je n'étais pas une vierge
effarouchée, loin de là, mais je venais de comprendre
clairement vers qui me menaient mes désirs, et ce n'était
pas si simple...). le garçon était tout aussi
timide que moi, un peu sonné de se retrouver devant la
statue d'Henri IV en pleine nuit, face à une drôlesse
inconnue... Il n'était pas plus expérimenté
que moi. Ce fut ma seule expérience vécue. Peu
à peu, j'ai moins appelé, je ne sais plus pourquoi...
Et un jour, j'ai appris qu'il existait un autre réseau,
tarifé celui-ci..., bien moins attirant. Longtemps après,
j'ai parlé à des amis du réseau, mais personne
ne s'en souvenait (menteurs ?). Seul mon cousin s'est rappelé
ces soirées. Et les émotions ressenties... Un
jour, je suis tombée par hasard sur un film joué
entre autres par Laurent Lucas qui met en scène justement
le réseau ; il est musicien et,découvrant par
hasard, le réseau, décide d'en faire une uvre
(en même temps qu'il noue une relation anonyme avec une
femme). Je crois qu'il s'agit de "Les Invisibles",
de Thierry Jousse (avec Lio et Michael Lonsdale), mais le film
est d'un intello, trop cérébral et on ne retrouve
que peu les émotions ressenties. Voilà pour mon
petit témoignage d'un dimanche soir, s'il peut vous amuser.
Merci en tout cas de faire revivre cet espace
Envoyé par Sophie
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------
J'ai connu le réseau en 1974. Mon
nom était Alexis et j'habitais dans le centre de Paris.
Grâce au téléphone, j'ai rencontré
par ce moyen beaucoup de femmes et c'était vraiment super.
C'était la bonne époque... Merci pour votre site
et les documents de l'époque...
Envoyé par Alex
sommaire
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Bonjour, eh oui, je me souviens très
bien de cette époque où un petit nombre de personnes
s'adonnait à dialoguer en "pirate" sur des
lignes téléphoniques dont le message vocal des
PTT qui était atténué disait: "le
numéro de votre correspondant est ....." et là
avec des pseudos nous conversions entre plusieurs personnes
à travers la France. Mon pseudo à moi était
RATAFIA !. Il me semble que ce mode de communication existait
déjà pendant la seconde guerre mondiale et servait
aux résistants à communiquer clandestinement ...
J'étais à cette époque accidenté
de la route âgé de 18 ans, et alité j'étais
souvent en ligne et mes parents l'avait même soupçonné.
Il y avait même certains réseaux où nous
pouvions communiquer à deux uniquement et évidemment
c'était la collaboration de certains techniciens des
PTT qui permettait cette opportunité ! Quelque années
plus tard j'y ai entendu des gens connus comme Jacques Martin
lui même!. Ayant informé un ami qui était
speaker sur une radio FM de l'existence du "réseau",
eh bien ce dernier en a fait une émission à l'époque
!! Voilà, j'aurais certainement encore beaucoup de chose
à dire et je dois dire que cette chose m'a marqué
au point où j'ai par la suite pratiqué la radiocommunication
que je pratique toujours d'ailleurs. Voilà, je reste
à votre disposition !
Envoyé par PB
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Bonjour, A Montpellier, aussi, le Réseau
existait, et j'en ai été un utilisateur effréné
pendant des années, avec à la clé des dizaines
de rencontres, mmm, disons épicées... C'était
aussi un super-moyen de passer le temps, le soir, quand il n'y
avait rien à la télévision, et que je m'ennuyais.
J'avais une vingtaine d'années, et comme j'étais
timide, aller draguer en boîte n'était pas vraiment
ma tasse de thé. Sur le Réseau, on pouvait discuter,
déconner, brancher (au sens romantique du terme), et
"plus si affinités", selon l'expression consacrée.
Et des rencontres, j'en ai fait !
