Le THEATROPHONE de Ader

LE PREMIER MEDIUM ELECTRIQUE
DE DIFFUSION CULTURELLE


C'est ici le lieu de décrire avec plus de détails cette opération extraordinaire, qui a passé longtemps pour un rêve, et qui n'était qu'une merveilleuse réalité
Les conceptions précoces des usages multi-points du téléphone
Le téléphone électrique de Graham Bell est, par excellence, une forme de communication "point à point", permettant à émetteur et à un récepteur de communiquer.
Cependant, dès sa mise au point, on a imaginé des formes d'usage plus collectif.

En témoigne le dessin "Terrors of the Téléphone" paru dans le magazine new-yorkais Daily Graphic du 15 mars 1877 : on y voit un orateur - ou est-ce un chanteur ? - en nage, gueule ouverte, s'adressant, via une émetteur que prolongent un réseau mondial de fils, à des publics installés à Pékin, San Francisco, Saint-Petersbourg, Dublin et Londres, et réunis autour de récepteurs dont la forme ressemble curieusement à celle de l'appareil émetteur.
D'autres destinations, notamment vers des peuplades insulaires et une sorte de sauvage solitaire, sont également suggérées.

L'historien américain de la radiodiffusion, qui reproduit ce dessin en ouverture de sa monumentale History of Broadcasting in the United States, cite également une chanson populaire, publiée à St-Louis la même année,
The Wondrous Telephone, qui témoigne de ce que, immédiatement, on a imaginé que le téléphone permettrait d'amener les loisirs à domicile :

You stay at home and listen
To the lecture in the hall
Or hear the strains of music
From a fashionable ball !


Graham Bell lui-même aimait, lors des démonstrations du téléphone, faire entendre des orchestres, afin de démontrer les capacités de son invention.

Mais ce sont surtout les perfectionnements apportés au téléphone par le français Clément Ader qui vont permettre, à partir de 1881, la propagation du théâtrophone, première forme de diffusion culturelle recourant à une technologie de communication électrique, et dont l'exploitation commerciale perdurera jusqu'à l'arrivée de la radio.

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Le théâtrophone de Clément Ader (1881)

L'inventeur français Clément Ader (1845-1921) est principalement connu pour sa contribution au développement de l'aéronautique.
Il fut cependant également un des pionniers du téléphone en France.
Il propose diverses améliorations techniques au téléphone électrique : le "téléphone d'Ader" présente certaines spécificités techniques (système dit "à contact unique", téléphone dit "à surexcitation") qui sont décrites dans la cinquième édition (1887) de l'ouvrage Le téléphone du Comte Th. du Moncel.

En 1880, Ader crée la Compagnie générale des téléphones de Paris, déploie le premier réseau téléphonique de la capitale.

Clément Ader


Plan du dispositif de théâtrophone à l'Opéra durant l'Exposition universelle de Paris (1881).

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En 1881, dans le cadre de l'Exposition universelle, Clement Ader conçoit le système du théâtrophone, notons que le terme ne sera utilisé qu'à partir de 1889.

Le théâtrophone tel qu'il a été présenté en 1881 était un système qui permettait de diffuser des concerts ou des pièces de théâtre, captés à l'Opéra, à l'Opéra-Comique ou au Théâtre-Français.
L'inauguration eût lieu en novembre 1881 par le président de la République, Jules Grévy, qui, le premier, eût la possibilité d'offrir à ses invités une audition à domicile.
Le public de l'Exposition universelle pouvait entendre, en recourant à deux écouteurs, les spectacles diffusés à l'Opéra qui se situait à plus de deux kilomètres.
Cette expérience fût l'occasion de découvrir (et d'élaborer des solutions) les problèmes de la captation en direct.
Ader met au point un système de captation qui préfigure la stéréophonie (l'oreillette de droite permet d'entendre les sons captés à la droite de la scène et l'oreillette de gauche ceux capter sur la partie gauche).
Les auditions des représentations de l'Opéra eurent lieu pendant l'automne de 1881, dans quatre salles de l'Exposition d'électricité.
Les transmetteurs employés étaient ceux du téléphone Ader, les mêmes qui fonctionnent aujourd'hui pour la correspondance entre particuliers. Ils étaient placés, au nombre de dix, de chaque côté de la boîte du souffleur.


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Chacun de ces 20 récepteurs était en rapport avec une pile Leclanché et une bobine d'induction correspondait à cette pile. Le fil conducteur double (pour l'aller et le retour) s'étendait sur une longueur de 2 kilomètres environ qui sépare l'Opéra du Palais de l'Industrie. Ces conducteurs étaient placés à la voûte des égouts. Comme les piles se polarisent rapidement, et perdent ainsi de leur puissance, on les changeait de quart d'heure en quart d'heure.
Pour cela, chaque pile avait son commutateur, au moyen duquel, chaque quart d'heure, on mettait le transmetteur en rapport avec une pile nouvelle : pendant ce même temps on rechargeait la pile usée

Pour mieux assurer le bon fonctionnement des appareils, et pour se mettre en garde contre toute cause de dérangement, Mr Ader avait pris certaines précautions, qu'il n'est pas hors de propos de mentionner.
Les transmetteurs microphoniques disposés sur la scène étaient fixés, chacun, sur un socle en plomb, reposant sur des pieds en caoutchouc.

On évitait ainsi les bruits qui, sans cette précaution, auraient été transmis en même temps que les sons, et qui provenaient des pas et des mouvements des acteurs et des danseuses.
L'inertie des masses de plomb servant de supports aux transmetteurs, éteignait ces trépidations, et les empêchait d'arriver à la planchette microphonique du transmetteur.

M. Ader encore une fois précurseur dans son domaine avait jugé indispensable de munir chaque auditeur d'un récepteur double : un pour chaque oreille. Il venait d'inventer la stéréophonie

Et voici la raison de cette particularité.


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Le chanteur n'est pas immobile sur la scène, il passe fréquemment de l'un à l'autre côté de la rampe.

C'est même là une des règles de l'art.

Supposons que le chanteur se trouve à droite du souffleur; la voix actionnera le microphone transmetteur de droite plus énergiquement que celui de gauche, et l'oreille droite de l'auditeur sera plus vivement impressionnée que l'oreille gauche.
Si le chanteur passe à gauche du souffleur, c'est le contraire qui se produira.
Ainsi, quand l'acteur, marche sur la scène, son déplacement se traduit, pour celui qui écoute, par un affaiblissement du son dans un des cornets récepteurs et par un renforcement dans l'autre cornet récepteur.
De là des inégalités d'intensité, qui nuisent à la pureté de la transmission. M. Ader eut l'idée, très ingénieuse, de croiser les impressions arrivant à chaque oreille de l'auditeur, c'est-à-dire, de faire aboutir à l'oreille droite les sons d'un transmetteur et à l'oreille gauche le son d'un second transmetteur, placé à une distance de quelques mètres du premier.
Les transmetteurs sont donc groupés par paires, l'un étant sensiblement éloigné de l'autre.

