La SOCOTEL

Introduction

Plusieurs événements vont, en 1961-1962, profondément infléchir l'économie des développements techniques. Nous en retiendrons deux.
Le premier est la création du Centre de recherche de Lannion, CRL. Dès 1957, P. Marzin s'était saisi avec art de la loi de décentralisation votée en 1955 et des dispositions incitatives attenantes pour implanter, dans une Bretagne complètement délaissée par le développement économique français, un deuxième site du CNET, à Lannion précisément. Ayant un temps envisagé d'en faire un centre essentiellement tourné vers les études spatiales naissantes, P. Marzin se ravise et nomme en 1962 L.-J. Libois comme directeur. Sous l'œil «amusé» des ingénieurs du corps des télécommunications de Paris, L.-J Libois va tourner à son avantage cette implantation excentrée. Fort de l'appui prononcé de Marzin et de son complice, René Pleven, ancien ministre de la Quatrième République et influent président du Conseil régional de Bretagne, Libois obtient une montée en charge du CRL très rapide : 142 personnes en 1962, 584 en 1964 (en incluant la nouvelle station spatiale de Pleumeur-Bodou) et 810 en 1967. De plus, le CRL devient le nouveau centre de gravité de la commutation électronique du CNET.

Le deuxième événement qui change la donne est la constitution d'une organisation nouvelle, SOCOTEL, regroupant l'administration (DGT et CNET) et les principaux industriels de la commutation. Inspiré par le modèle Sotelec mis en place pour la transmission dans l'immédiat après-guerre et par l'exemple plus récent des britanniques (JERC), la Socotel est un lieu de débats techniques, de mise en commun d'études et de brevets, de coordination des recherches effectuées en France, mais surtout d'enjeux stratégiques à travers la répartition des marchés d'études et des collaborations entre le CNET et les industriels.

P. Marzin, ce n'est un secret pour personne, pèse au sein de ces organismes d'économie mixte, de tout le poids du CNET pour favoriser l'émergence d'une filière industrielle française face à la prédominance des filiales de PITT. La domination exercée par les deux filiales américaines (LMT et CGCT), en termes de parts de marchés d'équipements achetés par l'administration, reste particulièrement forte pour le secteur de la commutation (73 % en 1955, 57% en 1961). D'où, après de difficiles négociations, une intégration différée de ces deux compagnies au sein de Socotel. Désormais, les choix de partenaires pour l'industrialisation des divers systèmes se jouera au sein de la Socotel qui « suit » le déplacement géographique du centre de gravité de la commutation électronique : tous les groupes industriels créent bientôt leur propre site à Lannion autour du CNET et un laboratoire Socotel y est ouvert dès 1963.

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Création de la Socotel

Henri Docquiert
a été chef adjoint du cabinet d’Augustin Laurent (ministre des PTT en 1944-1945, puis ministre d’État en décembre 1946-janvier 1947), il fut ensuite chef du secrétariat particulier d’Eugène Thomas ministre des PTT en 1945, puis directeur de son cabinet au secrétariat d’État chargé des PTT en octobre 1947-1948 puis au secrétariat d’État à la présidence du conseil, enfin de nouveau son directeur de cabinet en 1958.
Après cette expérience dans le secteur des postes et communication, Henri Docquiert créa, en 1959, une entreprise partenaire des PTT, la SO.CO.TEL : Société mixte pour le développement de la Commutation dans le domaine des Télécommunications.
Il en tira un livre "Expérience de coopération État-Industrie" sur une des premières tentatives de coopération Administration/Industrie, naissance de la commutation électronique qui introduisit les ordinateurs dans les centraux téléphoniques, technique largement répandue aujourd’hui dans le monde.
Puis, il passe dans le privé pour animer de 1970 à 1981 le Syndicat des Industries Téléphoniques et Télégraphiques (aujourd'hui SI3T), où il se consacre notamment à l'exportation des techniques françaises et à la création d'une Europe des industries des Télécommunications. " .