Envoyé par Stéphane du Réseau
- Montpellier - Années 80
------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Bonjour, J'étais adolescente en
ces années-là, et dès que je rentrais du
lycée et avais la chance d'être seule chez moi,
je me précipitais sur le réseau, découvert
un jour par hasard. C'était joyeux, exaltant. Une période
ou beaucoup d'élèves (et de postulants) du "Petit
Conservatoire de la chanson" de Mireille fréquentaient
le réseau, qui a surement aidé beaucoup de gens
à rentrer dans le milieu artistique. J'espère
que certains s'en souviennent... Trop jeune pour rencontrer
mes interlocuteurs de visu (mais à ma voix, on me donnait
bien 5 ou 6 ans de plus...et je ne détrompais personne
!), tout cela est resté une parenthèse magique,
romantique, hors du temps. Mais quelques années plus
tard, je suis devenue pionnière de la télématique
et de la toute première messagerie française électronique
grâce à ça....
Envoyé par Etoile - Années 1972
/ 1974
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Je travaillais au PTT, j'ai découvert
en testant des lignes... grâce au gitan qui ma expliqué
...38 ans plus tard je suis toujours la, sous le nom de nounours
mais l'ambiance a changée il y a plein de haines dommage
mais bon on avais des amplis ..cobra ect .. il passait fort
..Le 8249030 on était des dizaines sur 2 faces c'était
fabuleux.
Envoyé par django
sommaire
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Bonsoir Merci pour votre page qui m'a
rappelé de bons souvenirs, j'habitais Créteil
dans les années 70 et travaillais à Suresnes je
n'avais qu'une hâte le soir c'était de me brancher
sur le réseau mon nom de réseau était Bénédicte
et j'ai eu un contact avec Le Scorpion... Que de bons souvenirs
!!!!!
Envoyé par Bénédicte
-----------------------------------------------------------------------------------------------------------
Bonjour Je suis Lionel un ancien du réseau
(Il y a eu trois Lionel en tout et jétais celui
de Nogent sur Marne.). Jai fait mes début dans
les années 74 mon premier numéro était
je crois « Château » de mémoire. Cest
surtout dans les années 77 que jai pratiqué
le réseau en en permanence jusquà sa belle
mort. Une des personnes qui avait joué un grand rôle
dans la relance des réseaux cest un journaliste
de léquipe qui était connu sous le pseudo
« Neptune ». On ne peut pas oublier les deux phénomènes
de la musique avec le sorcier et Jacques le para qui nétait
pas mieux. Il y avait à Joinville le Pont un gars qui
réseautait avec un ampli comme le tient et je crois quil
sagissait daigle noir. Je me souviens de certains
pseudos tels : le baron et de son épouse anémone.
Parmi les pseudos assez marrants : Il y avait le coq de basse
cours appel. Tout comme toi jai connu énormément
de monde avec lesquelles jai gardé des souvenirs
magnifiques. Voilà cétait juste pour la
bonne cause. Amicalement
Envoyé par Jacky
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Bonjour, jétais bien jeune
en 1979 (10 ans) quand je me suis intéressé au
téléphone et mes explorations téléphoniques.
J'avais bien entendu des voix après des "faux"
numéros mais je pensais que ce nétait que
de la diaphonie et n'ai jamais prêté attention
aux propos tenu... ce qui m'intéressait c'était
d'entendre la tonalité d'acheminement qui plus elle était
longue plus me faisait penser à un long voyage à
travers la France (interurbain).
Quel plaisir d'entendre les accents des diverses voix enregistrées.
Je trouvais, par contre, et suis toujours de cet avis, que la
qualité sonore des S63 est très bonne. Que jusqu'en
1980 il y avait aussi des U43 en service. Globalement la qualité
de voix était au rendez vous même si je comprend
qu'en amplifiant on passait par dessus la voix enregistré
et le brouhaha des autres intervenants.
Merci pour ce site qui m'informe donc de ce que j'ai raté
(mais je ne pense pas avoir eu le bon âge pour apprécier).
J'avais connaissance par le site Phone trips qu'aux USA également
il existait le même phénomène de "réseau",
et de là à penser que cela ait pu exister dans
plusieurs autres pays.....
Merci encore!
sommaire
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Bonjour réseauteur-teuse d'un autre
temps que les moins de 20 ans... dacdac ;)
J'ai découvert le réseau j'avais
20 ans, en 1991... j'étais étudiante, et durant
un stage dans une entreprise, un autre stagiaire, m'a dit :
"tiens, t'es rigolote, ça devrait t'amuser le numéro
que je vais te donner... mais attention, tu risques d'y prendre
goût !"