Chaque personne reçoit l'impression des deux transmetteurs distincts, par l'une et l'autre oreille, ainsi que le montre le diagramme de la figure ci contre, dans laquelle on voit que le chanteur étant placé en A, par exemple, la voix traversant le microphone M, est recueillie par le récepteur B, correspondant à l'oreille droite du spectateur, et à travers le microphone M', par le récepteur B', correspondant à son oreille gauche, et que, lorsque le chanteur se trouve au point A', sa voix est recueillie à travers le microphone M', par le récepteur B', correspondant à son oreille gauche et à travers le microphone M, par le récepteur B, correspondant à l'oreille droite.

Dès lors, le chanteur peut se mouvoir : l'une des deux oreilles de l'auditeur percevra toujours le son à peu près avec la même intensité que l'autre.
Les deux transmetteurs disposés le long de la scène de l'Opéra répondaient à 80 récepteurs Ader pour desservir quarante auditeurs placés dans deux salles du Palais de l'Industrie.

Ces salles étaient disposées de manière à éteindre tout bruit extérieur, qui aurait nui à l'effet sonore que l'on voulait recueillir.
Pour cela, un épais tapis couvrait le parquet; des rideaux et des tentures composaient l'enceinte.
Des portes doubles et faites d'épaisses étoffes en défendaient l'entrée. L'éclairage était faible et triste, pour ne point distraire l'attention des oreilles par l'impression des yeux. Au milieu se tenait, devant une table, un employé, chargé de la surveillance générale.

Le public entrait par fournée de 20 personnes dans chaque salle, et n'y séjournait que à 4 à 5 minutes.
Cet intervalle de temps écoulé, les assistants sortaient par une porte, tandis que la seconde fournée entrait, silencieusement, par la porte opposée.
Grace à ces ingénieuses dispositions, on assistait littéralement à une représentation de l'Opéra.

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On reconnaissait la voix des chanteurs.
Ce n'était pas l'effet d'un rêve lointain, mais celui d'une réalité auditive. Sellier, Boudouresque et Mlle Kraus vous chantaient dans l'oreille. Les choeurs arrivaient pleins et harmonieux, et on ne perdait pas un accord de l'orchestre.
Pendant les entractes, on entendait les bruits de la salle, et même la voix des crieurs de journaux et des marchands de programmes. Et comme, malgré la fidélité de la transmission des sons, on était privé du spectacle de la scène, ces auditions aveugles avaient quelque chose d'étrange, de fantastique, que n'oublieront jamais ceux qui ont pu en jouir.
Rien ne pouvait mieux populariser dans le public les nouveaux progrès de l'électricité.

Comme l'indique du Moncel, "le succès de ces auditions théâtrales a été très grand.
Tous les soirs d'Opéra on faisait queue pour y assister, et cette vogue a continué jusqu'à la fin de l'Exposition.

Bien que des esprits chagrins aient voulu jeter de l'eau sur ce succès au nom de l'art contre ces reproductions musicales, presque toutes les personnes de bonne foi ont été ravies et ont prétendu avoir mieux entendu qu'à l'Opéra, ce qui se conçoit facilement, si l'on réfléchit que les transmetteurs étant interposés entre les acteurs et l'orchestre, celui-ci se trouvait un peu sacrifié au profit des acteurs, dont les paroles pouvaient alors être admirablement entendues".

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Le souvenir de ces belles soirées inspira l'idée de multiplier les auditions téléphoniques théâtrales.
Mais une telle installation est compliquée et coûteuse.
Les frais faits en 1881, par la Société des téléphones, à l'Opéra et au Palais de l'Industrie, atteignirent, dit-on, la somme de 160 000 fr.
Aussi jusqu'à ce jour les reproductions de ce genre ont-elles été rares.
On ne peut citer à Paris que le musée Grévin qui. pendant l'été de 1883, ait imaginé de donner des auditions téléphoniques.
A la fin de l'exposition, le dispositif des microphones de l'Opéra fut démonté. Des auditions théâtrophoniques furent organisées par le Musée Grévin.
Les microphones étaient placés sur la scène de l'Eldorado, un café-concert en vogue.

Seulement, au lieu des chants superbes de l'Opéra, on entendait, au Musée Grévin, le répertoire grossier d'un vulgaire café-concert, l'Eldorado, du boulevard de Strasbourg.
On recevait, par l'oreille droite ce refrain, légué par Thérésa :
« C'est dans l'nez que ça me chatouille ! »
tandis que l'oreille gauche vous faisait entendre cet autre, popularisé par Judic :
« Ah ! si ma mère le savait ! »
Et lorsque, suffoqué par ces chansons idiotes, à demi asphyxié par l'atmosphère irrespirable de la cave
où se faisaient ces auditions, on s'empressait de regagner l'escalier étroit et tournant qui vous ramenait à l'air, relativement pur, du boulevard Montmartre, on était poursuivi par les regards d'une foule de personnages en cire, portant de vieux habits, qui vous fascinaient avec leurs yeux en boule de loto, immobiles et morts.
C'est que tout soleil a son ombre, toute médaille a son revers, toute belle chose a sa caricature.
Les auditions du musée Grévin étaient la caricature des auditions téléphoniques de l'Opéra.

En 1883 voila ce que l'on pouvait penser :
En raison de l'intérêt qui s'attache au phénomène scientifique de ces auditions théâtrales, il n'est pas douteux que la transmission de la musique par la voie du téléphone ne soit appelée à prendre un jour une grande extension.
Ce n'est qu'une question de temps. On arrivera à réaliser ce système de reproduction musicale d'une manière économique, et on pourra alors en généraliser l'usage. L'Opéra, l'Opéra-Comique, le Théâtre Français, pourraient être reliés par des conducteurs téléphoniques à des salles disposées dans ce but particulier, et un jour des spéculateurs trouveront leur bénéfice à créer des établissements consacrés aux répétitions téléphoniques de la musique de ces théâtres.Bien plus, il ne sera pas impossible à un particulier de se procurer le luxe d'une représentation théâtrale à domicile, et d'entendre, sans quitter son salon, les accents du Trouvère, de Faust ou de la Favorite.

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C'est ce qu'expose fort bien le savant rédacteur scientifique du Journal dès Débats, M. H. de Parville, dans l'ouvrage qu'il a publié sur l'Exposilion d'électricité en 1881.