Lors d’un colloque organisé en 1997, pour le cinquantenaire du CNET (Centre National d’Études des Télécommunications), le directeur général honoraire des Télécommunications, L.J.Libois, évoqua ainsi l’action menée par Henri Docquiert : « C’est, en janvier 1959, qu’est créée SOCOTEL sous l’impulsion et grâce à la ténacité de Henri Docquiert (…). La mission principale de la SOCOTEL était de coordonner les recherches de l’administration et de ses principaux constructeurs dans le domaine de la communication électronique et de mettre en commun les brevets et certaines études et de faire progresser la normalisation »

Deux sociétés d'économie mixte, Sotelec et Socotel groupent l'administration des P.T.T. et ses fournisseurs d'équipement de transmissions et câbles interurbains (Sotelec) et de matériel de commutation (Socotel).
Elles coordonnent la politique de recherche en matériels nouveaux. Chacun des participants met dans un " pot " commun ses brevets.
Grâce à ces études, l'administration s'adresse, en priorité, pour ses commandes, dont 90 % sont passées de gré à gré, aux sociétés regroupées au sein de Sotelec et Socotel.

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Société mixte pour le développement de la technique de la commutation dans le domaine des télécommunications (SOCOTEL ).

Extrait du rapport du Sénat de 1962

I. — Généralités.
La SOCOTEL est une société d'économie mixte, à laquelle participent, en tant qu'associés, l'État, d'une part, et les grands constructeurs de matériel de commutation téléphonique destiné à l'État, d'autre part. Au 5 février 1959, date de création de la SOCOTEL, ces constructeurs étaient au nombre de trois :
- l'Association des Ouvriers en Instruments de Précision (A. O. I. P. ),
- la Compagnie Industrielle des Téléphones (C. I. T. )
- la Société des Téléphones Ericsson ( S. T. E. ).
Depuis le 1 " janvier 1961 , le nombre des sociétés participantes a été porté à cinq, par adjonction de
- la Compagnie Générale de Constructions Téléphoniques ( C. G. C. T.)
- la société « Le Matériel Téléphonique » (L. M. T.).

La SOCOTEL est une société d' études et de recherches dont l' objet est la réalisa tion d'installations destinées aux administrations de l'État par :
— l'acquisition, la répartition et la défense des droits de propriété industrielle ;
— la constitution d'un laboratoire commun chargé, pour le compte des associés , de l'étude, de la mise au point et du développement de systèmes de commutation téléphonique et télégraphique et essentiellement de ceux qui utilisent l'électronique ;
— la coordination technique des travaux des associés et la constitution d' une documentation.
Les dépenses sont financées par les cotisations des associés, SOCOTEL n'ayant pas d' activité commerciale et étant dépourvue de but lucratif. L'État participe à ces dépenses de fonctionnement et d' équipement, depuis le ler janvier 1961 , à raison de 50 % et chacune des cinq sociétés à raison de 10 % .
La SOCOTEL est administrée par un conseil de gérance comprenant un représentant par société et cinq représentants de l'État, à savoir : le Directeur du Centre national d'Études des Télécommunications (CNET) , président, le Directeur général des Télé communications, le Directeur du Budget au Ministère des Finances et des Affaires économiques et deux ingénieurs généraux des Télécommunications.
Le contrôle économique et financier est assuré par le Contrôleur financier près le Ministère des Postes et Télécommunications.

II. — Bilan au 31 décembre 1961
.
Le bilan de la société au 31 décembre 1961 présente un actif et un passif en équilibre pour un total de 462.066,31 F. Le détail de ce bilan, établi suivant le cadre type prévu au plan comptable général, est fourni par le tableau ci-annexé.