Y prendre goût ?? je suis devenue addictive à ce
numéro magique... j'y ai passé, des nuits entières
durant ma vie de célibataire à Paris... et j'ai,
moi aussi partagé ce numéro secret... j'avais
l'impression que c'était une vie secrète que,
seuls certains connaissaient, et que j'en faisais partie, moi
qui déboulais à Paris... les factures de téléphone
étaient monstrueuses... je devais les payer en plusieurs
fois, parfois, souvent !
Ahhhh les voix, ces voix... comme j'ai fantasmé dessus,
comme je les désirais ces voix, comme je les attendais
ces voix... et je revenais de nuit en nuit, pour en retrouver
certaines ! C'était magique, c'était aussi une
sacrée drogue... Il y avait aussi des voix inatteignables,
mais je les voulais tellement... leur parler, qu'elles me désirent
tout autant que je les désirais. C'est, pour ceux qui
n'ont pas connu, très certainement, dément de
raconter ceci... mais pour ceux qui savent, ils me comprendront.
Et puis rencontrer dans la nuit, un homme, sur un coup de tête...
prendre un taxi, se rendre à une adresse, je pense que
j'étais folle ! mais je n'ai jamais eu peur... Je me
suis toujours fiée à mon instinct qui me disait
qu'avec telle ou telle voix, je ne risquais rien, si ce n'est
que de passer une nuit inoubliable ! j'aurais pu me tromper
bien évidemment !
Et des nuits inoubliables j'en ai passé, oh que oui...
d'ailleurs, je me les rappelle encore, parfois !! comme c'était
chouette, comme c'était enivrant, troublant, excitant...
d'ailleurs en découvrant votre blog, je suis excitée
à l'idée que je pourrais peut-être lire
des personnes que j'ai rencontrées. C'était un
lieu formidable pour y faire de merveilleuses rencontres. On
sent bien la fille qui regrette ce temps, nan ? rire !
Et il y avait des gens de milieux différents, il y avait
de toutes sorte de gens... et puis, j'ai l'impression qu'il
y avait surtout moins de frontière entre nous, et que
les gens qui venaient sur le réseau se laissaient emporter
par une voix, par ce que cette voix racontait, pour partir à
l'aventure ou pas ! Parfois on pouvait être déçue...
Mais souvent on pouvait aussi fréquenter un homme, une
femme, avoir une liaison de plusieurs mois, années, on
pouvait vivre avec cette personne rencontrée, voire l'épouser......
Discuter, discuter, des heures, des nuits entières...
Il m'arrivait de passer des nuits blanches avec au bout du fil
un inconnu ou nous parlions de tout avec fascination... et l'idée
de se retrouver sur le réseau la nuit d'après,
était tout aussi excitant, je ne pensais à ça
toute la journée.
Oh comme je suis joie de pouvoir en parler, ici, avec d'autres
réseauteur-teuse, car autour de moi, je ne connais plus
personne qui connait cet endroit où je me suis tant amusée...
Et le numéro je m'en souviens comme-ci j'allais encore
le composer : 01. 40.50..... Z'avez essayé ;) !
Envoyé par Véra
-----------------------------------------------------------------------------------------------------------
Bonjour à tous j'ai bien connu le réso et notamment
un certain, Nounours qui bossait dans les télécoms
prés de la place St Georges. On s'était même
rencontré. Il y avait aussi le samedi les soirées
à Sérrurier ou j'ai rencontré la plus part
des actifs du Réso : Le Glas, Le petit Jé, Gino,
Le Sport, Lustu, L'Appo, Bourrou, La poubelle, La Chiffone,
la Concierge, Airlines, Tacotac, la Duchesse, Véronica,
Le Gitan, ça ne nous rajeunit pas tout çà,
mais c'était bien marrant. Comme aurait dit Gino on a
en abattu du gibier la dessus.