Nous souhaitons, dit M. de Parville, que le public soit bientôt mis à même d'assister, au bout d'un fil télégraphique, aux représentations de l'Opéra, de l'Opéra-Comique et de la Comédie-Française. Il est de règle en ce monde que toute chose nouvelle doit passer par une période d'évolution. On commencera par aller entendre l'Opéra dans un local approprié, qui remplacera les salons de l'Exposition; puis, peu à peu, on tiendra à rester chez soi, et à entendre ce qui se passe à la Comédie-Française, puis à la place Favart, et l'on réclamera un réseau théâtral. On s'abonnera aux téléphones de l'Opéra, de l'Opéra-Comique, etc., comme on s'abonne aujourd'hui aux téléphones de la Société générale. Et dans dix ans on vous invitera à prendre le thé et à assister à une première. Au lieu de la mention, devenue vulgaire : « on dansera, on fera de la musique », les cartes d'invitation porteront : « Audition théâtrale. » Et ailleurs : « à dix heures, Robert-le-Diable, à onze heures, Monologue par Coquelin cadet, etc. »L'inauguration de ce genre de distraction artistique et scientifique fut offerte, comme un hommage à sa haute dignité, au Président de la République française, au mois de novembre 1881.
Le palais de l'Elysée avait été relié, par les moyens ci-dessus décrits, avec la scène de l'Opéra; de sorte que M. Jules Grévy put donner à ses invités la curieuse distraction de l'Opéra à domicile.
Il est évident que ce qui a été réalisé sous des lambris" aristocratiques et officiels, peut, grâce à la science et à l'industrie de notre temps, se produire sous les toits les plus modestes, et que l'Opéra à domicile pourra un un jour être un genre de distraction à la portée de tous.
Autrefois, on louait les appartements avec « le gaz à tous les étages ».
Quand le nouveau service des eaux a permis de distribuer l'eau potable dans les appartements, au moyen d'une colonne montante, les propriétaires parisiens ont mis sur leurs écriteaux : « Eau et gaz à tous les étages ».
Plus tard, quand la construction des ascenseurs s'est simplifiée, et que leur usage est passé des gares de chemin de fer dans les grands hôtels meublés, et de là enfin dans les maisons particulières, les propriétaires des immeubles de Paris ont inscrit sur leurs écriteaux : « Eau, gaz et ascenseur à tous les étages ».
Quand les architectes auront réussi à distribuer, par un calorifère de cave, la chaleur dans toute une maison, et que, d'autre part, la Compagnie des horloges pneumatiques sera parvenue, comme elle l'annonce, à donner à chaque locataire la facilité de se procurer une pendule pour un sou par jour, les propriétaires inscriront avec fierté : « Eau, gaz, ascenseur, heure et chaleur à tous les étages. »
Enfin, un jour viendra, il n'en faut pas douter, où on lira sur l'annonce des appartements à louer : « l'Opéra à tous les étages !»


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Nous représentons dans la figure ci dessous les douceurs de l'Opéra à domicile.
Une belle mondaine, en son élégant salon, se donne le plaisir, sans sortir de chez elle d'entendre, son opéra favori.

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Avec un abonnement au téléphone théâtral, on pourrait se coucher tranquillement, et au lieu de prendre le volume dont la lecture doit forcément amener le sommeil, comme un roman de M. X. ., on décrocherait le téléphone, qui vous ferait entendre le Trouvère ou la Favorite et l'on s'endormirait, en vrai Sybarite, aux sons harmonieux d'une musique aimée.
On pourrait même créer une feuille d'abonnement électrique pour les trois jours d'opéra : lundi, mercredi, vendredi.

On ne tarda pas à reproduire, en province et à l'étranger, une expérience qui avait eu à Paris le plus vif succès.
A Bordeaux, par exemple, plusieurs personnes réunies au bureau central de la Société des téléphones écoutèrent un violoniste de talent qui jouait dans une maison des allées de Tourny; elles saisirent les sons les plus faibles de l'instrument. A Berlin, on installa une liaison téléphonique entre l'Opéra et une salle située dans la Leipziger Strasse, et les auditeurs reconnurent parfaitement la voix de chacun des artistes en scène.
A Charleroi, la compagnie des téléphones Bell fit à ses abonnés, le 14 août 1884, la surprise d'un concert à domicile. Chaque abonné avait reçu, le matin, l'avis suivant : — ConcertTéléphone. — Dimanche, 14 août, concert au bureau central du téléphone Bell. Toutes les communications seront établies à onze heures précises du matin. Mettre le cornet à l'oreille à l'heure juste, sans avertir le bureau central.
Le concert eut lieu à l'heure dite, à la grande satisfaction des nombreux auditeurs.
En septembre 1884, on mit en communication le chalet que la reine des Belges habitait à Ostende avec le théâtre de la Monnaie de Bruxelles. La reine put ainsi entendre, à une distance de plus de deux cent cinquante kilomètres, Guillaume Tell, et, le lendemain, la répétition du Barbier de Séville.
Un peu plus tard, on établit une ligne téléphonique entre le théâtre de la Monnaie et le château de Laeken, où résidait la reine. « Un jour, raconte un journal de Bruxelles, Sa Majesté suivait, par l'appareil téléphonique, la répétition de l'opéra les Templiers, du maestro Litolf. Tout à coup elle eut un tel mouvement de brusque surprise, que le téléphone, lui tomba des mains. C'est qu'elle venait d'entendre le chef d'orchestre, dans un moment d'impatience contre les choeurs, tenir un langage qui n'avait absolument rien d'édifiant. Depuis lors, les répétitions du théâtre de la Monnaie sont conduites de la façon la plus correcte. »
En 1889 on trouve dans les grands hôtels, les cafés et restaurants, ailleurs encore, des théâtrophones, — sortes d'appareils qui tiennent à la fois du téléphone et du distributeur automatique, et qui permettent, moyennant l'introduction d'une pièce de 50 centimes dans une fente ad hoc, d'entendre pendant cinq minutes les artistes qui jouent sur la scène d'un théâtre dont un avertisseur présente le nom dans un guichet pratiqué sur le devant de la boîte.
Vient-il à se produire un entracte pendant la durée de l'audition, aussitôt le nom du premier théâtre est remplacé par un autre, et l'on entend une nouvelle pièce. S'il arrivait qu'à un moment tous les théâtres fussent à l'entracte, l'appareil transmettrait un morceau de piano ou de chant, en sorte que l'auditeur ne risque pas de payer pour ne rien entendre.
Comment ce résultat est-il obtenu ? Le voici.
Le poste central de la compagnie du théâtrophone est relié à des postes secondaires placés dans les théâtres.


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Chacun de ces postes secondaires est muni de piles, bobines, appareils d'appel, commutateurs, etc., et communique avec une série de microphones disposés comme il a été dit.
Les câbles qui relient ces postes secondaires au poste central aboutissent à une rosace sur laquelle viennent également se fixer les câbles desservant les théàtrophones et un certain nombre de câbles allant au bureau central téléphonique de l'avenue de l'Opéra.
Les câbles de théâtrophone sont formés de trois conducteurs; deux, toronnés ensemble, servent à la transmission de la musique; le troisième fait marcher l'avertisseur. Le même câble dessert plusieurs appareils; ainsi, pour ne citer qu'un exemple, la ligne de l'hôtel Continental dessert un nombre total de douze appareils répartis entre les hôtels du Rhin, Dominici, de Londres, Continental, Saint-James, Albion, Windsor, Wagram et Brighton. D'ailleurs, les appareils ne sont pas nécessairement fixes; il suffit de ménager, sur le parcours du câble, des prises de courant sur lesquelles on peut greffer un appareil que l'on veut faire fonctionner; c'est le cas du café de la Paix, qui possède quatre appareils mobiles et soixante prises de courant.
Lorsque l'appareil est fixé, l'avertissement se fait aisément au moyen du troisième conducteur.
Dans le cas d'appareils mobiles, on ne peut plus opérer de la même manière; on dispose alors, en des points déterminés et bien en vue, des avertisseurs fixes, indépendants par conséquent de l'appareil. Celui-ci est muni d'un bouton qui permet de rétablir le synchronisme entre ses indications et celles de l'avertisseur fixe commandé par le poste central.
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La compagnie a installé dans Paris un grand nombre d'appareils; mais, en dehors du service des théâtrophones, elle a des abonnés, c'est-à-dire des particuliers qui, moyennant payement d'une redevance fixe, ont droit à des auditions à domicile.
A ce service est affecté le groupe de câbles allant au bureau central téléphonique de l'avenue de l'Opéra
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Les abonnés du théâtrophone sont nécessairement des abonnés du téléphone ; pour leur donner une audition, l'employée du bureau de l'Opéra relie la ligne qui les dessert avec la ligne venant du poste central du théâtrophone dont le numéro lui est indiqué par la préposée à ce dernier poste.