III. — Activités de la société en 1962.
Les activités de la société en 1962 peuvent être caractérisées par :
— un développement des travaux des sous-commissions et groupes de travail ;
— la mise en place des différentes unités du laboratoire commun et les premières réalisations de celui-ci ;
— la création d' un service de télétrafic et de recherche opérationnelle ;
— la négociation d' un accord de brevets avec la Western Electric Company ;
— la publication d'une revue à diffusion internationale et d'un bulletin de liaison interne.

a) Travaux des sous-commissions et groupes de travail réunissant les techniciens de l'État et des sociétés :
— SOCOTEL S 1 : études relatives à la mise en service, en juillet 1962 dans le secteur de Grasse, de trois prototypes, têtes de série, s'insérant dans la gamme des autocommutateurs pour zones rurales et suburbaines ;
— Normalisation des matériels Crossbar et leur adaptation au réseau téléphonique français ; mise au point des documents de définition de ces matériels en vue de l'établissement des dossiers de normalisation destinés à la Direction générale des Télécommunications ;
— Signalisation : mise au point et réalisation de prototypes d'équipements multifréquences utilisant le nouveau système de signalisation entre centraux Crossbar en France ;
— Central téléphonique électronique : élaboration des ensembles constitutifs ;
— Taxation électronique : définition des systèmes à réaliser expérimentalement dans les centraux téléphoniques Crossbar ; mise à l'essai d'un nouveau système dans le central télégraphique « Grenelle » de Paris ;
— Réalisation de prototypes de postes téléphoniques ;
— Établissement d' une maquette de central Crossbar CP 400 semi-électronique.

b ) Le laboratoire commun :
A la fin du premier semestre 1962, le laboratoire commun a pu recevoir une structure définitive, les trois unités qui le constituent (bureau d'études, unité de réalisation et de montage, laboratoire d' adaptation et de contrôle) ayant été par ailleurs regroupées à Lannion en liaison avec la décentralisation du C. N. E. T.
En 1962, les activités du laboratoire commun sont, pour l' essentiel, consacrées, en coopération avec le C. N. E. T. , à la réalisation du central téléphonique électronique expérimental, et notamment à ses deux parties principales :
— le réseau central entièrement électronique ;
— le satellite téléphonique semi-électronique utilisant un commutateur Crossbar comme point de connexion.
Par ailleurs, le laboratoire commun a entrepris :
— la normalisation des supports mécaniques des prototypes de commutation électroniques ;
— l'étude de différents systèmes de test et de contrôle à utiliser pour la vérification des équipements de commutation.

c) Service de télétrafic et de recherche opérationnelle :
Ce service a été créé au l" r janvier 1962. Il a procédé à des études d'observation de trafic, à caractère théorique ou expérimental, en vue d'une utilisation rationnelle des équipements utilisés ou à utiliser par l'Administration.

d) Accord de brevets :
Un accord de licences a été négocié, au cours de l'année 1962, avec la Western Electric, société américaine qui possède un des plus importants patrimoines de droits de propriété industrielle dans le domaine des télécommunications.
SOCOTEL et ses associés (le Ministère des Postes et Télécommunications et les cinq sociétés participantes) bénéficieront notamment, par la signature de cet accord, - d'une réduction des taux de redevances qui - leur étaient antérieurement consentis par la Western.

e ) Publications :
Au cours de l'année 1962 , la SOCOTEL a publié :
— un bulletin d'information exclusivement destiné aux services des associés ;
— une revue « Commutation et Électronique » diffusée à l' échelon international.

IV. — Projets pour 1963.
Les études confiées par l'État et les sociétés participantes aux commissions et groupes de travail ainsi qu'au laboratoire commun de SOCOTEL s' étendront en 1963 :
— au centre intermédiaire de la chaîne d'autocommutateurs SOCOTEL SI ;
— à la réalisation définitive du central expérimental électronique ;
— à la mise au point de deux systèmes nouveaux de taxation téléphonique électronique ;
— à la transmission de données sur circuits télégraphiques ;
— à la mise au point des autocommutateurs de type Crossbar dans le réseau de Paris et dans les grands réseaux de province.

...

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Parmi les retombées :

- 1960 : Premier succès - la gamme SO.CO.TEL S1 et la normalisation du Crossbar
Les Commutateurs téléphoniques crossbar français sont normalisés en 1963 sous l'autorité de la SOCOTEL et prêts pour un déploiement massif en France.