Envoyé par Marlon
------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Bonjour, je viens de tomber sur ce témoignage
de BB dans ses mémoires (Initiales BB) chez Grasset,
p121, que je vous recopie ci-dessous. Cest juste avant
la sortie de "Et Dieu créa la femme", et elle
vit une relation amoureuse avec Trintignant, le Jean-Louis du
texte :
"Comme nous navions, Jean-Louis et
moi, aucun moyen dinformation, un soir, pour avoir des
nouvelles, nous avons fait I.N.F.1 sur le cadran de notre téléphone.
Il était minuit et demi, le disque des informations était
arrêté, mais par contre nous avons découvert
tout un réseau de gens qui parlaient entre eux sous des
pseudonymes. Cétait extraordinaire ! Napoléon
racontait des idioties à Arsène Lupin qui lui-même
faisait la cour à Sarah Bernhard, qui disait des âneries
à Bigoudi. Il y avait au moins une vingtaine de personnes
qui parlaient en même temps et au moins autant qui, comme
nous écoutaient sans rien dire. Tout le monde était
parfaitement anonyme. Cétait passionnant. Je me
risquais timidement à dire « Bonsoir ». Aussitôt,
flairant une « nouvelle », trois ou quatre voix
me demandèrent en même temps qui jétais.
Prise de court, je dis « Chouchou », nom que je
devais porter dans mon prochain film « La Mariée
est trop belle ». Et on me posa des questions
Et
jen posais aux autres Il fallait faire attention de ne
pas se trahir ! Cétait follement amusant ! Nous
avons passé des nuits entières, Jean-Louis et
moi, riant comme des fous avec des inconnus. « Chouchou
» avait beaucoup de succès, sa voix plaisait, et
« Chouchou » disait quelle avait 70 ans mais
était restée très gamine et personne ne
croyait « Chouchou ». Pendant que je mamusais
au téléphone, la sortie de « Et Dieu créa
la femme » se préparait."
Envoyé par Ph.L
------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Bonjour, Ayant récemment emprunté
la ligne de bus N° 20 , laquelle passe place de la Bourse,
je me suis souvenu quun café situé sur cette
place servait , dans les années 1970, de lieu de rencontres
pour les personnes qui discutaient sur le « Réseau
». Javais reconnu le café, qui sappelle
désormais « Le Réaumur », mais je
ne me souvenais plus du nom quil portait lorsquil
était le rendez-vous des gens du Réseau. Jai
donc effectué une recherche sur internet et je suis fort
heureusement tombé sur votre blog, lequel ma fait
remonter bien des souvenirs. En effet, jai pratiqué
le Réseau en 1977, à la suite de mon divorce.
Je ne recherchais pas spécifiquement des rencontres sexuelles,
mais plutôt des contacts me permettant de me sentir un
peu moins seul. Jai donc pratiqué le réseau
pendant environ un an et demi, sous le pseudonyme « Le
Chimiste », et jy ai fait quelques rencontres intéressantes.
Je me suis effectivement rendu compte que lon pouvait
y rencontrer tout un tas de gens extrêmement différents,
de tous les milieux sociaux. Et fait notoire, beaucoup de gens
malades ou handicapés qui, cloués sur leur lit
ou leur chaise roulante, et ayant peu de contacts sociaux palliaient
ce manque grâce à leur téléphone.
Jajouterai quen ce qui me concerne, jai été
initié au Réseau par un ami qui ma communiqué
le numéro à appeler, car le système fonctionnait
beaucoup sur la base du bouche à oreille et du parrainage.
Jai eu loccasion de faire quelques rencontres intéressantes
dans la « vraie vie » avec des utilisateurs du Réseau
avec lesquels javais échangé mon numéro
de téléphone. Ma vie ayant fini par se stabiliser
jai eu de moins en moins recours au Réseau, puis
jai cessé de lutiliser. Quelque temps après
avoir terminé, jai été contacté
par quelquun qui voulait minviter sur son numéro,
mais jai décliné linvitation : la
« vraie vie » avait repris le dessus. Il nen
reste pas moins que lexpérience a été
très intéressante et quelle ma laissé
de bons souvenirs. En tous les cas, merci et bravo à
vous davoir ressuscité ce fameux réseau
téléphonique sur votre blog : jy ai notamment
appris ce que jignorais à son sujet, à savoir
quil avait été initié par la Résistance.
Envoyé par Jean-Louis
...
|
sommaire
|