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Grâce au téléphone et au théâtrophone, le lord maire de Londres a pu, en 1892, offrir à ses invités, au cours d'une réception, le luxe d'une audition de l'Opéra de Paris.
Il n'y a plus qu'une chose à souhaiter : c'est que la science, poursuivant ses conquêtes, double le théâtrophone du théâtrophote, c'est-à-dire d'un appareil qui permette de suivre des yeux les acteurs tandis que l'oreille perçoit leurs paroles ou leurs chants. Le jour où sera réalisé ce desideratum, il sera possible à tout Parisien d'offrir chez lui à autant d'invités qu'il voudra la représentation complète de la pièce en vogue, ou, s'il le préfère, de faire défiler successivement devant eux les troupes des principaux théâtres.
Cela viendra, n'en doutons point; il y a longtemps qu'on l'a dit : le xx° siècle sera encore dans l'enfance qu'on lira sur toutes les maisons nouvelles, au-dessus de la porte d'entrée, cette inscription : Eau, ascenseur, lumière électrique, téléphone et théâtrophone à tous les étages.
Passons, comme le veulent les principes de la bonne littérature, du plaisant au sévère. — S'il sert à transmettre des représentations théâtrales, le téléphone sert aussi à transmettre à distance des sermons et des exercices de piété. Dans plusieurs villes des Etats-Unis, — à Mansfield, à Brooklyn et à Hartford, par exemple, — les personnes que leur grand âge ou des infirmités empêchent de se rendre à l'église peuvent entendre les offices de chez elles. Il en est de même dans certaines localités anglaises, — à Bradford, à Birmingham, à Greenock, etc. A Birmingham, les parents et les amis des malades soignés dans les hôpitaux peuvent correspondre avec eux par le téléphone, prendre de leurs nouvelles sans courir aucun risque d'infection.
La compagnie du théâtrophone : 1890-1932

Les expériences qui avaient eu lieu à Paris en 1881, à l'occasion de l'exposition d'électricité, furent reprises en grand en 1889, lors de l'Exposition universelle.
Concurremment avec le phonographe d'Edison alors dans toute sa nouveauté, les candidats « auditeurs » purent éprouver la sensation rare d'entendre à distance ce qui se jouait sur les grandes scènes parisiennes. Les recettes furent, paraît-il, aussi bonnes qu'en 1881.
De plus, les organisateurs n'avaient pas hésité à faire écouter pendant la journée, c'est-à-dire à la période creuse pendant laquelle les théâtres étaient fermés, des transmissions d'un piano mécanique qui débitait docilement ses bandes perforées et enchantait les oreilles peu exigeantes des badauds de passage.
Pour l'occasion, Ader avait remis à jour ses brevets de 1881 par une série d'additifs. Il avait amélioré l'installation de ses microphones, le long des rampes devenues électriques (elles étaient équipées au gaz quelque dix ans auparavant). Il avait mis au point des casques à deux écouteurs, pour rendre l'audition plus commode. Enfin, il avait prévu un système de commutation polarisé permettant d'envoyer un courant d'appel chez les abonnés au début du spectacle et à la fin des entractes : car, en plus des visiteurs de l'Exposition qui goûtaient en passant aux joies du théâtre téléphoné dans un lieu public, un petit nombre d'usagers du téléphone en étaient bénéficiaires à domicile.


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L'Exposition de 1889 terminée, il fallut trouver une nouvelle utilisation du matériel et, le 26 mai 1890, des batteries d'appareils récepteurs furent placées au foyer du théâtre des Nouveautés.
Une société se constitua, qui prit le nom de Compagnie du théâtrophone et qui entreprit d'étendre les activités de cette attraction.

Un grand coup fut tenté avec un matériel nouveau et des méthodes d'exploitation inédites.
Des récepteurs à encaissement automatique furent placés dans différents lieux publics : cafés, hôtels, cercles, tandis que les microphones étaient installés dans plusieurs théâtres parisiens après de laborieuses négociations avec leurs directeurs ; ceux-ci, à l'instar de nos actuels organisateurs de matchs de football, craignaient sans doute que les retransmissions leur fassent perdre des entrées.

Les nouveaux entrepreneurs, nommés Marinovitch et Szarvady, commandèrent une belle affiche au célèbre dessinateur Jules Chéret, qui faisait d'ailleurs partie du conseil d'administration du Musée Grévin.

De son crayon léger, il croqua une élégante à multiples frisettes, tenant devant ses jolies oreilles les écouteurs Ader du théâtrophone ; étincelante dans sa robe jaune citron, elle apparaissait devant un fond bleu-de-nuit sur lequel se découpait la silhouette d'un "copurchic" à moustaches effilées.

La Parisienne de Chéret prit place non seulement sur les affiches murales, mais aussi, en vignette, sur les appareils récepteurs et constitua la « marque » du nouveau théâtrophone.


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Des boîtes à sous et à sons.
Les appareils publics comportaient à leur partie supérieure deux fentes, une pour les pièces de cinquante centimes qui permettaient une audition de cinq minutes, et une pour les pièces d'un franc grâce auxquelles on prolongeait l'écoute jusqu'à dix minutes.


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Un système indicateur intégré faisait savoir aux clients avec quel théâtre un poste donné pouvait les mettre en relation : cet « affichage » était obtenu à partir de plaquettes montées en éventail sur un axe central mû par un électro-aimant, auquel les impulsion nécessaires étaient envoyées au moyen d'un fil spécial par le central du théâtrophone.


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Le central en question était installé près des grands boulevards, au 23 de la rue Louis-le-Grand, dans un sous-sol où l'on remarquait d'abord le « répartiteur ». Celui-ci, comme tous ceux de l'époque, affectait la forme d'une rosace ; il constituait le point d'aboutissement de tous les circuits d'arrivée provenant des microphones dans les théâtres, et de départ vers les postes publics.

Le central du théâtrophone, à ses débuts. Au fond, la rosace regroupant les circuits d'arrivée et de départ. Au premier plan et au centre, l'émetteur d'impulsions pour la mise à jour, à distance, de l'affichage des postes publics. En haut du meuble-tableau, indicateurs synchronisés avec l'affichage des postes : l'opératrice pouvait ainsi vérifier à quel théâtre chaque appareil était relié
Plus tard, la multiplication du nombre des postes publics et des abonnés rendra nécessaire plusieurs opératrices et des «"tableaux» beaucoup plus complexes.