- 1960 : Le poste téléphonique SO.CO.TEL S.63
L'administration met en circulation le modèle de téléphone S63
Un peu plus tard arrive le téléphone à clavier multifréquences, pour chiffrer le numéro à appeler et de bénéficier des nouveaux services ...
C'est le système à fréquence vocal qui consiste à envoyer la numérotation sous forme de signaux à deux harmoniques (tones) dans la plage de fréquence vocale [300 Hz, 3400 Hz]. A chaque touche correspond une combinaison d'une fréquence basse et une fréquence haute.

- 1961-1962-1963 : Une création originale : le Laboratoire Commun

-
1975 L’automatisation du réseau téléphonique de la Région Parisienne commencée le 22 septembre 1928 est totalement achevée au bout de 47 années, par la mise en service d'un Centre de Secteur Socotel S1 de 200 lignes à Forêt-le-Roi (91).
Ce sont les commutateurs téléphoniques ruraux CP100 et sa variante simplifiée qui n'est pas à autonomie d'acheminement : le Socotel S1.

- 1964-1965-1966 : "Les Trois Glorieuses" en commutation électronique et le Colloque International de 1966

- Le code multifréquence Socotel ou DTMF (Dual Tone Multi Frequency)
MF SOCOTEL CCITT N°5 (expérimenté en 1963) R2 Analogique (normalisé en 1968) R2 Numérique CCITT n°6 CCITT n°7
Jusqu’à l’avènement du réseau numérique intégré, la signalisation interne au réseau téléphonique est aussi basée sur l’émission d’une combinaison de deux fréquences. Cette signalisation est communément appelée signalisation multifréquence (R2 multifréquence, MF Socotel, CCITT n°5 ...) Elle est du type voie par voie c’est-à-dire qu’à une voie de signalisation est rigidement associée une voie d’échange de signalisation. Ce système a été défini pour les systèmes à commutation électromécanique .

Le code MF Socotel utilise la combinaison de 2 fréquences différentes parmi n pour transmettre la signalisation dans les commutateurs téléphoniques.
Ces n fréquences sont situées dans la bande téléphonique c’est-à-dire dans la bande vocale de 300 Hz à 3400 Hz.
En exploitation nationale, on choisit une combinaison de 2 fréquences parmi 5 (n=5), ce qui offre une possibilité d’avoir 10 signaux possibles.
Les fréquences pouvant être utilisées sont :
f0 = 700 Hz f1 = 900 Hz f2 = 1100 Hz f4 = 1300 Hz f7 = 1500 Hz.
En exploitation internationale, on choisit parmi 6 fréquences différentes. En plus des 5 fréquences précédentes, on a une fréquence supplémentaire f11 = 1700 Hz.
Il est à noter qu’une autre fréquence appelée fréquence de contrôle fc est employée pour accuser la réception des combinaisons de fréquences émises. La valeur de fc est de 1900 Hz.
Voici les codes des signaux :
- signaux en avant (demandeur vers demandé) :
o Code a : code d’accès indiquant la nature de la combinaison à établir.
o Code b : code correspondant aux chiffres à transmettre.
o Code c : code de catégorie de l’abonné.
- signaux en arrière (demandé vers demandeur)
o code A : code de sélection destinée à demander ou à transmettre les infos nécessaires à la sélection.
o Code B : code d’état du demandé indiquant à l’enregistreur de départ de la ligne demandée.
o Code C : code d’identification du demandeur, sert à demander la catégorie et le numéro du demandeur.
Code R2 Multifréquence (MF)
Ce type de code utilise pour la signalisation deux groupes de fréquences. En effet, 6 fréquences sont disponibles pour transmettre les signaux vers l’avant. Ce sont les fréquences allant de 1380 Hz à 1980 Hz, et espacées de 120 Hz les unes des autres (1380, 1500, 1620, 1740, 1860,
1980 Hz). D’autre part, 6 fréquences sont employées pour la transmission des signaux en arrière.
Elles sont situées entre 540 Hz et 1140 Hz (540, 660, 780, 900, 1020, 1140 Hz).
Il est à préciser que les signaux sont transmis sous forme de 2 fréquences parmi ces fréquences, que ce soit vers l’avant ou vers l’arrière.
Comme on le constate, la fréquence de contrôle est, pour ce code, remplacée par la combinaison de multifréquence vers l’arrière. En fait, cette dernière permet l’asservissement de l’échange, la transmission de chaque signal avant entraîne la transmission d’un signal arrière
associé.
Les signaux sont classés comme suit :
- Vers l’avant : signaux du groupe I et signaux du groupe II. Ce sont les signaux suivants :
o signal d’adresse
o indicateur d’indicatif du pays et demi suppresseur d’échos
o chiffre de langue ou de discrimination
o indicateur d’appel d’essai
o indicateur de nature de circuit
o signal de fin de numérotation
o signal indiquant la catégorie du demandeur
- Vers l’arrière : signaux de groupe A et signaux du groupe B. Il s’agit des signaux ci-après :
o signaux demandant l’envoi des signaux d’adresse
o signaux demandant des renseignements sur les circuits
o signaux demandant des renseignements sur la communication
o signaux d’adresse complète
o signaux indiquant la situation de la ligne de l’abonné demandé.
Les groupes primaires sont I et A, les groupes secondaires sont II et B.
Code CCITT n° 5
Le système de signalisation n° 5 est encore un système de type multifréquence. Il utilise en effet la combinaison de 2 fréquences choisies parmi 6. La signalisation est effectuée par l’envoi simultané de ces 2 fréquences. Elles sont situées dans la bande vocale. Ce sont les fréquences 700
Hz, 900 Hz, 1100 Hz, 1300 Hz, 1500 Hz et 1700 Hz. La signalisation a lieu section par section et se fait en bloc dans le sens amont vers l’aval.

- 1977-80 Les centraux éléctroniques viennent remplacer les centraux électromécaniques à bout de souffle.
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Postes, téléphone et télécommunications ; Direction générale des télécommunications (1971-1978)

Un travail plus fouillé permettrait d'établir des statistiques sur la répartition des marchés par zones.
Le versement de la D.T.R.N. donne des renseignements utiles en microéconomie, dans une branche essentielle pour l'ensemble des Télécommunications.
La Compagnie Industrielle des Télécommunications CIT-ALCATEL, la Compagnie Générale de constructions téléphoniques (CGCT) obtiennent également des marchés conséquents.
Les pourcentages de répartition des commandes entre les industriels de la SOCOTEL et la SOTELEC ne varient que lentement.
Les procédures suivies dans les domaines de la commutations et de la transmission sont stables.
. Le fonds
La Direction des Télécommunications Réseau National (D.T.R.N.) est un service spécial des Télécommunications, qui a connu diverses dénominations.
Les lignes souterraines à grande distance deviennent en 1957, Les Lignes à grande distance : le service a été chargé de l'exploitation des faisceaux hertziens.
En raison de l'importance sans cesse croissante du trafic interurbain écoulé sur le réseau national, les Lignes à grande distance constituent en 1972 la D.T.R.N., chargée de la quasi totalité des transmissions interurbaines.
L'étude des marchés versés par la D.T.R.N. démontre que THOMSON-CSF, conjointement et solidairement avec la Société Anonyme de Télécommunications dispose d'un quasi-monopole en matière de faisceaux hertziens ; la société "Télécommunications radioélectriques et téléphoniques" ne traite que quelques dossiers.
Pour les marchés de fourniture, la Direction des Télécommunications Réseau National fait appel à de multiples établissements : Société Union Radio-Import, Société Lignes télégraphiques et téléphoniques, Société Marconi, Société Pierre Fontaine, Wandel R. Goltermann, Société allemande Elekro-Metall, Société Tektronix, Société Philips Industrielle et Commerciale Bobigny, Société Hewlet Packard France, Société Henri Pouyet, Société Salies S.F., Société Ferisol, Société Chauvin-Arnoux, Société Camusat-Gueguen, Société Le matériel physico-chimique, Société française de l'Electro-Résistance, Société Spektrix. permettant de mettre en place un dispositif de contrôle d'une valeur certaine.
En 1964, est institué un "Service central de contrôle des prix" placé sous la responsabilité directe du secrétaire général du Centre National d'Etudes des Télécommunications.
Le décret n°76-89 du 21 janvier 1976 tend à améliorer la mise en concurrence des marchés publics. La publicité donnée aux annonces de marchés est accrue et des délais suffisants sont accordés pour l'étude et la remise de leurs offres.
Cette règlementation a fait l'objet de la circulaire du 21 avril 1976. Elle s'applique surtout aux marchés de travaux de bâtiment de la Direction Générale des Télécommunications, qui sont également soumis, de par les deux directives de 1971 du Conseil des Communautés européennes et les circulaires d'application du 6 juin 1973 et du 27 juin 1974, à la mise en concurrence dans le cadre de la Communauté économique européenne.