Le répartiteur était relié, circuit par circuit, à un tableau desservi alors par une seule opératrice. Son travail consistait à établir les liaisons entre les différents théâtres et les appareils à sous, et à mettre à jour les voyants indicateurs de ces derniers par télécommande.

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En 1893 en Hongrie, Le Telefon Hírmondó est un système similaire, ouvert en 1893.
En Angleterre,l'Electrophone un système similaire, aussi inspiré par le Théatrophone a ouvert en 1894.

Comme le soulignait un chroniqueur de l'époque : « C'est un exemple peu commun d'une personne entendant toutes les pièces du répertoire moderne sans pouvoir mettre jamais les pieds dans une salle de spectacles. »
De ce même tableau de commutation partaient également des lignes vers le central téléphonique « Opéra », d'où l'on pouvait joindre ceux des abonnés au réseau du téléphone qui étaient clients du théâtrophone : les transmissions se faisaient alors par l'intermédiaire de leur central d'attache et par le moyen de leur ligne téléphonique normale. Toujours d'après notre chroniqueur, ils « étaient les mieux partagés puisque, chez eux-mêmes, sans sortir de leur appartement et même de leur lit, ils pouvaient se croire transportés dans leur théâtre préféré ». Heureusement, les centraux n'étaient pas encore automatiques et la « demoiselle du téléphone » était en mesure d'interrompre l'audition pour prévenir d'une communication urgente : grave responsabilité, qui pouvait lui valoir d'amères récriminations. Inconvénient de la ligne particulière : plus de stéréophonie.
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MARCEL PROUST, AMATEUR DE THEATROPHONE

Marcel Proust, dont on sait que les problèmes de santé l'incitait à éviter les sorties, fut, comme le révèle sa correspondance, un adepte du théâtrophone.
Le 21 février 1911, il écrit à son ami Reynaldo Hahn : "J'ai entendu hier au théâtrophone un acte des Maîtres Chanteurs [...] et ce soir... tout Pelleas" .
Comme le note Philippe Kolb, éditeur de la Correspondance, cet abonnement de Proust paraît lié à une nouvelle campagne promotionnelle du théâtrophone. Il cite une annonce parue dans le Tout Paris de 1911 :
"Le Théâtre chez soi. Pour avoir à domicile les auditions de : Opéra - Opéra Comique - Variétés - Nouveautés - Comédie française - Concerts Colonne - Châtelet - Scala, s'adresser au Théâtrophone 23, rue louis-le-Grand, tél. 101-03. Prix de l'abonnement permettant à trois personnes d'avoir quotidiennement les auditions : 60 F par mois. Audition d'essai sur demande."
Quelques jours après son abonnement, Proust témoigne une certaine déception, dans une lettre à Georges de Lauris : "Je me suis abonné au théâtrophone dont j'use rarement, où on entend très mal. Mais enfin pour les opéras de Wagner que je connais presque par coeur, je supplée aux insuffisances de l'acoustique. Et l'autre jour, une charmante révélation, qui me tyrannise même un peu : Pelléas. Je ne m'en doutais pas !".

La mauvaise qualité de la transmission n'empêche pas Proust de se faire le propagandiste du système.
En 1912, il recommande à une de ses correspondantes, Mme Strauss, de souscrire au service : "Si vous êtes demain soir chez vous, vous devriez demander le théâtrophone. On donne à l'Opéra la charmante Gwendoline".
En 1913, il revient à la charge auprès de la même Mme Strauss :
"Vous êtes-vous abonnée au théâtrophone ? Ils ont maintenant les concerts Touche et je peux dans mon lit être visité par le ruisseau et les oiseaux de la Symphonie pastorale dont le pauvre Beethoven ne jouissait pas plus directement que moi puisqu'il était complètement sourd. Il se consolait en tâchant de reproduire le chant des oiseaux qu'il n'entendait plus. A la distance du génie à l'absence de talent, ce sont aussi des symphonies pastorales que je fais à ma manière en peignant ce que je ne peux plus voir !".
Commentant cette lettre dans son ouvrage Proust au miroir de sa correspondance, Luc Fraisse remarque que "le théâtrophone n'est pas seulement un épisode anecdotique dans sa vie. [...]. L'abonné mélomane aperçoit dans ce procédé moderne un symbole de sa condition d'écrivain. [...] Abolissant la distance de l'absence, le théâtrophone ressemble à l'écriture selon Proust, en ce qu'il restitue à sa manière une musique retrouvée, un temps retrouvé. Il recrée en outre un chant intérieur, cette mélodie intime dont, à l'image de Vinteuil, tout artiste est habité. Ainsi, le véritable théâtrophone de Proust, c'est son imagination."
Il n'était pas étonnant que, quelques années plus tard, Proust s'intéresse également aux perspectives ouvertes par les travaux sur la vision à distance. Nous y reviendrons.

1930 : trois cents abonnés

Et le théâtrophone connut des jours heureux..., même au domicile de Clément Ader, qui possédait chez lui un énorme champignon permettant à huit auditeurs d'écouter, en monophonie toutefois, la transmission des dernières nouveautés de l'Opéra ou de l'Opéra-Comique.

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Avec les années, les auditeurs, qui étaient le plus souvent des mélomanes devinrent plus exigeants et il fallut améliorer la qualité du service.
Vers les années 1910,— l'électronique n'ayant pas encore fait son apparition—, on recourut au relais Brown pour obtenir une certaine amplification du courant parcourant les lignes et remédier ainsi à l'affaiblissement de l'audition on obtint des résultats intéressants.
Le 24 mai 1913, ce type d'installation permit une transmission audible à Londres, de « Tristan et Isolde » donné à l'Opéra de Paris ; dans l'autre sens, une représentation de l'Alhambra dei Londres était offerte aux auditeurs parisiens.
Les microphones aussi furent améliorés.
Au lendemain de la guerre 1914-1918, chaque abonné au théâtrophone pouvait disposer l'espace d'une soirée et dans le théâtre de son choix, d'un microphone de type « Paris-Rome », c'est-à-dire du même type que les microphones très sensibles dont étaient dotées les opératrices assurant les communications téléphoniques à longue distance.
Mais le système, en lui-même, limitait nombre des bénéficiaires : sans quoi, la rampe du théâtre se serait écroulée sous le poids des appareils, et le nombre des circuits les reliant un à un central serait devenu prohibitif.
En outre, de vieux abonnés compliquaient le travail du personnel en demandant qu'on les place bien entendu « côté violons ».
En 1923, tout se simplifia : on put, à partir d'un microphone rattaché à un amplificateur à lampes, atteindre de multiples usagers.