Les marchés de transmission, qui dépendent de SOTELEC, les marchés de commutation -SOCOTEL- restent à l'écart de ces changements.
Ils présentent des caractéristiques très particulières, par suite du nombre restreint d'entreprises en mesure de fournir un matériel spécialisé et des liens qui les unissent. Ces liens établis avec les sociétés au sein de la SOTELEC et de la SOCOTEL, les conditions dans lesquelles sont étudiés, puis négociés les prix de série, les accords de rabaix sont incompatibles avec une modification profonde de la répartition des commandes.
L'appel aux techniques étrangères est le problème pendant en matière de télécommunications.
Dans le domaine de la transmission (cf. SOTELEC), les intérêts français ont été assez bien défendus.
Le marché des Câbles est assuré par la Société "Les câbles de Lyon", la Société "Lignes télégraphiques et téléphoniques", la Société Anonyme des Télécommunications.
La fourniture des câbles de réseaux est confiée à de nombreuses sociétés, notamment l'Association coopérative d'ouvriers en matériel électrique, la Société "Les câbles de Lyon", la Société industrielle de liaisons électrique, la Société Tréfimetaux, la Société Gordons et Equipements, la Société "Lignes télégraphiques et téléphoniques", la Société Anonyme de Télécommunications, la Société Métaleure, la Société Thomson-Brandt.

Par contre, les sociétés de commutation de SOCOTEL dépendent étroitement du capital étranger. L'Association des Ouvriers en instruments de précision, société française qui a joué un rôle notable en matière de commutation,est confrontée, en 1980, à une situation difficile.
Thomson-CSF regroupe "Le matériel téléphonique" (américain) et ERICSSON-FRANCE (large participation suédoise et financement par le Crédit Lyonnais).
En matière politique, l'Administration a voulu supprimer le risque d'un régime de monopole, qui aurait sans doute eu pour conséquence une emprise excessive des groupes étrangers.

Pour se protéger contre ces dangers, les P.T.T. ont eu recours à deux sociétés d'économie mixte : la Société pour le développement de la technique des télécommunications sur câbles-SOTELEC, constituée en 1947, et la Société pour le développement de la technique de la commutation dans le domaine des télécommunications-SOTELEC, instituée en 1959, par application d'une ordonnance du 8 septembre 1958.
Seule, la SOCOTEL est soumise au contrôle de la Commission des vérifications des comptes des entreprises publiques, l'Etat n'ayant dans le capital de la SOTELEC qu'une participation légèrement inférieure à 50 %. Encore un décret du 9 janvier 1961 porte approbation d'une modification des statuts de SOCOTEL : la Compagnie générale de constructions téléphoniques (CGCT) et la Société "Le matériel téléphonique" sont admises dans cette société en qualité d'associés.
Les sociétés coordonnent les études qui sont réparties entre les entreprises adhérentes afin d'éviter la duplication des travaux et l'alourdissement des prix de revient.
Elles instaurent un droit d'usage réciproque des brevets détenus par chacun des membres desdites sociétés, droit qui permet de faire fabriquer le matériel breveté indistinctement par l'une des sociétés qui font partie de SOCOTEL et de SOTELEC.
Auparavant, l'Administration parvenait à un résultat voisin en acquérant les droits de propriété industrielle concernant le matériel qu'elle souhaitait voir produire en grande série.
Les moyens d'action, les modalités de fonctionnement des deux organismes ne sont pas semblables : l'Etat est minoritaire dans SOTELEC, il ne participe pas aux frais qu'entraine son fonctionnement. Il est majoritaire dans SOCOTEL ; il contribue à son financement.
D'autre part, la coordination des études est poussée plus loin au sein de SOCOTEL, qui dispose d'un laboratoire intégré.