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En 1930, le théâtrophone était toujours installé rue Louis-Lé-Grand desservait environ trois cents abonnés, dont les demandes d'audition étaient reçues de dix à dix-neuf heures par plusieurs « théâtrophonistes ».
Une grande amélioration était intervenue au domicile des abonnés, ils écoutaient désormais confortablement grâce à un haut-parleur Après des essais avec des appareils à pavillon, la Compagnie avait retenu des diffuseurs Lumière ou SFR, assez semblables à nos haut-parleurs modernes.

Nous terminerons cette étude par l'examen des moyens employés par la Société scientifique industrielle de Marseille pour les auditions téléphoniques du Grand Opéra qui ont eu lieu, aidée du concours actif de M. B. Dupuy, directeur de l'agence de la société générale des Téléphones, dans la Bibliothèque de la Société et à quatre reprises différentes en mars 1882.
Les dispositions adoptées à Marseille étaient les mêmes que celles qui avaient été prises à Paris lors de l'Exposition d'Electricité en 1881.
Bien entendu le nombre des microphones était moindre, de même que les appareils d'audition, mais le système était absolument le même et avait été installé obligeamment entre l'Opéra et le siège de la Société par M. R. G. Brown, Ingénieur Electricien de la Société générale des Téléphones
— Les dispositions prises au grand opéra de Paris sont représentées dans les figures suivantes, qui donnent un dessin de la rampe à gaz montrant de chaque côté de cette rampe une série de microphones.


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A Marseille on s'était contenté des deux appareils placés de chaque côté du trou du souffleur et l'effet n'en a pas été moins bon.
La figure ci contre représente les communications telles qu'elles avaient été établies, afin d'éviter l'induction, les circuits étaient entièrement métalliques, et l'on avait établi quatre fils entre l'Opéra et la salle de la Bibliothèque de la Société, Ces fils étaient reliés à quatre paires de téléphones Ader installés sur une table entourée de sièges et au centre de laquelle ou avait mis une sonnerie devant limiter le temps d'audition accordé aux invités.
On peut voir par notre diagramme que les courants engendrés dans le circuit local des microphones et des bobines primaires placées au théâtre lançaient sur la ligue des courants qui, en la traversant, influençaient les téléphones placés à la Société scientifique industrielle.
Le microphone de droite au théâtre influençait le circuit des fils n°1 et 2 de la ligne dans lequel étaient placés les téléphones 1, 3, 5 et 7 placés à la droite des auditeurs.
Le microphone de gauche faisait passer les courants par les fils 3 et 4 et les téléphones 2, 4, 6 et 8 placés à gauche des auditeurs qui pouvaient ainsi entendre également bien les chants et la musique exécutés des deux côtés de la scène.
La pile, divisée en deux parties, pouvait d'ailleurs, être utilisée par moitié et être renouvelée chaque quart d'heure au moyen d'un commutateur manoeuvrépar l'employé placé au théâtre.
On évitait ainsi l'affaiblissement des sons provenant de l'épuisement de la pile. Un téléphone était mis dans le circuit des fils 1 et 2 pour la personne qui dirigeait les opérations et donnait toutes les cinq minutes le coup de sonnette qui devait renouveler la série d'auditeurs admis par quatre à la fois dans la salle d'audition.

Un autre téléphone placé au théâtre dans le même circuit permettait les communications orales avec ce lieu, pendant les entre actes, quand le commutateur l'introduisait dans le circuit des lignes.

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On se rappellera sans doute avec plaisir l'effet à la fois grandiose et saisissant produit par l'audition téléphonique du Barbier de Séville et de l'Africaine. Les dispositions prises avaient répondu à l'attente de tous .

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Évidemment deux microphones étaient insuffisants et les conditions adoptées à Paris étaient beaucoup plus favorables.
La haute société de Marseille n'en a pas moins pu assister à des séances très-intéressantes au point de vue de l'art et de la science.

Désireuse de pouvoir renouveler quelquefois ces auditions, la Société Scientifique Industrielle de Marseille, d'accord avec le Cercle Artistique, a établi une ligne permanente à deux fils qui lui permet de maintenir des communications téléphoniques constantes entre les deux établissements, aussi bien pour l'audition musicale que pour les échanges verbaux.
Cette ligne peu d'ailleurs être utilisée pour d'autres expériences relatives à la lumière électrique et au transport de la force à distance. La Société Scientifique est aussi reliée, au moyen des appareils d'Ader, au réseau téléphonique de Marseille.
L'un de ces deux fils est installé comme une communication téléphonique ordinaire. Le second, spécialement réservé aux auditions musicales, aboutit, d'un côté, à la salle de musique du Cercle Artistique où sont placés les microphones, les piles et les bobines d'inductions.
Une série de douze téléphones aboutit à la salle des Commissions de la Société Scientifique Industrielle de la manière indiquée par la figure 37. On voit que, dans ce cas, il a suffi d'un circuit ordinaire avec un seul fil et la terre pour retour. Cette disposition suffisait en effet en cette circonstance dans laquelle l'induction n'était pas à redouter, elle est d'ailleurs très-effective par suite d'un groupement particulier des appareils.


On a fait récemment, entre l'Hippodrome et les bureaux de la Compagnie Internationale des Téléphones, 15, place Vendôme, une expérience intéressante.

L'orchestre de l'Hippodrome, qui joue dans la journée et le soir pour les deux représentations quotidiennes, a été entendu par de nombreux invités réunis place Vendôme. Il y avait là 90 récepteurs téléphoniques ; chaque personne en ayant deux, 48 personnes pouvaient entendre à la fois.
Nous allons entrer dans quelques détails sur les dispositions prises par le docteur J. Moser pour obtenir ce résultat .
Grâce à la complaisance de l'Administration de l'Hippodrome et à celle de la Société Générale des Téléphones, on a pu faire usage des deux fils qui servent habituellement à la Direction de l'Hippodrome qui compte parmi les abonnés du réseau de Paris. Mais de ces deux fils, il en fallait un pour l'échange des conversations, ordres donnés, avis transmis, etc., etc., tout à fait indispensables pour mener à bien une opération exécutée, comme celle-ci, entre deux points éloignés.
Il ne restait donc plus qu'un seul fil pour l'audition musicale.
Voici comment les appareils étaient disposés à l'Hippodrome :
II y avait 25 transmetteurs microphoniques montés sur une planche unique, placée elle-même un peu inclinée sur l'horizontale et au-dessus du chef d'orchestre. Les microphones étaient, bien entendu, au-dessus de la planche, protégés de la poussière par une boîte légère.La planche elle-même était suspendue par quatre cordes.

La pile agissant sur ces microphones était composée de 3 accumulateurs Ueynier-Faure au début ; l'intensité du courant était indiquée par un galvanomètre Deprez placé dans le circuit ; on la maintenait sensiblement constante en ajoutant à ces 3 accumulateurs un autre, puis un autre, jusqu'au nombre total de 9. Le résultat aurait pu être obtenu également avec 5 éléments Daniell modèle Reynier, qui ont une très-faible résistance et une constance absolue. Le courant de la pile est dérivé entre les 25 microphones, puis dans les 24 fils primaires de
24 bobines d'inductions, montés par 2 en série et 12 en dérivation. L'intensité du courant est de 12 ampères environ.
Les 24 circuits secondaires des 24 bobines d'induction sont groupés par 4 en série et 6 en dérivation. La résistance de chacune est de 300 ohms, soit pour l'ensemble 1200 ohms.
La ligne de l'Hippodrome, de 3512 mètres de longueur, aboutit 96, rue des Petits-Champs, à l'un des bureaux de la Société Générale des Téléphones auquel arrive également la ligne de la place Vendôme qui est très-courte. Avec le raccordement à la rue des Petits-Champs, la communication était établie. Les récepteurs du type Ader étaient groupés par 16 en série et 6 en dérivation.
La netteté de l'audition a été parfaite et il a paru que tous les auditeurs, ceux de l'après-midi et ceux du soir, partaient satisfaits.
Nous ne croyons pas qu'on puisse contester qu'il y ait là un progrès sensible sur le mode d'installation mis en oeuvre entre l'Opéra et le Palais de l'Industrie, lors de l'Exposition d'électricité de 1881.

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Il y avait d'un côté 10 microphones et de l'autre 80 récepteurs ; mais la moitié seulement des récepteurs était en service à la fois ; il y avait donc en fait 4 récepteurs par microphone avec deux fils, soit en tout 20 fils. La réduction du nombre des fils facilitera la pose ; elle diminuera le coût de l'installation, et par suite permettra un plus grand nombre d'applications.
L'expérience de M. Moser a été faite avec un seul fil, parce que le second avait un autre usage ; mais nous ne prétendons pas que, dans d'autres cas, il faille n'employer qu'un fil; tout au contraire, nous pensons qu'il conviendra généralement d'unir ainsi deux fils pour éviter les bruits d'induction.
Nous dirons en terminant que dans les dispositions de M. Moser la principale nouveauté consiste dans l'association en dérivation des
25 microphones, dans l'association des 24 fils secondaires des bobines d'induction en tension et en quantité comme on fait avec des éléments de pile.
Avant de terminer cette étude, nous dirons quelques mots de la fanfare Ader qu'on voyait à l'Exposition Universelle d'électricité de 1881 et qui a été également présentée à la Société Scientifique Industrielle de Marseille.
Cette fanfare, telle qu'on l'avait installée au Palais de l'Industrie, consistait en quatre cors de chasse ou récepteurs semblables. Chaque récepteur avait sa ligne et sa pile (figure ci contre). Pour une salle de dimensions ordinaires, comme l'est celle des conférences de la Société Scientifique Industrielle, un seul cor suffisait et donnait une sonorité assez grande.


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Le récepteur consiste en un grand et fort aimant permanent en fer à cheval, dont les pôles sont très-rapprochés l'un de l'autre. Une feuille en laiton remplit l'espace compris entre ces pôles. Un fil de cuivre recouvert de soie floche est enroulé autour de chaque pôle en forme de bobine; ces bobines arrivent jusqu'à 5 m/m des bords des pôles de l'aimant et forment un circuit dont les extrémités se rattachent à des bornes placées sur le socle de l'appareil.
L'aimant est fixé à l'intérieur de façon à pouvoir pivoter sur l'axe W et on le renferme dans une boîte en bois munie d'une ouverture latérale. Cette ouverture est close par un diaphragme en bois de 10 cm de long sur 08 de large et n'a qu'un demi millimètre d'épaisseur. Collé au centre de ce diaphragme se trouve un petit bloc de bois C sur la face intérieure duquel est fixée une petite armature en fer doux d de 9 m/m de long, 4 m/m de large et un 1/2 m/m d'épaisseur.
Le fer à cheval est alors ajusté au moyen de la vis E de manière à placer cette petite armature juste en face et presque à toucher ses pôles. Une boîte en bois dans le centre de laquelle on perce un orifice de 25 m/m de diamètre est alors fixée au-devant du diaphragme. Cette boîte a pour effet de protéger le diaphragme et de former autour de lui une chambre résonnante qui augmente l'intensité du son. Celui-ci peut d'ailleurs être considérablement amplifié lorsqu'on fixe à la boîte sonore un pavillon de trompette dont les vibrations métalliques ajoutent à l'effet obtenu.

Le transmetteur ressemble à celui du condensateur chantant ; il consiste en un diaphragme de 1/2 m/m d'épaisseur ayant un morceau de platine soudé à son centre. Le diaphragme est fixé dans un anneau métallique sous lequel est placée, dans un cadre, une vis isolée à pointe de platine qui permet le réglage.
Pour l'obtenir, il suffit de tourner la vis du transmetteur jusqu'à ce qu'elle vienne affleurer le diaphragme métallique.


Quand la ligne est longue, il y a avantage à se servir d'une bobine d'induction en mettant le transmetteur et la pile sur la primaire et le récepteur et la ligne sur la secondaire. La résistance des bobines du récepteur doit, dans ce cas, être de 100 ohms.
Quand la ligne est courte, il est préférable de se dispenser de la bobine d'induction et de mettre le récepteur, le transmetteur et sa pile dans le circuit direct de la ligne. Dans ce cas, la résistance des bobines du récepteur ne devrait pas dépasser 3 ohms.
Six à huit éléments de pile sont suffisants dans les deux cas.

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Pour faire fonctionner l'appareil il suffit de chanter dans l'embouchure du transmetteur à la façon du mirliton et non pas comme si l'on soufflait dans l'embouchure d'une trompette.

Les vibrations produites ainsi ouvrent et ferment alternativement le circuit de la pile dont le courant attire et repousse de même l'armature en fer doux fixée au diaphragme du récepteur.
En effectuant ces différents mouvements, l'armature frappe les pôles de l'aimant permanent avec assez de force pour produire les sons d'un cor de chasse.

La construction du récepteur présente quelques difficultés, et l'on ne devra pas se laisser décourager si l'on s'aperçoit que la petite armature refuse de venir frapper les pôles de l'aimant permanent chaque fois que le circuit est ouvert ou fermé. Cette armature reste parfois même collée à l'aimant, mais ce n'est qu'une simple question de dimensions exactes du diaphragme en bois qui ne doit être ni trop grand, ni trop petit, ni trop flexible, ni trop rigide.

Le brevet ADER fut vendu partout dans le monde et le théâtrophone fut utilisée jusqu'en 1926, à Moscou et 1937 à Paris. Bien sûr, son succès déclina beaucoup après la découverte des ondes hertziennes.
Ader fut surpris de cet engouement, autant qu'il fut surpris de l'échec commercial de certaines de ses inventions. Mais grâce au théâtrophone et au téléphone, Ader devint multimillionnaire

TÉLÉPHONES ET PHONOGRAPHES
A L'EXPOSITION UNIVERSELLE de 1889

L'illustration du samedi 19 Octobre 1889.

La science moderne a parfois le mot pour rire.
Si tous les ans elle dote l'humanité de canons, explosifs, ou projectiles de plus en plus meurtriers, étrennes utiles mais peu agréables, elle daigne parfois nous offrir en compensation quelque invention ayant, outre son côté pratique, le caractère et le charme de jouets merveilleux, tels le phonographe et le téléphone.