L'existence de SOCOTEL et de SOTELEC a permis une organisation industrielle.
Parallèlement, la règlementation s'est renforcée. Réalisée par le décret n° 56 256 du 13 mars 1956, la réforme des marchés de l'Etat est entrée en vigueur le 1er octobre 1957, à la suite de la publication d'un autre texte auquel le décret de 1956 avait subordonné lui-même sa propre mise en application, le décret n°57 1015 du 26 août 1957 relatif aux contrôles des marchés de l'Etat. Il s'agit d'une promotion de l'appel d'offre, au détriment de l'adjudication et du gré à gré.
Le contrôle est exercé au sein des départements ministériels, par les commissions consultatives centrales des marchés. En fait, pour les télécommunications, le décret du 26 août 1957 a vu son application limitée aux marchés à prix provisoires et il ne précise pas les règles suivant lesquelles seront appréciés les éléments constitutifs du prix contractuel.
Par contre, l'article 54 de la loi de finances du 23 février 1963 offre des perspectives nouvelles et des moyens d'investigation ; il donne aux P.T.T. le pouvoir de contrôler les prix de revient. Un arrêté interministériel du 2 juillet 1964 approuve un cahier des clauses comptables. Pour la première fois, l'Administration des P.T.T. dispose d'un cadre cohérent lui.
Ce fonds a été versé par la Direction des Télécommunications du Réseau National le 18 mars 1980.

La période concernée va de 1971 à 1978.
Les documents sont relatifs aux marchés de faisceaux hertziens : construction et extension de faisceaux hertziens, fourniture de matériel.
Les marchés de la Direction Générale des Télécommunications et des Services spéciaux afférents aux télécommunications présentent tous une caractéristique : la concurrence joue peu.
Les textes de 1942, qui régissaient les marchés de l'Etat, sont restés inopérants. Dans la plupart des cas, les marchés sont passés de gré à gré, à des prix de bordereaux fixés d'un commun accord par l'Administration et les constructeurs.
Les services des P.T.T. ont fondé leur politique sur la négociation des séries de prix avec les entreprises disantes.
Ils s'appuient sur des études estimatives ou des contrôles effectués par le Centre National d'Etudes des Télécommunications, l'efficacité de la discussion dépend de la valeur des études sur le montant et la structure des prix proposés par les fournisseurs ; assez souvent, seule une étude technique précède l'adoption d'un matériel nouveau.
La base de départ, qui est le coût de revient retenu pour établir la série de prix est connue de façon imparfaite. Une fois déterminée, la série de prix sert de base à la conclusion des marchés. Si les marchés comportent des formules de révision qui garantissent les intérêts du producteur, les mesures de blocage des prix sont quasi inopérantes.
Les prix inscrits aux séries constituent un maximum à partir duquel l'Administration cherche à obtenir des rabais qui tiendraient compte, de façon empirique, des avantages inhérents au développement ultérieur des séries de fabrication. Parfois, des accords de longue durée stipulent des rabais progressifs. En général, les accords de prix prévoient un rabais établi par comparaison du volume annuel des commandes avec un volume de référence.
Le marché de gré à gré implique l'acceptation de prix dont les éléments sont mal connus, la reconduction de séries de prix anciennes prolongeant des situations partiellement périmées.
Le secteur "Télécommunications" des P.T.T., qui contracte avec des entreprises peu nombreuses, a limité la concurrence pour des raisons techniques et politiques.
Sur le plan technique, l'Administration souhaitait éviter la prolifération des types de matériel pouvant remplir les mêmes fonctions.

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