Aussi ces instruments constituent-ils une véritable attraction pour les nombreux visiteurs de l'Exposition, habitants des pays ou des localités où l'art de causer ainsi avec un interlocuteur invisible et placé à grande distance est encore inconnu.
Les curieux se pressent chaque jour, faisant queue le long des câbles de velours rouge qui protègent les appareils mystérieux contre la poussée de leurs admirateurs, dans l'exposition Edison ou au pavillon des téléphones, près la tour Eiffel.
C'est la physionomie de ce coin de l'Exposition que notre dessinateur a croquée sur le vif pour le plus grand plaisir de nos lecteurs.


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Voici, d'abord, les amateurs du phonographe alignés devant la boîte carrée d'où partent les fils conducteurs comme les tentacules d'une pieuvre ; ils ont appliqué à leurs oreilles les récepteurs et sont sous le charme : l'instrument répète, en scandant lentement chaque mot, la phrase gravée sur son rouleau ; une vieille toute attentive sourit avec satisfaction : « C'est qu'on entend comme si quelqu'un vous parlait tout de même, on n'a pas idée de ça à Carpentras ! » Un enfant à grand chapeau marin rejeté en arrière regarde la boîte avec de grands yeux, il espère surprendre le truc; puis deux bons provinciaux, un vieux et un jeune, assez absorbés, les malheureux! pour ne pas voir à deux pas le chef-d'oeuvre d'un inventeur qui en vaut bien d'autres, une toute charmante Parisienne, en toilette exquise. Elle passe, toisant dédaigneusement du coin de oeil les chapeaux mous déformés, et le bibi invraisemblable de la bonne vieille !
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Tout le monde ne partage pas, Dieu merci ! l'indifférence de ces quidams pour le sexe charmant.

Si la galanterie était chassée du reste de la terre, elle se retrouverait certes chez le gros monsieur de notre second dessin (où va-t-elle se nicher ?).
Malgré son épaisse carrure, les rides qui étoilent le coin de sa paupière, sa grosse moustache et ses cheveux mal peignés, il a gardé les saines traditions de galanterie et, qui sait ? quelque prétention à être encore aimable, sinon aimé.

Aussi c'est avec un geste gracieux (ou du moins il l'espère) qu'il passe à sa voisine les récepteurs sortis tout chauds de ses oreilles.
II sourit et esquisse un malin clignement d'œil : dame! c'est le répertoire d'un calé-concert un peu risqué que répète en ce moment l'inconscient instrument. « A vous, belle dame ! » dit-il tout haut, et in petto: « Vous allez en entendre de drôles ! »

La jolie femme reçoit en baissant les yeux le compliment de son adorateur suranné, et risque ses deux mignonnes oreilles ; si le refrain est un peu trop leste, tant pis !


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Voici venir l'abbé Bontemps : le député de sa circonscription a organisé un train à prix réduits pour ses électeurs, et l'abbé ne l'a pas manqué, soyez-en sûrs.
Quelle occasion de voir toutes les merveilles dont l'entretient chaque matin l'Univers ! et surtout le téléphone, cette merveilleuse découverte de la science.
Car l'abbé Bontemps n'est pas un de ces esprits arriérés qui enverraient encore au bûcher, s'il leur était loisible, les successeurs de Galilée.
Non, il sais faire la part du progrès. Son moral, pas plus que son physique de bon vivant, gras et réjoui, n'offre de ressemblance avec la Torquemada à l'esprit atrabilaire, déplorable conséquence d'un estomac délabré.
Après une longue attente, il est arrivé jusqu'à l'instrument : son devancier lui tend les récepteurs : la face hilare, l'abbé les porte à ses oreilles, avec une certaine émotion.
Il va être initié aux mystères de la science moderne !
il écoute ! sa physionomie passe par toutes les expressions de l'attention , de l'intérêt, de la surprise, pour tomber de l'indignation
et dans la consternation. Il est trop initié.
Qu'a-t-il donc entendu ? Ah! voilà : c'est que le téléphone est relié un café-concert et au moment ou le brave abbé entrait en communication, une étoile quelconque attaquait à plein gosier le refrain d'une chanson dont voici le premier vers :
Mon pantalon est décousu (bis), etc.


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L'abbé n'en a pas voulu savoir davantage sur les désordres de la toilette intime de cette jeune personne, nous aimons à le croire ; il a précipitamment raccroché les récepteurs, et reste pensif, les pouces passés mélancoliquement dans la ceinture qui sangle son robuste abdomen.
« Encore un instrument de perdition ! ô mes illusions ! »
Et voilà un ennemi de plus pour Edison !

Puis c'est une longue file d'auditeurs le long des murailles du pavillon téléphonique ; les uns nous montrent la face, les autres le contraire.
Au premier plan, une bien jolie femme assise, enchantée d'une joie enfantine.
Son voisin a de terribles distractions, et, entre nous, il regarde, je crois, plus qu'il n'écoute.
Quant à la jolie voisine, gageons qu'à son tour elle écoute moins qu'elle ne regarde. Comment cela finira-t-il ? Par un mariage peut-être, le mariage au téléphone.
Que de petits romans dont le dénouement aura lieu devant M. le maire auront commencé ainsi dans la galerie des machines, sans que leurs acteurs aient aperçu l'observateur, dessinateur ou romancier, qui les guettait le crayon à la main, faisant de leur naissante idylle un document !
Le spectacle, enfin, est vraiment curieux.


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Louis D'HURCOURT.
L'illustration du samedi 19 Octobre 1889.

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Voyez-vous un de nos grands-pères subitement ressuscité au milieu de la pièce, et voyant cette file de gens silencieux, collés au mur, écoutant avec attention, l'oreille appliquée à des tampons qui ne rendent aucun son? Il se croirait dans une maison de fous, évidemment.
Pour finir, encore deux petites femmes : l'une absorbée par le phonographe, l'autre par le téléphone.

La première, une brave nourrice que la Bourgogne regrette, écoute de ses deux oreilles, ahurie et charmée tout à la fois, pendant qu'assis gravement à ses pieds, Bébé se creuse peut-être sa petite cervelle pour deviner ce que Nounou peut bien faire là. Quand Bébé aura vingt ans, qui sait si téléphone et phonographe ne seront pas démodés et remplacés par d'autres inventions, plus abracadabrantes encore ?

La dernière, dilettante sans doute, a choisi l'appareil en communication avec . l'Opéra-Comique ; le hasard l'a servie, on achève un duo d'amour.
Bercée par la voix chaude du baryton, elle a fermé les yeux, et l'illusion a été si forte que, le morceau terminé, elle pose les récepteurs et applaudit bruyamment, oubliant que le bruit de ses petites mains entrechoquées ne saurait arriver jusqu'à l'objet de son enthousiasme.
Encore un artiste qui ne connaîtra pas son bonheur!
Et voilà quelques bons moments de passés aussi bien pour ceux qui écoutent que pour ceux qui vont regarder écouter.

Les premiers s'en reviennent du Champ-de-Mars enthousiasmés pour les inventions nouvelles ; les seconds publient des croquis et des articles qui feront peut-être se liâtei vers cette partie de l'Exposition les indifférents et les retardataires.